LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CDS
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 6 juillet 2022
Cassation partielle
M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 826 F-D
Pourvoi n° D 20-17.287
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 JUILLET 2022
M. [Y] [Z], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° D 20-17.287 contre l'arrêt rendu le 30 avril 2020 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 2), dans le litige l'opposant à la société Magellis consultants, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Rouchayrole, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. [Z], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Magellis consultants, après débats en l'audience publique du 25 mai 2022 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rouchayrole, conseiller rapporteur, M. Sornay, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 30 avril 2020), M. [Z] a été engagé le 1er février 2005 par la société Magellis consultants (la société) en qualité de consultant senior manager, puis de directeur de l'agence de Toulouse.
2. Il a été licencié le 14 mars 2016 et a saisi, le 13 septembre suivant, la juridiction prud'homale de diverses demandes liées à l'exécution et à la rupture du contrat de travail.
Examen des moyens
Sur les troisième et quatrième moyens, ci-après annexés
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
4. Le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande indemnitaire pour licenciement brutal et vexatoire, alors « que le licenciement peut causer au salarié, en raison des circonstances brutales ou vexatoires qui l'ont accompagné, un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi et dont il est fondé à demander réparation ; que le licenciement -notamment lorsqu'il est reconnu ultérieurement comme dépourvu de fondement- prononcé avec une précipitation inutile ou dans des conditions de célérité anormales, voire suspectes, revêt un caractère, non seulement brutal, mais encore vexatoire, qui est d'autant plus amplifié par la circonstance que le salarié bénéficie d'une ancienneté notable ou occupe un poste important dans l'entreprise, que ce soit en termes de positionnement hiérarchique ou historique ; qu'en l'espèce, M. [Z] -qui justifiait alors de plus de dix ans d'ancienneté et avait participé à l'important développement de l'agence de [Localité 4], laquelle comptait en dernier lieu 25 collaborateurs, qu'il dirigeait- faisait expressément valoir que son licenciement lui avait été notifié dans des conditions brutales et vexatoires dans la mesure où il lui avait été notifié, moins d'un mois après la nomination du nouveau président de la société et la reprise de l'entreprise par le groupe Segeco, en conséquence de son refus de signer un nouveau contrat de travail abaissant sa rémunération de 168.000 euros annuels à 90.000 euros annuels et d'accepter le rachat de ses parts sociales pour un montant dérisoire ; qu'il ajoutait que son éviction avait été particulièrement brutale dans la mesure où, bien qu'ayant été congédié pour cause réelle et sérieuse et un motif non disciplinaire, il avait été dispensé de préavis, de sorte qu'il avait été contraint de disparaître de l'entreprise du jour au lendemain, sans même pouvoir saluer ses anciens collaborateurs ; qu'en se bornant dès lors à affirmer péremptoirement que ''M. [Z] ne justifie pas de mesures vexatoires entourant la procédure de licenciement, de plus la circonstance selon laquelle on lui a annoncé qu'il participerait à une réunion alors qu'il lui a été adressé une convocation à un entretien préalable au licenciement est insuffisante à caractériser l'existence d'un préjudice distinct de celui déjà réparé au titre de la rupture du contrat de travail'', sans rechercher concrètement si la célérité avec laquelle l'employeur avait diligenté la procédure de licenciement à la suite de la reprise de la société par le groupe Segeco, ainsi que la brutalité -résultant de sa dispense d'exécution du préavis- de son éviction de l'entreprise, dont il avait dirigé une agence pendant plusieurs années, consécutive à son refus de céder ses parts à vil prix et de consentir à une amputation de sa rémunération de près de 50 %, ne constituaient pas des circonstances vexatoires dont il était résulté pour le salarié un préjudice, à tout le moins moral, distinct de celui réparé par l'allocation de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse réparant la perte injustifiée de l'emploi, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1147 du code civil en sa rédaction applicable au litige. »
Réponse de la Cour
5. La cour d'appel, ayant relevé, par une appréciation souveraine des éléments de la cause, que le salarié ne justifiait pas du caractère brutal et vexatoire de son licenciement, a légalement justifié sa décision.
