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06/07/2022 | FRANCE | N°21-10187

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 juillet 2022, 21-10187


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CA3

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 juillet 2022

Cassation partielle

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 819 F-D

Pourvoi n° H 21-10.187

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 JUILLET 2022

La société Lago Urban,

société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° H 21-10.187 contre l'arrêt rendu le 24 novembre 2020 par la...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CA3

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 juillet 2022

Cassation partielle

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 819 F-D

Pourvoi n° H 21-10.187

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 JUILLET 2022

La société Lago Urban, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° H 21-10.187 contre l'arrêt rendu le 24 novembre 2020 par la cour d'appel de Chambéry (chambre sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [C] [K], domicilié [Adresse 4],

2°/ à Pôle emploi [Localité 5], dont le siège est [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Laplume, conseiller référendaire, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société Lago Urban, de Me Haas, avocat de M. [K], après débats en l'audience publique du 24 mai 2022 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Laplume, conseiller référendaire rapporteur, Mme Van Ruymbeke, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 24 novembre 2020), M. [K] a été engagé le 5 mars 2007 par la société Lago Urban. Il était en dernier lieu cadre technico-commercial.

2. Le 19 décembre 2018, il a pris acte de la rupture du contrat de travail.

Examen des moyens

Sur les premier, deuxième et quatrième moyens, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser au salarié une somme au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, alors « qu'aux termes de l'article 29 de la convention collective des cadres de la métallurgie, est alloué à l'ingénieur ou cadre, licencié sans avoir commis une faute grave, une indemnité de licenciement distincte du préavis dont le taux est fixé en fonction de la durée de l'ancienneté de l'intéressé dans l'entreprise, soit pour la tranche de 1 à 7 ans d'ancienneté : 3/5ème de mois par année d'ancienneté et pour la tranche au-delà de 7 ans : 3/5ème de mois par année d'ancienneté ; que M. [K] ayant, au jour de la rupture, 11 ans et 9 mois d'ancienneté, le calcul de l'indemnité devait se baser sur 1/5ème de mois pour les 7 premières années, puis sur 3/5ème de mois de la 8ème à la 11ème année : qu'en retenant, pour lui accorder la somme de 26 928 € à titre d'indemnité conventionnelle, 3/5ème de mois pour toutes ses années d'ancienneté, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

5. Le salarié conteste la recevabilité du moyen, comme étant nouveau.
6. Cependant, l'employeur ne se prévalant d'aucun fait qui n'ait été constaté par les juges du fond, un moyen, qui est de pur droit, peut être invoqué pour la première fois devant la Cour de cassation.

7. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article 29 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie :

8. Selon ce texte, il est alloué à l'ingénieur ou cadre, licencié sans avoir commis une faute grave, une indemnité de licenciement distincte du préavis d'un montant de 1/5ème de mois par année d'ancienneté pour la tranche de 1 à 7 ans d'ancienneté et de 3/5ème de mois par année d'ancienneté pour la tranche au-delà de 7 ans d'ancienneté, majorée de 30 %, sans que le montant total de l'indemnité puisse être inférieur à 6 mois, en ce qui concerne l'ingénieur ou cadre âgé d'au moins 55 ans et de moins de 60 ans, ayant 5 ans d'ancienneté dans l'entreprise.

9. Pour condamner l'employeur à payer au salarié une certaine somme au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, la cour d'appel a indiqué que le calcul de l'indemnité sera ainsi formulé : 3/5 x 3 400 € x 11 = 22 440 €, majoré de 20 %, soit au total 26 928 €.

10. En statuant ainsi, alors qu'elle constatait que le salarié, né le [Date naissance 3] 1961, avait 11 ans et 9 mois d'ancienneté, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Et sur le cinquième moyen

Enoncé du moyen

11. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à rembourser à Pôle emploi les indemnités chômage versées au salarié dans la limite de six mois d'indemnités, alors « qu'aux termes de l'article L. 1235-5 du code du travail, ne sont pas applicables au licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise et au licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés, les dispositions relatives au remboursement des indemnités de chômage prévues à l'article L. 1234-5 en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que la société Lago Urban avait produit aux débats la copie de son registre unique du personnel dont il ressortait qu'elle employait moins de onze salariés ; qu'en la condamnant néanmoins au remboursement des indemnités chômage, la cour d'appel a dénaturé ledit document en méconnaissance de l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

12. Aux termes de ce texte, tout jugement doit être motivé.

13. Pour ordonner d'office le remboursement par l'employeur à Pôle emploi des indemnités chômage versées au salarié, du jour de son licenciement au jour de la décision, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage, l'arrêt retient qu'il convient de faire application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail, qui dispose que dans les cas prévus à l'article L. 1235-3 dudit code, le juge doit ordonner d'office, lorsque les organismes ne sont pas intervenus à l'instance et n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées, le versement par l'employeur fautif de tout ou partie des indemnités chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage.

14. En statuant ainsi, sans préciser si l'entreprise employait habituellement au moins onze salariés, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Lago Urban à payer à M. [K] une somme de 26 928 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement et en ce qu'il ordonne d'office le remboursement par l'employeur à Pôle emploi des indemnités chômage versées au salarié du jour de son licenciement au jour de la présente décision, dans la limite de six mois d'indemnités chômage, l'arrêt rendu le 24 novembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Condamne M. [K] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six juillet deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour la société Lago Urban

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

La société Lago Urban reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la prise d'acte de la rupture lui était entièrement imputable et de l'avoir condamnée en conséquence à verser à M. [K] les sommes de 35 700 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 26 928 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, de 20 400 € à titre d'indemnité conventionnelle de préavis, de 2 400 € au titre des congés payés afférents et de 522,36 € à titre de maintien de salaire d'août à décembre 2018.

