LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 29 juin 2022
Cassation partielle
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 539 F-D
Pourvoi n° M 21-15.205
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 29 JUIN 2022
1°/ la société SCI Pico, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ la société de gérance du Cabinet Taboni, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],
3°/ la société Taboni Transactions, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2],
ont formé le pourvoi n° M 21-15.205 contre l'arrêt rendu le 1er avril 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre des expropriations), dans le litige les opposant :
1°/ à l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur, établissement public à caractère industriel et commercial, dont le siège est [Adresse 3],
2°/ au directeur départemental des finances publiques des Alpes-Maritimes, domicilié [Adresse 4],
défendeurs à la cassation.
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Djikpa, conseiller référendaire, les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de la SCI Pico, de la société de gérance du Cabinet Taboni et de la société Taboni Transactions, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur, après débats en l'audience publique du 24 mai 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Djikpa, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. L'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 1er avril 2021, n° RG 19/00021) fixe les indemnités revenant à la société civile immobilière Pico (la SCI) et à la société de gérance du Cabinet Taboni (le Cabinet Taboni), à la suite de l'expropriation pour cause d'utilité publique, au profit de l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur (l'EPF), de trois lots de copropriété appartenant à la première et donnés à bail à la seconde.
2. La société Taboni transactions, locataire de locaux commerciaux à proximité, mais hors emprise, a été déclarée irrecevable en sa demande d'indemnité d'éviction.
Examen des moyens
Sur les premier et troisième moyens, ci-après annexés
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
4. La SCI, le Cabinet Taboni et la société Taboni transactions font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable la demande tendant à la fixation de la date de référence au 1er février 2018, pour autorité de la chose jugée, alors « qu'il résulte des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile que la portée de la cassation, qui est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce, s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; que la détermination de la date de référence, en application des articles L. 322-3 et L. 322-6 du code de l'expropriation, n'est effectuée par le juge que pour fixer les indemnités d'expropriation dues ; qu'au cas présent précisément, le juge de première instance, le 23 novembre 2017, comme le juge d'appel, le 8 novembre 2018, ne se sont prononcés sur la date de référence que pour la fixation des indemnités de dépossession et de remploi ; que par un arrêt du 16 janvier 2020, la Cour de cassation a toutefois cassé l'arrêt de la cour d'appel du 8 novembre 2018, pour n'avoir pas annulé le jugement du 23 novembre 2017 et avoir statué sur les indemnités de dépossession et de remploi dues à la SCI Pico alors que cette dernière n'avait saisi le juge de l'expropriation que d'une demande d'emprise totale et n'avait présenté aucune demande indemnitaire pour les biens expropriés ; que dès lors qu'ils n'étaient saisis d'aucune demande indemnitaire, les juges du fond n'avaient pas à se prononcer sur la date de référence ; que la cassation de l'arrêt du 8 novembre 2018 pour avoir rejeté la demande d'annulation du jugement et fixé les indemnités d'expropriation – qui impliquait l'annulation de ce jugement et excluait que le juge de l'expropriation se prononce sur les indemnités précitées, et ce faisant sur la date de référence – s'étendait donc nécessairement aux dispositions de ce même arrêt relatives à la détermination de la date de référence, compte-tenu du lien d'indivisibilité ou, à tout le moins, de dépendance nécessaire existant avec les dispositions de l'arrêt ayant fait l'objet de la cassation ; que, dès lors, en estimant que la demande de la SCI Pico concernant la fixation de la date de référence se heurtait à l'autorité de la chose jugée par l'arrêt du 8 novembre 2018 au motif que celui-ci n'aurait été censuré par la Cour de cassation que sur le rejet de la demande d'annulation du jugement avec fixation d'indemnités, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a violé les dispositions de l'article 624 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 624 du code de procédure civile :
5. Aux termes de ce texte, la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce. Elle s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.
6. Pour dire que la demande aux fins de fixation de la date de référence se heurte à l'autorité de la chose jugée, l'arrêt retient que cette date a été définitivement fixée par un arrêt du 8 novembre 2018, qui n'a été censuré par la Cour de cassation que sur l'irrecevabilité d'une pièce et le rejet de la demande d'annulation du jugement avec fixation des indemnités d'expropriation.
