LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CA3
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 13 avril 2022
Rejet
Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 468 F-D
Pourvoi n° D 20-22.347
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 13 AVRIL 2022
La société [K], ci-devant Centre Nextdoor, [Adresse 2], société par actions simplifiée, dont le siège est actuellement [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 20-22.347 contre l'arrêt rendu le 30 septembre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 4), dans le litige l'opposant à Mme [X] [O] [B], domiciliée [Adresse 3], défenderesse à la cassation.
Madame [B] a formé un pourvoi incident ainsi qu'un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
La demanderesse au pourvoi incident éventuel invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Capitaine, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société [K], de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [O] [B], après débats en l'audience publique du 1er mars 2022 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Capitaine, conseiller rapporteur, M. Pion, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 septembre 2020), estimant avoir été liée à la société [K] (la société) par un contrat de travail, rompu en raison de son état de grossesse, Mme [O] [B] a saisi la juridiction prud'homale.
Examen des moyens
Sur les premier, deuxième et troisième moyens du pourvoi principal, ci-après annexés
2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen du pourvoi incident
Enoncé du moyen
3. La salariée fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure, alors « que lorsque le licenciement irrégulier est, au surplus, déclaré nul, l'irrégularité de procédure doit être réparée par le juge, soit par une indemnité distincte, soit par une somme comprise dans l'évaluation globale du préjudice résultant de la nullité du licenciement ; qu'en déboutant la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure, motif pris que l'indemnité prévue par l'article L. 1235-2 du code du travail n'est due que ''lorsque le licenciement intervient pour une cause réelle et sérieuse ce qui n'est pas le cas en l'espèce s'agissant d'un licenciement nul'', la cour d'appel a violé le principe de réparation intégrale du préjudice. »
Réponse de la Cour
4. La salariée s'étant bornée à solliciter une indemnité d'un mois de salaire sur le fondement de l'article L. 1235-2 du code du travail, ne peut faire grief à l'arrêt d'avoir constaté que ce texte n'était pas applicable.
5. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il n'y ait lieu de statuer sur le pourvoi incident éventuel, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Laisse à chaque partie la charge des dépens par elle exposés ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize avril deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société [K], demanderesse au pourvoi principal
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'acte du 10 juin 2016 constitue une promesse unilatérale d'embauche ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, la promesse unilatérale de contrat de travail est le contrat par lequel une partie, le promettant, accorde à l'autre, le bénéficiaire, le droit d'opter pour la conclusion d'un contrat de travail, dont l'emploi, la rémunération et la date d'entrée en fonction sont déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire. La révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n'empêche pas la formation du contrat promis ; en l'espèce, le document adressé le 10 juin 2016 à Mme [O] [B] fait expressément d'état de l'intitulé du poste et de la qualification occupée, du montant de la rémunération fixe et des modalités de calcul de la part variable ainsi que de la date d'entrée en fonction ; si l'employeur soutient que des pourparlers étaient encore en cours sur la clause de non-concurrence, il ne le démontre aucunement alors qu'il résulte au contraire sans ambigüité des échanges de mails du 9 juin 2016 comme du document 10 juin 2016 