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
6. Le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes au titre des heures supplémentaires, du repos compensateur et du travail dissimulé, alors « qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments ; que le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux articles L. 3171-2 et L. 3171-3 du code du travail ; que, pour débouter intégralement le salarié de sa demande de rappel d'heures supplémentaires, la cour d'appel a retenu que l'attestation d'un stagiaire « est imprécise sur l'amplitude de travail de M. [Z] », que ''les mails produits et les justificatifs d'achat ne peuvent fournir des éléments sur cette amplitude'' et que ''M. [Z] ne produit aucun récapitulatif quotidien ou hebdomadaire de nature à permettre à l'employeur d'y répondre par des éléments précis'' ; qu'elle en a déduit que ''la demande en paiement d'heures supplémentaires n'est pas soutenue par des éléments suffisamment précis de nature à permettre à l'employeur d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments'' ; qu'en statuant ainsi, quand elle constatait que le salarié -qui alléguait travailler ''entre 50 et 60 heures par semaine''- produisait ''un tableau récapitulatif des repas professionnels pris entre 12 heures et 14 heures c'est-à-dire selon lui en dehors des heures de travail'', un ''tableau fournissant des exemples de justificatifs de frais de déplacement qui auraient eu lieu hors les 35 heures hebdomadaires'', des ''mails adressés à ses collaborateurs principalement en soirée après 18h30 et les justificatifs de frais professionnels comportant des heures de paiement situées en dehors des heures théoriques de travail'' et ''l'attestation d'un stagiaire indiquant que M. [Z] était présent à l'agence lors de son arrivée vers 8h30 et était encore présent lorsqu'il quittait les lieux vers 19 heures'', la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve des heures supplémentaires sur le seul salarié, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail :
7. Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.
8. Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
9. Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
10. Pour débouter le salarié de sa demande relative au temps de travail et à l'accomplissement d'heures supplémentaires, l'arrêt retient, après avoir écarté la qualification de cadre dirigeant invoquée par l'employeur, que ce salarié produit un tableau récapitulatif des repas professionnels, un tableau comportant des exemples de justificatifs de frais de déplacement excédant la durée légale du travail, des mails adressés à des collaborateurs après 18 h 30 ainsi que des justificatifs de frais professionnels comportant des horaires excédant les heures théoriques de travail.
11. Il relève encore qu'une attestation produite par un stagiaire révélait que ce dernier constatait la présence du salarié tant à son arrivée à l'agence vers 8 h 30 que lorsqu'il quittait les lieux vers 19 heures, cette attestation évoquant par ailleurs la tenue de réunions de l'équipe de management de l'agence au-delà de 20 heures.
12. L'arrêt considère cependant que cette dernière attestation est imprécise sur l'amplitude de travail du salarié, que les mails produits et les justificatifs d'achat ne peuvent fournir des éléments sur cette amplitude et que le salarié ne produit aucun récapitulatif quotidien ou hebdomadaire de nature à permettre à l'employeur d'y répondre par des éléments précis. Il en déduit que la demande en paiement d'heures supplémentaires, qui n'est fondée sur aucun élément suffisamment précis de nature à permettre à l'employeur de répondre utilement, devra être rejetée.
13. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations, d'une part, que le salarié présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre, d'autre part, que ce dernier ne produisait aucun élément de contrôle de la durée du travail, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
Vu l'article 624 du code de procédure civile :
14. La cassation du chef de dispositif critiqué par le premier moyen, relatif au paiement d'heures supplémentaires, emporte, par voie de conséquence, la cassation du chef de dispositif rejetant les demandes du salarié au titre du repos compensateur et du travail dissimulé, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de M. [Z] présentée au titre des heures supplémentaires, du repos compensateur et du travail dissimulé, l'arrêt rendu le 30 avril 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne la société Magellis consultants aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Magellis consultants et la condamne à payer à M. [Z] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six juillet deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour M. [Z]
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, d'AVOIR rejeté les demandes de M. [Z] au titre des heures supplémentaires, du repos compensateur et du travail dissimulé ;
AUX MOTIFS QUE, sur les heures supplémentaires et le repos compensateur : la société Magellis Consultants soutient que M. [Z] ne peut présenter une demande au titre du décompte du temps de travail car il était cadre dirigeant : il disposait d'un pouvoir de décision autonome, d'importantes responsabilités et d'une délégation de pouvoir, il encadrait 25 collaborateurs et gérait de manière autonome l'organisation de son travail et son emploi du temps, et était le troisième salarié le mieux rémunéré de la société ; que de son côté, M. [Z] conteste le statut de cadre dirigeant que veut lui attribuer la société, en rappelant qu'il était tenu de remplir très précisément un outil informatique « Fitnet » pour indiquer ses jours d'absence et ses rendez-vous, qu'il bénéficiait d'un bonus discrétionnairement défini par le directeur général et le président, et qu'en sa qualité de directeur d'agence de [Localité 4] il avait les mêmes attributions que son collègue de [Localité 3] qui n'a jamais été considéré comme un cadre dirigeant ; qu'il ajoute que des jours de RTT lui ont été attribués, ce qui est incompatible avec ce statut de cadre dirigeant, et que dans le projet de contrat qui lui avait été soumis par le groupe Segeco, il était assujetti à une convention de forfait, ce qui montre qu'il était considéré comme cadre autonome ; que de plus les éléments produits à l'appui du licenciement montrent qu'il a été informé tardivement du projet de rapprochement et était sommé d'accepter les nouvelles conditions de travail au sein du groupe, ce qui démontre qu'il ne définissait nullement la politique de l'entreprise ni ne participait à la stratégie de celle-ci, et qu'il était soumis à une obligation de reporting importante ; qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 3111-2 du code du travail : « sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement » ; que ces critères, qui sont cumulatifs, impliquent que seuls relèvent de la catégorie des cadres dirigeants, les cadres participant à la direction de l'entreprise ; qu'en l'espèce, il résulte des éléments de la cause que M. [Z] était soumis par l'employeur à un décompte de son temps de travail consistant à enregistrer sur le logiciel de l'entreprise ses journées d'absence avec la tenue d'un décompte de jours de RTT impliquant que l'employeur le considérait comme un cadre autonome mais non un cadre dirigeant, ce que confirmait formellement le projet de contrat de travail qui lui était proposé avant de le licencier ; qu'il est également justifié que la signature de ruptures conventionnelles concernant les collaborateurs de M. [Z] était soumise à validation par les deux dirigeants actionnaires majoritaires ou, en dernier lieu, par le DRH du groupe ; que M. [Z], actionnaire très minoritaire, ne disposait d'aucun pouvoir de décision sur la stratégie de l'entreprise comme le démontrent d'ailleurs les circonstances dans lesquelles il a été licencié puisqu'il n'a eu aucun avis à donner (même purement indicatif) sur le rachat de la société et son intégration au groupe Segeco ; que par conséquent, la cour considère par infirmation du jugement déféré que M. [Z] n'avait pas la qualité de cadre dirigeant de sorte que sa demande de paiement d'heures supplémentaires est recevable ; qu'aux termes de l'article L 