LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2 / ELECT
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 24 mars 2022
Rejet
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 494 F-D
Pourvoi n° G 22-60.102
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 24 MARS 2022
M. [O] [T], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° G 22-60.102 contre le jugement rendu le 28 janvier 2022 par le tribunal de proximité de Menton (contentieux des élections politiques), dans le litige l'opposant à M. [P] [R], domicilié [Adresse 3], défendeur à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Les parties ou leurs mandataires ont produit des mémoires.
Sur le rapport de Mme Brouzes, conseiller référendaire, après débats en l'audience publique du 23 mars 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Brouzes, conseiller référendaire rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué (tribunal de proximité de Menton, 28 janvier 2022), rendu en dernier ressort, M. [T] a, par requête enregistrée le 26 janvier 2022, contesté l'inscription de M. [R] le 10 janvier 2022 sur la liste électorale de la commune de Menton, dans laquelle se tenaient des élections municipales le 30 janvier 2022.
Recevabilité du mémoire complémentaire, examinée d'office
2. M. [T] a déposé le 21 mars 2022 un mémoire complémentaire.
3. Ce mémoire a été enregistré et notifié après expiration du délai pour former un pourvoi, de sorte qu'il n'est pas recevable.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. M. [T] fait grief au jugement de rejeter sa demande tendant à voir radier de la liste électorale de la mairie de [Localité 2] M. [R], alors que le non-respect du délai de trois jours, édicté à l'article R. 18 du code électoral, et le délai d'une journée entre le dépôt de la requête et l'audience ne permettent pas de réunir l'ensemble des documents susceptibles de convaincre la juridiction de proximité.
Réponse de la Cour
5. Selon l'article R. 18 du code électoral, les recours soumis au tribunal sont jugés dans les huit jours, sans forme et sur simple avertissement donné dans les trois jours à l'avance à toutes les parties intéressées.
6. Le non-respect du délai de trois jours, prévu par cet article, n'entraîne la nullité de l'avertissement que si l'irrégularité cause un grief à la partie qui l'invoque.
7. Il ne résulte ni du jugement, ni des notes d'audience, que M. [T] ait soutenu devant le tribunal que le non-respect de ce délai lui causait un grief.
8. Le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit, n'est, dès lors, pas recevable.
Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
9. M. [T] fait le même grief au jugement, alors que l'absence de dossier à transmettre à la Cour de cassation tel que prévu à l'article R. 19-4 du code électoral en raison de la restitution de l'ensemble des pièces fournies à l'audience par les deux parties, ne permet pas au juge de cassation de prendre connaissance des documents sur la base desquels la décision a été rendue, et de constater une éventuelle dénaturation des éléments et pièces qui étaient soumis à la juridiction de proximité.
Réponse de la Cour
10. Aux termes de l'article R. 19-4 du code électoral, lorsque le pourvoi a été formé au tribunal judiciaire, le greffe de ce tribunal transmet immédiatement au greffe de la Cour de cassation le dossier de l'affaire avec la déclaration ou sa copie, la copie de la décision attaquée ainsi que les documents relatifs à la notification de celle-ci et, s'il y a un défenseur, les documents relatifs à la notification du pourvoi à ce dernier. Il transmet au greffe de la Cour de cassation toute pièce qui lui parviendrait ultérieurement.
11. Ce texte ne prévoit pas la transmission, par le greffe du tribunal, au greffe de la Cour de cassation, des pièces produites par les parties au soutien de leurs prétentions.
12. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
Sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
13. M. [T] fait le même grief au jugement, alors que les pièces produites par M. [R] devant le tribunal étaient en nombre supérieur à celles produites en mairie lors de sa demande d'inscription sur les listes électorales.
Réponse de la Cour
14. Aux termes de l'article R. 18 du code électoral, le tribunal se prononce après avoir vérifié notamment la validité des justifications produites par l'électeur à l'appui de sa demande d'inscription.
15. Ce texte ne prive pas l'électeur du droit de produire devant le juge du fond toute pièce qu'il estimerait utile au soutien de ses prétentions.
16. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
Sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
17. M. [T] fait le même grief au jugement, alors que l'ensemble des cas visés à l'article L. 30, 2° bis, du code électoral, concerne des situations subies et non choisies, telles que la mutation, la retraite, la libération des obligations militaires, ou l'acquisition de la majorité, de la nationalité française ainsi que le recouvrement des droits civils ; qu'en jugeant que ce texte vise le cas de personnes ayant créé leur entreprise, le tribunal en a fait une fausse application.
Réponse de la Cour
18. Selon l'article L. 30, 2° bis, du code électoral, peuvent demander à être inscrits sur la liste électorale de la commune entre le sixième vendredi précédant le scrutin et le dixième jour précédant ce scrutin, les personnes qui établissent leur domicile dans une autre commune pour un motif professionnel autre que ceux énumérés aux 1° et 2° après la clôture des délais d'inscription, ainsi que les membres de leur famille domiciliés avec elles à la date du changement de domicile.
19. Après avoir énoncé que le motif professionnel prévu par ce texte vise le cas de personnes ayant fait l'objet d'une mutation professionnelle, trouvé un emploi ou créé une entreprise, le tribunal relève que M. [R] a emménagé à Menton où il a créé la société Riviera deux roues, inscrite au registre du commerce et des sociétés le 5 janvier 2022.
20. En l'état de ces constatations et énonciations, le tribunal a exactement décidé que l'électeur pouvait solliciter son inscription sur la liste électorale de cette commune après la clôture des délais d'inscription, en application du texte susvisé.
21. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mars deux mille vingt-deux.