7. En statuant ainsi, alors que la fixation de la date de référence n'étant qu'un élément de l'évaluation des indemnités d'expropriation, l'annulation, par la Cour de cassation, de l'arrêt du 8 novembre 2018 en ce qu'il avait confirmé le jugement ayant fixé des indemnités d'expropriation non demandées, entraînait celle du chef de dispositif confirmant le jugement ayant statué sur la date de référence, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Sur le quatrième moyen
Enoncé du moyen
8. La SCI, le Cabinet Taboni et la société Taboni transactions font grief à l'arrêt de statuer sur les indemnités pour perte de loyers et du droit au bail et de confirmer le jugement du 23 mars 2019, alors « qu'il résulte des dispositions de l'article 625 du code de procédure civile que la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; qu'en conséquence de la cassation de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence n° 2021/18 du 1er avril 2021 que la Cour de cassation prononcera dans le cadre du pourvoi n° 21-15.203, elle ne pourra que prononcer celui-ci du même jour, n° 2021/17, objet du présent pourvoi, qui en est la suite ou, à tout le moins, avec lequel existe un lien de dépendance nécessaire excluant qu'il puisse subsister seul après la cassation du premier arrêt, compte-tenu tant du principe selon lequel l'accessoire suit le sort du principal que de l'unité du contentieux de l'expropriation. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 625 du code de procédure civile :
9. Selon ce texte, sur les points qu'elle atteint, la cassation replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le jugement cassé. Elle entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
10. La cassation de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 1er avril 2021 (RG n° 20/00041) prononcée ce jour (pourvoi n° J 21-15.203), entraîne la cassation, par voie de conséquence, des chefs du dispositif de l'arrêt attaqué déclarant irrecevable la demande de fixation de la date de référence pour autorité de la chose jugée, et confirmant le jugement du 28 mars 2019 en ce qu'il a déclaré irrecevable pour autorité de la chose jugée la SCI en ses demandes de fixation des indemnités de dépossession, fixé la date de référence au 23 décembre 2010 et fixé l'indemnité principale due par l'EPF au Cabinet Taboni au titre de la perte du droit au bail, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
Et sur le cinquième moyen
Enoncé du moyen
11. La SCI, le Cabinet Taboni et la société Taboni transactions font grief à l'arrêt de rejeter la demande d'indemnisation de la première liée à la dépréciation consécutive à l'extinction du bail commercial conclu entre elle et le Cabinet Taboni, alors « qu'il résulte des dispositions de l'article L. 321-1 du code de l'expropriation que les indemnités couvrent l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation ; qu'à la suite de l'expropriation partielle des locaux qu'elle louait, la société de gérance du cabinet Taboni a résilié l'intégralité du bail commercial qui la liait à la SCI Pico ; que la SCI Pico faisait valoir qu'une telle résiliation, consécutive à l'expropriation, générait une perte de revenus locatifs le temps pour elle de trouver un nouveau locataire pour le surplus non exproprié ; que compte-tenu du caractère dégradé du quartier, elle estimait ce temps, et en conséquence la perte subie, à cinq années de loyer ; que la cour a toutefois retenu que la perte de loyers pour la SCI Pico ne concernait que la partie expropriée, à l'exclusion du surplus non exproprié ; que ce faisant, en ne réparant pas l'intégralité du préjudice subie par la SCI Pico en conséquence de l'expropriation, elle a violé les dispositions précitées de l'article L. 321-1 du code de l'expropriation. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 321-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique :
12. Selon ce texte, les indemnités allouées couvrent l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation.
13. Pour limiter l'indemnisation de la perte de loyers aux seuls lots faisant l'objet de l'expropriation, l'arrêt retient que la SCI conserve un usage normal de la partie non expropriée.
