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06/07/2022 | FRANCE | N°20-23199;21-10477

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 juillet 2022, 20-23199 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CA3

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 juillet 2022

Cassation partielle

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 815 F-D

Pourvois n°
E 20-23.199
X 21-10.477 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 JUILLET 2022r>
I. La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du [Localité 3], dont le siège est [Adresse 1],

II. Mme [K] [W], domiciliée [Adresse 2],

ont...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CA3

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 juillet 2022

Cassation partielle

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 815 F-D

Pourvois n°
E 20-23.199
X 21-10.477 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 JUILLET 2022

I. La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du [Localité 3], dont le siège est [Adresse 1],

II. Mme [K] [W], domiciliée [Adresse 2],

ont formé respectivement les pourvois n° E 20-23.199 et X 21-10.477 contre l'arrêt rendu le 16 octobre 2020 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 2, chambre sociale), dans le litige les opposant.

La demanderesse au pourvoi n° E 20-23.199 invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi n° X 21-10.477 invoque, à l'appui de son recours, les six moyens de cassation également annexés au présent arrêt.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Van Ruymbeke, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 3], de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de Mme [W], après débats en l'audience publique du 24 mai 2022 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Van Ruymbeke, conseiller rapporteur, Mme Lacquemant, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° E 20-23.199 et X 21-10.477 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 16 octobre 2020), Mme [W] a été engagée le 1er octobre 2003, en qualité de chirurgien-dentiste, niveau 10 de la convention collective nationale de travail du personnel des organismes de sécurité sociale, par la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du [Localité 3].

3. Elle a saisi la juridiction prud'homale aux fins de reconnaissance d'un harcèlement moral et de rappels de salaires.

Examen des moyens

Sur les six moyens du pourvoi de la salariée (X 21-10.477) et sur le moyen du pourvoi de l'employeur (E 20-23.199), pris en sa cinquième branche, ci-après annexés

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen du pourvoi de l'employeur (E 20-23.199), pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

5. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser à la salariée les sommes de 4 590,92 euros bruts à titre de rappel de salaire, et 459,09 euros bruts au titre des congés payés y afférents, alors :

« 1°/ que l'article 4-2 du protocole d‘accord du 30 novembre 2004 énonce que les salariés peuvent se voir attribuer par la direction des points de compétence destinés à rétribuer l'accroissement des compétences professionnelles mises en oeuvre dans l'emploi, après appréciation de ces compétences lors de l'entretien annuel ; que l'article 7 du même accord dispose que tout salarié éligible au développement professionnel et n'ayant pas bénéficié de points de compétence pendant 3 ans consécutifs, peut demander à bénéficier d'un examen personnalisé de sa situation par la direction de l'organisme et que le résultat de cet examen personnalisé de situation fait l'objet d'une notification écrite adressée à l'intéressé ; qu'il en résulte que l'obtention de points de compétence chaque année n'est pas de droit, le salarié pouvant seulement prétendre à un examen personnalisé de sa situation tous les trois ans ; qu'en accordant en l'espèce à Mme [W] 75 points de compétence au titre des années 2008, 2009 et 2010, après avoir constaté qu'il ne lui avait été attribué aucun point de compétence au cours de ces trois années durant lesquelles il n'y avait pas de médecin responsable de service susceptible d'évaluer ses compétences, la cour d'appel a violé les articles 4-2 et 7 du protocole d'accord du 30 novembre 2004 relatif au dispositif de rémunération et à la classification des emplois des organismes de sécurité sociale ;

2°/ que l'article 4-2 du protocole d‘accord du 30 novembre 2004 énonce que les salariés peuvent se voir attribuer par la direction des points de compétence destinés à rétribuer l'accroissement des compétences professionnelles mises en oeuvre dans l'emploi, que les compétences recouvrent des savoirs, c'est-à-dire des connaissances théoriques et professionnelles mises en oeuvre dans l'exercice du travail et des savoir-faire techniques et relationnels observables dans la tenue de l'emploi, que les compétences doivent être appréciées sur la base de faits précis, objectifs, observables et mesurables, à l'occasion de l'entretien annuel ; qu'il en résulte qu'en l'absence d'entretien annuel, le juge ne peut se substituer à l'employeur en accordant des points de compétence sans lui-même procéder à l'appréciation des compétences du salarié sur la base de faits précis, objectifs, observables et mesurables ; qu'en accordant en l'espèce à Mme [W] 75 points de compétence au titre des années 2008, 2009 et 2010, après avoir seulement constaté que la salariée disposait du même diplôme et exerçait les mêmes fonctions que les années précédentes, sans procéder à une évaluation des compétences mises en oeuvre par la salariée au cours de ces années, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 4-2 du protocole d'accord du 30 novembre 2004 relatif au dispositif de rémunération et à la classification des emplois des organismes de sécurité sociale ; »

