LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC. / ELECT
CH.B
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 6 avril 2022
Cassation partielle
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 454 F-D
Pourvoi n° N 20-20.423
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 AVRIL 2022
Le groupement d'intérêt économique (GIE) Klesia ADP, dont le siège est [Adresse 3], [Localité 5], venant aux droits de l'association de moyens Klesia, a formé le pourvoi n° N 20-20.423 contre le jugement rendu le 7 septembre 2020 par le tribunal judiciaire de Lyon (contentieux des élections professionnelles - Pôle social), dans le litige l'opposant :
1°/ au syndicat solidaires CRCPM, dont le siège est [Adresse 6], [Localité 4],
2°/ à M. [F] [H], domicilié [Adresse 1], [Localité 2],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Rinuy, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat du GIE Klesia ADP, venant aux droits de l'association de moyens Klesia, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat du syndicat solidaires CRCPM et de M. [H], après débats en l'audience publique du 16 février 2022 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rinuy, conseiller rapporteur, Mme Ott, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Reprise d'instance
1. Il est donné acte au GIE Klesia ADP, venant aux droits de l'association de moyens Klesia, de sa reprise de l'instance engagée par celle-ci.
Faits et procédure
2. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Lyon, 7 septembre 2020),
l'association de moyens Klesia a saisi le tribunal d'instance, par requête reçue au greffe le 4 décembre 2019, en annulation de la désignation par le syndicat solidaires CRCPM (le syndicat) de M. [H] en qualité de délégué syndical au sein de cette association, site de Lyon, effectuée par le secrétaire du syndicat par courrier du 21 novembre 2019.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. L'association de moyens Klesia, aux droits de laquelle vient le GIE Klesia ADP, fait grief au jugement de dire que le syndicat justifie de sa transparence financière, de dire que la désignation de M. [H] a été réalisée par une personne dûment habilitée et de surseoir à statuer dans l'attente d'une décision judiciaire définitive sur la validité ou l'opposabilité de l'accord collectif du 5 juillet 2019, alors « que les comptes annuels d'un syndicat dont les ressources sont inférieures à 230 000 euros et supérieures à 2 000 euros doivent être établis sous la forme d'un bilan, d'un compte de résultat et d'une annexe simplifiée ; que si les documents comptables dont la loi impose la confection et la publication ne constituent que des éléments de preuve de la transparence financière, leur défaut doit être suppléé par d'autres documents produits par le syndicat et que le juge doit examiner ; qu'en l'espèce, pour justifier du respect de la transparence financière, le syndicat Solidaires CRCPM avait produit un compte de résultat synthétique tenant en une seule page, sur lequel figuraient des indications très sommaires sur ses produits et charges d'exploitation, son résultat d'exploitation et son résultat courant ; qu'en considérant que ce document suffisait à lui seul à faire la preuve de la transparence financière du syndicat, sans exiger le moindre élément complémentaire permettant de vérifier la sincérité de ces indications sommaires, au motif erroné qu' « un simple compte de résultat suffit », le tribunal judiciaire a violé les articles L. 2143-3, L. 2121-1, L. 2135-1 et D. 2135-3 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 2121-1 et L. 2143-3 du code du travail :
4. Il résulte de ces textes que tout syndicat doit, pour pouvoir exercer des prérogatives dans l'entreprise, satisfaire au critère de transparence financière. Les documents comptables dont la loi impose la confection et la publication ne constituent que des éléments de preuve de la transparence financière, leur défaut pouvant dès lors être suppléé par d'autres documents produits par le syndicat et que le juge doit examiner.
5. Pour dire que le syndicat justifie de sa transparence financière, le jugement retient que, le mandat du délégué syndical remis en cause datant du 20 novembre 2019, le syndicat doit produire ses comptes de l'année 2018, les comptes de l'année 2019 n'ayant pas encore été soumis à approbation, que, pour l'année 2018, les ressources du syndicat sont de 19 053 euros soit supérieures à 2 000 euros mais inférieures à 230 000 euros, que dès lors la production d'un bilan et d'une annexe simplifiée n'est pas obligatoire et qu'un simple compte de résultat suffit, que le syndicat produit son compte de résultat synthétique pour l'année 2018 faisant apparaître un bilan de 19 053 euros mais un déficit de 1 199 euros, que par conséquent, il sera considéré que le syndicat répond à la condition de transparence financière.
6. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le syndicat n'avait présenté aux débats qu'un compte de résultat publié sur son site, sans présenter ni bilan ni annexe simplifiée, ni aucun autre document permettant d'établir la véracité des comptes, de sorte qu'il ne justifiait pas satisfaire au critère de transparence financière lorsqu'il a procédé à la désignation contestée, le tribunal a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette l'exception d'incompétence soulevée par le syndicat solidaires CRCPM et M. [H] et rappelle que la procédure est sans frais, le jugement rendu le 7 septembre 2020, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Lyon ;
Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Lyon autrement composé ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six avril deux mille vingt-deux.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour le GIE Klesia ADP, venant aux droits de l'association de moyens Klesia.
Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR dit que le syndicat Solidaires CRCPM justifie de sa transparence financière, d'AVOIR dit que la désignation de M. [H] a été réalisée par une personne dûment habilitée et d'AVOIR sursis à statuer dans l'attente d'une décision judiciaire définitive sur la validité ou l'opposabilité de l'accord collectif du 5 juillet 2019 ;
AUX MOTIFS QUE :
« Selon l'article L. 2143-3 alinéa 1er et troisième du code du travail, « Chaque organisation syndicale représentative dans l'entreprise ou l'établissement d'au moins cinquante salariés, qui constitue une section syndicale, désigne parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli à titre personnel et dans leur collège au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité social et économique, quel que soit le nombre de votants, dans les limites fixées à l'article [7] 2143-12, un ou plusieurs délégués syndicaux pour la représenter auprès de l'employeur.
(?)
Elle peut intervenir au sein de l'établissement regroupant des salariés placés sous la direction d'un représentant de l'employeur et constituant une communauté de travail ayant des intérêts propres, susceptibles de générer des revendications communes et spécifiques ».
Sur la transparence financière du syndicat SOLIDAIRES CRCPM
Selon l'article L. 2121-1 du code du travail,
« La représentativité des organisations syndicales est déterminée d'après les critères cumulatifs suivants :
1° Le respect des valeurs républicaines ;
2° L'indépendance ;
3° La transparence financière ;
4° Une ancienneté minimale de deux ans dans le champ professionnel et géographique couvrant le niveau de négociation. Cette ancienneté s'apprécie à compter de la date de dépôt légal des statuts ;
5° L'audience établie selon les niveaux de négociation conformément aux articles L. 2122-1, L. 2122-5, L. 2122-6 et L. 2122-9 ;
6° L'influence, prioritairement caractérisée par l'activité et l'expérience ;
7° Les effectifs d'adhérents et les cotisations ».
Le critère de la transparence financière doit être examiné de manière autonome.
Selon l'article L. 2135-1 du code du travail, « Les syndicats professionnels (...) sont soumis aux obligations comptables définies à l'article L. 123-12 du code de commerce. Lorsque leurs ressources annuelles n'excèdent pas un seuil fixé par décret, ils peuvent adopter une présentation simplifiée de leurs comptes avec la possibilité de n'enregistrer leurs créances et leurs dettes qu'à la clôture de l'exercice. Si leurs ressources annuelles n'excèdent pas un second seuil fixé par décret, ils peuvent tenir tin livre enregistrant chronologiquement l'ensemble des mouvements de leur patrimoine. Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret ».
Selon l'article D. 2135-3 du code du travail, « Les comptes annuels des syndicats professionnels de salariés ou d'employeurs et de leurs unions, et des associations de salariés ou d'employeurs mentionnés à l'article L. 2135-1 dont les ressources au sens de l'article D. 2135-9 sont inférieures ou égales à 230.000 euros à la clôture de l'exercice peuvent être établis sous la forme d'un bilan, d'un compte de résultat et d'une annexe simplifiés, selon des modalités fixées par règlement de l'Autorité des normes comptables ».
Selon l'article D. 2135-8 du code du travail, « Toutefois, les comptes annuels des syndicats professionnels de salariés ou d'employeurs et de leurs unions, et des associations de salariés ou d'employeurs mentionnés à l'article L. 2135-1 dont les ressources, au sens de l'article D. 2135-9, sont inférieures à 23.000 euros à la clôture d'un exercice, ne le sont (publiés) qu'à la condition que cette consultation ne soit pas susceptible de porter atteinte à la vie privée de leurs membres ».
Les documents comptables dont la loi impose la confection et la publication ne constituent que des éléments de preuve de la transparence financière, leur défaut pouvant dès lors être suppléé par d'autres documents produits par le syndicat et que le juge doit examiner.
En l'espèce, le mandat du délégué syndical remis en cause datant du 20 novembre 2019, le syndicat doit produire ses comptes de l'année 2018, les comptes de l'année 2019 n'ayant pas encore été soumis à approbation.
Pour l'année 2018, les ressources du syndicat sont de 19.053,00 euros soit supérieures à 2.000,00 euros mais inférieures à 230.000 euros. Dès lors, la production d'un bilan et d'une annexe simplifiée n'est pas obligatoire. Un simple compte de résultat suffit comme en l'espèce.
Le syndicat SOLIDAIRES produit son compte de résultat synthétique pour l'année 2018 faisant apparaître un bilan de 19.053,00 euros mais un déficit de 1.199,00 euros.
