LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
ZB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 6 juillet 2022
Cassation
M. CATHALA, président
Arrêt n° 891 FP-B
Pourvoi n° G 21-18.100
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 JUILLET 2022
La société Arc France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° G 21-18.100 contre le jugement rendu le 22 avril 2021 par le conseil de prud'hommes de Saint-Omer (section industrie), dans le litige l'opposant à M. [I] [M], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Flores, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Arc France, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [M], et l'avis de Mme Berriat, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 2 juin 2022 où étaient présents M. Cathala, président, M. Flores, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, Mme Farthouat-Danon, M. Schamber, Mme Mariette MM. Rinuy, Ricour, Mme Van Ruymbeke, M. Pietton, Mmes Monge, Ott, Le Lay, conseillers, Mmes Ala, Prache, Lanoue, Valéry, conseillers référendaires, Mme Berriat, premier avocat général et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application des articles R. 421-4-1 et R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Saint-Omer, 22 avril 2021), rendu en dernier ressort, M. [M] a été engagé le 2 février 1988 par la société Arc France et exerce les fonctions de conducteur industriel dans la filière conditionnement.
2. Alors qu'il se trouvait en situation d'arrêt maladie depuis la fin du mois de février 2020, le salarié a été placé en activité partielle en raison de la crise sanitaire liée à la propagation de la Covid 19.
3. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'un rappel de rémunération correspondant à la différence entre les sommes perçues au titre de l'activité partielle et celles qu'il estimait être dues au titre de l'indemnisation conventionnelle de son absence pour cause de maladie.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. L'employeur fait grief au jugement de le condamner au paiement de certaines sommes à titre de rappel de salaire, alors « qu'en l'absence de disposition conventionnelle plus favorable, pendant un arrêt maladie, le salarié bénéficie, en plus des indemnités journalières de sécurité sociale, d'une indemnité complémentaire calculée en fonction de la rémunération qu'il aurait perçue s'il avait continué à travailler ; que l'article 7 de l'annexe I à la convention collective des industries mécaniques du verre du 8 juin 1972, qui définit le montant et la durée de l'indemnisation du salarié pendant un arrêt maladie, précise qu'"en aucun cas, l'indemnité à charge de l'employeur versée en application de l'ensemble des dispositions ci-dessus ne doit permettre à l'agent intéressé de percevoir davantage que la rémunération totale qu'il aurait perçue s'il avait travaillé" ; qu'il en résulte que, pendant une période d'activité partielle, le salarié qui bénéficie d'un arrêt maladie ne peut prétendre à une indemnisation d'un montant supérieur à celle due au titre de l'activité partielle ; qu'en considérant, en l'espèce, que dès lors qu'aucune disposition ne prévoyait le passage des salariés en arrêt maladie sous le régime de l'activité partielle avant le 1er mai 2020, M. [M], qui était en arrêt maladie avant le 17 mars 2020, devait rester soumis sous le régime de la maladie jusqu'au 1er mai 2020 et pouvait en conséquence prétendre à une indemnisation complémentaire à celle perçue sous le régime de l'activité partielle, le conseil de prud'hommes a reconnu au salarié en arrêt maladie un complément de salaire supérieur à la rémunération qu'il aurait perçue s'il avait été en mesure de travailler ; qu'il a en conséquence violé l'article 7 de l'annexe I à la convention collective précitée et l'article R. 5122-18 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 7 de l'annexe I, conditions particulières de travail des ouvriers et employés, à la convention collective nationale de la fabrication mécanique du verre du 8 juin 1972 :
5. Selon ce texte, l'indemnisation des périodes d'absence pour cause de maladie ou d'accident est calculée par référence à l'horaire pratiqué dans l'établissement ou la partie d'établissement pendant l'absence de l'intéressé. En aucun cas l'indemnité versée par l'employeur au titre de l'indemnisation des absences pour cause de maladie ou d'accident ne doit permettre à l'agent intéressé de percevoir davantage que la rémunération totale qu'il aurait reçue s'il avait travaillé.
6. Si ces dispositions conventionnelles ont pour objet d'éviter que le salarié absent pour cause de maladie ou d'accident subisse de ce chef un préjudice par rapport aux autres membres du personnel, elles n'ont pas institué en sa faveur un avantage lui permettant de recevoir une rémunération supérieure à celle qu'il aurait effectivement perçue en l'absence d'un tel arrêt de travail. Il en résulte que lorsque l'employeur a recours au régime d'activité partielle, le salarié en arrêt de travail pour cause de maladie ou d'accident ne peut prétendre à une indemnisation supérieure à ce qu'il aurait perçu s'il avait été en mesure de travailler.
7. Pour condamner l'employeur au paiement d'un rappel de salaire le jugement retient que le régime de l'arrêt de travail pour maladie s'appliquait au salarié au cours des mois de mars et d'avril 2020 et que l'employeur ne pouvait pas le placer en activité partielle avant le 1er mai 2020. Il ajoute que le montant de l'indemnité complémentaire versée entre le 12 mars et le 30 avril 2020 était égal, en tenant compte du montant des indemnités journalières de la sécurité sociale, à 90 % de la rémunération brute que le salarié aurait perçue s'il avait travaillé.
8. En statuant ainsi, alors qu'il avait constaté que l'employeur avait recouru à l'activité partielle, le conseil de prud'hommes a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 22 avril 2021, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Saint-Omer ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Boulogne-sur-Mer ;
Condamne M. [M] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six juillet deux mille vingt-deux.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Arc France
La société Arc France fait grief au jugement attaqué d'AVOIR condamné la société Arc France à payer à M. [M] les sommes de 352,56 euros au titre du rappel de salaire du mois de mars 2020, outre 35 euros au titre des congés payés afférents, 629,75 euros au titre du rappel de salaire du mois d'avril 2020, outre 62 euros au titre des congés payés afférents, et 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
ALORS QU' en l'absence de disposition conventionnelle plus favorable, pendant un arrêt maladie, le salarié bénéficie, en plus des indemnités journalières de sécurité sociale, d'une indemnité complémentaire calculée en fonction de la rémunération qu'il aurait perçue s'il avait continué à travailler ; que l'article 7 de l'annexe I à la convention collective des industries mécaniques du verre du 8 juin 1972, qui définit le montant et la durée de l'indemnisation du salarié pendant un arrêt maladie, précise qu' « en aucun cas, l'indemnité à charge de l'employeur versée en application de l'ensemble des dispositions ci-dessus ne doit permettre à l'agent intéressé de percevoir davantage que la rémunération totale qu'il aurait perçue s'il avait travaillé » ; qu'il en résulte que, pendant une période d'activité partielle, le salarié qui bénéficie d'un arrêt maladie ne peut prétendre à une indemnisation d'un montant supérieur à celle due au titre de l'activité partielle ; qu'en considérant, en l'espèce, que dès lors qu'aucune disposition ne prévoyait le passage des salariés en arrêt maladie sous le régime de l'activité partielle avant le 1er mai 2020, M. [M], qui était en arrêt maladie avant le 17 mars 2020, devait rester soumis sous le régime de la maladie jusqu'au 1er mai 2020 et pouvait en conséquence prétendre à une indemnisation complémentaire à celle perçue sous le régime de l'activité partielle, le conseil de prud'hommes a reconnu au salarié en arrêt maladie un complément de salaire supérieur à la rémunération qu'il aurait perçue s'il avait été en mesure de travailler ; qu'il a en conséquence violé l'article 7 de l'annexe I à la convention collective précitée et l'article R. 5122-18 du code du travail