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15/06/2022 | FRANCE | N°20-22864

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 juin 2022, 20-22864


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 15 juin 2022

Cassation

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 741 F-D

Pourvoi n° R 20-22.864

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 15 JUIN 2022

La société Coulommiers poids lourds, socié

té par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° R 20-22.864 contre l'arrêt rendu le 14 octobre 2020 par la cour d'...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 15 juin 2022

Cassation

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 741 F-D

Pourvoi n° R 20-22.864

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 15 JUIN 2022

La société Coulommiers poids lourds, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° R 20-22.864 contre l'arrêt rendu le 14 octobre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 3), dans le litige l'opposant à M. [D] [N], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Grandemange, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société Coulommiers poids lourds, de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de M. [N], après débats en l'audience publique du 20 avril 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Grandemange, conseiller rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué ( Paris, 14 octobre 2020), M. [N] a été engagé, à compter du 9 avril 1978, par la société Ferté véhicules industriels, en qualité d'apprenti mécanicien. Son contrat de travail a été transféré à la société Coulommiers poids lourds (la société). Il occupait en dernier lieu le poste de responsable après-vente.

2. Le 4 octobre 2016 la société l'a informé de ses difficultés économiques et lui a proposé un reclassement sur un poste de magasinier vendeur.

3. Le salarié a été licencié pour motif économique le 12 novembre 2016.

4. Il a saisi la juridiction prud'homale d'une contestation de son licenciement.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. La société fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à verser au salarié des sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, alors « qu'il était acquis aux débats que l'employeur avait, par courrier du 13 octobre 2016, apporté une réponse à la demande de précisions formulée par le salarié sur les objectifs et la rémunération fixés dans le cadre de la proposition de reclassement qui lui avait été adressée le 4 octobre précédent, les parties ne s'opposant que sur le caractère suffisant de cette réponse ; qu'en retenant que l'employeur n'avait pas loyalement satisfait à son obligation de reclassement à l'égard du salarié faute de réponse à sa demande de précision sur les objectifs et la rémunération, la cour d'appel a méconnu les termes du litige qui lui était soumis et violé l'article 4 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 4 du code de procédure civile :

6. Pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que la société a proposé un seul poste de reclassement au salarié qui l'a refusé faute de réponse à sa demande de précisions sur les objectifs et la rémunération.

7. En statuant ainsi, alors qu'il résultait des écritures et des productions du salarié que l'employeur avait répondu à sa demande par lettre du 13 octobre 2016, la cour d'appel, qui a ainsi modifié les termes du litige, a violé le texte susvisé.

Et sur le moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

8. La société fait le même grief à l'arrêt, alors « que ne manque pas à l'obligation de reclassement l'employeur qui justifie de l'absence de poste disponible à l'époque du licenciement, dans l'entreprise ou, s'il y a lieu, dans le groupe auquel elle appartient ; que la société, qui avait adressé au salarié une offre de reclassement, soutenait et offrait de démontrer qu'il n'existait aucun autre poste disponible dans l'entreprise ni au sein des entreprises appartenant au même groupe, y compris de catégorie inférieure, qui puisse lui être proposé ; que pour juger que l'employeur n'avait loyalement exécuté son obligation de reclassement, la cour d'appel s'est bornée à relever que la société ne justifiait pas avoir interrogé les autres sociétés sur les possibilités de reclassement ; qu'en se déterminant comme elle a fait, sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si l'employeur ne justifiait pas de l'absence de postes disponibles à la date du licenciement, autres que celui proposé au salarié, dans l'entreprise ou dans le groupe auquel elle appartenait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail, dans sa rédaction résultant de la loi du 6 août 2015. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1233-4 du code du travail, dans version antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, applicable en la cause :

9. Pour dire le licenciement du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse, en raison du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement, l'arrêt retient par ailleurs, que l'employeur ne justifie pas avoir interrogé les autres sociétés sur les possibilités d'un reclassement et en conclut qu'il n'apporte pas la preuve d'avoir exécuté loyalement son obligation de reclassement.

