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15/06/2022 | FRANCE | N°20-19950

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 juin 2022, 20-19950


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CDS

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 15 juin 2022

Rejet

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 729 F-D

Pourvoi n° Y 20-19.950

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 15 JUIN 2022

La société Alsacienne de publication - l'Alsace

, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 20-19.950 contre l'arrêt rendu le 29 octobre 2019 par la...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CDS

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 15 juin 2022

Rejet

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 729 F-D

Pourvoi n° Y 20-19.950

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 15 JUIN 2022

La société Alsacienne de publication - l'Alsace, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 20-19.950 contre l'arrêt rendu le 29 octobre 2019 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section A), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [I] [Z], domicilié [Adresse 2],

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Seguy, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Alsacienne de publication - l'Alsace, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [Z], après débats en l'audience publique du 20 avril 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Seguy, conseiller rapporteur, M. Pietton, conseiller et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 29 octobre 2019), M. [Z] a été engagé le 1er septembre 1990 en qualité de rédacteur stagiaire par la société Alsacienne de publication, devenue la société Alsacienne de publication - l'Alsace, éditrice de périodiques.

2. Dans le dernier état de la relation de travail, il était responsable du développement des magazines et d'un journal.

3. Il a été licencié pour motif économique le 8 juillet 2014 et son contrat de travail a été rompu par son adhésion, le 15 juillet 2014, à un contrat de sécurisation professionnelle.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses sixième à neuvième branches, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses cinq premières branches

Enoncé du moyen

5. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse et, en conséquence, de le condamner à lui verser une somme à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors :

« 1°/ qu'il résulte de l'article L. 2331-1, I du code du travail qu'un comité de groupe est constitué au sein du groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante, dont le siège social est situé sur le territoire français, et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce ; que l'article L. 233-3 du code de commerce définit les conditions dans lesquelles une personne, physique ou morale, est considérée comme en contrôlant une autre, à savoir, par une détention directe ou indirecte d'une fraction du capital conférant la majorité des droits de vote dans les assemblées générales de la société contrôlée, par la majorité des droits de vote dans la société contrôlée en vertu d'un accord conclu avec d'autres associés ou actionnaires et qui n'est pas contraire à l'intérêt de la société, par la détermination en fait, par les droits de vote dont elle dispose, des décisions des assemblées générales de la société contrôlée et par la qualité d'associée ou d'actionnaire de cette société et pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des membres des organes d'administration, de direction ou de surveillance de cette société ; qu'en l'espèce, en retenant, pour juger le licenciement pour motif économique du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse, que « la Banque Fédérative du Crédit Mutuel contrôle directement ou par sa filiale, la SFEJIC, plusieurs entreprises de presse : L'Est Républicain, le Républicain Lorrain, Les Dernières Nouvelles d'Alsace, L'Alsace, Vosges Matin, Le Bien Public, le Journal de Saône et Loire, le Progrès, le Dauphiné Libéré, le Journal de la Haute-Marne, Vaucluse Matin, la nouvelle SAP-L'Alsace est détenue quant à elle à 95,68% par la Banque Fédérative du Crédit Mutuel » et que ces sociétés « sont des sociétés du groupe au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce, texte visé par l'article L. 2331-1 du code du travail précité », sans constater que la Banque Fédérale du Crédit Mutuel aurait effectivement répondu aux conditions prévues par l'article L. 233-3 du code de commerce précitées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2331-1, I, du code du travail ensemble l'article L. 233-3 du code de commerce ;

2°/ que la détention indirecte par un groupe d'une participation dans le capital de sociétés ne suffit pas à créer un groupe au niveau du secteur d'activité duquel devait être apprécié le motif économique de licenciement ; qu'en l'espèce, la société SAP faisait valoir que « le groupe SAP est en effet une filiale de la Banque Fédérative du Crédit Mutuel –BFCM– qui détient plusieurs participations au sein de différentes sociétés de presse » mais que « pour autant, ces sociétés de presse n'ont strictement aucun lien entre elles si ce n'est le fait d'avoir un actionnaire en commun » ; que pour juger le licenciement pour motif économique du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a retenu que « la Banque Fédérative du Crédit Mutuel contrôle directement ou par sa filiale, la SFEJIC, plusieurs entreprises de presse : L'Est Républicain, le Républicain Lorrain, Les Dernières Nouvelles d'Alsace, L'Alsace, Vosges Matin, Le Bien Public, le Journal de Saône et Loire, le Progrès, le Dauphiné Libéré, le Journal de la Haute-Marne, Vaucluse Matin, la nouvelle SAP-L'Alsace est détenue quant à elle à 95,68% par la Banque Fédérative du Crédit Mutuel » et que ces sociétés « sont des sociétés du groupe au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce, texte visé par l'article L. 2331-1 du code du travail précité » ; qu'en se déterminant ainsi, par de tels motifs impropres à caractériser un groupe pour l'appréciation du motif économique, au sens de l'article L. 2331-1, I, du code du travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ce texte ;

