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06/07/2022 | FRANCE | N°21-17610

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 06 juillet 2022, 21-17610


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 juillet 2022

Cassation partielle

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 570 F-D

Pourvoi n° A 21-17.610

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 6 JUILLET 2022

M. [K] [Y], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvo

i n° A 21-17.610 contre l'arrêt rendu le 9 mars 2021 par la cour d'appel de Montpellier (5e chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 juillet 2022

Cassation partielle

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 570 F-D

Pourvoi n° A 21-17.610

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 6 JUILLET 2022

M. [K] [Y], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° A 21-17.610 contre l'arrêt rendu le 9 mars 2021 par la cour d'appel de Montpellier (5e chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [F] [T], épouse [Z], domiciliée [Adresse 1],

2°/ à la société Mapa, mutuelle d'assurance, société d'assurance mutuelle à cotisations variables, dont le siège est [Adresse 4],

3°/ à la société Pacifica, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. [Y], de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société Pacifica, de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de Mme [T], de la société Mapa, après débats en l'audience publique du 31 mai 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 9 mars 2021), le 23 juillet 2013, une caravane appartenant à Mme [T] et confiée par un contrat conclu à titre onéreux à M. [Y] a été volée.

2. Le 19 septembre 2016, Mme [T] et son assureur, la société Mapa, subrogée dans ses droits après le versement d'une indemnité, ont assigné M. [Y] en paiement, respectivement, de la franchise et de l'indemnité versée. M. [Y] a appelé en garantie son assureur de responsabilité au titre de son activité de dépositaire de matériels, la société Pacifica.

3. M. [Y] a été condamné au paiement des sommes réclamées par Mme [T] et la société Mapa.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le second moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. M. [Y] fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes contre la société Pacifica, alors « que, sauf à ce qu'ils fassent l'objet d'une clause d'exclusion prévue au contrat ou qu'ils soient le résultat d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré, les dommages qui entrent dans le champ du contrat d'assurance doivent, lors de leur survenance, déclencher la garantie de l'assureur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que M. [Y] avait souscrit auprès de la société Pacifica une police d'assurance multirisque couvrant sa responsabilité civile dans le cadre de son activité de dépositaire de matériels ; qu'en retenant que la société Pacifica était fondée à refuser sa garantie à M. [Y], dont la responsabilité civile était engagée à raison du vol de la caravane qu'il avait reçue en dépôt de Mme [T], sans constater ni l'existence d'une clause d'exclusion prévue au contrat, ni que le vol de la caravane litigieuse était le résultat d'une faute intentionnelle ou dolosive de M. [Y], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 113-1 et L. 113-5 du code des assurances. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 113-1 du code des assurances :

6. Aux termes de ce texte, les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police et l'assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré.

7. Pour rejeter les demandes de M. [Y], l'arrêt retient que la société Pacifica est fondée à refuser sa garantie qui suppose un exercice de I'activité de dépositaire assuré conforme à la loi et au contrat de dépôt, sans qu'il soit nécessaire de justifier d'une clause précise d'exclusion, en ayant constaté que le dépositaire n'avait pas respecté son obligation légale de bons soins dans la garde de la chose.

8. En se déterminant ainsi, sans constater ni l'existence d'une clause d'exclusion en cas de non-respect par le dépositaire de son obligation légale de bons soins dans la garde de la chose ni une faute intentionnelle ou dolosive ayant occasionné le vol, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Demande de mise hors de cause

9. Il y a lieu de mettre hors de cause, sur leur demande, la société Mapa et Mme [T], dont la présence devant la cour d'appel de renvoi n'est pas nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de M. [Y] à l'encontre de la société Pacifica, l'arrêt rendu le 9 mars 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Met hors de cause la société Mapa et Mme [T] ;

Condamne in solidum M. [Y] et la société Pacifica aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par M. [Y] et la société Pacifica et condamne M. [Y] à payer à la société Mapa la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six juillet deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour M. [K] [Y].