susvisé que les parties s'étaient finalement entendues sur le libellé exact de celle-ci ; la société [K] ne démontre pas davantage que la révocation de cette promesse serait intervenue avant le terme de la période pour opter dans la mesure où, s'il n'est pas contesté que Mme [O] [B] a bien annulé le rendez-vous de signature initialement fixé au 10 juin 2016, rien ne permet d'affirmer que cette date constituait le terme susmentionné et ce d'autant que, alors que la date d'entrée en fonction était prévue le 4 juillet 2016, sont produits des échanges de courriels du 29 juin précédent qui démontrent que son arrivée prochaine au sein des effectifs de la société était considérée comme acquise, le dernier message d'un collègue se terminant par 'à la semaine prochaine' ; enfin, l'employeur, sur qui pèse la charge de la preuve sur ce point, ne démontre pas que la salariée aurait obtenu frauduleusement la promesse litigieuse alors que celui-ci se contente d'affirmer que Mme [O] [B] lui aurait dissimulé l'existence d'une de ses deux entreprises de conseil à l'époque où elle négociait son contrat et que celle-ci rétorque qu'elle a simplement créé un statut d'auto-entrepreneur pour réaliser des missions de conseil parallèlement à la constitution de sa société 'Avicienne Health Consulting' ; le jugement sera donc infirmé en ce qu'il qualifie l'acte du 10 juin 2016 de promesse d'embauche celui-ci s'analysant, plus précisément, en promesse unilatérale d'embauche valant contrat de travail ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE vu les articles L. 1221-1, L. 1221-6 du code du travail, l'article 9 du CPC ainsi que les pièces et conclusions produites à l'audience ; Mme [O] [B] soutient que suite à un entretien du 23 mai 2016, la SAS [K] lui proposait de l'embaucher à compter du 27 juin 2016 (date reportée par suite au 4 juillet 2016), qui lui était demandé le 1er juin 2016 la transmission de son curriculum vitae prou répondre à un appel d'offre et qu'il lui était adressé enfin le 9 juin son contrat de travail qu'elle retournait signé dès le 10 juin 2016 ; elle en déduit l'existence d'un contrat de travail ; dans ses conclusions, la SAS [K] prétend pour sa part que le 9 juin les parties négociaient ensemble sur l'étendue de la clause de non-concurrence, que le contrat n'était qu'au stade de projet ; Me [O] ayant décliné le rendez-vous de signature prévu par M. [K] le 10 juin et que la SAS [K] ne possède pas d'exemplaire signé du contrat de travail de Me [O] [B] ; attendu qu'au terme des débats et à l'examen des pièces il ne peut être démontré la conclusion effective du contrat de travail par les deux parties, qu'en revanche, la réduction et l'envoi par la SAS [K] d'un contrat de travail en bonne et due fore, très précis sur l'emploi, la qualification, la date d'effet la durée du travail, les clauses d'activité exclusive, la rémunération, le secret professionnel la clause de non-concurrence permet d'en déduire que la phase de négociation était terminée et que la production de ce contrat – à défaut de signature par les parties – représentait en tout état de cause une promesse ferme d'embauche de Mme [O] [B] à la date du 4 juillet 2016 ;
1) ALORS QUE la promesse unilatérale de contrat de travail est le contrat par lequel une partie, le promettant, accorde à l'autre, le bénéficiaire, le droit d'opter pour la conclusion d'un contrat de travail, dont l'emploi, la rémunération et la date d'entrée en fonction sont déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire ; qu'en l'espèce, pour affirmer péremptoirement que le projet de contrat adressé à Mme [O] [B] le 9 juin 2016 constituait une promesse unilatérale de contrat, la cour d'appel a retenu que « le document adressé le 10 juin 2016 à Mme [O] [B] fait expressément d'état de l'intitulé du poste et de la qualification occupée, du montant de la rémunération fixe et des modalités de calcul de la part variable ainsi que de la date d'entrée en fonction » et que « la société [K] ne démontre pas davantage que la révocation de cette promesse serait intervenue avant le terme de la