3°/ que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; que la société faisait également valoir « qu'aucun syndicat, qu'aucun représentant du personnel n'a jamais revendiqué la mise en place d'un comité de groupe et qu'aucun inspecteur du travail n'a jamais demandé la mise en place d'une telle institution puisque précisément le groupe n'existe pas » et que « le comité de groupe n'est pas une option mais une obligation quand les conditions de l'existence d'un groupe sont réunies en vertu des dispositions de l'article L. 2331-1 du code du travail » ; qu'en ne répondant pas à ce moyen opérant de la société quant à la qualification du groupe au sens de l'article L. 2331-1, I, du code du travail, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4°/ que tout jugement doit être motivé ; que le juge ne peut se borner à se référer aux pièces du dossier, sans les analyser, même sommairement ; que l'article L. 233-3 du code de commerce, auquel renvoie l'article L. 2331-1, I, du code du travail, définit les conditions dans lesquelles une personne, physique ou morale, est considérée comme en contrôlant une autre, à savoir, par une détention directe ou indirecte d'une fraction du capital conférant la majorité des droits de vote dans les assemblées générales de la société contrôlée, par la majorité des droits de vote dans la société contrôlée en vertu d'un accord conclu avec d'autres associés ou actionnaires et qui n'est pas contraire à l'intérêt de la société, par la détermination en fait, par les droits de vote dont elle dispose, des décisions des assemblées générales de la société contrôlée et par la qualité d'associée ou d'actionnaire de cette société et pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des membres des organes d'administration, de direction ou de surveillance de cette société ; qu'en se bornant à affirmer que « la Banque Fédérative du Crédit Mutuel contrôle directement ou par sa filiale, la SFEJIC, plusieurs entreprises de presse : L'Est Républicain, le Républicain Lorrain, Les Dernières Nouvelles d'Alsace, L'Alsace, Vosges Matin, Le Bien Public, le Journal de Saône et Loire, le Progrès, le Dauphiné Libéré, le Journal de la Haute-Marne, Vaucluse Matin, la nouvelle SAP-L'Alsace est détenue quant à elle à 95,68% par la Banque Fédérative du Crédit Mutuel » et que ces sociétés « sont des sociétés du groupe au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce, texte visé par l'article L. 2331-1 du code du travail précité », sans préciser, ni a fortiori analyser les pièces sur lesquelles elle fondait de telles affirmations, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

5°/ que les difficultés économiques doivent être constituées, lorsque l'entreprise appartient à un groupe, au niveau du secteur d'activité de ce groupe dans lequel intervient l'employeur ; que le secteur d'activité ne peut être caractérisé par son seul objet et que le juge prend en considération un faisceau d'indices relatifs notamment à la nature des produits, biens ou services délivrés, à la clientèle à laquelle ils s'adressaient, au mode de distribution mis en oeuvre ou encore aux réseaux et modes de distribution, se rapportant à un même marché ; qu'en l'espèce, la société SAP faisait valoir que « le lectorat est totalement captif dans une zone géographique donnée et si le bien délivré est effectivement journal, le Journal L'Alsace n'est pas le Journal le Progrès de [Localité 4] et ne peut être interchangé. Il ne s'agit donc pas de la même clientèle qui est ciblée » et que la presse quotidienne régionale « a une vocation géographique limitée », de sorte qu' « un quotidien régional reste axé sur l'actualité régionale et ce sont bien des journalistes en région qui rédigent les articles » ; que pour juger le licenciement de M. [Z] dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel s'est bornée à retenir que « la Banque Fédérative du Crédit Mutuel contrôle directement ou par sa filiale se bornant à retenir seulement, , la SFEJIC, plusieurs entreprises de presse : L'Est Républicain, le Républicain Lorrain, Les Dernières Nouvelles d'Alsace, L'Alsace, Vosges Matin, Le Bien Public, le Journal de Saône et Loire, le Progrès, le Dauphiné Libéré, le Journal de la Haute-Marne, Vaucluse Matin, la nouvelle SAP-L'Alsace est détenue quant à elle à 95,68% par la Banque Fédérative du Crédit Mutuel » et que l'employeur n'aurait pas versé aux débats les éléments permettant de vérifier la situation économique « des autres sociétés du secteur « presse » du Crédit Mutuel, lesquelles sont des sociétés du groupe au seins de l'article L. 233-3 du code du commerce, texte visé par l'article L. 2331-1 du code du travail » ; qu'en se déterminant ainsi, par des considérations insuffisantes et impropres à qualifier le secteur d'activité, tandis qu'il lui appartenait de prendre en considération, par un faisceau d'indices, non seulement la nature des produits délivrés, mais également notamment, la clientèle à laquelle ils s'adressaient permettant de déterminer s'ils visaient le même marché, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail. »

Réponse de la Cour

6. La cause économique d'un licenciement s'apprécie au niveau de l'entreprise ou, si celle-ci fait partie d'un groupe, au niveau du secteur d'activité du groupe dans lequel elle intervient. Le périmètre du groupe à prendre en considération à cet effet est l'ensemble des entreprises unies par le contrôle ou l'influence d'une entreprise dominante dans les conditions définies à l'article L. 2331-1 du code du travail, sans qu'il y ait lieu de réduire le groupe aux entreprises situées sur le territoire national.

7. Il incombe à l'employeur de démontrer, dans le périmètre pertinent, la réalité et le sérieux du motif invoqué.

8. Ayant d'abord retenu, par une appréciation souveraine des pièces produites, que la société Alsacienne de publication - l'Alsace était détenue à plus de 95 % par la Banque fédérative du Crédit mutuel, laquelle contrôlait, directement ou indirectement par l'intermédiaire d'une filiale, d'autres entreprises de presse et que celles-ci avaient le même président que la société filiale Ebra regroupant les entreprises d'un pôle presse, la cour d'appel a fait ressortir que l'employeur appartenait à un groupe de sociétés non restreint au groupe Alsace média mais correspondant au secteur presse de la Banque fédérative du Crédit mutuel et que les difficultés économiques devaient être appréciées au niveau de ce secteur d'activité.