14. En se déterminant ainsi, sans rechercher si l'expropriation n'avait pas entraîné la résiliation du bail pour l'ensemble des lots que la SCI louait au Cabinet Taboni, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il :
- déclare irrecevable la demande de la société civile immobilière Pico et de la société de gérance du Cabinet Taboni tendant à la fixation de la date de référence au 1er février 2018, pour autorité de la chose jugée,
- confirme le jugement du 28 mars 2019 en ce qu'il a déclaré irrecevable pour autorité de la chose jugée la société civile immobilière Pico en ses demandes de fixation des indemnités de dépossession, fixé la date de référence au 23 décembre 2010, fixé l'indemnité due par l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur au titre de la perte de revenus locatifs à 25 290 euros, fixé l'indemnité principale due par l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur à la société de gérance du Cabinet Taboni au titre de la perte du droit au bail à hauteur de 61 000 euros outre 4 950 euros au titre de l'indemnité de remploi,
l'arrêt rendu le 1er avril 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf juin deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat aux Conseils, pour la SCI Pico, la société de Gérance du Cabinet Taboni et la société Taboni Transactions
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevables les pièces numérotées 21, 22 et 23 adressées le 21 octobre 2019,
Alors que les juges du fond ne sauraient dénaturer les conclusions des parties ; que le commissaire du gouvernement n'a jamais sollicité de la Cour, dans son mémoire reçu au greffe le 28 août 2019, l'irrecevabilité des pièces n°21 à 23, contrairement à ce qu'a retenu le juge d'appel ; qu'il a d'autant moins pu le faire que les pièces en cause sont respectivement datées des 30 septembre 2019, 1er septembre 2019 et 15 octobre 2019 et sont donc postérieures aux conclusions précitées ; qu'ainsi la Cour a dénaturé les conclusions du commissaire du gouvernement.
Alors que s'il résulte des dispositions de l'article R. 311-26 du code de l'expropriation que l'appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel, ces dispositions ne font toutefois pas obstacle à ce qu'il dépose, postérieurement à ce délai, des pièces venant au soutien de ses conclusions ; que la seule circonstance que des pièces auraient été produites au-delà du délai de trois mois précité ne suffit donc pas à les faire regarder comme irrecevables ; que les juges du fond ne sauraient dès lors écarter les pièces et éléments produits au-delà du délai précité, sans rechercher s'ils ne viennent pas au soutien des conclusions de l'appelant ; qu'en écartant les pièces complémentaires n°21 à 23 produites par les requérants le 21 octobre 2019 au seul motif de l'expiration du délai de trois prévu par les dispositions de l'article R. 311-26 du code de l'expropriation, sans rechercher si ces pièces ne venaient au soutien de leurs conclusions d'appel, la Cour d'appel a violé les dispositions précitées.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable la demande de la SCI PICO et de la SAS TABONI tendant à la fixation de la date de référence au 1er février 2018, pour autorité de la chose jugée,
Alors qu'il résulte des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile que la portée de la cassation, qui est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce, s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; que la détermination de la date de référence, en application des articles L. 322-3 et L. 322-6 du code de l'expropriation, n'est effectuée par le juge que pour fixer les indemnités d'expropriation dues ; qu'au cas présent précisément, le juge de première instance, le 23 novembre 2017, comme le juge d'appel, le 8 novembre 2018, ne se sont prononcés sur la date de référence que pour la fixation des indemnités de dépossession et de remploi ; que par un arrêt du 16 janvier 2020, la Cour de cassation a toutefois cassé l'arrêt de la cour d'appel du 8 novembre 2018, pour n'avoir pas annulé le jugement du 23 novembre 2017 et avoir statué sur les indemnités de dépossession et de remploi dues à la SCI PICO alors que cette dernière n'avait saisi le juge de l'expropriation que d'une demande d'emprise totale et n'avait présenté aucune demande indemnitaire pour les biens expropriés ; que dès lors qu'ils n'étaient saisis d'aucune demande indemnitaire, les juges du fond n'avaient pas à se prononcer sur la date de référence ; que la cassation de l'arrêt du 8 novembre 2018 pour avoir rejeté la demande d'annulation du jugement et fixé les indemnités d'expropriation – qui impliquait l'annulation de ce jugement et