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné M. [Y] à payer à Mme [T] la somme de 35 € avec les intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 19 septembre 2016 et d'AVOIR condamné M. [Y] à payer à la société d'assurance MAPA la somme de 7.965 € avec les intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 19 septembre 2016 ;

AUX MOTIFS QUE, sur la responsabilité du dépositaire, l'article 1927 du code civil dispose que le dépositaire doit apporter dans la garde de la chose les mêmes soins qu'il apporte dans la garde de celles qui lui appartiennent ; que l'article 1928 du même code stipule une application plus rigoureuse de l'obligation du dépositaire lorsque le dépôt, comme en l'espèce, est à titre onéreux ; que le dépositaire a la charge de la preuve qu'il a donné à la garde de la chose le niveau de soins exigé par la loi, dont il ne peut être exonéré que par la survenance d'un accident de force majeure ; que [K] [Y] n'apporte pas suffisamment la preuve des soins particulièrement rigoureux apportés à la garde de la caravane résultant de l'application des dispositions légales, alors que le contrat d'hivernage mentionne expressément « le gardiennage couvert et fermé », par un procès-verbal d'huissier en date du 10 novembre 2016 qui constate 40 mois après le vol la présence d'un hangar en bon état général et fermé, dans lequel sont stationnées les caravanes, et la présence sur le pourtour d'une clôture de grillage, ni par une plainte auprès des services de gendarmerie presque 8 mois après le vol, le 18 mars 2014, relatant seulement que le cadenas maintenant la chaîne à l'entrée de son terrain a été coupée, sans mentionner que l'entrée du hangar aurait été fracturée et la caravane volée ; que le vol ne peut en aucun cas caractériser une force majeure imprévisible ; que le premier juge a inversé la charge de la preuve en retenant que [F] [T] n'apportait pas celle de son affirmation que la caravane stationnait en extérieur, ou qu'elle aurait dû faire l'appréciation des conditions de sécurité du dépôt en laissant la caravane sans laisser de clés ; que la cour condamne en conséquence le dépositaire [K] [Y] à payer à [F] [T] et son assureur subrogé les montants qui ne sont pas discutés du préjudice ;

1) ALORS QU'en cas de disparition de la chose reçue en dépôt, le dépositaire est exonéré de toute responsabilité lorsqu'il démontre que la disparition n'est pas imputable à sa faute ; que dans ses conclusions, M. [Y] faisait valoir, preuve à l'appui, qu'il avait pris toutes les précautions nécessaires pour éviter le vol de la caravane que Mme [T] lui avait laissée en dépôt puisque, conformément au contrat d'hivernage conclu entre les parties, la caravane litigieuse avait été entreposée à l'abri des regards malveillants, dans un hangar couvert et fermé avec un grand portail en bois, situé sur un terrain intégralement clôturé à l'aide de poteaux et de grillage et dont l'accès était empêché par une chaîne cadenassée (concl., p. 4 § 11-13 et p. 5 § 6) ; qu'en se bornant à affirmer, pour retenir la responsabilité de M. [Y], que ni « le procès-verbal d'huissier en date du 10 novembre 2016 qui constate 40 mois après le vol la présence d'un hangar en bon état général et fermé, dans lequel sont stationnés les caravanes, et la présence sur le pourtour d'une clôture de grillage », ni « la plainte [déposée par M. [Y]] auprès des services de gendarmerie presque 8 mois après le vol, le 18 mars 2014, relatant seulement que le cadenas maintenant la chaîne à l'entrée de son terrain a[vait] été coupée, sans mentionner que l'entrée du hangar aurait été fracturée et la caravane volée » (arrêt, p. 5 § 8), ne suffisaient à apporter la preuve des soins particulièrement rigoureux apportés par M. [Y] à la garde de la caravane objet du contrat conclu avec Mme [T], sans expliquer en quoi ces deux éléments de preuve n'étaient pas suffisants pour établir l'absence de faute de M. [Y], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1927 et 1928 du code civil ;