9. La cour d'appel a ensuite constaté que la société Alsace Publication, qui invoquait dans la lettre de licenciement les difficultés du groupe auquel elle appartenait, n'avait toutefois produit que ses propres bilans pour les années 2013 et 2014 ainsi que celui de sa filiale, la SFEJIC, pour l'année 2013, sans verser le moindre élément sur les autres sociétés du secteur presse du groupe de la Banque fédérative du Crédit mutuel, et ne démontrait pas la réalité de difficultés économiques au niveau du secteur d'activité à prendre en considération. Elle en a exactement déduit que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Alsacienne de publication - l'Alsace aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Alsacienne de publication - l'Alsace et la condamne à payer à M. [Z] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze juin deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour la société Alsacienne de publication - l'Alsace

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement dont M. [Z] a fait l'objet de la part de la société SAP est dépourvu de cause réelle et sérieuse, et d'AVOIR en conséquence condamné la société SAP à verser à M. [Z] la somme de 150.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, la lettre de licenciement est ainsi libellée : « La lettre de licenciement est ainsi libellée : « Vous êtes informé que la société Alsacienne de Publications l'Alsace (nouvelle structure issue de la transmission universelle de patrimoine de la Société Alsacienne de Publications vers la SFEJIC) ainsi que toutes les sociétés du groupe auquel elle appartient, continuent à subir les difficultés économiques que rencontre la presse quotidienne régionale et activités connexes. Ces difficultés se traduisent par un lectorat toujours en diminution sur tous les titres du Groupe « Alsace Media » ainsi que la poursuite de la diminution de nos recettes publicitaires toutes sources confondues. Nos difficultés sont reflétées par la baisse constante de notre chiffre d'affaires et les pertes accrues que nous avons enregistrées au cours des deux derniers exercices. Pour l'ancienne Société Alsacienne de Publications (ancienne structure l'Alsace, le Pays, magazines) : L'exercice est décompté du 01/01 au 31/12 de chaque année : ' CA 2012 : 53 487 Keuros ' Résultat 2012 : perte de 5 754 Keuros ' CA 2013 : 50 017 M euros ' Résultat 2013 : perte de 5 862 Keuros Pour l'ancien périmètre du groupe « Alsace Média », comptes consolidés de tout le groupe : ' CA 2012 : 64 329 Keuros ' Résultat 2012 : perte de 19 823 Keuros ' CA 2013 : 56 247 Keuros ' Résultat 2013 : perte de 7 758 Keuros. Depuis le début du nouvel exercice 2014, les chiffres enregistrés confirment la diminution de chiffre d'affaires et nous enregistrons toujours des pertes importantes (comptes consolidés) : ' CA 1er trimestre 2013 : 14 024 Keuros ' CA 1er trimestre 2014 : 12 848 Keuros ‘ Résultat 1er trimestre 2013 : moins 1 941 Keuros ' Résultat 1er trimestre 2014 : moins 1 651 Keuros. Les perspectives d'avenir sont toujours peu encourageantes malgré les différentes décisions qui ont été prises afin de recentrer l'activité et de réduire les charges. Au niveau du pôle « Magazines », nous avons enregistré, en 2013, une perte de 39,8 Keuros et de 22,8 Keuros pour le seul premier semestre 2014. Les résultats continuent à se dégrader. La décision a été prise de supprimer le magazine « En Bourgogne » à compter du mois de juin 2014, après la publication du dernier hors-série. Ce titre dépend directement de vos fonctions et il n'était pas possible d'en maintenir la parution compte tenu des pertes engendrées par cette parution. Au niveau du Journal des enfants, nous avons enregistré en 2013, une perte de 68,4 Keuros et de 64,4 Keuros pour le seul premier semestre 2014. Les résultats du JDE sont extrêmement dégradés par rapport à l'année passée. Compte tenu des résultats d'exploitation des différents magazines et du journal des enfants dont vous avez la responsabilité, de l'impérieuse nécessité de diminuer les charges liées à ces titres mais également de notre CA prévisionnel sur ces titres, ainsi pour la société SAP et au niveau du groupe « Alsace Média », il n'est plus possible de maintenir votre poste de responsable du développement des magazines et du journal des enfants. Nous avons pris la décision de redéployer votre activité et de rattacher les titres dont vous aviez la charge aux différents responsables des secteurs rédactionnels et commerciaux. Nous vous précisons que nous ne pouvons pas envisager une mesure de chômage partiel qui constituerait une mesure cosmétique qui n'aurait pas d'impact sur le long terme au niveau des charges, ni sur l'activité de la société à laquelle vous appartenez, ni au niveau du groupe « Alsace Média ». Compte tenu de la décision de supprimer votre poste, nous avons exploré toutes les mesures de reclassement en interne et au niveau des titres du pôle presse du Crédit Mutuel. Par courrier en date du 19 juin 2014, nous vous avons proposé un poste de reclassement en qualité de Chef de Service à la rédaction. En date du dimanche 29 juin 2014, vous n'avez pas accepté notre proposition de reclassement. Aussi, nous sommes donc contraints de poursuivre la procédure de licenciement pour motif économique que nous avons initiée. Parallèlement à la remise du présent courrier d'information, nous vous proposons le bénéficie d'un contrat de sécurisation professionnelle. Il vous est remis une documentation d'information établie par Pôle emploi ainsi qu'un dossier d'acceptation du contrat de sécurisation professionnelle. Vous disposez d'un délai de 21 jours pour prendre votre décision. Ce délai court à compter du 9 juillet et expirera le 29 juillet 2014. » ; M. [Z] fait valoir que l'avenant du 26 juin 2013 le nommant aux fonctions de responsable du développement et des magazines ne porte pas sa signature et lui est inopposable de sorte que le licenciement pour suppression de ce poste est sans fondement ; il est constant que la lettre de licenciement indique que le poste supprimé est celui de « responsable du développement des magazines et du journal des enfants » et que M. [Z] n'a pas signé l'avenant le nommant, à compter du 1er janvier 2013, au poste précité ; toutefois, si la novation ne se présume pas, elle peut résulter d'actes positifs et non équivoques caractérisant la volonté de nover ; or, en l'espèce, il est avéré que l'intéressé a occupé effectivement ce poste ' qui est un poste d'animation et de direction supposant des initiatives et des prises de responsabilités - pendant un an et que c'est cet emploi qui est mentionné sur les bulletins de paie ; en outre, il a diffusé, le 15 mai 2013, un message à ses collaborateurs indiquant qu'il avait demandé à la direction générale de le décharger de sa fonction antérieure ; par suite, c'est bien le poste qu'il occupait qui a été supprimé ; l'intimé fait valoir qu'en tout état de cause, l'employeur connaissait les importantes difficultés économiques existantes lorsqu'il l'a affecté à ce poste, considéré comme non viable un an plus tard, ce qui caractérise une légèreté blâmable. Mais, à supposer établie une erreur du chef d'entreprise dans l'appréciation du risque inhérent à tout choix de gestion, une telle erreur ne caractérise pas à elle seule la légèreté blâmable et il n'appartient pas au juge de contrôler le choix effectué par l'employeur entre les solutions possibles afin de remédier aux difficultés économiques ; par suite, aucun élément ne caractérisant la connaissance de l'employeur, en juin 2013, des difficultés économiques impliquant la suppression du poste, la légèreté blâmable alléguée ne peut être retenue ; s'agissant des difficultés économiques, M. [Z] invoque plusieurs moyens : - la lettre de licenciement fait état des difficultés de la SAP et du Groupe Alsace Média mais pas des difficultés au niveau du secteur du groupe, - les sociétés du groupe ont non seulement des liens capitalistiques, mais mutualisent le personnel et les moyens de gestion et d'organisation, par exemple le bureau des informations générales, - c'est le nouveau périmètre, postérieur à la reconfiguration du Groupe Alsace Média, qui doit être pris en considération, - aucune des ruptures intervenues en 2014 ne l'a été pour motif économique sinon la sienne, - de nombreux contrats à durée déterminée sont intervenues en 2014, - le registre du personnel n'est pas régulier car il ne mentionne pas l'emploi sur lequel les salariés ont été embauchés, - le motif du licenciement est inhérent à sa personne, à savoir sa candidature aux élections municipales de Belfort en mars 2014, laquelle lui a valu sa rétrogradation de 2013, des brimades et vexations ; pour la SAS Société alsacienne de publication "L'Alsace", en revanche, - le cadre d'appréciation des difficultés économiques doit s'apprécier au niveau de l'entreprise, laquelle n'appartient pas au groupe EBRA, - il n'y a aucune autre relation entre les sociétés que l'existence d'un actionnaire commun, le lectorat n'étant pas le même, - la définition nouvelle du groupe n'est pas applicable et ne peut inspirer une décision de justice, - le chiffre d'affaires du groupe n'a cessé de se détériorer, de même que la diffusion des magazines et du journal des enfants,- les contrats à durée déterminée n'ont pour objet que de remplacer des salariés absents ; le licenciement ayant été prononcé en raison de difficultés économiques, il est rappelé que si la réalité de la suppression ou la transformation de l'emploi est examinée au niveau de l'entreprise, les difficultés économiques doivent être appréciées au regard du secteur d'activité du groupe auquel appartient l'entreprise concernée, le périmètre du groupe à prendre en considération à cet effet étant l'ensemble des entreprises unies par le contrôle ou l'influence d'une entreprise dominante dans les conditions définies à l'article L. 2331-1 du code du travail, sans qu'il y ait lieu de réduire le groupe aux