3171-4 du code du travail, « en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles » ; que si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties, et si l'employeur doit être en mesure de fournir les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de présenter à l'appui de sa demande des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies, afin de permettre à l'employeur qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments ; que le contrat de travail de M. [Z] fixe la durée du travail à 169 heures et ne comporte aucune convention de forfait ; que M. [Z] indique que, sans avenant, il a été payé sur la base de 151,67 heures de sorte qu'il lui est dû à minima 17h33 supplémentaires par mois ; qu'il est exact que les bulletins de salaire mentionnent une rémunération sur la base de 151,67h, cependant le salarié omet de tenir compte de l'application à son profit du système de jours de RTT tel que décrit dans les notes de service dont il se prévaut d'ailleurs pour solliciter le paiement d'un solde de RTT, demande à laquelle la cour a fait droit ; que le quantum de ces jours de RTT compense précisément la différence entre 35 et 39h de travail hebdomadaires ; que l'existence d'heures supplémentaires non rémunérées entre 151,67 heures et 169 heures par mois n'est donc pas établie ; que M. [Z] ajoute qu'il travaillait bien au-delà de 169 heures mensuelles, et soutient qu'en réalité il travaillait entre 50 et 60 heures par semaine ; qu'au soutien de sa demande il présente les éléments suivants : - un tableau récapitulatif des repas professionnels pris entre 12 heures et 14 heures c'est-à-dire selon lui en dehors des heures de travail ; - un tableau fournissant des exemples de justificatifs de frais de déplacement qui auraient eu lieu hors les 35 heures hebdomadaires ; - des mails adressés à ses collaborateurs principalement en soirée après 18h30 et les justificatifs de frais professionnels comportant des heures de paiement situées en dehors des heures théoriques de travail ; - l'attestation d'un stagiaire M. [P] [H] indiquant que M. [Z] était présent à l'agence lors de son arrivée vers 8h30 et était encore présent lorsqu'il quittait les lieux vers 19 heures ; qu'il évoquait également des réunions organisées avec l'équipe de management de l'agence au-delà de 20 heures ; que la cour observe que cette dernière attestation est imprécise sur l'amplitude de travail de M. [Z] ; que les mails produits et les justificatifs d'achat ne peuvent fournir des éléments sur cette amplitude ; et que M. [Z] ne produit aucun récapitulatif quotidien ou hebdomadaire de nature à permettre à l'employeur d'y répondre par des éléments précis ; qu'en conséquence, la demande en paiement d'heures supplémentaires n'est pas soutenue par des éléments suffisamment précis de nature à permettre à l'employeur d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments, elle sera donc rejetée par confirmation du jugement entrepris ; qu'il en est de même de la demande subséquente d'indemnisation fondée sur le dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires ; que, sur le travail dissimulé : en application de l'article L. 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour un employeur de mentionner sur les bulletins de paye un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli ; que toutefois la dissimulation d'emploi salarié prévue par ces textes n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle ; que l'existence d'heures supplémentaires non rémunérées n'ayant pas été retenue par la cour, la demande présentée au titre du travail dissimulé sera rejetée par confirmation du jugement déféré ;
1°) ALORS QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments ; que le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux articles L. 3171-2 et L. 3171-3 du code du travail ; que, pour débouter intégralement M. [Z] de sa demande de rappel d'heures supplémentaires, la cour d'appel a retenu que l'attestation de M. [P] [H] « est imprécise sur l'amplitude de travail de M. [Z] », que « les mails produits et les justificatifs d'achat ne peuvent fournir des éléments sur cette amplitude » et que « M. [Z] ne produit aucun récapitulatif quotidien ou hebdomadaire de nature à permettre à l'employeur d'y répondre par des éléments précis » ; qu'elle en a déduit que « la demande en paiement d'heures supplémentaires n'est pas soutenue par des éléments suffisamment précis de nature à permettre à l'employeur d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments » ; qu'en statuant ainsi, quand elle constatait que le salarié -qui alléguait