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11/05/2022 | FRANCE | N°20-22210

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 11 mai 2022, 20-22210


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 11 mai 2022

Cassation partielle

Mme DUVAL-ARNOULD, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 370 F-B

Pourvoi n° E 20-22.210

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 11 MAI 2022

M. [E] [S],

domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° E 20-22.210 contre l'arrêt rendu le 18 septembre 2020 par la cour d'appel de Rennes (2e chambre), d...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 11 mai 2022

Cassation partielle

Mme DUVAL-ARNOULD, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 370 F-B

Pourvoi n° E 20-22.210

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 11 MAI 2022

M. [E] [S], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° E 20-22.210 contre l'arrêt rendu le 18 septembre 2020 par la cour d'appel de Rennes (2e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Bourcier, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3],

2°/ à la société Laika Caravans, dont le siège est [Adresse 2] (Italie), société de droit italien,

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations de la SCP Boullez, avocat de M. [S], de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Laika Caravans, de la SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de la société Bourcier, et l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 15 mars 2022 où étaient présents Mme Duval-Arnould, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Chevalier, conseiller rapporteur, M. Mornet, conseiller, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 18 septembre 2020), afin d'effectuer un voyage sur le continent américain avec quatre passagers, M. [S] a acquis auprès de la société Bourcier (le vendeur) un camping-car fabriqué par la société Laika Caravans. Postérieurement à la livraison du véhicule le 6 mai 2011, il a fait installer par le vendeur des équipements supplémentaires.

2. En novembre 2011, au cours de son voyage, il a constaté un fléchissement de l'essieu arrière et a sollicité à son retour des expertises amiable et judiciaire qui ont imputé le dommage à un excès de poids.

3. Estimant que le vendeur et la société Laika Caravans avaient manqué à leur devoir d'information et de conseil, il les a assignés en résolution de la vente et en réparation de ses préjudices moral et matériel.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Exposé du moyen

4. M. [S] fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors « que l'obligation de conseil à laquelle est tenu le vendeur lui impose de se renseigner sur les besoins de l'acheteur et de l'informer lors de l'achat, de l'adéquation du matériel proposé à l'utilisation qui en est prévue ; qu'il s'ensuit que le vendeur devait s'enquérir des besoins de M. [S] qui souhaitait acquérir un camping-car pour réaliser un long voyage d'un an au travers du continent américain avec une famille de cinq personnes pour le conseiller sur l'adéquation des options et des accessoires par rapport à la charge utile restante ; qu'en se satisfaisant de la seule mise en garde donnée postérieurement à la conclusion de la vente par une facture de livraison du 6 mai 2011 qui comporte une mention « attention au poids » et qui précise que « chaque accessoire supplémentaire diminue la charge » ; qu'en imposant à M. [S] lui-même de surveiller la charge de son véhicule pour demeurer dans les limites du poids définis par son permis de voiture, après avoir constaté que le vendeur avait attiré son attention sur la charge du véhicule et, plus particulièrement, sur l'incidence de l'installation de nouveaux équipements en précisant sur la facture de livraison que chaque accessoire diminue la charge utile, quand il appartenait au vendeur de s'informer des besoins de M. [S] et, en particulier, de la charge utile qui lui était nécessaire pour mener à bien son projet de voyage, compte tenu des options et des accessoires qu'il souhaitait installer, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable en l'espèce. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1147 du code civil :

5. Il résulte de ce texte que le vendeur professionnel est tenu, avant la vente, d'une obligation de conseil qui lui impose de se renseigner sur les besoins de l'acheteur afin d'être en mesure de l'informer sur l'adéquation entre le bien qui est proposé et l'usage qui en est prévu.