entreprises situées sur le territoire national ; en l'espèce, l'employeur explique que, fin 2013, la holding SFEJIC a absorbé la Société Alsacienne de Publications, devenant la Société Alsacienne de Publication ' L'Alsace ; mais, alors qu'elle dispose de tous les éléments caractérisant le périmètre du groupe d'appréciation des difficultés économiques, la SAP-L'Alsace invite la Cour à faire porter l'intégralité de la charge de la preuve de ce périmètre sur M. [Z], se bornant à contester la description du Groupe Alsace Média que fait le salarié, lequel n'a pu s'appuyer que sur les informations diffusées au public au soutien de son analyse ; pourtant, cette charge probatoire est partagée et le salarié s'est acquitté de sa part en produisant les éléments selon lesquels la Banque Fédérative du Crédit Mutuel contrôle directement ou par sa filiale, la SFEJIC, plusieurs entreprises de presse : L'Est Républicain, le Républicain Lorrain, Les Dernières Nouvelles d'Alsace, L'Alsace, Vosges Matin, Le Bien Public, le Journal de Saône et Loire, le Progrès, Le Dauphiné Libéré, le Journal de la Haute-Marne, Vaucluse Matin, la nouvelle SAP- L'Alsace est détenue quant à elle à 95,68 % par la Banque Fédérative du Crédit Mutuel ; M. [Z] démontre également que la SAS Ebra et plusieurs des sociétés éditrices des journaux précités avaient le même président ; c'est au jour du licenciement que doivent s'apprécier l'étendue du périmètre et les difficultés économiques du groupe, soit en juillet 2014 ; alors que la lettre de licenciement fait état des difficultés de la SAP l'Alsace ainsi que de « toutes les sociétés du groupe auquel elle appartient », force est de constater que ne sont produits aux débats que : - le bilan 2013 de la Société Alsacienne de Publications, - le bilan 2013 de la SFEJIC, - le bilan 2014 de la société SAP L'Alsace ; aucun autre élément n'est versé aux débats, permettant de vérifier la situation économique des autres sociétés du secteur « presse » du Crédit Mutuel, lesquelles sont des sociétés du groupe au sens de l'article L 233-3 du Code de commerce, texte visé par l'article L 23331-1 du Code du travail précité. Par suite, la SAP-L'Alsace ne démontre pas la réalité du motif économique ayant conduit à la suppression du poste de M. [Z] ; en revanche, ce dernier établit, comme l'ont observé les premiers juges, que le licenciement a été prononcé pour un motif personnel, ce qui résulte des échanges de messages entre l'intéressé et sa hiérarchie, faisant état des protestations exprimées par M. [Z] les 10 juin et 9 décembre 2013, 28 février et 5 mai 2014 au sujet de ses conditions de travail (affectation à un bureau de taille très réduite), au sujet des suspicions de travail insuffisant, du retard de versement de sa prime annuelle et de la suppression de carte Fréquence-SNCF ; par ailleurs, compte-tenu des difficultés dont fait état la SAP-L'Alsace, à savoir la perte de plusieurs millions d'euros, la suppression d'un seul poste dans tout le groupe au cours de l'année 2014 n'apparaît pas justifiée par ces difficultés ; dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse ; en ce qui concerne le préjudice, M. [Z] verse aux débats les bulletins de paie correspondant à sa nouvelle activité et il compare sa rémunération (1.749,05 euros depuis le 9 juin 2015) à celle qu'il percevait dans son emploi précédent (7.325,15 euros, 13ème et 14ème mois inclus) ; compte-tenu de cet élément, de son ancienneté au sein de la SAP-L'Alsace (23 ans et 10 mois), de son âge au jour de la rupture (49 ans), des difficultés rencontrées pour retrouver un emploi, la cour réformera le jugement entrepris, le préjudice subi du fait de la rupture étant arrêté à la somme de 150.000 euros, ce qui correspond à la réparation intégrale du préjudice subi ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE, aux termes de l'article L. 1235-1 du code du travail, le juge a pour mission d ‘apprécier la régularité de la procédure de licenciement et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur ; la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; la cause du licenciement doit être objective et reposer sur des faits matériellement vérifiables ; la faits doivent être établis et constituer la véritable cause du licenciement ; enfin, les faits invoqués doivent être suffisamment pertinents pour justifier le licenciement ; il appartient au juge du fond, qui n'est pas lié par la qualification donnée au licenciement, de vérifier la réalité des faits invoqués et reprochés au salarié et de les qualifier puis de décider s'ils constituent une cause réelle et sérieuse au sens de l'article L. 1232-1 du code du travail à la date du licenciement ; l'employeur devant fournir au juge les éléments permettant à celui-ci de constater les caractères réels et sérieux du licenciement ; aux termes de l'article L. 1233-3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non-inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutive notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ; selon l'article L. 1233-4, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie ; le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe, ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure ; M. [I] [Z] prétendant que le motif économique allégué par l'employeur déguise en réalité un motif inhérent à la personne du salarié, il convient de rechercher en premier lieu, dans les éléments fournis à l'appréciation du conseil de prud'hommes, si l'engagement politique de M. [Z] n'a pas conduit la SAP à envisager la rupture du contrat de travail ; en l'espèce, par avenant à son contrat de travail du 26 juin 2013, M. [Z] a été nommé responsable du développement des magazines et du JDE, coefficient 190 (convention collective Encadrement Presse Quotidienne Régionale) ; il en résulte sans conteste des échanges de courriers électroniques contemporains à cette période, ainsi que du compte rendu de l'entretien préalable au licenciement, que M. [O] [W], directeur général, estimait incompatibles avec une campagne électorale municipale les fonctions de chef de la publicité, et que M. [Z] n'a pas quitté ce poste de son plein gré, bien que le changement de responsable ait été présenté dans son service comme résultant d'une demande de l'intéressé pour convenance personnelle et que le poste qui lui a ensuite été attribué –chargé du développement publicitaire et des partenariats pour le magazine et le journal des enfants– a été le cadre de reproches liés au prétendu empiétement de son activité politique sur son travail ; ainsi, outre l'amertume dont fait part M. [Z] à sa direction sur les conditions qui lui sont faites lors de son changement de poste (mails des 4 et 10 juin 2013), les regrets et le soutien moral manifesté par Mme [V] [S] (mail du 15 mai 2013), démontrent que ce départ lui a été imposé ; de même, le message adressé par M. [Z] à son directeur général le 9 décembre 2013, en réponse à des reproches qui lui auraient été faits en réunion, emporte la conviction en ce qu'il a été rédigé bien avant l'engagement de la procédure de licenciement et que l'employeur ne conteste pas l'existence desdits reproches ; par ailleurs, il résulte des mails échangés des 28 février et 5 mai 2014, soit à proximité de la date du licenciement, que M. [Z] formule des réclamations diverses à l'endroit de son employeur ; si la suppression de la carte d'abonnement SNCF pourrait s'expliquer par la rationalisation légitime des moyens financiers de l'entreprise, elle apparaît vexatoire, replacée dans le contexte général de la privation d'attributs attachés au statut du salarié et non utilement expliqué par la SAP ; enfin, et alors que l'entreprise n'a procédé au licenciement économique que du seul demandeur au cours de l'année 2014, tout en recrutant d'autres salariés ainsi que cela résulte du registre unique du personnel, il n'est pas démontré que cette décision était de nature à contribuer à l'assainissement de la situation économique de la SAP ; il résulte de ces éléments que le motif déterminant du licenciement de M. [Z] était inhérent à sa personne, de sorte qu'ne procédant à une rupture du contrat de travail pour motif économique, la SAP l'a privé de cause réelle et sérieuse ; sur les conséquences du licenciement ; en application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis ; si l'une ou l'autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié ; cette indemnité, à la charge de l'employeur, ne peut être inférieure au salaire des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9 ; au moment de son licenciement, M. [Z] avait plus de deux années d'ancienneté et la société Alsacienne de publication employait habituellement au moins 11 salariés ; M. [Z] peut prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui ne peut être inférieure au montant des salaires bruts qu'il a perçus pendant les six derniers mois précédant son licenciement ; M. [Z] justifie d'un préjudice supplémentaire résultant de son âge de 49 ans au moment du licenciement, de son ancienneté contractuelle de 24 ans, des revenus bien inférieurs tirés de sa nouvelle activité professionnelle (21.397 euros nets pour l'année 2016) ou des trente années de travail au sein du groupe L'Alsace, il convient de lui allouer la somme de 130.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; lorsque le licenciement illégitime est indemnisé en application des articles L. 1235-3/11 du code du travail et sauf si le salarié avait moins de deux ans d'ancienneté, le conseil ordonne d'office, même en l'absence de Pôle emploi çà l'audience, et sur le fondement des dispositions de l'article L. 1235-4, le remboursement par l'employeur de tout ou partie des indemnités de chômage payées au salarié par les organismes concernés, du jour du licenciement au jour du licenciement, dans la limite de six mois ; en l'espèce, au vu des circonstances de la cause, il convient de condamner l'employeur à rembourser les indemnités à concurrence de six mois ;