Réponse de la Cour

6. Selon l'article 4-2 du protocole d'accord du 30 novembre 2004, les salariés peuvent se voir attribuer par la direction des points de compétence destinés à rétribuer l'accroissement des compétences professionnelles mises en oeuvre dans l'emploi. L'accroissement de compétences passe obligatoirement par l'élaboration de référentiels de compétences. Les compétences doivent être appréciées sur la base de faits précis, objectifs, observables et mesurables et leur évaluation est formalisée à l'occasion de l'entretien annuel.

7. Selon l'article 7, chaque salarié bénéficie, chaque année, d'un entretien avec son supérieur hiérarchique direct. Cet entretien a pour finalité, à partir du référentiel de compétences de l'emploi occupé, d'échanger et de faire le point sur les attentes en termes professionnels du salarié et de son responsable hiérarchique.

8. Il résulte de ces textes que si l'attribution de points de compétence est facultative, l'employeur est tenu de procéder à l'évaluation des compétences du salarié sur la base de faits précis, objectifs, observables et mesurables dans le cadre d'un entretien annuel.

9. La cour d'appel a d'abord relevé que la salariée s'était vue attribuer chaque année depuis 2003, 15 points de compétence et que ces 15 points constituaient le minimum fixé par le texte conventionnel pour les salariés occupant un emploi de niveau 10 comme elle.

10. Constatant ensuite que la salariée n'avait pas bénéficié, au cours des années 2008, 2009 et 2010, en raison de l'absence de médecin responsable de service, d'un entretien avec son supérieur hiérarchique sur l'évaluation de l'accroissement de ses compétences permettant l'attribution de points de compétence, la cour d'appel, qui ne s'est pas substituée à l'employeur, a pu statuer comme elle l'a fait.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le moyen du pourvoi de l'employeur, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

12. L'employeur fait le même grief à l'arrêt, alors « subsidiairement qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que Mme [W] était fondée à réclamer l'attribution de 15 points de compétence sur les années 2008, 2009 et 2010 ; qu'en lui accordant au total 75 points de compétence au titre de ces trois années, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations en violation de l'article 4-2 du protocole d'accord du 30 novembre 2004 relatif au dispositif de rémunération et à la classification des emplois des organismes de sécurité sociale ; »

Réponse de la Cour

Vu l'article 4-2 du protocole d'accord du 30 novembre 2004 relatif au dispositif de rémunération et à la classification des emplois des organismes de sécurité sociale :

13. Pour accorder à la salariée la somme de 4 590,92 € bruts à titre de rappel de salaire, outre les congés payés afférents, l'arrêt retient qu'il sera fait droit à la demande de la salariée à hauteur de 75 points de compétence pour les années 2008, 2009 et 2010.

14. En statuant ainsi, alors qu'elle avait déclaré la salariée fondée à réclamer l'attribution de 15 points de compétence au titre de ces trois années, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

REJETTE le pourvoi n° X 21-10.477 ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la CPAM du [Localité 3] au paiement d'une somme de 4 590,92 euros bruts à titre de rappel de salaire, outre les congés payés afférents, l'arrêt rendu le 16 octobre 2020 entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six juillet deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 3],
demanderesse au pourvoi n° E 20-23.199

La CPAM du [Localité 3] FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée à verser à Mme [W] les sommes de 4 590,92 € bruts à titre de rappel de salaire, et 459,09 € bruts au titre des congés payés y afférents

1/ ALORS QUE l'article 4-2 du protocole d‘accord du 30 novembre 2004 énonce que les salariés peuvent se voir attribuer par la direction des points de compétence destinés à rétribuer l'accroissement des compétences professionnelles mises en oeuvre dans l'emploi, après appréciation de ces compétences lors de l'entretien annuel ; que l'article 7 du même accord dispose que tout salarié éligible au développement professionnel et n'ayant pas bénéficié de points de compétence pendant 3 ans consécutifs, peut demander à bénéficier d'un examen personnalisé de sa situation par la direction de l'organisme et que le résultat de cet examen personnalisé de situation fait l'objet d'une notification écrite adressée à l'intéressé ; qu'il en résulte que l'obtention de points de compétence chaque année n'est pas de droit, le salarié pouvant seulement prétendre à un examen personnalisé de sa situation tous les trois ans ; qu'en accordant en l'espèce à Mme [W] 75 points de compétence au titre des années 2008, 2009 et 2010, après avoir constaté qu'il ne lui avait été attribué aucun point de compétence au cours de ces trois années durant lesquelles il n'y avait pas de médecin responsable de service susceptible d'évaluer ses compétences, la cour d'appel a violé les articles 4-2 et 7 du protocole d'accord du 30 novembre 2004 relatif au dispositif de rémunération et à la classification des emplois des organismes de sécurité sociale ;