période pour opter dans la mesure où, s'il n'est pas contesté que Mme [O] [B] a bien annulé le rendez-vous de signature initialement fixé au 10 juin 2016, rien ne permet d'affirmer que cette date constituait le terme susmentionné et ce d'autant que, alors que la date d'entrée en fonction était prévue le 4 juillet 2016, sont produits des échanges de courriels du 29 juin précédent qui démontrent que son arrivée prochaine au sein des effectifs de la société était considérée comme acquise, le dernier message d'un collègue se terminant par "à la semaine prochaine" » ; qu'en se déterminant ainsi, par des motifs inopérants, la cour d'appel, qui n'a pas constaté qu'une date-butoir avait été fixée à Mme [O] [B] pour lever une option, de sorte qu'elle ne pouvait affirmer que la société avait formulé une promesse unilatérale de contrat et que la rétractation de la société n'empêchait pas la conclusion du contrat de travail, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause, et l'article L. 1221-1 du code du travail ;
2) ALORS QUE le juge a l'interdiction de dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, pour considérer que la société [K] ne démontrait pas que des pourparlers étaient encore en cours sur la clause de non concurrence, la cour d'appel a retenu « qu'il résulte sans ambiguïté des échanges de mails du 9 juin 2016 comme du document du 10 juin 2016 susvisé que les parties s'étaient finalement entendues sur le libellé exact de celui-ci » ; qu'en se déterminant ainsi, tandis qu'il ressortait sans équivoque desdits échanges de mails (pièce n°3 de Mme [O] [B], production) que, par courriel du 9 juin 2016 à 18h34, Mme [O] [B] avait proposé de limiter l'obligation de non-concurrence aux « - clients et projets traités dans le cadre de mes fonctions au sein de [K] SAS ; - les clients / projets en cours de négociation ou de prospection par [K] SAS au moment de la cessation du contrat » et que M. [K] avait répondu, par courriel du 9 juin 2016 à 19h54, qu'il avait accepté cette modification et amendé le projet de contrat de travail conformément à cette demande, mais que « diminuant l'étendue de la clause », il a « juste diminué l'indemnité de moitié (pareil pour la pénalité) » et que cette dernière modification à l'initiative de la société était restée sans réponse de Mme [O] [B], de sorte qu'il était clair que les pourparlers n'avaient pas abouti à un accord entre les parties quant au montant de la contrepartie financière attachée à la clause de non-concurrence, la cour d'appel a dénaturé le sens clair et précis des échanges de mail précités et violé le principe interdisant aux juges du fond de dénaturer les éléments de la cause, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige.
3) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent modifier l'objet du litige, tel que déterminé par les prétentions respectives des parties exprimées dans leurs conclusions ; qu'en l'espèce, pour juger que le projet de contrat de travail du 10 juin 2016 devait s'analyser en promesse unilatérale d'embauche valant contrat de travail, la cour d'appel a retenu que « la société [K] ne démontre pas davantage que la révocation de cette promesse serait intervenue avant le terme de la période pour opter » ; qu'en statuant comme elle l'a fait, quand la société [K] soutenait dans ses écritures que « en tout état de cause, si par extraordinaire la cour de céans considérait que la société [K] avait formulé une promesse ou une offre de contrat, elle ne pourrait que constater que ces dernières étaient devenues caduques passé le délai fixé au 10 juin par la société [K] à Mme [O] [B] pour accepter » (conclusions de la société [K] p. 9), faisant ainsi valoir que Mme [O] [B] n'avait pas exercé son droit d'option avant la date butoir du 10 juin 2016, de sorte que l'annulation par la société [K] du contrat de travail envisagé, par courriel du 29 juin 2016, soit postérieurement à l'expiration de ce délai, ne pouvait s'analyser en une rupture de contrat de travail, la cour d'appel a donc méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile.