1) ALORS QU'il résulte de l'article L. 2331-1, I, du code du travail qu'un comité de groupe est constitué au sein du groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante, dont le siège social est situé sur le territoire français, et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce ; que l'article L. 233-3 du code de commerce définit les conditions dans lesquelles une personne, physique ou morale, est considérée comme en contrôlant une autre, à savoir, par une détention directe ou indirecte d'une fraction du capital conférant la majorité des droits de vote dans les assemblées générales de la société contrôlée, par la majorité des droits de vote dans la société contrôlée en vertu d'un accord conclu avec d'autres associés ou actionnaires et qui n'est pas contraire à l'intérêt de la société, par la détermination en fait, par les droits de vote dont elle dispose, des décisions des assemblées générales de la société contrôlée et par la qualité d'associée ou d'actionnaire de cette société et pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des membres des organes d'administration, de direction ou de surveillance de cette société ; qu'en l'espèce, en retenant, pour juger le licenciement pour motif économique de M. [Z] dépourvu de cause réelle et sérieuse, que « la Banque Fédérative du Crédit Mutuel contrôle directement ou par sa filiale, la SFEJIC, plusieurs entreprises de presse : L'Est Républicain, le Républicain Lorrain, Les Dernières Nouvelles d'Alsace, L'Alsace, Vosges Matin, Le Bien Public, le Journal de Saône et Loire, le Progrès, le Dauphiné Libéré, le Journal de la Haute-Marne, Vaucluse Matin, la nouvelle SAP-L'Alsace est détenue quant à elle à 95,68% par la Banque Fédérative du Crédit Mutuel » et que ces sociétés « sont des sociétés du groupe au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce, texte visé par l'article L. 2331-1 du code du travail précité », sans constater que la Banque Fédérale du Crédit Mutuel aurait effectivement répondu aux conditions prévues par l'article L. 233-3 du code de commerce précitées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2331-1, I, du code du travail ensemble l'article L. 233-3 du code de commerce ;

