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24/05/2022 | FRANCE | N°21-85722

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 24 mai 2022, 21-85722


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° K 21-85.722 F-D

N° 00603

MAS2
24 MAI 2022

REJET

Mme INGALL-MONTAGNIER conseiller le plus ancien faisant fonction de président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 24 MAI 2022

Les sociétés [1], [3] et [2] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, 11e chambre, en

date du 8 septembre 2021, qui, pour homicide involontaire, les a condamnées chacune à 10 000 euros d'amende.

Les pourvois s...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° K 21-85.722 F-D

N° 00603

MAS2
24 MAI 2022

REJET

Mme INGALL-MONTAGNIER conseiller le plus ancien faisant fonction de président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 24 MAI 2022

Les sociétés [1], [3] et [2] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, 11e chambre, en date du 8 septembre 2021, qui, pour homicide involontaire, les a condamnées chacune à 10 000 euros d'amende.

Les pourvois sont joints en raison de la connexité.

Des mémoires ont été produits.

Sur le rapport de M. Charmoillaux, conseiller référendaire, les observations de la SARL Ortscheidt, avocat de la société [3], les observations de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat des sociétés [1] et [2], et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 12 avril 2022 où étaient présents Mme Ingall-Montagnier,
conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Charmoillaux, conseiller rapporteur, M. Samuel, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. [W] [G] est décédé sur un chantier mobile de réfection d'une ligne ferroviaire, emporté, alors qu'il procédait à une réparation électrique sur le train, par un portique coulissant auto-alimenté piloté par un autre salarié qui ne l'avait pas vu.

3. Le chantier était réalisé en co-traitance entre la société [1], employeur de [W] [G], et la société [3]. Ces sociétés louaient le portique incriminé à la société [2], société en nom collectif dont elles étaient les associées.

4. Les sociétés [1], [3] et [2] ont été poursuivies du chef d'homicide involontaire devant le tribunal correctionnel, qui les a toutes trois relaxées et a prononcé sur les intérêts civils.

5. Le ministère public a relevé appel de la décision à l'encontre des trois prévenues.

Examen de la recevabilité du pourvoi formé le 14 septembre 2021 par la société [1] « agissant en qualité de gérant de la SNC [2], pris en la personne de son représentant légal »

6. Les sociétés [1] et [2] ayant épuisé, par l'exercice qu'elles en avaient fait le 10 septembre 2021, le droit à se pourvoir contre l'arrêt attaqué, la première citée était irrecevable à se pourvoir à nouveau le 14 septembre 2021 contre la même décision, « en qualité de gérant de la SNC [2], pris en la personne de son représentant légal ».

7. Le pourvoi formé, le 14 septembre 2021, par la société [1] agissant ès qualités est par conséquent irrecevable.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche, et le second moyen proposés pour la société [3], les premier, deuxième et quatrième moyens proposés pour la société [2], et les premier, troisième et quatrième moyens proposés pour la société [1]

8. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le premier moyen, pris en sa première branche, proposé pour la société [3], le troisième moyen proposé pour la société [2] et le deuxième moyen proposé pour la société [1]

Enoncé des moyens

9. Le premier moyen, proposé pour la société [3], en sa première branche, critique l'arrêt en ce qu'il l'a déclarée coupable d'homicide involontaire par personne morale dans le cadre du travail et, en répression, l'a condamnée au paiement d'une amende de 10 000 euros, alors :

« 1°/ que l'engagement de la responsabilité pénale d'une personne morale du chef d'homicide involontaire dans le cadre du travail à raison d'un manquement commis par l'un ou ses organes ou son représentant suppose, au préalable, l'identification de la personne physique, distincte de ce représentant, dont le manquement a indirectement contribué au dommage, même si cette dernière n'a pas été poursuivie ; qu'en jugeant qu'« il apparaît que les faits d'homicide involontaire ont été commis pour le compte et dans l'intérêt de la personne morale de la société [3] par son représentant en l'espèce M. [D], directeur général, en ce qu'il a permis à la société d'utiliser un équipement de travail qui ne préservait pas la sécurité des travailleurs en ne disposant pas de mesures compensatoires suffisantes pour pallier cette visibilité insuffisante » du poste conducteur du portique mobile, sans identifier la personne physique, distincte directeur général de la société [3], qui était tenue sur le chantier de mettre en oeuvre des mesures compensatoires suffisantes pour pallier l'insuffisance de visibilité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 121-2 et 221-6 du code pénal. »

