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01/06/2022 | FRANCE | N°21-16390

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 01 juin 2022, 21-16390


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 1er juin 2022

Rejet

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 463 F-D

Pourvoi n° Z 21-16.390

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 1ER JUIN 2022

La société Wesmyr canonniers, société civile immobilière, dont

le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Z 21-16.390 contre l'arrêt rendu le 11 mars 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-9...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 1er juin 2022

Rejet

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 463 F-D

Pourvoi n° Z 21-16.390

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 1ER JUIN 2022

La société Wesmyr canonniers, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Z 21-16.390 contre l'arrêt rendu le 11 mars 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-9), dans le litige l'opposant à M. [M] [V], domicilié chez M. [D] [O], [Adresse 2], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. David, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Wesmyr canonniers, après débats en l'audience publique du 20 avril 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. David, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 11 mars 2021), le 11 avril 2017, la société civile immobilière Wesmyr canonniers (la SCI) a donné en location à la société Le Local divers locaux à usage commercial.

2. M. [V], gérant de la société Le Local, s'est le même jour porté caution solidaire de celle-ci pour la durée du bail.

3. Le cautionnement stipulait que le bailleur ne pourrait accorder de délais de paiement au preneur sans le consentement exprès et par écrit de la caution, sous peine de perdre tous recours et actions contre cette dernière.

4. Le 11 septembre 2018, un huissier de justice a dressé à l'encontre de M. [V] un procès-verbal de saisie-attribution au titre de loyers impayés par la société Le Local.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. La SCI fait grief à l'arrêt de la dire déchue du droit de poursuivre la caution et, en conséquence, d'ordonner la mainlevée de la saisie-attribution en litige, alors :

« 1° / que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ; qu'aux termes du contrat de bail commercial du 11 avril 2017 conclu entre la société Wesmyr Canonniers, bailleresse, et la société Le Local, preneuse, « il est expressément convenu que le bailleur ne pourra accorder aucun délai de paiement au preneur sans le consentement exprès et par écrit de la caution, sous peine de perdre tous recours et actions contre cette dernière » ; que pour énoncer que la bailleresse avait accordé à la preneuse des délais de paiement, la cour d'appel s'est bornée à affirmer qu'en avril 2017, le gérant de la preneuse avait sollicité la bailleresse pour patienter pour le règlement des loyers, que celle-ci n'avait procédé à deux tentatives d'encaissement du loyer du mois d'avril 2018 qu'en juin 2018, alors qu'au vu du décompte du procès-verbal de saisie-attribution le loyer dû pour mars 2018 n'avait pas été acquitté, qu'il demeurait un solde débiteur antérieur et que la bailleresse n'avait mis en demeure la locataire de payer l'arriéré qu'à la fin du mois de juillet 2018 ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle le devait dès lors qu'il lui appartenait d'examiner la pertinence des motifs par lesquels le premier juge s'était déterminé, si la notion de délai de paiement au sens de la clause litigieuse ne devait pas s'entendre de délais réels pour apurer la dette au sens de l'article 1244-1 devenu 343-5 du code civil, et non pas de la simple acceptation d'un retard ou d'un décalage de paiement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1103 du code civil, ensemble l'article 472, alinéa 2, du code de procédure civile.

2°/ que si l'octroi de délais de paiement au débiteur peut être tacite, il doit résulter d'actes manifestant sans équivoque la volonté du créancier de proroger les échéances prévues par le contrat ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a énoncé que la bailleresse avait accordé à la preneuse des délais de paiement par des motifs impropres à retenir l'absence d'équivoque quant à la volonté de la bailleresse de proroger les échéances prévues par le contrat de bail commercial, dès lors qu'il ressortait de ses constatations qu'en l'état de ce contrat en date du 11 avril 2017, ce n'est qu'à compter du mois de mars 2018 que la preneuse n'avait plus acquitté la totalité du loyer, que la bailleresse avait procédé à deux tentatives d'encaissement du loyer d'avril 2018 en juin 2018 et qu'elle avait mis la preneuse en demeure de payer l'arriéré à la fin du mois de juillet 2018, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 1103 du code civil. »

Réponse de la Cour

6. La cour d'appel a relevé que, dans des observations écrites adressées au juge de l'exécution, la SCI avait elle-même admis que les loyers des mois de novembre et décembre 2017 n'avaient été payés qu'au début de l'année 2018, que s'en était suivie une irrégularité permanente dans le règlement des loyers jusqu'à un chèque impayé correspondant au loyer d'avril 2018 et que la preneuse lui avait alors demandé de patienter pour le règlement des loyers.

7. Elle a ajouté que la SCI n'avait procédé à des tentatives d'encaissement du loyer d'avril 2018 qu'au mois de juin 2018, alors que le loyer de mars 2018 n'avait pas été payé et que demeurait un solde débiteur antérieur, que la preneuse n'avait été mise en demeure de payer l'arriéré que fin juillet 2018 et que la caution n'avait été informée qu'à ce moment des délais de paiement antérieurement accordés auxquels elle n'avait pu consentir.