1/ ALORS QUE le juge méconnaît en conséquence les termes du litige lorsqu'il introduit dans le litige des moyens que les parties n'avaient pas invoqués ; qu'en retenant à l'encontre de la société Lago Urban un manquement à son obligation de sécurité, quand il ressortait des écritures du salarié qu'il avait invoqué l'existence d'un harcèlement moral pour justifier sa prise d'acte de la rupture, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige et a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2/ ALORS QU'en statuant au regard de l'obligation de sécurité quand les parties ne l'avaient pas invoquée, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3/ ALORS (subsidiairement) QU'en concluant à l'existence d'un manquement de la société Lago Urban à son obligation de sécurité justifiant la prise d'acte de la rupture par le salarié sans préciser en quoi aurait consisté la faute commise par l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 4121-1 du code du travail ;

4 ALORS (subsidiairement) QU'en imputant à la société Lago Urban la responsabilité de la rupture au vu des éléments avancés par M. [K] pour établir le harcèlement dont il aurait été victime, sans même examiner les explications objectives avancées en réponse par la société, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

La société Lago Urban reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la prise d'acte de la rupture par M. [K] s'analysait en un licenciement abusif et de l'avoir condamnée en conséquence à verser au salarié les sommes de 35 700 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 26 928 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, de 20 400 € à titre d'indemnité de préavis, de 2 400 € au titre des congés payés afférents, de 522,36 € à titre de maintien de salaire d'août à décembre 2018 et de 1 300 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

1/ ALORS QUE ces motifs seront censurés par voie de conséquence de la cassation à intervenir sur le premier moyen, par application de l'article 625 du code de procédure civile ;

2/ ALORS (subsidiairement) QUE le seul manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ne suffit pas à entraîner la requalification de la prise d'acte de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'il incombe aux juges, pour lui imputer la rupture, de rechercher si ce manquement était suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail ; qu'en se bornant à affirmer que le non-respect par la société Lago Urban de son obligation de sécurité constituait un manquement grave à ses obligations, sans caractériser l'impossibilité de poursuivre l'exécution du contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1231-1 et L. 4121-1 du code du travail.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

La société Lago Urban reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à verser à M. [K] la somme de 26 928 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement.

ALORS QU'aux termes de l'article 29 de la convention collective des cadres de la métallurgie, est allouée à l'ingénieur ou cadre, licencié sans avoir commis une faute grave, une indemnité de licenciement distincte du préavis dont le taux est fixé en fonction de la durée de l'ancienneté de l'intéressé dans l'entreprise, soit pour la tranche de 1 à 7 ans d'ancienneté : 1/5ème de mois par année d'ancienneté et pour la tranche au-delà de 7 ans : 3/5ème de mois par année d'ancienneté ; que M. [K] ayant, au jour de la rupture, 11 ans et 9 mois d'ancienneté, le calcul de l'indemnité devait se baser sur 1/5ème de mois pour les 7 premières années, puis sur 3/5ème de mois de la 8ème à la 11ème année ; qu'en retenant, pour lui accorder la somme de 26 928 € à titre d'indemnité conventionnelle, 3/5ème de mois pour toutes ses années d'ancienneté, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées.

QUATRIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

La société Lago Urban reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à verser à M. [K] les sommes de 20 400 € au titre du préavis et de 2 400 € au titre des congés payés afférents.

1/ ALORS QU'en confirmant la décision des premiers juges ayant accordé à M. [K] la somme de 20 400 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis correspondant à six mois de salaire, alors qu'elle avait auparavant retenu que le salarié pouvait prétendre au paiement d'un préavis de quatre mois, la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires et méconnu en conséquence les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

2/ ALORS QU'en vertu de l'article L. 3141-24 du code du travail, l'indemnité afférente au congé est égale au dixième de la rémunération perçue ; qu'en condamnant la société Lago Urban à verser à M. [K] la somme de 2 400 € au titre des congés payés afférents au préavis quand elle avait retenu à ce titre un montant de 20 400 €, de sorte que seule la somme de 2 040 € était éventuellement due, la cour d'appel a violé l'article susvisé.

CINQUIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

La société Lago Urban reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à rembourser à Pôle emploi les indemnités chômage versées à M. [K] dans la limite de six mois d'indemnités.

ALORS QU'aux termes de l'article L. 1235-5 du code du travail, ne sont pas applicables au licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise et au licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés, les dispositions relatives au remboursement des indemnités de chômage prévues à l'article L. 1235-4 en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que la société Lago Urban avait produit aux débats la copie de son registre unique du personnel (pièce n° 31) dont il ressortait qu'elle employait moins de onze salariés ; qu'en la condamnant néanmoins au remboursement des indemnités chômage, la cour d'appel a dénaturé ledit document en méconnaissance de l'interdiction faite aux juges de dénaturer les documents de la cause.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-10187
Date de la décision : 06/07/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 24 novembre 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 jui. 2022, pourvoi n°21-10187


Composition du Tribunal
Président : Mme Farthouat-Danon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.10187
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