2/ ALORS QUE l'article 4-2 du protocole d‘accord du 30 novembre 2004 énonce que les salariés peuvent se voir attribuer par la direction des points de compétence destinés à rétribuer l'accroissement des compétences professionnelles mises en oeuvre dans l'emploi, que les compétences recouvrent des savoirs, c'est-à-dire des connaissances théoriques et professionnelles mises en oeuvre dans l'exercice du travail et des savoir-faire techniques et relationnels observables dans la tenue de l'emploi, que les compétences doivent être appréciées sur la base de faits précis, objectifs, observables et mesurables, à l'occasion de l'entretien annuel ; qu'il en résulte qu'en l'absence d'entretien annuel, le juge ne peut se substituer à l'employeur en accordant des points de compétence sans lui-même procéder à l'appréciation des compétences du salarié sur la base de faits précis, objectifs, observables et mesurables ; qu'en accordant en l'espèce à Mme [W] 75 points de compétence au titre des années 2008, 2009 et 2010, après avoir seulement constaté que la salariée disposait du même diplôme et exerçait les mêmes fonctions que les années précédentes, sans procéder à une évaluation des compétences mises en oeuvre par la salariée au cours de ces années, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 4-2 du protocole d'accord du 30 novembre 2004 relatif au dispositif de rémunération et à la classification des emplois des organismes de sécurité sociale ;

3/ ALORS subsidiairement QU'il résulte des propres constatations de l'arrêt que Mme [W] était fondée à réclamer l'attribution de 15 points de compétence sur les années 2008, 2009 et 2010 ; qu'en lui accordant au total 75 points de compétence au titre de ces trois années, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations en violation de l'article 4-2 du protocole d'accord du 30 novembre 2004 relatif au dispositif de rémunération et à la classification des emplois des organismes de sécurité sociale ;

4/ ALORS très subsidiairement QUE l'article 4-2 du protocole d‘accord du 30 novembre 2004 énonce que l'attribution des points de compétence correspond au minimum à 15 points pour un emploi de niveau 8 E à 12 E des personnels soignants, éducatifs et médicaux des établissements et oeuvres et qu'en outre, s'agissant du personnel soignant, éducatif et médical des établissements et oeuvres, la progression au sein du développement professionnel tient compte notamment du diplôme de spécialisation obtenu ou du diplôme universitaire permettant l'exercice effectif de nouvelles responsabilités par l'attribution de 25 points ; qu'il en résulte que l'attribution de ces 25 points n'a lieu qu'à l'occasion de l'obtention d'un diplôme et de l'accès à de nouvelles responsabilités au cours de l'année considérée; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que Mme [W] est titulaire d'un diplôme universitaire de médecine de protection sociale depuis son embauche en 2003; que dès lors, en attribuant 75 points pour les trois années comprises entre 2008 et 2010, la Cour d'appel a violé l'article 4-2 du protocole d'accord du 30 novembre 2004 relatif au dispositif de rémunération et à la classification des emplois des organismes de sécurité sociale;

5/ ALORS QUE toute décision de justice doit être motivée; qu'en retenant que l'allocation de 75 points de compétence au total pour les années 2008 à 2010 ouvrait droit à un rappel de salaire de 4 590,92 € bruts outre 459,09 € bruts au titre des congés payés y afférents, sans nullement préciser les modalités de ce calcul, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. Moyens produits par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour Mme [W], demanderesse au pourvoi n° X 21-10.477

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Mme [W] reproche à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté sa demande tendant à voir reconnaître le harcèlement moral dont elle avait été victime et à obtenir des dommages et intérêts à ce titre.