travailler « entre 50 et 60 heures par semaine »- produisait « un tableau récapitulatif des repas professionnels pris entre 12 heures et 14 heures c'est-à-dire selon lui en dehors des heures de travail », un « tableau fournissant des exemples de justificatifs de frais de déplacement qui auraient eu lieu hors les 35 heures hebdomadaires », des « mails adressés à ses collaborateurs principalement en soirée après 18h30 et les justificatifs de frais professionnels comportant des heures de paiement situées en dehors des heures théoriques de travail » et « l'attestation d'un stagiaire M. [P] [H] indiquant que M. [Z] était présent à l'agence lors de son arrivée vers 8h30 et était encore présent lorsqu'il quittait les lieux vers 19 heures », la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve des heures supplémentaires sur le seul salarié, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;
2°) ET ALORS QUE s'il appartient au salarié de présenter à l'appui de demande des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments, il ne lui est pas fait obligation, pour satisfaire à cette exigence, de produire un décompte quotidien ou hebdomadaire de ses heures de travail ; qu'en jugeant le contraire pour débouter le salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 3171-4 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, d'AVOIR rejeté la demande indemnitaire de M. [Z] pour licenciement brutal et vexatoire ;
AUX MOTIFS QUE, sur le caractère vexatoire du licenciement : M. [Z] ne justifie pas de mesures vexatoires entourant la procédure de licenciement, de plus la circonstance selon laquelle on lui a annoncé qu'il participerait à une réunion alors qu'il lui a été adressé une convocation à un entretien préalable au licenciement est insuffisante à caractériser l'existence d'un préjudice distinct de celui déjà réparé au titre de la rupture du contrat de travail ; que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande ;
ALORS QUE le licenciement peut causer au salarié, en raison des circonstances brutales ou vexatoires qui l'ont accompagné, un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi et dont il est fondé à demander réparation ; que le licenciement -notamment lorsqu'il est reconnu ultérieurement comme dépourvu de fondement- prononcé avec une précipitation inutile ou dans des conditions de célérité anormales, voire suspectes, revêt un caractère, non seulement brutal, mais encore vexatoire, qui est d'autant plus amplifié par la circonstance que le salarié bénéficie d'une ancienneté notable ou occupe un poste important dans l'entreprise, que ce soit en termes de positionnement hiérarchique ou historique ; qu'en l'espèce, M. [Z] -qui justifiait alors de plus de dix ans d'ancienneté et avait participé à l'important développement de l'agence de [Localité 4], laquelle comptait en dernier lieu 25 collaborateurs, qu'il dirigeait- faisait expressément valoir que son licenciement lui avait été notifié dans des conditions brutales et vexatoires dans la mesure où il lui avait été notifié, moins d'un mois après la nomination du nouveau président de la société et la reprise de l'entreprise par le groupe Segeco, en conséquence de son refus de signer un nouveau contrat de travail abaissant sa rémunération de 168.000 euros annuels à 90.000 euros annuels et d'accepter le rachat de ses parts sociales pour un montant dérisoire (cf. conclusions d'appel p. 29) ; qu'il ajoutait que son éviction avait été particulièrement brutale dans la mesure où, bien qu'ayant été congédié pour cause réelle et sérieuse et un motif non disciplinaire, il avait été dispensé de préavis, de sorte qu'il avait été contraint de disparaître de l'entreprise du jour au lendemain, sans même pouvoir saluer ses anciens collaborateurs (cf. ibid.) ; qu'en se bornant dès lors à affirmer péremptoirement que « M. [Z] ne justifie pas de mesures vexatoires entourant la procédure de licenciement, de plus la circonstance selon laquelle on lui a annoncé qu'il participerait à une réunion alors qu'il lui a été adressé une convocation à un entretien préalable au licenciement est insuffisante à caractériser l'existence d'un préjudice distinct de celui déjà réparé au titre de la rupture du contrat de travail », sans rechercher concrètement si la célérité avec laquelle l'employeur avait diligenté la procédure de licenciement à la suite de la reprise de la société par le groupe Segeco, ainsi que la brutalité -résultant de sa dispense d'exécution du préavis- de son éviction de l'entreprise, dont il avait dirigé une agence pendant plusieurs années, consécutive à son refus de céder ses parts à vil prix et de consentir à une amputation de sa rémunération de près de 50 %, ne constituaient pas des circonstances vexatoires dont il était résulté pour le salarié un préjudice, à tout le moins moral, distinct de celui réparé par l'allocation de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse réparant la perte injustifiée de l'emploi, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1147 du code civil en sa rédaction applicable au litige.