6. Pour rejeter les demandes de M. [S], l'arrêt retient que le véhicule livré conformément à la commande initiale était apte à l'usage prévu par M.[S], que la surcharge de poids est la conséquence de l'installation à sa demande d'équipements optionnels postérieurement à la livraison, que son attention a été attirée de manière formelle sur la facture de livraison du 6 mai 2011 qui comporte une mention « attention au poids » et qui précise que « chaque accessoire supplémentaire diminue la charge utile », que, même si cette mention ne précisait pas le poids des équipements déjà installés, elle était suffisante pour attirer l'attention du client sur la charge du véhicule et particulièrement sur l'incidence de l'installation de nouveaux équipements sur le poids du véhicule, M. [S] devant, en sa qualité de conducteur, surveiller la charge de son véhicule pour demeurer dans les limites de poids définies par son permis de conduire.

7. En statuant ainsi, sans constater que le vendeur s'était informé des besoins de M. [S] et, en particulier, de la charge utile qui lui était nécessaire pour mener à bien son projet de voyage, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en ce qu'il rejette les demandes de M. [S] contre la société Bourcier, l'arrêt rendu le 18 septembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

Remet sur ce point l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes autrement composée ;

Condamne la société Bourcier aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par la société Bourcier et la société Laika Caravans, et condamne la société Bourcier à payer à M. [S] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour M. [S].

M. [S] fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR écarté les demandes qu'il avait formées ;

1. ALORS QUE tout vendeur d'un matériel doit, afin que la vente soit conclue en connaissance de cause, s'informer des besoins de son acheteur et informer ensuite celui-ci des contraintes techniques de la chose vendue et de son aptitude à atteindre le but recherché ; qu'il s'ensuit que le vendeur doit informer l'acheteur préalablement à la conclusion de la vente ; qu'en se satisfaisant de la seule mise en garde donnée postérieurement à la conclusion de la vente par une facture de livraison du 6 mai 2011 qui comporte une mention « attention au poids » et qui précise que « chaque accessoire supplémentaire diminue la charge », la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable en l'espèce, ensemble les articles 1602 et 1604 du code civil ;

2. ALORS QUE l'obligation de conseil à laquelle est tenu le vendeur lui impose de se renseigner sur les besoins de l'acheteur et de l'informer lors de l'achat, de l'adéquation du matériel proposé à l'utilisation qui en est prévue ; qu'il s'ensuit que la société BOURSIER devait s'enquérir des besoins de M. [S] qui souhaitait acquérir un camping-car pour réaliser un long voyage d'un an au travers du continent américain avec une famille de cinq personnes pour le conseiller sur l'adéquation des options et des accessoires par rapport à la charge utile restante ; qu'en se satisfaisant de la seule mise en garde donnée postérieurement à la conclusion de la vente par une facture de livraison du 6 mai 2011 qui comporte une mention « attention au poids » et qui précise que « chaque accessoire supplémentaire diminue la charge » ; qu'en imposant à M. [S] lui-même de surveiller la charge de son véhicule pour demeurer dans les limites du poids définis par son permis de voiture, après avoir constaté que le vendeur avait attiré son attention sur la charge du véhicule et, plus particulièrement, sur l'incidence de l'installation de nouveaux équipements en précisant sur la facture de livraison que chaque accessoire diminue la charge utile, quand il appartenait au vendeur de s'informer des besoins de M. [S] et, en particulier, de la charge utile qui lui était nécessaire pour mener à bien son projet de voyage, compte tenu des options et des accessoires qu'il souhaitait installer, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable en l'espèce.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 20-22210
Date de la décision : 11/05/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

VENTE - Vendeur - Obligations - Obligation de conseil - Etude des besoins de l'acheteur

RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Obligation de conseil - Domaine d'application - Etendue - Détermination - Portée

Il résulte de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, que le vendeur professionnel est tenu, avant la vente, d'une obligation de conseil qui lui impose de se renseigner sur les besoins de l'acheteur afin d'être en mesure de l'informer sur l'adéquation entre le bien qui est proposé et l'usage qui en est prévu


Références :

Article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 18 septembre 2020

1re Civ., 28 octobre 2010, pourvoi n° 09-16913, Bull. 2010, I, n° 215 (cassation), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 11 mai. 2022, pourvoi n°20-22210, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Duval-Arnould (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boullez, SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier

Origine de la décision
Date de l'import : 24/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.22210
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