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14/06/2022 | FRANCE | N°22-81947

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 14 juin 2022, 22-81947


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° C 22-81.947 F-D
Z 20-80.832

N° 00891

SL2
14 JUIN 2022

REJET

M. BONNAL conseiller le plus ancien faisant fonction de président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 14 JUIN 2022

La société [1] a formé des pourvois contre deux arrêts de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de

Paris, 2e section, le premier, en date du 12 décembre 2019, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 9 mai 2019, n° 19-81.349) d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° C 22-81.947 F-D
Z 20-80.832

N° 00891

SL2
14 JUIN 2022

REJET

M. BONNAL conseiller le plus ancien faisant fonction de président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 14 JUIN 2022

La société [1] a formé des pourvois contre deux arrêts de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 2e section, le premier, en date du 12 décembre 2019, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 9 mai 2019, n° 19-81.349) dans l'information suivie contre elle des chefs de harcèlement, subornation de témoin et entrave, a infirmé l'ordonnance de non-lieu partiel et de renvoi du juge d'instruction et ordonné un supplément d'information, le second, en date du 3 mars 2022, qui l'a renvoyée devant le tribunal correctionnel des chefs précités.

Les pourvois sont joints en raison de la connexité.

Des mémoires, en demande et en défense, et des observations complémentaires ont été produits.

Sur le rapport de M. Seys, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de la société [1], les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de M. [J] [M], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 juin 2022 où étaient présents M. Bonnal, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Seys, conseiller rapporteur, Mme Ménotti, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Par ordonnance du 28 août 2017, le juge d'instruction a ordonné le renvoi de la société [1] (ci-après, la société [1]) devant le tribunal correctionnel du chef de harcèlement et dit n'y avoir lieu à suivre notamment des chefs d'entrave et de subornation de témoin au préjudice de M. [J] [M] ; ce dernier, partie civile, a relevé appel de cette décision.

3. Par arrêt en date du 7 février 2019, la chambre de l'instruction a infirmé l'ordonnance contestée s'agissant des faits d'entrave au fonctionnement du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail
(ci-après, le CHSCT), l'a confirmée pour le surplus et a ordonné le retour du dossier au magistrat instructeur pour poursuite de l'information.

4. La société [1] s'est pourvue en cassation contre cette décision.

5. Par arrêt en date du 9 mai 2019 (Crim., 9 mai 2019, n° 19-81.349), la Cour de cassation a cassé en toutes ses dispositions l'arrêt ci-dessus et renvoyé la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée.

6. Par arrêt en date du 12 décembre 2019, la chambre de l'instruction a infirmé l'ordonnance contestée et ordonné un supplément d'information aux fins de mise en examen de la société [1] du chef d'entrave au fonctionnement de son CHSCT.

7. Un pourvoi a été formé contre cette décision par la société [1], enregistré sous le numéro Z 20-80.832.

8. Par ordonnance en date du 9 mars 2020, le président de la chambre criminelle a dit n'y a avoir lieu, en l'état, de recevoir ce pourvoi.

9. Les actes accomplis en exécution du supplément d'information ont été reçus au greffe de la chambre de l'instruction le 30 mars 2021 ; un arrêt de dépôt a été rendu le 22 juin 2021.

10. L'affaire a été évoquée à l'audience du 2 décembre 2021, à l'issue de laquelle, par arrêt du 27 janvier 2022, la chambre de l'instruction a ordonné le versement d'une pièce à la procédure.

Examen des moyens

Sur les premier, deuxième, cinquième et sixième moyens

11. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

12. La société [1] fait grief à l'arrêt attaqué d'ordonner son renvoi devant le tribunal correctionnel du chef de harcèlement au préjudice de Mme [I] et de M. [M], alors :

« 1°/ que l'article 202 du code de procédure pénale permet à la chambre de l'instruction, et sans que sa saisine puisse être limitée par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer d'office, à l'égard de la personne mise en examen renvoyée devant elle, sur tous les chefs de crimes, délits principaux ou connexes, résultant de la procédure et, notamment, sur ceux qui en avaient été distraits par une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel ; que, dès lors, en énonçant, pour ordonner le renvoi de la société [1] devant le tribunal correctionnel des chefs de harcèlement au préjudice de Mme [I] et de M. [M], qu'elle n'est pas saisie d'un appel à l'encontre de l'ordonnance de non-lieu partiel et de renvoi en ce qui concerne les faits de harcèlement pour lesquels [1] a été renvoyée devant le tribunal correctionnel, mais du seul appel interjeté par M. [M], partie civile, en ce qui concerne le non-lieu partiel prononcé à l'égard de la société [1] s'agissant des faits de subornation de témoin, et que l'ordonnance de non-lieu partiel et de renvoi n'a été infirmée qu'en ce qui concerne les faits d'entrave au fonctionnement du CHSCT, quand, d'une part, l'appel de cette partie civile l'avait saisie de l'ensemble des faits résultant de la procédure, dont ceux de harcèlement pour lesquels le renvoi de la société [1] devant la juridiction correctionnelle avait été ordonné par l'ordonnance de non-lieu partiel et de renvoi et, d'autre part, elle avait infirmé cette ordonnance par un précédent arrêt du 12 décembre 2019 sans limiter l'étendue de cette infirmation, la chambre de l'instruction a méconnu l'étendue de sa saisine ainsi que l'autorité de chose jugée attachée à cette décision et violé l'article susvisé ;