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Mme [O] [B] est nul et d'AVOIR condamné la société [K] à lui payer les sommes de 26.857,62 euros à titre de dommages et intérêts pour nullité du licenciement et 13.428,81 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis majorée des congés payés afférents, soit 1.342,88 euros ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE La rupture d'une promesse unilatérale de contrat de travail équivaut à un licenciement ; aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l'article 1er de la loi du 27 mai 2008, au sens de l'article L. 3221-3, en raison notamment de son sexe, de sa situation de famille ou de son état de grossesse ; en vertu de l'article L. 1134-1 du même code, lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions qui précèdent, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, au vu desquels il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; en l'espèce, Mme [O] [B] indique qu'elle a informé M. [K], directeur général de la société du même nom, de sa grossesse par téléphone le 29 juin 2016 puis que ce dernier, après l'avoir dans un premier temps félicitée et avoir indiqué qu'il l'attendait à la date convenue, lui aurait finalement annoncé le même jour, quelques heures plus tard, qu'il 'annulait son contrat de travail', annulation qu'il confirmait le 4 juillet suivant ; au soutien de ses affirmations, elle produit une capture d'écran de portable montrant qu'elle a appelé M. [K] le 29 juin à 17h28, un courriel de ce dernier du même jour à 19h20 aux termes duquel il lui propose 'd'annuler le contrat de travail', un courrier de sa main adressé à son employeur dans lequel elle confirme l'avoir précédemment informé par téléphone de sa grossesse ainsi qu'un courriel 4 juillet à 23h37 aux termes duquel ce dernier lui adresse ses 'félicitations pour sa grossesse qu'il apprend ' et lui indique ne pouvoir 'donner suite à sa proposition de contrat du fait de la situation économique de son entreprise' ; cette chronologie et ces données circonstanciées prises dans leur ensemble laissent présumer l'existence d'une discrimination en raison de la situation de grossesse de la salariée ; il incombe dès lors à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'une telle discrimination et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; or, c'est vainement que la société [K] soutient que le licenciement se justifierait par des difficultés de trésorerie alors qu'elle venait de finaliser le contrat de travail quelques jours plus tôt en parfaite connaissance de sa propre situation financière et des prétentions salariales de Mme [O] [B], qu'elle a procédé à un autre recrutement en octobre 2016 et qu'elle ne démontre aucunement les difficultés de trésorerie invoquées, les échanges avec la banque évoquant un simple besoin de trésorerie et les relevés bancaires montrant certes une diminution du solde créditeur mais pas une situation critique ; au regard de ce qui précède, l'employeur échoue à rapporter la preuve que sa décision était justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination et la simultanéité entre l'annonce de la grossesse et le licenciement doit conduire à considérer que cette mesure est en lien avec l'état de grossesse de la salariée ; enfin, si l'article R. 1225-1 du code du travail dispose que, pour bénéficier de la protection de la grossesse et de la maternité, prévue aux articles L. 1225-1 et suivants, la salariée remet contre récépissé ou envoie par lettre recommandée avec avis de réception à son employeur un certificat médical attestant son état de grossesse et la date présumée de son accouchement ou la date effective de celui-ci, il est de principe qu'avant la notification du licenciement, l'information de l'état de grossesse peut se faire par l'envoi d'un certificat médical mais cette formalité n'a pas un caractère substantiel, à charge pour la salariée de démontrer que l'employeur était informé de son état ; en l'espèce, il résulte de la chronologie rappelée ci-dessus que l'employeur était informé de l'état de grossesse de sa salariée avant le licenciement et que cet état de grossesse n'est pas contesté ; dès lors, il importe peu que Mme [O] [B] n'ait pas adressé le certificat médical susmentionné dans les délais réglementaires, cette formalité n'étant pas substantielle ; il s'ensuit que le licenciement est nul ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE Mme [O] [B] soutient que suite à l'annonce de sa grossesse par téléphone le 29 juin 2016, auprès de M. [K] et sa réponse le même jour lui proposant d'annuler le contrat de travail en raison d'une