10. En se déterminant ainsi, sans rechercher si l'employeur ne justifiait pas de l'absence de poste disponible, autre que celui proposé au salarié, dans l'entreprise et au sein des entreprises du groupe dont les activités, l'organisation et le lieu d'exploitation permettaient la permutation de tout ou partie du personnel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 octobre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne M. [N] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze juin deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour la société Coulommiers poids lourds

La société Coulommiers Poids Lourds fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'AVOIR condamnée à verser au salarié des sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents.

1° ALORS QU'il était acquis aux débats que l'employeur avait, par courrier du 13 octobre 2016, apporté une réponse à la demande de précisions formulée par le salarié sur les objectifs et la rémunération fixés dans le cadre de la proposition de reclassement qui lui avait été adressée le 4 octobre précédent, les parties ne s'opposant que sur le caractère suffisant de cette réponse ; qu'en retenant que l'employeur n'avait pas loyalement satisfait à son obligation de reclassement à l'égard du salarié faute de réponse à sa demande de précision sur les objectifs et la rémunération, la cour d'appel a méconnu les termes du litige qui lui était soumis et violé l'article 4 du code de procédure civile.

2° ALORS QU'interdiction est faite au juge de dénaturer les documents de la cause ; qu'il résultait du courrier adressé au salarié le 13 octobre 2016, régulièrement produit aux débats, que l'employeur avait précisément répondu au courriel du 11 octobre 2016, aux termes duquel le salarié l'interrogeait, en suite de la proposition de reclassement qui lui avait été faite à un poste de « magasinier vendeur PRA » sur « le point de savoir si les objectifs sont réalisables et si la part variable est susceptible de maintenir [la] rémunération totale au niveau actuel » et lui demandait de lui communiquer un certain nombre d'éléments chiffrés tel le chiffre d'affaires mensuel du magasin, la marge brute minimum, le montant des remises et primes de fin d'année des fournisseurs et les ventes de pièces détachées ; que par ce courrier, long de trois pages, la société a communiqué au salarié des éléments de réponse détaillés s'agissant « du caractère réalisable des objectifs » et « du maintien de la rémunération actuelle », et de « l'évaluation de la rémunération » et lui a fourni l'ensemble des données chiffrées sollicitées à l'exception du montant des remises, en raison du caractère confidentiel de ces données ; qu'en retenant pourtant que le salarié avait refusé le poste de reclassement qui lui était proposé « faute de réponse à sa demande de précisions sur les objectifs et la rémunération », la cour d'appel a dénaturé par omission ledit courrier, en violation du principe susvisé.

3° ALORS, en toute hypothèse, QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'à supposer qu'elle n'ait pas dénaturé le courrier adressé au salarié par la société le 13 octobre 2016, faute de l'avoir visé, la cour d'appel, qui s'est abstenue d'examiner cette pièce dont la société se prévalait expressément et dont il résultait qu'elle avait répondu à la demande de précisions formulée par le salarié, a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

4° ALORS QUE ne manque pas à l'obligation de reclassement l'employeur qui justifie de l'absence de poste disponible à l'époque du licenciement, dans l'entreprise ou, s'il y a lieu, dans le groupe auquel elle appartient ; que la société, qui avait adressé au salarié une offre de reclassement, soutenait et offrait de démontrer qu'il n'existait aucun autre poste disponible dans l'entreprise ni au sein des entreprises appartenant au même groupe, y compris de catégorie inférieure, qui puisse lui être proposé ; que pour juger que l'employeur n'avait loyalement exécuté son obligation de reclassement, la cour d'appel s'est bornée à relever que la société ne justifiait pas avoir interrogé les autres sociétés sur les possibilités de reclassement ; qu'en se déterminant comme elle a fait, sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si l'employeur ne justifiait pas de l'absence de postes disponibles à la date du licenciement, autres que celui proposé au salarié, dans l'entreprise ou dans le groupe auquel elle appartenait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail, dans sa rédaction résultant de la loi du 6 août 2015.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-22864
Date de la décision : 15/06/2022
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 14 octobre 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 jui. 2022, pourvoi n°20-22864


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Munier-Apaire, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.22864
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