1/ ALORS QU'aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en concluant que les comptes-rendus d'évaluation produits par la CPAM révélaient davantage les problèmes relationnels de la salariée que sa souffrance au travail, quand l'un n'excluait pas l'autre, la cour d'appel a d'ores et déjà privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

2/ ALORS QUE la cour d'appel a constaté d'une part, que lors de l'entretien annuel d'évaluation de 2009 avaient été constatés une situation de souffrance au travail de la salariée et " de graves problèmes relationnels au sein du CES : impact psychologique lourd du comportement des uns et des autres. Agressivité dans l'équipe " et d'autre part, que Mme [W] n'avait passé aucune visite médicale entre 2008 et 2012 ; qu'en considérant que l'absence de visite périodique ne pouvait être retenue à titre d'agissements constitutifs d'un harcèlement moral, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé en conséquence les dispositions des articles L 1152-1 et L 1154-1 du code du travail ;

3/ ALORS QU'en retenant que Mme [W] ne pouvait reprocher à son employeur, au titre des agissements constitutifs d'un harcèlement moral, l'absence d'organisation de visites médicales périodiques dès lors que la pénurie de médecins du travail constatée en 2012 ne lui était pas imputable, quand elle ne permettait pas d'expliquer l'absence de visites organisées au cours des quatre années précédentes, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à justifier sa décision et l'a privée en conséquence de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

4/ ALORS QU'en considérant que la dégradation durable de l'état de santé de Mme [W] n'aurait pas été imputable à son employeur, alors même qu'elle avait constaté la dégradation des conditions de travail au sein du centre et l'irrespect dont les salariés faisaient preuve à son égard sans que la direction ait réussi à y remédier efficacement, de sorte qu'en la maintenant dans cet environnement malsain, malgré la souffrance exprimée auparavant, la CPAM s'était bien rendue coupable à son égard d'un agissement fautif relevant du harcèlement, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Mme [W] reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande de dommages et intérêts au titre de la violation par la CPAM du [Localité 3] de son obligation de sécurité.

1/ ALORS QU'aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ; que les visites médicales sont en elles mêmes une obligation de sécurité mise à la charge de l'employeur, dès lors qu'elles concourent à la protection de la santé et de la sécurité de ses salariés ; qu'en déboutant Mme [W] de sa demande de dommages et intérêts au titre de la violation de l'obligation de sécurité alors qu'elle avait constaté qu'aucune visite n'avait été organisée entre celle de 2008 et celle du 10 octobre 2012, la cour d'appel a violé l'article susvisé ;

2/ ALORS QU'en retenant que la salariée ne pouvait reprocher à son employeur un quelconque manquement à son obligation de sécurité puisque la pénurie de visites médicales aurait été causée par un manque de médecins et ne lui serait donc pas imputable, quand cet argument, qui n'avait été évoqué qu'en 2012, ne permettait pas de justifier l'absence de visites depuis 2008, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à justifier sa décision et l'a privée de base légale au regard de l'article L. 4121-1 du code du travail ;

3/ ALORS QUE la cour d'appel, reprenant les conclusions de la commission d'enquête, a relevé que l'absence de médecin directeur au sein du centre avait été la cause de la dégradation des relations de travail entre les membres du service, que l'absence de manager avait provoqué à la fois une désorganisation et des conflits allant jusqu'à l'irrespect mutuel et que les salariés de la structure vivaient une dégradation de leurs conditions de travail liée aux dysfonctionnements structurels ; qu'en considérant néanmoins que la CPAM du [Localité 3] n'aurait pas commis de manquement à son obligation de sécurité justifiant l'octroi de dommages et intérêts à Mme [W], la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 4121-1 du code du travail.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Mme [W] reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande tendant à obtenir la somme de 63 963,77 € au titre des deux mois de rémunération annuelle complémentaire ainsi que les congés payés afférents.

ALORS QU'en retenant, pour débouter Mme [W] de ses demandes au titre des mois de rémunération annuelle complémentaire, que son contrat de travail n'aurait fait que reprendre les dispositions conventionnelles sans avoir expressément indiqué que les parties se seraient accordées sur le principe d'un cumul des primes contractuelles et des primes conventionnelles, quand ledit contrat ne s'était à aucun moment référé aux dispositions conventionnelles, de sorte qu'il n'avait pas besoin de préciser que les éléments de rémunération qu'il prévoyait s'ajoutaient aux éléments de rémunération prévus par la convention collective, la cour d'appel en a dénaturé les termes en violation de l'interdiction faite aux juges de dénaturer les documents de la cause.

QUATRIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Mme [W] reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit qu'elle ne pouvait se prévaloir que de 75 points de compétence au total pour les années 2008 à 2010 et d'avoir limité en conséquence la condamnation de la CPAM du [Localité 3] à lui verser à ce titre les sommes de 4 590,92 € bruts, outre 459,09 € au titre des congés payés afférents.

