LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° V 21-84.765 et S 15-85.405 F-D
N° 00585
ODVS
18 MAI 2022
REJET
Henri de Larosière de Champfeu, conseiller le plus ancien faisant fonction de président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 18 MAI 2022
M. [K] [X] et M. [R] [M] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Amiens, en date du 14 août 2015, qui, dans l'information suivie contre le premier des chefs de violences aggravées, harcèlement moral aggravé, dégradations, faux public, complicité et usage de faux public aggravé, et contre le second du chef de faux public aggravé, a prononcé sur leurs demandes d'annulation de pièces de la procédure (pourvoi n° S 15-85.405).
M. [K] [X] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens, chambre correctionnelle, en date du 30 juin 2021, qui, pour violences aggravées, l'a condamné à trois mois d'emprisonnement avec sursis, a ordonné une mesure de confiscation, et a prononcé sur les intérêts civils (pourvoi n° V 21-84.765).
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires ont été produits pour M. [X].
Sur le rapport de M. Mallard, conseiller référendaire, les observations de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de M. [K] [X], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 avril 2022 où étaient présents M. de Larosière de Champfeu, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Mallard, conseiller rapporteur, Mme Slove, conseiller de chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Le 19 décembre 2014, une information judiciaire a été ouverte, notamment contre M. [K] [X], qui a été mis en examen des chefs de violences et harcèlement, aggravés, et dégradation d'un bien appartenant à autrui.
3. La révélation, en cours d'information judiciaire, de l'existence de faits criminels connexes a entraîné le dessaisissement du juge d'instruction du tribunal judiciaire de Compiègne au profit du pôle de l'instruction de Senlis, par ordonnance du 8 janvier 2015.
4. Le 18 octobre 2019, sur réquisitoire définitif du procureur de la République de Compiègne du 20 août 2018, le juge d'instruction au tribunal judiciaire de Senlis a notamment ordonné un non-lieu partiel s'agissant de M. [X], et le renvoi de ce dernier devant le tribunal correctionnel du seul chef de violences aggravées.
5. Par jugement du 9 janvier 2020, le tribunal correctionnel de Compiègne a relaxé M. [X], et a débouté la partie civile de ses demandes.
6. Le procureur de la République et la partie civile ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Déchéance du pourvoi formé par M. [M]
7. M. [M] n'a pas déposé dans le délai légal, personnellement ou par son avocat, un mémoire exposant ses moyens de cassation. Il y a lieu, en conséquence, de le déclarer déchu de son pourvoi par application de l'article 590-1 du code de procédure pénale
Sur les pourvois formés par M. [X]
Sur le premier et le troisième moyens
8. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [X] coupable de violences sans incapacité par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire liée à la victime par un pacte civil de solidarité, alors « que aux termes des articles 80 et 175 du code de procédure pénale, lorsqu'une affaire a été ouverte devant une juridiction puis renvoyée pour instruction devant un pôle de l'instruction, le procureur de la juridiction du pôle de l'instruction reste seul compétent, jusqu'à délivrance de l'ordonnance de règlement ; qu'au cas présent, il résulte des pièces de la procédure que le juge d'instruction a transmis la procédure pour règlement au procureur du tribunal de Compiègne, et non au procureur de Senlis, pourtant seul compétent ; qu'il s'ensuit que les réquisitions ont été prises par le procureur de Compiègne, incompétent (et qui, comme tel, ne s'était pas vu adresser par l'exposant ses conclusions aux fins de non-lieu, qu'il n'a donc pas pu discuter contradictoirement) ; que l'omission de cette formalité substantielle a porté atteinte aux droits de la défense de M. [X], qui a ainsi été privé du droit de faire examiner par le procureur compétent ses observations de non-lieu et d'en discuter contradictoirement avec lui ; qu'en déclarant néanmoins M. [X] coupable, la cour d'appel a méconnu les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 80, 175, 802, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
10. Il résulte de l'article 385 du code de procédure pénale que le tribunal correctionnel n'a pas qualité pour constater les nullités des procédures qui lui sont soumises lorsqu'il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d'instruction ou la chambre de l'instruction, sauf lorsque la décision de renvoi n'a pas été portée à la connaissance des parties, ou n'a pas été rendue conformément aux dispositions de l'article 184.
11. La Cour de cassation juge que cet article concerne toutes les nullités, y compris celles sanctionnant des irrégularités substantielles ou des dispositions d'ordre public, sauf si elles affectent la compétence (Crim., 14 octobre 1991, n° 90-84.818, Bull. crim. 1991 N° 341).
12. La compétence ainsi visée doit s'entendre de celle de la juridiction de jugement, qui doit être en mesure de relever son incompétence d'office, ou peut être saisie d'une exception présentée à cette fin, et non de la compétence territoriale du procureur de la République qui a pris des réquisitions tendant au renvoi de l'affaire devant la juridiction de jugement, dont la compétence peut être contestée par les parties, quand elles reçoivent copie de ces réquisitions, en application de l'article 175 du code de procédure pénale, qui prévoit la faculté de présenter alors une requête en annulation.
13. L'arrêt attaqué infirme une décision rendue sur renvoi du juge d'instruction de Senlis ordonné sur réquisitoire définitif de procureur de la République près le tribunal judiciaire de Compiègne.
14. Ainsi, le moyen tiré de l'incompétence territoriale du procureur de la République qui a requis le renvoi devant le tribunal correctionnel, est irrecevable car présenté pour la première fois devant la Cour de cassation.
15. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
Sur le pourvoi formé par M. [R] [M] :
CONSTATE la déchéance du pourvoi ;
Sur les pourvois formés par M. [K] [X] :
Les REJETTE ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-huit mai deux mille vingt-deux.