situation de trésorerie tr-s tendue et l'impossibilité de supporter un salaire supplémentaire en juillet/août, elle en conclut à une mesure discriminatoire liée à son état de grossesse entraînant la nullité de la rupture ou à tout le moins un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; la SAS [K] invoque l'absence de motif discriminatoire de la rupture du processus de négociation injustifiée par l'absence de trésorerie et porte à l'attention du conseil l'existence récente de la société (9 mois), le faible effectif (3 salariés) et la réalité d'une situation de trésorerie affichant au 30 avril 2016, 48.670 euros et seulement 9.708 euros au 30 juin qu'ainsi l'absence de recul sur son activité économique ne pouvait lui permettre de donner suite à sa proposition d'emploi de Mme [O] [B] ; attendu qu'au terme des débats et à l'examen des pièces produites par les parties, il apparaît qu'à défaut de contrat formellement conclu et en l'absence d'un début d'exécution de ce contrat, le processus de négociation était abouti dès le 10 juin 2016, qu'il constituait comme indiqué plus haut une promesse ferme d'emploi, qu'à cette date la SAS [K] ne pouvait ignorer l'état de sa trésorerie et que la concomitance de l'annonce de la grossesse de Mme [O] [B] et du retrait le même jour de l'engagement d'embauche pris par M. [K] à son égard est une mesure sans conteste discriminatoire constituant une rupture abusive de la promesse d'embauche justifiant réparation par la condamnation de la société [K] au paiement à titre de dommages et intérêts la somme de 13.500 euros en raison du préjudice subi ;
1) ALORS QUE la salariée dont la promesse unilatérale de contrat a été annulée, rétractée ou révoquée par un employeur ignorant à ce moment son état de grossesse ne peut obtenir la condamnation de l'employeur au titre du licenciement nul qu'à condition d'avoir transmis à celui-ci un certificat médical justifiant qu'elle est enceinte dans les 15 jours à compter de la notification ; qu'en l'espèce, pour condamner la société [K] au titre du licenciement nul, la cour d'appel a retenu que Mme [O] [B] « produit une capture d'écran de portable montrant qu'elle a appelé M. [K] le 29 juin à 17h28, un courriel de ce dernier du même jour à 19h20 aux termes duquel il lui propose "d'annuler le contrat de travail", un courrier de sa main adressé à son employeur dans lequel elle confirme l'avoir précédemment informé par téléphone de sa grossesse ainsi qu'un courriel 4 juillet à 23h37 aux termes duquel ce dernier lui adresse ses "félicitations pour sa grossesse qu'il apprend "et lui indique ne pouvoir "donner suite à sa proposition de contrat du fait de la situation économique de son entreprise" » et qu' « il résulte de la chronologie rappelée ci-dessus que l'employeur était informé de l'état de grossesse de sa salariée avant le licenciement et que cet état de grossesse n'est pas contesté » ; qu'en se déterminant ainsi, sans constater que Mme [O] [B] avait adressé à son employeur une quelconque pièce médicale relative à son état de grossesse dans les 15 jours suivant « l'annulation » de sa proposition d'embauche le 29 juin 2016, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1225-5 du code du travail ;
2) ALORS QUE la salariée dont la promesse unilatérale de contrat a été annulée, rétractée ou révoquée par un employeur ignorant à ce moment son état de grossesse ne peut obtenir la condamnation de l'employeur au titre du licenciement nul qu'à condition d'avoir transmis à celui-ci un certificat médical justifiant qu'elle est enceinte dans les 15 jours à compter de la notification ; que pour condamner la société [K] au titre du licenciement nul, la cour d'appel a affirmé que « si l'article R. 1225-1 du code du travail dispose que, pour bénéficier de la protection de la grossesse et de la maternité, prévue aux articles L. 1225-1 et suivants, la salariée remet contre récépissé ou envoie par lettre recommandée avec avis de réception à son employeur un certificat médical attestant son état de grossesse et la date présumée de son accouchement ou la date effective de celui-ci, il est de principe qu'avant la notification du licenciement, l'information de l'état de grossesse peut se faire par l'envoi d'un certificat médical mais cette formalité n'a pas un caractère substantiel, à charge pour la salariée de démontrer que l'employeur était informé de son état » et qu' « il importe peu que Mme [O] [B] n'ait pas adressé de certificat médical susmentionné dans les délais réglementaires, cette formalité n'étant pas substantielle » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 1225-5 du code du travail ;