2) ALORS QUE la détention indirecte par un groupe d'une participation dans le capital de sociétés ne suffit pas à créer un groupe au niveau du secteur d'activité duquel devait être apprécié le motif économique de licenciement ; qu'en l'espèce, la société SAP faisait valoir que « le groupe SAP est en effet une filiale de la Banque Fédérative du Crédit Mutuel –BFCM– qui détient plusieurs participations au sein de différentes sociétés de presse » mais que « pour autant, ces sociétés de presse n'ont strictement aucun lien entre elles si ce n'est le fait d'avoir un actionnaire en commun » ; que pour juger le licenciement pour motif économique de M. [Z] dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a retenu que « la Banque Fédérative du Crédit Mutuel contrôle directement ou par sa filiale, la SFEJIC, plusieurs entreprises de presse : L'Est Républicain, le Républicain Lorrain, Les Dernières Nouvelles d'Alsace, L'Alsace, Vosges Matin, Le Bien Public, le Journal de Saône et Loire, le Progrès, le Dauphiné Libéré, le Journal de la Haute-Marne, Vaucluse Matin, la nouvelle SAP-L'Alsace est détenue quant à elle à 95,68% par la Banque Fédérative du Crédit Mutuel » et que ces sociétés « sont des sociétés du groupe au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce, texte visé par l'article L. 2331-1 du code du travail précité » ; qu'en se déterminant ainsi, par de tels motifs impropres à caractériser un groupe pour l'appréciation du motif économique, au sens de l'article L. 2331-1, I, du code du travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ce texte ;

3) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; que la société faisait également valoir « qu'aucun syndicat, qu'aucun représentant du personnel n'a jamais revendiqué a mise en place d'un comité de groupe et qu'aucun inspecteur du travail n'a jamais demandé la mise en place d'une telle institution puisque précisément le groupe n'existe pas » et que « le comité de groupe n'est pas une option mais une obligation quand les conditions de l'existence d'un groupe sont réunies en vertu des dispositions de l'article L. 2331-1 du code du travail » ; qu'en ne répondant pas à ce moyen opérant de la société quant à la qualification du groupe au sens de l'article L. 2331-1, I, du code du travail, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4) ALORS QUE tout jugement doit être motivé ; que le juge ne peut se borner à se référer aux pièces du dossier, sans les analyser, même sommairement ; que l'article L. 233-3 du code de commerce, auquel renvoie l'article L. 2331-1, I, du code du travail, définit les conditions dans lesquelles une personne, physique ou morale, est considérée comme en contrôlant une autre, à savoir, par une détention directe ou indirecte d'une fraction du capital conférant la majorité des droits de vote dans les assemblées générales de la société contrôlée, par la majorité des droits de vote dans la société contrôlée en vertu d'un accord conclu avec d'autres associés ou actionnaires et qui n'est pas contraire à l'intérêt de la société, par la détermination en fait, par les droits de vote dont elle dispose, des décisions des assemblées générales de la société contrôlée et par la qualité d'associée ou d'actionnaire de cette société et pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des membres des organes d'administration, de direction ou de surveillance de cette société ; qu'en se bornant à affirmer que « la Banque Fédérative du Crédit Mutuel contrôle directement ou par sa filiale, la SFEJIC, plusieurs entreprises de presse : L'Est Républicain, le Républicain Lorrain, Les Dernières Nouvelles d'Alsace, L'Alsace, Vosges Matin, Le Bien Public, le Journal de Saône et Loire, le Progrès, le Dauphiné Libéré, le Journal de la Haute-Marne, Vaucluse Matin, la nouvelle SAP-L'Alsace est détenue quant à elle à 95,68% par la Banque Fédérative du Crédit Mutuel » et que ces sociétés « sont des sociétés du groupe au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce, texte visé par l'article L. 2331-1 du code du travail précité », sans préciser, ni a fortiori analyser les pièces sur lesquelles elle fondait de telles affirmations, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

5) ALORS en toute hypothèse QUE les difficultés économiques doivent être constituées, lorsque l'entreprise appartient à un groupe, au niveau du secteur d'activité de ce groupe dans lequel intervient l'employeur ; que le secteur d'activité ne peut être caractérisé par son seul objet et que le juge prend en considération un faisceau d'indices relatifs notamment à la nature des produits, biens ou services délivrés, à la clientèle à laquelle ils s'adressaient, au mode de distribution mis en oeuvre ou encore aux réseaux et modes de distribution, se rapportant à un même marché ; qu'en l'espèce, la société SAP faisait valoir que « le lectorat est totalement captif dans une zone géographique donnée et si le bien délivré est effectivement journal, le Journal L'Alsace n'est pas le Journal le Progrès de [Localité 4] et ne peut être interchangé. Il ne s'agit donc pas de la même clientèle qui est ciblée » et que la presse quotidienne régionale « a une vocation géographique limitée », de sorte qu' « un quotidien régional reste axé sur l'actualité régionale et ce sont bien des journalistes en région qui rédigent les articles » ; que pour juger le licenciement de M. [Z] dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel s'est bornée à retenir que « la Banque Fédérative du Crédit Mutuel contrôle directement ou par sa filiale se bornant à retenir seulement, , la SFEJIC, plusieurs entreprises de presse : L'Est Républicain, le Républicain Lorrain, Les Dernières Nouvelles d'Alsace, L'Alsace, Vosges Matin, Le Bien Public, le Journal de Saône et Loire, le Progrès, le Dauphiné Libéré, le Journal de la Haute-Marne, Vaucluse Matin, la nouvelle SAP-L'Alsace est détenue quant à elle à 95,68% par la Banque Fédérative du Crédit Mutuel » et que l'employeur n'aurait pas versé aux débats les éléments permettant de vérifier la situation économique « des autres sociétés du secteur « presse » du Crédit Mutuel, lesquelles sont des sociétés du groupe au seins de l'article L. 233-3 du code du commerce, texte visé par l'article L. 2331-1 du code du travail » ; qu'en se déterminant ainsi, par des considérations insuffisantes et impropres à qualifier le secteur d'activité, tandis qu'il lui appartenait de prendre en considération, par un faisceau d'indices, non seulement la nature des produits délivrés, mais également notamment, la clientèle à laquelle ils s'adressaient permettant de déterminer s'ils visaient le même marché, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail ;