Les ressources étant inférieures à 23.000 euros, le syndicat n'avait pas l'obligation de publier ses comptes afin de préserver la vie privée de ses membres. Ils ont néanmoins été publiés sur son site internet.
Le code du travail ne prévoit pas les modalités d'approbation des comptes. Il convient de se référer aux statuts en la matière.
L'article 4 des statuts du syndicat prévoit que l'assemblée générale annuelle se prononce sur la gestion financière après présentation et débat.
Le syndicat produit un document intitulé « points à l'ordre du jour de l'AG Solidaires CRCPM du 5 juin 2019 avec le résultat des votes » qui mentionne que les comptes de résultats pour l'année 2018 ont été présentés et approuvés à l'unanimité.
Par conséquent, il sera considéré que le syndicat SOLIDAIRES CRCPM répond à la condition de transparence financière.
Sur la compétence du signataire du courrier du 20 novembre 2019
En l'absence de précision légale ou réglementaire, il convient de se référer aux statuts du syndicat pour identifier les personnes habilitées à désigner les délégués syndicaux dans l'entreprise.
En l'espèce, le courrier du 20 novembre 2019 par lequel Monsieur [F] [H] a été désigné- en qualité de délégué syndical « du site de [Localité 8] » est signé par « Madame [P] [U], secrétaire ».
Or, il résulte de l'annexe 1 du 5 juin 2019, déposé à la Mairie de [Localité 9] que Madame [P] [U] a été élue en qualité de secrétaire comme membre du bureau. Dès lors, et contrairement à l'affirmation de l'AMK, la qualité de secrétaire de Madame [U] est prouvée.
Il ressort de l'article 3 des statuts du syndicat que « la secrétaire pourra déléguer les désignations de DS, RSS et RS à effectuer dans les différentes entités que constitue le syndicat, aux secrétaires adjoints ou aux DSC ». Étant entendu que l'abréviation DS couramment utilisée, désigne le terme de « délégué syndical », il se déduit de la possibilité par la secrétaire de déléguer la désignation du délégué syndical, le pouvoir de le désigner directement.
Par conséquent, Madame [U] [W] avait compétence pour désigner Monsieur [F] [H] en tant que délégué syndical.
Sur le périmètre de désignation, la notion d'établissement distinct, la représentativité du syndicat et la demande de sursis à statuer
Selon l'article 378 du code de procédure civile, « la décision de sursis suspend le cours de l'instance pour le temps ou jusqu'à la survenance de l'événement qu'elle détermine ».
Par courrier du 20 novembre 2019, Monsieur [F] [H] a été désigné en qualité de délégué syndical « du site de [Localité 8] ».
L'association de moyens KLESIA a saisi six tribunaux de 22 requêtes différentes en contestation de la désignation des délégués syndicaux effectués par les organisations syndicales CGT DES SALARIES KLESIA et SOLIDAIRES CRCPM dont celui de [Localité 8].
L'AMK conteste la désignation de Monsieur [F] [H] en qualité de délégué syndical au motif que cette désignation est imprécise quant à son périmètre de désignation, la notion de « site » ne correspondant, selon elle, à aucun cadre légal ni conventionnel de désignation. Elle allègue ensuite que le syndicat SOLIDAIRES CRCPM ne justifie pas de sa représentativité sur le site de [Localité 8], les élections du Comité Social et Économique étant intervenues uniquement au niveau de l'entreprise KLESIA dont le siège est à [Localité 9] et elle soutient enfin qu'il n'existe pas à [Localité 8] d'établissement distinct au sens de l'accord collectif d'entreprise majoritaire signé le 3 juillet 2019 ni au sens de la loi.
L'ensemble de ces moyens est rattaché à la question du périmètre de désignation du délégué syndical qui est déterminé, en l'espèce, par l'accord collectif du 5 juillet 2019 et qui fait l'objet d'une contestation devant le tribunal judiciaire de Paris.
La question de l'opposabilité de l'accord collectif et de sa primauté sur les dispositions d'ordre public du code du travail ressort de la compétence du tribunal judiciaire de Paris, saisi de cette question.
Les autres moyens indépendants de cette question et tenant à la transparence financière du syndicat et la compétence des personnes signataires du courrier de désignation ont été rejetés.
Le fait que le sursis à statuer prolonge la durée des mandats potentiellement illégaux de représentants du personnel ne constitue pas un argument en soi dans la mesure où statuer avant le jugement du tribunal de Paris conduirait à prendre le risque de décisions contradictoires rallongeant encore davantage la durée de ces mandats.