3) ALORS subsidiairement QUE le juge a l'interdiction de dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, pour considérer que la société [K] « était informée de l'état de grossesse de sa salariée avant le licenciement et que cet état de grossesse n'est pas contesté », la cour d'appel a retenu que Mme [O] [B] « produit une capture d'écran de portable montrant qu'elle a appelé M. [K] le 29 juin à 17h28, un courriel de ce dernier du même jour à 19h20 aux termes duquel il lui propose "d'annuler le contrat de travail", un courrier de sa main adressé à son employeur dans lequel elle confirme l'avoir précédemment informé par téléphone de sa grossesse ainsi qu'un courriel 4 uillet à 23h37 aux termes duquel ce dernier lui adresse ses "félicitations pour sa grossesse qu'il apprend " et lui indique ne pouvoir "donner suite à sa proposition de contrat du fait de la situation économique de son entreprise" » ; qu'en se déterminant ainsi, tandis qu'il ne pouvait manifestement pas s'évincer de la seule capture d'écran affichant un appel entre Mme [O] [B] et M. [K] le 29 juin 2016 à 17h28 que ce dernier avait été informé à cette occasion de l'état de grossesse de l'intéressée (pièce adverse n° 5, production), la cour d'appel en a dénaturé le sens clair et précis et violé le principe interdisant aux juges du fond de dénaturer les éléments de la cause, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige ;
4) ALORS en toute hypothèse QUE selon l'article L. 1231-1 du code du travail, les dispositions du titre III du livre II du code du travail relatif à la rupture du contrat de travail à durée indéterminée ne sont pas applicables pendant la période d'essai ; qu'en condamnant la société [K] au titre du licenciement nul, sans rechercher si, comme elle y était invitée en toute hypothèse, le projet de contrat ne prévoyait pas une période d'essai qui n'ouvrait pas droit à l'indemnité pour nullité du licenciement, la cour d'appel a violé les articles L. 1231-1 et L. 1235-3 du code du travail ;
5) ALORS en toute hypothèse QUE s'il appartient au juge, tenu de contrôler le caractère sérieux du motif économique du licenciement, de vérifier l'adéquation entre la situation économique de l'entreprise et les mesures affectant l'emploi ou le contrat de travail envisagées par l'employeur, il ne peut se substituer à ce dernier quant aux choix qu'il effectue pour faire face à la situation économique de l'entreprise ; qu'en l'espèce, en retenant, pour condamner la société [K] au titre du licenciement nul, que « c'est vainement que la société [K] soutient que le licenciement se justifierait par des difficultés de trésorerie alors qu'elle venait de finaliser le contrat de travail quelques jours plus tôt en parfaite connaissance de sa propre situation financière et des prétentions salariales de Mme [O] [B], qu'elle a procédé à un autre recrutement en octobre 2016 et qu'elle ne démontre aucunement les difficultés de trésorerie invoquées, les échanges avec la banque évoquant un simple besoin de trésorerie et les relevés bancaires montrant certes une diminution du solde créditeur mais pas une situation critique », la cour d'appel, qui a, ce faisant, constaté que l'employeur avait été confronté à une diminution de trésorerie contemporaine à l'annulation de l'embauche de Mme [O] [B], a statué par des motifs inopérants, revenant à substituer son appréciation à celle du chef d'entreprise sur l'opportunité d'une embauche au regard de sa trésorerie à la date de la décision litigieuse, et a violé les articles L. 1232-1 du code du travail, et L. 1132-1 du code du travail dans sa version applicable au litige ;
6) et ALORS en toute hypothèse QUE lorsque le salarié présente des éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments dans leur ensemble laissent supposer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, il incombe alors à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en l'espèce, en condamnant la société [K] au titre du licenciement nul pour discrimination en raison l'état de grossesse de Mme [O] [B], au motif inopérant que « la simultanéité entre l'annonce de la grossesse et le licenciement doit conduire à considérer que cette mesure est en lien avec l'état de grossesse de la salariée », la cour d'appel, qui a postulé une lien nécessaire entre l'annonce de l'état de grossesse et le licenciement de leur seule contemporanéité, et de ce fait mécaniquement exclu toute possibilité pour l'employeur, dans une telle situation, de prouver que sa décision procède de raisons objectives étrangères à toute discrimination, notamment de difficultés de trésorerie, la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