2°/ que l'arrêt de renvoi doit préciser les motifs pour lesquels il existe contre la personne mise en examen des charges suffisantes d'avoir commis les faits pour lesquels elle est renvoyée devant la juridiction de jugement, ainsi que les éléments à charge et à décharge ; que, dès lors, en ordonnant le renvoi de la société [1] devant le tribunal correctionnel des chefs de harcèlement moral au préjudice de Mme [I] et de M. [M] sans constater l'existence de charges suffisantes à l'encontre de cette société d'avoir commis ces délits, ni préciser les éléments à charge et à décharge, la chambre de l'instruction a violé les articles 184, 211 et 213 du code de procédure pénale ;

3°/ qu'en ordonnant le renvoi de la société [1] devant le tribunal correctionnel des chefs de harcèlement moral au préjudice de Mme [I] et de M. [M] après avoir retenu que l'ordonnance de renvoi était définitive à cet égard, la chambre de l'instruction s'est contredite et a méconnu l'étendue de sa saisine, en violation des articles 202, 213, 591 et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

13. L'arrêt attaqué énonce, d'une part, que la chambre de l'instruction est saisie de l'appel de la partie civile critiquant la seule décision de non-lieu partiel du chef d'entrave au fonctionnement du CHSCT, d'autre part, que la société [1] a été mise en examen de ce chef dans le cadre d'un supplément d'information ordonné précédemment.

14. Les juges ajoutent que, n'étant pas saisis d'un appel contestant le renvoi de la société [1] pour harcèlement, il conviendra en conséquence d'ordonner le renvoi de ladite société de ce chef.

15. C'est à tort que la chambre de l'instruction, qui avait, par son arrêt précédent, infirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance contestée, a retenu qu'elle n'était pas saisie du chef de harcèlement.

16. L'arrêt attaqué n'encourt néanmoins pas la censure, dès lors qu'en l'absence de tout moyen critiquant sur ce point l'ordonnance de règlement du juge d'instruction, la chambre de l'instruction, qui a entendu en adopter les motifs, sans les modifier ou y ajouter, a régulièrement renvoyé la société [1] du chef de harcèlement.

17. Le moyen doit donc être rejeté.

Sur le quatrième moyen

Enoncé du moyen

18. La société [1] fait grief à l'arrêt attaqué d'ordonner son renvoi devant le tribunal correctionnel du chef de subornation de témoin, alors « qu'en ordonnant le renvoi de la société [1] devant le tribunal correctionnel du chef de subornation de témoin après avoir retenu que l'ordonnance de non-lieu partiel et de renvoi, par laquelle le juge d'instruction avait dit n'y avoir lieu à suivre de ce chef, n'avait été infirmée qu'en ce qui concerne les faits d'entrave au fonctionnement du CHSCT, ce dont il se déduisait que le non-lieu relatif aux faits de subornation de témoin était définitif, la chambre de l'instruction s'est contredite et a méconnu l'étendue de sa saisine, en violation des articles 202, 211, 213, 591 et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

19. Pour ordonner le renvoi de la société [1] devant le tribunal correctionnel du chef de subornation de témoin, l'arrêt, après avoir exposé les moyens des parties portant sur les faits susceptibles d'être ainsi qualifiés, détaille de manière précise et circonstanciée les divers éléments à charge et à décharge afférents à ce chef de poursuite.

20. Les juges en déduisent l'existence de charges suffisantes contre la société [1] d'avoir commis le délit de subornation de témoin au préjudice de M. [M].

21. En l'état de ces seules énonciations, la chambre de l'instruction, qui, prononçant sur appel de la partie civile d'une ordonnance de non lieu partiel, et saisie ainsi de l'ensemble des faits visés par la procédure, pouvait user de son pouvoir de révision pour qualifier d'infraction pénale tout ou partie de ces mêmes faits, a justifié sa décision.

22. Dès lors, le moyen sera rejeté.

23. L'arrêt est par ailleurs régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

Sur le pourvoi dirigé contre l'arrêt du 12 décembre 2019 :

DIT n'y avoir lieu de statuer immédiatement sur le pourvoi ;

Sur le pourvoi dirigé contre l'arrêt du 3 mars 2022 :

REJETTE le pourvoi ;

FIXE à 2 500 euros la somme que la société [1] devra payer à M. [M] en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatorze juin deux mille vingt-deux.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 22-81947
Date de la décision : 14/06/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 03 mars 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 14 jui. 2022, pourvoi n°22-81947


Composition du Tribunal
Président : M. Bonnal (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Sevaux et Mathonnet, SCP Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:22.81947
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