1/ ALORS QUE bien que constatant que Mme [W] était fondée à obtenir 75 points de compétence pour les années 2008 à 2010, elle n'a toutefois condamné la CPAM à lui verser à ce titre que les sommes de 4 590,92 € bruts, outre 459,09 € au titre des congés payés afférents ; qu'en statuant de la sorte, sans expliquer de quelle manière elle parvenait à ce montant, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

2/ ALORS QU'aux termes de l'article 2 du protocole d'accord relatif à la rémunération des personnels des organismes de Sécurité sociale du 10 mai 2010, " dans chaque organisme, à l'occasion des opérations déterminant les bénéficiaires de mesures individuelles non automatiques en 2010, un examen des situations des salariés présents aux effectifs d'un organisme du régime général depuis le 1er février 2005, qui n'ont pas obtenu, depuis cette date, un pas minimal de points de compétence ou une promotion autre que le passage du niveau 2 au niveau 3 aux termes d'une formation professionnelle qualifiante, est réalisé afin d'envisager l'attribution de points de compétence dans les conditions posées par le protocole d'accord du 30 novembre 2004 " ; qu'il est donc prévu que lorsqu'un salarié n'a pas, durant une période déterminée obtenu, une mesure individuelle, telle que l'octroi de points de compétence, un examen de sa situation doit être réalisé par la direction de l'organisme ; qu'en déboutant Mme [W] de sa demande tendant à obtenir 25 points de compétence par année de 2017 à 2019 faute d'organisation d'un examen spécifique au cours duquel sa situation aurait été examinée, qu'elle n'alléguait pas du refus, par l'employeur, de réexaminer sa situation à la suite d'une demande qui aurait été formulée en ce sens, quand cette initiative ne lui incombait pas, la cour d'appel a violé l'article susvisé.

3/ ALORS QU'en affirmant que Mme [W], titulaire d'un diplôme de médecine de protection sociale et assurant à ce titre des missions de prévention et d'accès au système de santé, ne pouvait réclamer dix points supplémentaires pour 2011 dans la mesure où elle ne prétendait ni avoir obtenu un diplôme supplémentaire depuis son embauche, ni avoir exercé des fonctions d'encadrement, ni même de nouvelles responsabilités, quand l'article 11 de l'avenant du 30 septembre 1977 n'imposait pas que le diplôme obtenu le soit en cours d'exécution du contrat mais faisait simplement référence à la liaison entre le diplôme et l'exercice effectif de nouvelles responsabilités, la cour d'appel en a violé les termes.

CINQUIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Mme [W] reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande de condamnation de la CPAM du [Localité 3] à lui verser une prime de résultat.

ALORS QUE lorsque l'employeur ne détermine pas les objectifs à atteindre chaque année, le salarié peut prétendre à l'intégralité de l'avantage revendiqué ; qu'en retenant, pour débouter Mme [W] de sa demande de prime de résultat, qu'elle ne justifiait pas s'être fait assigner un ou des objectifs particuliers négociés avec sa hiérarchie, la cour d'appel a violé l'article 5 du protocole d'accord relatif au dispositif de rémunération et à la classification des emplois du 30 novembre 2004 instituant cette prime.

SIXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Mme [W] reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande de rappel de salaire au titre du temps partiel de 14 heures hebdomadaires.

ALORS QU'aux termes du protocole d'accord de mise en oeuvre de l'aménagement et de la réduction du temps de travail à la CPAM du [Localité 3] du 28 mai 2002, était proposée aux salariés une réduction du temps de travail avec maintien de la rémunération, de sorte que le taux horaire était augmenté de 11,43 % ; que l'article 9 dudit accord disposait que les salariés nouvellement embauchés à compter de la date d'effet du présent protocole seraient rémunérés sur les mêmes bases que les salariés ayant bénéficié de la réduction de leur temps de travail ; qu'en retenant, pour affirmer que Mme [W] ne pouvait revendiquer des rappels de salaires au titre de la majoration du taux horaire qui ne lui avait pas été appliquée, qu'elle avait été engagée postérieurement à l'entrée en vigueur de l'accord, la cour d'appel a violé ces dispositions.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-23199;21-10477
Date de la décision : 06/07/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 16 octobre 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 jui. 2022, pourvoi n°20-23199;21-10477


Composition du Tribunal
Président : Mme Farthouat-Danon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.23199
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