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, d'AVOIR rejeté la demande de M. [Z] au titre d'une « rémunération variable » ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, sur le rappel de prime : M. [Z] soutient qu'il bénéficiait un bonus discrétionnaire au mois de décembre de chaque année sans qu'aucune règle ne soit contractuellement fixée pour en définir les règles d'attribution ; qu'il demande un rappel de « rémunération variable » sur 2013 à 2016 calculé par référence à l'année 2012 au cours de laquelle il avait perçu 12.000 € ; que la société Magellis Consultants soutient que l'intéressé ne démontre pas qu'il pouvait bénéficier chaque année d'une « rémunération variable », alors qu'il avoue même qu'il s'agissait d'un bonus discrétionnaire ; qu'aucune disposition contractuelle ne fixe de règles précises et le montant de la prime était variable d'un exercice à l'autre, il s'agissait d'une gratification et d'une partie de la prime conventionnelle de vacances ; que la cour constate au regard des éléments produits qu'effectivement les sommes versées annuellement au salarié étaient très variables dans leur montant, recevaient la qualification de « prime de performance » sur les bulletins de salaire mais ne correspondaient nullement à la fixation d'un quelconque objectif quantitatif ni qualitatif, de sorte qu'elles ne peuvent recevoir la qualification de « rémunération variable » ; qu'au demeurant à défaut de constance, de généralité ou de fixité elles ne peuvent recevoir la qualification de primes ; que dans ces conditions le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE, sur la rémunération variable : faute d'objectifs et d'explication, M. [Z] revendique le paiement de l'entier bonus possible soit 2.000 euros restant dus sur 2013 et 10.000 euros en 2014, outre les congés payés afférents ; que l'employeur oppose que le salarié ne démontre pas qu'il pouvait bénéficier d'une rémunération variable chaque année : il n'était pas convenu du versement d'une prime d'objectifs et M. [Z] a perçu chaque année une prime variable correspondant à la prime vacances et à une gratification discrétionnaire par l'employeur ; qu'aux termes de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; qu'en l'espèce, le seul document contractuel produit est le contrat de travail initial et il prévoit exclusivement une rémunération fixe (5.500 euros mensuels en 2015) ; que le demandeur ne produit aucun bulletin de salaire de 2013 et seulement 6 pour 2014 : aucun ne fait état de rémunération variable versée en sus du salaire dit de base de 14.000,5 euros hors avantage en nature ; qu'en revanche, celui de décembre 2014 mentionne une prime de 10.000 euros, soit précisément la somme revendiquée ; que l'existence d'une rémunération variable, dont au surplus une partie resterait due, n'est donc pas démontrée par les pièces du dossier ; que la demande sera en conséquence rejetée ;
1°) ALORS QU'en déboutant M. [Z] de sa demande de rappel de prime variable, motifs pris que « les sommes versées annuellement au salarié étaient très variables dans leur montant, recevaient la qualification de « prime de performance » sur les bulletins de salaire mais ne correspondaient nullement à la fixation d'un quelconque objectif quantitatif ni qualitatif, de sorte qu'elles ne peuvent recevoir la qualification de « rémunération variable » » et qu'« à défaut de constance, de généralité ou de fixité elles ne peuvent recevoir la qualification de prime », cependant qu'elle retenait, dans les commémoratifs de sa propre décision, que « M. [L] [Z] a été (?) promu directeur de l'agence de Toulouse au statut cadre, position 3.3, coefficient 270 de la convention applicable moyennant une rémunération mensuelle brute d'un montant de 14.000,66 €, outre l'avantage en nature constitué d'un véhicule et une rémunération variable d'un montant oscillant entre 5.000 et 16.000 € selon les années entre 2005 et 2014 », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations de fait, violant l'article 1134 du code civil en sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 1221-1 du code du travail ;