excluait que le juge de l'expropriation se prononce sur les indemnités précitées, et ce faisant sur la date de référence – s'étendait donc nécessairement aux dispositions de ce même arrêt relatives à la détermination de la date de référence, compte-tenu du lien d'indivisibilité ou, à tout le moins, de dépendance nécessaire existant avec les dispositions de l'arrêt ayant fait l'objet de la cassation ; que, dès lors, en estimant que la demande de la SCI PICO concernant la fixation de la date de référence se heurtait à l'autorité de la chose jugée par l'arrêt du 8 novembre 2018 au motif que celui-ci n'aurait été censuré par la Cour de cassation que sur le rejet de la demande d'annulation du jugement avec fixation d'indemnités, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a violé les dispositions de l'article 624 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande d'annulation du jugement du 28 mars 2019, par voie de conséquence de celle du jugement du 23 novembre 2017, et d'avoir statué sur les indemnités pour perte de loyer et droit au bail,
Alors qu'il résulte des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile que la portée de cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce ; que celles de l'article 625 du code de procédure civile prévoient que la cassation entraine, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que la Cour de cassation a, par un arrêt du 16 janvier 2020, cassé l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 8 novembre 2018, pour ne pas avoir annulé le jugement du juge de l'expropriation du 23 novembre 2017 et avoir statué sur les indemnités de dépossession et de remploi dues à la SCI PICO alors que cette dernière n'avait saisi le juge de l'expropriation que d'une demande d'emprise totale et n'avait présenté aucune demande indemnitaire pour les biens expropriés ; que la cour d'appel de renvoi ne pouvait dès lors, sans méconnaitre les dispositions susvisées et la portée de la cassation prononcée par l'arrêt du 16 janvier 2020, adopter exactement la même solution que celle qui venait d'être explicitement censurée par le dispositif de l'arrêt précité et confirmer le jugement du 23 novembre 2017 ; qu'elle devait censurer ce jugement et, par voie de conséquence, celui du 23 mars 2019 qui en était la suite ou, à tout le moins, avec lequel existait un lien de dépendance nécessaire ; qu'en s'en abstenant, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a dès lors violé les dispositions des articles 624 et 625 du code de procédure civile.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir statué sur les indemnités pour perte de loyer et droit au bail et confirmé le jugement du 23 mars 2019,
Alors qu'il résulte des dispositions de l'article 625 du code de procédure civile que la cassation entraine, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; qu'en conséquence de la cassation de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence n°2021/18 du 1er avril 2021 que la Cour de cassation prononcera dans le cadre du pourvoi n°21-15.203, elle ne pourra que prononcer celui-ci du même jour, n°2021/17, objet du présent pourvoi, qui en est la suite ou, à tout le moins, avec lequel existe un lien de dépendance nécessaire excluant qu'il puisse subsister seul après la cassation du premier arrêt, compte-tenu tant du principe selon lequel l'accessoire suit le sort du principal que de l'unité du contentieux de l'expropriation.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande d'indemnisation liée à la dépréciation consécutive à l'extinction du bail commercial conclu entre la SCI PICO et le cabinet TABONI
Alors qu'il résulte des dispositions de l'article L. 321-1 du code de l'expropriation que les indemnités couvrent l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation ; qu'à la suite de l'expropriation partielle des locaux qu'elle louait, la société de gérance du cabinet TABONI a résilié l'intégralité du bail commercial qui la liait à la SCI PICO ; que la SCI PICO faisait valoir qu'une telle résiliation, consécutive à l'expropriation, générait une perte de revenus locatifs le temps pour elle de trouver un nouveau locataire pour le surplus non exproprié ; que compte-tenu du caractère dégradé du quartier, elle estimait ce temps, et en conséquence la perte subie, à cinq années de loyer ; que la Cour a toutefois retenu que la perte de loyers pour la SCI PICO ne concernait que la partie expropriée, à l'exclusion du surplus non exproprié ; que ce faisant, en ne réparant pas l'intégralité du préjudice subie par la SCI PICO en conséquence de l'expropriation, elle a violé les dispositions précitées de l'article L. 321-1 du code de l'expropriation.