(EN TOUT ETAT DE CAUSE)Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société [K] à payer à Mme [O] [B] la somme de 2.148, 61 euros à titre d'indemnité de non-concurrence ;
AUX MOTIFS QUE le contrat de travail communiqué le 10 juin 2016 contient une clause de non-concurrence en son article 11. L'interdiction stipulée par cette clause est limitée à une période de douze mois à compter de la cessation du contrat ; en contrepartie de celle-ci, il est prévu une indemnité spéciale forfaitaire égale à 4% de la moyenne mensuelle du salaire brut perçu par elle au cours de ses six derniers mois de présence dans la société (soit l'équivalent de 2 % de la rémunération brute annuelle) ; la renonciation par l'employeur à l'obligation de non-concurrence ne se présume pas et ne peut résulter que d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer, actes qui ne sont pas caractérisés en l'espèce, lorsque la renonciation à la clause de non-concurrence par l'employeur est inopérante, le salarié a droit à l'indemnité compensatrice, mais ce tant qu'il respecte l'interdiction de non-concurrence. Il appartient à l'employeur de rapporter la preuve du non-respect de l'obligation de non-concurrence par le salarié. Or, en l'espèce, cette preuve n'est pas rapportée ; au vu de ces éléments, Mme [O] [B] est en droit d'obtenir le paiement de la contrepartie financière fixée par son contrat de travail dont le montant correspond à 2.148,61 euros (4.476,27 x 0,04 x 12) ;
ALORS QUE le juge a l'interdiction de dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, pour considérer que la société [K] ne démontrait pas que des pourparlers étaient encore en cours sur la clause de non-concurrence et la condamner à payer à Mme [O] [B] la contrepartie financière à hauteur de 2.148,61 euros, la cour d'appel a retenu « qu'il résulte sans ambiguïté des échanges de mails du 9 juin 2016 comme du document du 10 juin 2016 susvisé que les parties s'étaient finalement entendues sur le libellé exact de celui-ci » ; qu'en se déterminant ainsi, tandis qu'il ressortait sans équivoque desdits échanges de mails (pièce n° 3 de Mme [O] [B]) que, par courriel du 9 juin 2016 à 18h34, Mme [O] [B] avait proposé de limiter l'obligation de non-concurrence aux « - clients et projets traités dans le cadre de mes fonctions au sein de [K] SAS ; - les clients / projets en cours de négociation ou de prospection par [K] SAS au moment de la cessation du contrat » et que M. [K] avait répondu, par courriel du 9 juin 2016 à 19h54, qu'il avait accepté cette modification et amendé le projet de contrat de travail conformément à cette demande, mais que « diminuant l'étendue de la clause », il a « juste diminué l'indemnité de moitié (pareil pour la pénalité) » et que cette dernière modification à l'initiative de la société était restée sans réponse de Mme [O] [B], de sorte que les pourparlers n'avaient pas abouti à un accord entre les parties quant au montant de la contrepartie financière attachée à la clause de non-concurrence, la cour d'appel en a dénaturé le sens clair et précis et violé le principe interdisant aux juges du fond de dénaturer les éléments de la cause, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige. Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [B], demanderesse au pourvoi incident éventuel
Mme [O] [B] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté sa demande de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure.
ALORS QUE si, par extraordinaire, l'arrêt était cassé en ce qu'il a dit le licenciement nul, cette cassation entraînerait, par voie de conséquence, la censure du chef de dispositif critiqué par le présent moyen, en application de l'article 624 du code de procédure civile. Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [B], demanderesse au pourvoi incident
Mme [O] [B] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté sa demande de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure.
ALORS QUE lorsque le licenciement irrégulier est, au surplus, déclaré nul, l'irrégularité de procédure doit être réparée par le juge, soit par une indemnité distincte, soit par une somme comprise dans l'évaluation globale du préjudice résultant de la nullité du licenciement ; qu'en déboutant la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure, motif pris que l'indemnité prévue par l'article L. 1235-2 du code du travail n'est due que « lorsque le licenciement intervient pour une cause réelle et sérieuse ce qui n'est pas le cas en l'espèce s'agissant d'un licenciement nul », la cour d'appel a violé le principe de réparation intégrale du préjudice.