2°) ALORS, subsidiairement, QUE la prime versée au salarié de manière régulière constitue un élément de salaire dont le versement est obligatoire, nonobstant le caractère variable de son évaluation par l'employeur ; qu'en statuant comme elle l'a fait, cependant que la constance et la régularité du versement de la prime dite « de performance », chaque année et à la même période, conférait à cet accessoire de rémunération la qualification d'élément de salaire obligatoire pour l'employeur dans son principe, et ce, nonobstant le caractère variable de son montant laissé à l'appréciation de l'employeur et l'absence de généralité ou de fixité de ladite prime, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil en sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 1221-1 du code du travail ;
3°) ET ALORS, subsidiairement, QU'en déboutant M. [Z] de sa demande de rappel de prime, motifs pris qu'« à défaut de constance (?) elles ne peuvent recevoir la qualification de prime », cependant qu'elle constatait que la prime de performance avait été versée chaque mois de décembre au salarié de 2005 à 2014, ce dont il résultait la constance du paiement en question, la cour d'appel n'a, une nouvelle fois, pas tiré les conséquences légales de ses constatations de fait, violant l'article 1134 du code civil en sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 1221-1 du code du travail.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR, après avoir limité la condamnation de la société Magellis au profit de M. [Z] sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail à la somme de 120.000 € à titre de dommages-intérêts, rejeté le surplus des demandes du salarié ;
AUX MOTIFS QUE, dans ces conditions, le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et rejeté les demandes de M. [Z] ; que le licenciement que la cour juge dépourvu de cause réelle et sérieuse ouvre droit à M. [Z] à une indemnisation de son préjudice sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa rédaction applicable à la cause ; que M. [Z] avait 48 ans lors du licenciement, il bénéficiait d'une rémunération moyenne de 14.541,32 € bruts par mois et indique être resté sans emploi de sorte qu'il a créé une société de conseil générant des revenus très inférieurs, dont il justifie, ainsi que ceux de sa petite activité agricole ; qu'en considération de ces éléments il sera alloué à M. [Z] la somme de 120.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
1°) ALORS QUE la censure qui sera prononcée du chef du troisième de cassation relatif au paiement de la prime variable entraînera, par voie de conséquence et en application de l'article 625 du code de procédure civile, la cassation de l'arrêt en ce qu'il a limité le montant des dommages et intérêts alloués à M. [Z] pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 120.000 euros ;
2°) ALORS, subsidiairement, QUE les dommages et intérêts dus au salarié victime d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ont pour objet de réparer le préjudice né de la perte injustifiée de son emploi, qu'il appartient au juge d'apprécier en tenant compte, concrètement, de l'ensemble des éléments constitutifs de ce préjudice ; que l'exposant soutenait que « la perte d'emploi s'avèrera particulièrement grave puisque M. [Z], bien que salarié, n'était, en dernier lieu, pas éligible à Pôle Emploi. M. [Z] s'est vu notifier par Pôle Emploi qu'il ne pouvait bénéficier de l'assurance chômage, ce, au profit d'un régime d'assurance des professions libérales et dirigeants, la GSC, qui offre les mêmes niveaux de garanties? mais pour une période deux fois moins longue de 12 mois seulement, au lieu de 24 mois pour Pôle Emploi » (cf. conclusions d'appel p. 28 § dernier et suiv.) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef des conclusions du salarié, déterminant dans l'appréciation de son entier préjudice résultant de la perte injustifiée de son emploi, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ET ALORS, subsidiairement, QUE l'exposant faisait encore valoir qu'il était passé, du fait de son licenciement parfaitement injustifié, d'une rémunération confortable à des revenus annuels le plaçant sous le seuil d'imposition, de sorte qu'il avait été contraint de solliciter l'allocation de bourses d'études pour ses enfants (cf. conclusions d'appel p. 29 § 3 à 5) ; qu'en laissant également sans réponse ce chef des conclusions du salarié, tout aussi déterminant dans l'appréciation de son entier préjudice résultant de la perte injustifiée de son emploi, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.