LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 13 avril 2022
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 321 FS-B
Pourvoi n° S 21-15.923
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 AVRIL 2022
M. [V] [N], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° S 21-15.923 contre l'arrêt rendu le 24 février 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 2), dans le litige l'opposant au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] , dont le siège est [Adresse 1], représenté par son administrateur provisoire M. [F] [G], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Jariel, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. [N], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1], et l'avis de M. Sturlèse, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 mars 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Jariel, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, Mme Andrich, MM. Jessel, David, Jobert, Mme Grandjean, conseillers, Mmes Schmitt, Aldigé, conseillers référendaires, M. Sturlèse, avocat général, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 février 2021), l'immeuble du [Adresse 1], soumis au statut de la copropriété, est constitué des bâtiments A et B, auxquels l'état descriptif de division inclus dans le règlement de copropriété affecte des parties communes spéciales propres à chacun d'entre eux.
2. Par ordonnance du 16 septembre 2009, prise au visa de l'article 29-1 de la loi n° 66-557 du 10 juillet 1965, un administrateur provisoire a été désigné à la copropriété, dont la mission a été renouvelée.
3. Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] a assigné M. [N], propriétaire de tous les lots du bâtiment B, en paiement d'un arriéré de charges.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses première, troisième et quatrième branches, ci-après annexé
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
5. M. [N] fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement d'un arriéré de charges de copropriété, alors « que l'approbation des comptes d'un exercice et la fixation du budget provisionnel de l'exercice suivant par l'administrateur provisoire ayant reçu les pouvoirs de l'assemblée générale ne dispensent pas le syndicat des copropriétaires de son obligation de prouver que le copropriétaire qu'il assigne en paiement d'un arriéré de charges est débiteur des charges qui lui sont imputées et ne privent pas le copropriétaire assigné de son droit de contester être redevable de tout ou partie des charges réclamées ; qu'en retenant, pour considérer que M. [N] n'était pas fondé à soutenir qu'aucune dépense ne pouvait être imputée au bâtiment B dont il est seul propriétaire et qui n'était plus composé que de parties privatives, que le budget décidé par Me [G], administrateur provisoire, se composait de charges communes générales, de charges du bâtiment A et de charges du bâtiment B et que les copropriétaires ne peuvent remettre en cause les décisions prises par l'administrateur provisoire qui a reçu tous les pouvoirs normalement dévolus à l'assemblée générale à l'exception de ceux que la loi interdit au juge de lui donner, la cour d'appel a violé les articles 10, 14-1 et 29-1 de la loi du 10 juillet 1965 dans leurs rédactions successivement issues des lois des 13 décembre 2000 et 24 mars 2014 ensemble l'article 1315 devenu 1353 du code civil. »
Réponse de la Cour
6. Sans préjudice de la possibilité pour les copropriétaires d'en référer au président du tribunal judiciaire pour mettre fin ou modifier la mission de l'administrateur provisoire, la cour d'appel a retenu, à bon droit, qu'ils ne peuvent remettre en cause des décisions prises par l'administrateur provisoire qui a reçu tous les pouvoirs normalement dévolus à l'assemblée générale, à l'exception de ceux que la loi interdit au juge de lui donner.
7. Ayant relevé que les décisions de l'administrateur provisoire approuvant les comptes et les budgets prévisionnels étaient définitives et exécutoires de plein droit, elle en a exactement déduit que M. [N] n'était pas fondé à les contester en prétendant qu'aucune dépense ne pourrait être imputée au bâtiment B, au motif qu'il en serait le seul propriétaire.
8. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [N] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [N] et le condamne à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize avril deux mille vingt-deux.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat aux Conseils, pour M. [N]
M. [V] [N] FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué de l'avoir condamné à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] les sommes de 43 130,96 euros au titre des charges de copropriété arrêtées au 20 septembre 2017, avec intérêts au taux légal à compter du 8 novembre 2016 sur la somme de 39 644,75 euros, et de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du non-paiement des charges à bonne date ;
1°/ ALORS QUE, dans ses conclusions d'appel (p. 4 à 7), M. [N] faisait valoir qu'étant devenu seul propriétaire des lots composant le bâtiment B, les parties communes de ce bâtiment étaient devenues privatives en vertu du règlement de copropriété et qu'il ne pouvait plus y avoir de charges communes particulières à ce bâtiment ; qu'en affirmant néanmoins que « M. [N] ne conteste pas? les quotes-parts de parties communes spéciales attachées à chacun de ses lots et reprises dans les appels de fonds pour justifier la répartition des charges », la cour d'appel a dénaturé ses conclusions en violation de l'interdiction faite au juge de dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;
2°/ ALORS QUE l'approbation des comptes d'un exercice et la fixation du budget provisionnel de l'exercice suivant par l'administrateur provisoire ayant reçu les pouvoirs de l'assemblée générale ne dispensent pas le syndicat des copropriétaires de son obligation de prouver que le copropriétaire qu'il assigne en paiement d'un arriéré de charges est débiteur des charges qui lui sont imputées et ne privent pas le copropriétaire assigné de son droit de contester être redevable de tout ou partie des charges réclamées ; qu'en retenant, pour considérer que M. [N] n'était pas fondé à soutenir qu'aucune dépense ne pouvait être imputée au bâtiment B dont il est seul propriétaire et qui n'était plus composé que de parties privatives, que le budget décidé par Me [G], administrateur provisoire, se composait de charges communes générales, de charges du bâtiment A et de charges du bâtiment B et que les copropriétaires ne peuvent remettre en cause les décisions prises par l'administrateur provisoire qui a reçu tous les pouvoirs normalement dévolus à l'assemblée générale à l'exception de ceux que la loi interdit au juge de lui donner, la cour d'appel a violé les articles 10, 14-1 et 29-1 de la loi du 10 juillet 1965 dans leurs rédactions successivement issues des lois des 13 décembre 2000 et 24 mars 2014 ensemble l'article 1315 devenu 1353 du code civil ;
3°/ ALORS QU'en tout état de cause, M. [N] soutenait (p. 6) que le syndicat des copropriétaires se contentait, au sujet des charges particulières au bâtiment B, d'invoquer des appels de fonds sans justifier de l'existence de dépenses réellement engagées pour ce bâtiment ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ ALORS QUE M. [N] faisait valoir (p. 7 et suiv.) que, sous couvert de charges communes générales au titre des lots dont il est propriétaire dans le bâtiment B, le syndicat des copropriétaires lui réclamait des charges relevant, en vertu du règlement de copropriété et de l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965, des charges particulières au bâtiment A et qu'en toute hypothèse, il ne produisait de factures justifiant des dépenses engagées ; qu'en se bornant à retenir que les frais et dépens occasionnés par la procédure ayant opposé la copropriété à la SCI Zeurbast avaient été à juste titre inclus dans les charges communes générales sans répondre aux conclusions de M. [N] en ce qu'elles portaient sur des charges autres que les dépens et frais de procédure (travaux sur le bâtiment A relatifs notamment à une colonne et à des planchers ; étaiement de l'appartement du 3ème étage ; appel provisionnel sur travaux d'entretien), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.