2) ALORS QU'en cas de vol de la chose reçue en dépôt, il appartient uniquement à son propriétaire de déposer plainte ; qu'en conséquence, ne commet pas de faute le dépositaire qui ne prend pas l'initiative de déposer plainte lorsque la chose reçue en dépôt a fait l'objet d'un vol ; qu'en l'espèce, pour retenir que M. [Y] ne démontrait pas avoir apporté des soins particulièrement rigoureux à la garde de la caravane de Mme [T], objet d'un vol le 23 juillet 2013, alors qu'elle était entreposée sur son terrain suivant contrat d'hivernage conclu entre les parties, la cour d'appel a relevé que M. [Y] n'avait déposé plainte auprès des services de gendarmerie que huit mois après le vol, le 18 mars 2014, en se contentant de relater que « le cadenas maintenant la chaîne à l'entrée de son terrain a[vait] été coupée, sans mentionner que l'entrée du hangar aurait été fracturée et la caravane volée » (arrêt, p. 5 § 8) ; qu'en se déterminant ainsi, par des motifs en réalité inopérants pour caractériser la faute de M. [Y] susceptible d'engager sa responsabilité de dépositaire, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard des articles 1927 et 1928 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. [Y] de ses demandes contre la société Pacifica ;

AUX MOTIFS QUE sur la garantie de Pacifica, la SA Pacifica, assureur multirisque des domaines d'exploitation de [K] [Y] comprenant la responsabilité civile de dépositaire de matériels, est fondée à refuser sa garantie qui suppose un exercice de l'activité de dépositaire assuré conforme à la loi et au contrat de dépôt, sans qu'il soit nécessaire de justifier d'une clause précise d'exclusion, en ayant constaté que le dépositaire n'avait pas respecté son obligation légale de bons soins dans la garde de la chose ;

1) ALORS QUE sauf à ce qu'ils fassent l'objet d'une clause d'exclusion prévue au contrat ou qu'ils soient le résultat d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré, les dommages qui entrent dans le champ du contrat d'assurance doivent, lors de leur survenance, déclencher la garantie de l'assureur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que M. [Y] avait souscrit auprès de la société Pacifica une police d'assurance multirisque couvrant sa responsabilité civile dans le cadre de son activité de dépositaire de matériels (arrêt, p. 6 § 3) ; qu'en retenant que la société Pacifica était fondée à refuser sa garantie à M. [Y], dont la responsabilité civile était engagée à raison du vol de la caravane qu'il avait reçue en dépôt de Mme [T], sans constater ni l'existence d'une clause d'exclusion prévue au contrat, ni que le vol de la caravane litigieuse était le résultat d'une faute intentionnelle ou dolosive de M. [Y], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 113-1 et L. 113-5 du code des assurances ;

2) ALORS QUE ce n'est qu'à la condition de justifier de l'existence d'une clause d'exclusion formelle et limitée contenue dans le contrat d'assurance, que l'assureur peut refuser sa garantie ; qu'en retenant que la société Pacifica était fondée à refuser sa garantie à M. [Y] « sans qu'il soit nécessaire de justifier d'une clause précise d'exclusion » (arrêt, p. 6 § 3), la cour d'appel a violé l'article L. 113-1, alinéa 1er du code des assurances ;

3) ALORS QUE la faute de l'assuré, dans la survenance du dommage, n'a pas pour effet de le priver de la garantie de l'assureur au titre de sa responsabilité civile professionnelle ; qu'en retenant que la société Pacifica était fondée à refuser sa garantie à M. [Y], aux motifs que l'assuré « n'avait pas respecté son obligation légale de bons soins dans la garde de la chose » (arrêt, p. 6 § 3), la cour d'appel a violé les articles L. 113-1, alinéa 1er et L. 113-11 du code des assurances.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 21-17610
Date de la décision : 06/07/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 09 mars 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 06 jui. 2022, pourvoi n°21-17610


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Rousseau et Tapie, SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.17610
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