8. Ayant souverainement retenu que la SCI avait ainsi accordé des délais de paiement à la preneuse, la cour d'appel, qui n'avait pas à examiner le moyen inopérant tiré de l'application de l'article 1343-5 du code civil, relatif au seul pouvoir du juge de reporter ou échelonner le paiement des sommes dues, a légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société civile immobilière Wesmyr canonniers aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société civile immobilière Wesmyr canonniers ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier juin deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour la société Wesmyr canonniers

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que la société Wesmyr Canonniers est déchue du droit de poursuivre la caution et, en conséquence, d'AVOIR ordonné la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 11 septembre 2018 au préjudice de M. [M] [V] ;

AUX MOTIFS QUE la saisie attribution querellée a été pratiquée pour obtenir le règlement au principal, des loyers impayés suivants : - solde novembre 2017 : 360 - solde décembre 2017 : 314 - solde janvier 2018 : 314 - trop perçu février 2018 : 84 (en crédit) - loyer mars 2018 : 2 304 - loyer avril 2018 : 2 304 - loyer mai 2018 : 2 532 - loyer juin 2018 : 2 532 - loyer juillet 2018 : 2 532 - loyer août 2018 : 2 532 - loyer septembre 2018 : 2 532 Que l'acte notarié de bail commercial prévoit au chapitre du cautionnement solidaire que «le bailleur ne pourra accorder aucun délai de paiement au preneur sans le consentement exprès et écrit de la caution, sous peine de perdre tous recours et actions contre cette dernière» ; que dans les observations écrites du 4 mars 2019 qu'elle a adressées au juge de l'exécution et que l'appelant verse au dossier, la SCI Wesmyr Canonniers indique elle même que les loyers des mois de novembre et décembre 2017 n'ont pas été payés et n'ont pu l'être qu'au début de l'année 2018, ajoutant : «s'en est suivi une irrégularité permanente dans le règlement des loyers allant même jusqu'à un chèque impayé de 2 388 euros correspondant au loyer d'avril 2018. A ce moment-là M. [E] nous a sollicités pour patienter pour le règlement des loyers [...] de promesse en promesse, nous avons appris le dépôt de bilan [...] en octobre 2018» ; qu'il en ressort que la société locataire a bénéficié de la part de la bailleresse de délais de paiement, la SCI Wesmyr Canonniers n'ayant procédé à deux tentatives d'encaissement du loyer du mois d'avril 2018 qu'au mois de juin 2018, alors qu'au vu du décompte du procès-verbal de saisie-attribution, le loyer dû pour le mois de mars 2018 n'avait pas été acquitté et qu'il demeurait un solde débiteur antérieur, outre que la SCI n'a mis en demeure la locataire de payer l'arriéré qu'à la fin du mois de juillet 2018, avec copie à M. [V], lequel n'avait donc pas consenti aux délais accordés antérieurement dont il n'avait pas été informé, de sorte qu'en application de la clause conventionnelle sanctionnant le défaut de consentement de la caution, la SCI Wesmyr Canonniers a perdu tout recours contre M. [V] ; qu'ainsi, par réformation du jugement déféré, la mainlevée de la saisie-attribution sera ordonnée ;

1) ALORS QUE les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ; qu'aux termes du contrat de bail commercial du 11 avril 2017 conclu entre la société Wesmyr Canonniers, bailleresse, et la société Le Local, preneuse, «il est expressément convenu que le bailleur ne pourra accorder aucun délai de paiement au preneur sans le consentement exprès et par écrit de la caution, sous peine de perdre tous recours et actions contre cette dernière» ; que pour énoncer que la bailleresse avait accordé à la preneuse des délais de paiement, la cour d'appel s'est bornée à affirmer qu'en avril 2017, le gérant de la preneuse avait sollicité la bailleresse pour patienter pour le règlement des loyers, que celle-ci n'avait procédé à deux tentatives d'encaissement du loyer du mois d'avril 2018 qu'en juin 2018, alors qu'au vu du décompte du procès-verbal de saisie-attribution le loyer dû pour mars 2018 n'avait pas été acquitté, qu'il demeurait un solde débiteur antérieur et que la bailleresse n'avait mis en demeure la locataire de payer l'arriéré qu'à la fin du mois de juillet 2018 ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle le devait dès lors qu'il lui appartenait d'examiner la pertinence des motifs par lesquels le premier juge s'était déterminé, si la notion de délai de paiement au sens de la clause litigieuse ne devait pas s'entendre de délais réels pour apurer la dette au sens de l'article 1244-1 devenu 1343-5 du code civil, et non pas de la simple acceptation d'un retard ou d'un décalage de paiement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1103 du code civil, ensemble l'article 472, alinéa 2, du code de procédure civile ;

2) ALORS QUE si l'octroi de délais de paiement au débiteur peut être tacite, il doit résulter d'actes manifestant sans équivoque la volonté du créancier de proroger les échéances prévues par le contrat ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a énoncé que la bailleresse avait accordé à la preneuse des délais de paiement par des motifs impropres à retenir l'absence d'équivoque quant à la volonté de la bailleresse de proroger les échéances prévues par le contrat de bail commercial, dès lors qu'il ressortait de ses constatations qu'en l'état de ce contrat en date du 11 avril 2017, ce n'est qu'à compter du mois de mars 2018 que la preneuse n'avait plus acquitté la totalité du loyer, que la bailleresse avait procédé à deux tentatives d'encaissement du loyer d'avril 2018 en juin 2018 et qu'elle avait mis la preneuse en demeure de payer l'arriéré à la fin du mois de juillet 2018, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 1103 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 21-16390
Date de la décision : 01/06/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 11 mars 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 01 jui. 2022, pourvoi n°21-16390


Composition du Tribunal
Président : Mme Teiller (président)
Avocat(s) : SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.16390
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