Dès lors, au regard de l'ensemble de ces éléments, et dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, il convient d'ordonner le sursis à statuer pour le surplus dans l'attente d'une décision judiciaire définitive sur la validité ou l'opposabilité de l'accord collectif du 5 juillet 2019 » ;
1. ALORS QUE les comptes annuels d'un syndicat dont les ressources sont inférieures à 230.000 euros et supérieures à 2.000 euros doivent être établis sous la forme d'un bilan, d'un compte de résultat et d'une annexe simplifiée ; que si les documents comptables dont la loi impose la confection et la publication ne constituent que des éléments de preuve de la transparence financière, leur défaut doit être suppléé par d'autres documents produits par le syndicat et que le juge doit examiner ; qu'en l'espèce, pour justifier du respect de la transparence financière, le syndicat Solidaires CRCPM avait produit un compte de résultat synthétique tenant en une seule page, sur lequel figuraient des indications très sommaires sur ses produits et charges d'exploitation, son résultat d'exploitation et son résultat courant ; qu'en considérant que ce document suffisait à lui seul à faire la preuve de la transparence financière du syndicat, sans exiger le moindre élément complémentaire permettant de vérifier la sincérité de ces indications sommaires, au motif erroné qu' « un simple compte de résultat suffit », le tribunal judiciaire a violé les articles L. 2143-3, L. 2121-1, L. 2135-1 et D. 2135-3 du code du travail ;
2. ALORS QU' il résulte de l'article 4 des statuts du syndicat Solidaires CRCPM que « l'Assemblée Générale annuelle se prononce sur le rapport d'activité, sur la gestion financière après présentation et débat » et que « l'Assemblée Générale ordinaire ou extraordinaire ne peut délibérer valablement qu'en cas de présence d'un tiers des adhérents (es) ou des représentants (es) mandatés (es) à jour de leurs cotisations et à la majorité absolue des présents (es) » ; qu'en considérant que le document produit par le syndicat, intitulé « points à l'ordre du jour de l'AG Solidaires CRCPM du 5 juin 2019 avec le résultat du vote », qui n'est ni signé, ni conforté par le procès-verbal de cette assemblée générale, établit l'approbation des comptes 2018 par l'assemblée générale, sans exiger le moindre élément permettant de s'assurer des points à l'ordre du jour de cette réunion, ni le procès-verbal établi à l'issue de cette assemblée générale, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil, L. 2143-3, L. 2121-1 et L. 2135-4 du code du travail ;
3. ALORS QUE le syndicat doit indiquer, à peine de nullité de la désignation, le cadre précis dans lequel il désigne un délégué syndical ; qu'en l'espèce, l'accord collectif majoritaire du 5 juillet 2019 précise que l'association constitue un établissement unique, son organisation ne permettant pas la reconnaissance d'établissements distincts, ni la désignation de délégués syndicaux au niveau de ses différentes implantations géographiques ; qu'il accorde néanmoins aux organisations syndicales représentatives la faculté de désigner, en plus des trois délégués syndicaux prévus par la loi, dix délégués syndicaux de proximité ; que, dans le courrier adressé à l'employeur, le syndicat Solidaires CRCPM indique désigner M. [H] en qualité de « délégué syndical [Localité 8] » ; qu'il en résulte que le cadre de cette désignation n'était pas précis ; qu'en refusant néanmoins de tirer les conséquences d'une telle imprécision, le tribunal a violé les articles L. 2143-3 et L. 2143-8 du code du travail ;
4. ALORS QU' il appartient au tribunal judiciaire saisi d'une requête en annulation de la désignation d'un délégué syndical de se prononcer, dans un délai restreint, sur la validité de cette désignation au regard des dispositions légales et conventionnelles applicables ; qu'un accord collectif signé par des organisations syndicales représentatives et majoritaires est présumé valable et produit plein effet, tant qu'un juge n'a pas prononcé sa nullité ; qu'en l'espèce, l'accord collectif du 5 juillet 2019 signé par trois organisations syndicales majoritaires prévoit « que l'existence d'un établissement unique au niveau de l'AMK ne permet pas la désignation de délégués syndicaux au niveau des implantations géographiques qui la composent » ; que cet accord offre néanmoins aux organisations syndicales représentatives la possibilité de désigner, en plus des trois délégués syndicaux prévus par la loi, des « délégués syndicaux de proximité » ; que l'association Klesia demandait en conséquence au tribunal judiciaire d'annuler la désignation de M. [H] en qualité de « délégué syndical Lyon », intervenue en dehors des prévisions de cet accord ; qu'en refusant néanmoins de se prononcer sur la régularité de cette désignation au regard des dispositions de l'accord collectif précité, au motif que la validité et l'opposabilité de cet accord était contestée devant le tribunal judiciaire de Paris et en prononçant un sursis à statuer dans l'attente d'une décision judiciaire définitive sur la validité et l'opposabilité de cet accord collectif, le tribunal a commis un excès de pouvoir négatif en refusant d'exercer les pouvoirs qui lui sont dévolus par la loi et violé les articles L. 2232-12, L. 2143-8 et R. 2143-5 du code du travail.