10. Le troisième moyen, proposé pour la société [2], critique l'arrêt en ce qu'il l'a déclarée coupable du chef d'homicide involontaire par personne morale dans le cadre du travail et l'a condamnée pénalement, alors « que l'engagement de la responsabilité pénale d'une personne morale du chef d'homicide involontaire dans le cadre du travail à raison d'un manquement commis par l'un ou ses organes ou son représentant
suppose, au préalable, l'identification de la personne physique, distincte de ce représentant, dont le manquement a indirectement contribué au dommage, même si cette dernière n'a pas été poursuivie ; qu'en jugeant qu'« il apparaît que les faits d'homicide involontaire ont été commis pour le compte et dans l'intérêt de la personne morale de la société [2] par son représentant en l'espèce M. [Y], président du conseil d'administration de la société [1] (?), en ce qu'il a permis à la société d'utiliser un équipement de travail qui ne préservait pas la sécurité des travailleurs en ne disposant pas de mesures compensatoires suffisantes pour pallier la visibilité insuffisante » du poste conducteur du portique mobile, sans identifier la personne physique, distincte du président du conseil d'administration, qui était tenue sur le chantier de mettre en oeuvre des mesures compensatoires suffisantes pour pallier l'insuffisance de visibilité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 121-2 et 221-6 du code pénal. »

11. Le deuxième moyen, proposé pour la société [1], critique l'arrêt en ce qu'il l'a déclarée coupable d'homicide involontaire par personne morale dans le cadre du travail et l'a condamnée pénalement, alors « que l'engagement de la responsabilité pénale d'une personne morale du chef d'homicide involontaire dans le cadre du travail à raison d'un manquement commis par l'un ou ses organes ou son représentant suppose, au préalable, l'identification de la personne physique, distincte de ce représentant, dont le manquement a indirectement contribué au dommage, même si cette dernière n'a pas été poursuivie ; qu'en jugeant qu'« il apparaît que les faits d'homicide involontaire ont été commis pour le compte et dans l'intérêt de la personne morale de la société [1] par son représentant en l'espèce M. [Y], président du conseil d'administration, en ce qu'il a permis à la société d'utiliser un équipement de travail qui ne préservait pas la sécurité des travailleurs en ne disposant pas de mesures compensatoires suffisantes pour pallier la visibilité insuffisante » du poste conducteur du portique mobile, sans identifier la personne physique, distincte du président du conseil d'administration, qui était tenue sur le chantier de mettre en oeuvre des mesures compensatoires suffisantes pour pallier l'insuffisance de visibilité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 121-2 et 221-6 du code pénal. »

Réponse de la Cour

12. Les moyens sont réunis.

13. Pour retenir la responsabilité pénale des personnes morales prévenues, l'arrêt énonce que la non-conformité du portique à l'origine de l'accident est imputable tant à la société [2], qui l'a loué et mis à disposition, qu'aux sociétés [1] et [3], qui l'ont mis en service dans le cadre de l'exécution du chantier.

14. Les juges relèvent que les faits d'homicide involontaire ont été commis, pour le compte de la société [1] par le président de son conseil d'administration, M. [L] [Y], pour le compte de la société [3] par son directeur général, M. [O] [D], et pour le compte de la société [2] par ces deux dirigeants ensemble, en ce qu'ils ont permis à leurs sociétés d'utiliser un équipement ne préservant pas la sécurité des travailleurs.

15. En se déterminant ainsi, par des motifs qui identifient suffisamment les représentants des personnes morales pour le compte desquelles l'infraction a été commise, et en l'absence de toute allégation de délégation de pouvoir, la cour d'appel a justifié sa décision.

16. Dès lors, les moyens doivent être écartés.

17. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

Sur le pourvoi formé par la société [1] « en qualité de gérant de la société [2], pris en la personne de son représentant légal »
le 14 septembre 2021 :

Le DÉCLARE IRRECEVABLE ;

Sur les pourvois formés par les sociétés [1], [2] et [3]
le 10 septembre 2021 :

Les REJETTE ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-quatre mai deux mille vingt-deux.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 21-85722
Date de la décision : 24/05/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 08 septembre 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 24 mai. 2022, pourvoi n°21-85722


Composition du Tribunal
Président : Mme Ingall-Montagnier (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Le Prado - Gilbert, SARL Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.85722
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