6) ALORS en toute hypothèse QUE s'il appartient au juge, tenu de contrôler le caractère sérieux du motif économique du licenciement, de vérifier l'adéquation entre la situation économique de l'entreprise et les mesures affectant l'emploi ou le contrat de travail envisagées par l'employeur, il ne peut se substituer à ce dernier quant aux choix qu'il effectue pour faire face à la situation économique de l'entreprise ; qu'en l'espèce, en retenant, pour juger le licenciement de M. [Z] dépourvu de cause réelle et sérieuse, que « compte-tenu des difficultés dont fait état la SAP-L'Alsace, à savoir la perte de plusieurs millions d'euros, la suppression d'un seul poste dans tout le groupe au cours de l'année 2014 n'apparaît pas justifiée par ces difficultés », la cour d'appel, qui a totalement omis que M. [Z] s'était vu proposer un poste qui aurait permis d'éviter son licenciement et n'avait dû être licencié que suite à son refus, a statué par des motifs inopérants, impropres à écarter la nécessité de supprimer le poste de M. [Z], et a violé les articles L. 1232-1 du code du travail, et L. 1132-1 du code du travail dans sa version applicable au litige ;

7) ALORS en toute hypothèse QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, la société SAP faisait valoir que pour pallier les difficultés économiques qu'elle connaissait, notamment au niveau du journal des enfants (JDE), dont M. [Z] était responsable du développement et qui avait enregistré au cours du 1er semestre 2014 des pertes équivalentes à celles de la totalité de l'année 2013, elle avait recentré ses activités au sein de la SAP de sorte qu'il était incohérent de maintenir le poste de responsable du développement des magazines et de responsable du JDE, mais également qu'en octobre 2013, elle avait été contrainte de céder le journal Le Pays qui lui a permis de baisser les charges structurelles engendrées par les emplois liés au titre ; qu'en jugeant que le licenciement de M. [Z] pour motif économique était dépourvu de cause réelle et sérieuse, au motif que « compte-tenu des difficultés dont fait état la SAP-L'Alsace, à savoir la perte de plusieurs millions d'euros, la suppression d'un seul poste dans tout le groupe au cours de l'année 2014 n'apparaît pas justifiée par ces difficultés », sans répondre au moyen opérant de la société SAP qui faisait valoir que la suppression du poste de M. [Z] faisait partie d'un ensemble de mesures visant à diminuer les charges structurelles obérant sa situation économique, la cour d'appel a encore violé l'article 455 du code de procédure civile ;

8) et ALORS en toute hypothèse QUE les juges du fond ne peuvent modifier l'objet du litige, tel que déterminé par les prétentions respectives des parties exprimées dans leurs conclusions ; qu'en l'espèce, pour juger sans cause réelle et sérieuse le licenciement pour motif économique de M. [Z], la cour d'appel a retenu que « « le licenciement a été prononcé pour un motif personnel, ce qui résulte des échanges de messages entre l'intéressé et sa hiérarchie, faisant état des protestations exprimées par M. [Z] les 20 juin et 9 décembre 2013, 28 février et 5 mari 2014 au sujet de ses conditions de travail (affectation à un bureau de taille très réduite) au sujet des suspicions de travail insuffisant, du retard de versement de sa prime annuelle et de la suppression de carte Fréquence-SNCF » ; qu'en statuant comme elle l'a fait, quand il ressortait des conclusions du salarié que ce dernier faisait valoir que son licenciement aurait été en réalité causé par son engagement politique, que l'employeur lui aurait retiré ses responsabilités de chef de service publicité lorsqu'il a appris qu'il souhaitait se présenter aux élections municipales de mars 2014 à Belfort et que le salarié aurait ensuite été « placardisé » (conclusions de M. [Z] pp. 20 et s.), la cour d'appel a donc méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

9) et ALORS en toute hypothèse QUE le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'en jugeant sans cause réelle et sérieuse le licenciement pour motif économique de M. [Z], au motif que « le licenciement a été prononcé pour un motif personnel, ce qui résulte des échanges de messages entre l'intéressé et sa hiérarchie, faisant état des protestations exprimées par M. [Z] les 20 juin et 9 décembre 2013, 28 février et 5 mari 2014 au sujet de ses conditions de travail (affectation à un bureau de taille très réduite) au sujet des suspicions de travail insuffisant, du retard de versement de sa prime annuelle et de la suppression de carte Fréquence-SNCF », tandis qu'il résultait de ses propres constatations que M. [Z] avait effectivement occupé le poste de « responsable de développement des magazines et du journal des enfants » qui lui avait été proposé pour lui permettre de mener sa campagne électorale pour les élections municipales de Belfort en mars 2014, de sorte que le salarié ne pouvait manifestement affirmer qu'il aurait été « placardisé » à ce poste et que ses prétendues protestations quant aux conditions de travail attachées à ce poste ne pouvaient pas constituer la véritable cause de son licenciement, à la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1232-6, L. 1234-1, L. 1234-9 et L. 1235-1 du code du travail, dans leur rédaction alors applicable.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-19950
Date de la décision : 15/06/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 29 octobre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 jui. 2022, pourvoi n°20-19950


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.19950
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