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23/03/2022 | FRANCE | N°21-11316

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 23 mars 2022, 21-11316


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 mars 2022

Rejet

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 293 F-D

Pourvoi n° J 21-11.316

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 23 MARS 2022

La société Vignobles de terroirs, société par actions simplifiée,

dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 21-11.316 contre l'arrêt rendu le 26 novembre 2020 par la cour d'appel de Bordeaux (2e cham...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 mars 2022

Rejet

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 293 F-D

Pourvoi n° J 21-11.316

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 23 MARS 2022

La société Vignobles de terroirs, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 21-11.316 contre l'arrêt rendu le 26 novembre 2020 par la cour d'appel de Bordeaux (2e chambre civile), dans le litige l'opposant à la société d'aménagement foncier et d'établissement rural Nouvelle-Aquitaine (SAFER), dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de la SAFER Aquitaine-Atlantique, défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Schmitt, conseiller référendaire, les observations de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de la société Vignobles de terroirs, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, et Goulet, avocat de la société d'aménagement foncier et d'établissement rural Nouvelle-Aquitaine, après débats en l'audience publique du 15 février 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Schmitt, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 26 novembre 2020), la société Vignobles de terroirs, adjudicataire d'une propriété viticole, a assigné la société d'aménagement foncier et d'établissement rural Aquitaine Atlantique (la SAFER) en annulation de la déclaration de préemption que celle-ci lui avait notifiée et en indemnisation.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

2. La société Vignobles de terroirs fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors :

« 1°/ que le juge saisi d'une contestation de la légalité d'une décision de préemption d'un immeuble à usage agricole doit apprécier non seulement sa légalité externe, c'est-à-dire sa régularité formelle et procédurale, au titre de laquelle figure notamment le contrôle de l'existence de la mention de données concrètes établissant la conformité à un ou plusieurs objectifs légaux, mais également sa légalité interne, au titre de laquelle peut être soutenu notamment un grief d'abus de droit ou de détournement de pouvoir, lequel ne relève pas d'un contrôle de l'opportunité de la décision de la SAFER, lorsque celle-ci prend en réalité une décision de préemption en vue d'avantager une personne au détriment d'une autre ; qu'en refusant de contrôler l'existence d'un tel abus ou détournement dans l'appréciation de la légalité de la décision attaquée par des considérations inopérantes selon lesquelles elle n'avait pas à contrôler l'opportunité de la décision de la SAFER, quand elle était saisie d'un moyen de légalité interne de cette décision, la cour d'appel a violé les articles L. 143-2 et 3 du code rural et de la pêche maritime ;

2°/ que les juges qui doivent motiver leurs décisions, ne doivent pas dénaturer les conclusions des parties ; qu'en statuant par adoption de motifs du jugement par des considérations selon lesquels la société Vignobles de terroirs ne faisait valoir aucun nouveau moyen ou argument auquel il n'aurait pas été répondu par le tribunal quand elle était saisie pour la première fois d'une argumentation précise et circonstanciée relative à l'existence d'un détournement de pouvoir ou abus selon laquelle la SAFER avait dès le départ entendu rétrocéder les terres à des investisseurs non agriculteurs dans l'intérêt de ces derniers et moyennant un prix intéressant pour la SAFER, de sorte qu'il n'avait, en réalité, jamais été dans l'intention de la SAFER de rétrocéder ces terres à de jeunes agriculteurs comme cela était annoncé dans la décision de préemption ni de répondre à l'un des objectifs de l'article L. 143-2 du code rural, la cour d'appel, pour s'abstenir de répondre concrètement à ce moyen, a dénaturé les conclusions de la société Vignobles de terroirs, violant ainsi l'article 4 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

3. D'une part, la société Vignobles de terroirs a soutenu en appel, comme en première instance, que la SAFER avait mis en oeuvre son droit de préemption pour faire échec à l'adjudication, en invoquant des motifs erronés et au bénéfice d'un investisseur de son choix.

4. C'est donc sans violer l'article 4 du code de procédure civile que la cour d'appel a retenu que l'appelante ne faisait valoir aucun moyen ou argument auquel il n'avait pas déjà été répondu par le premier juge.

5. D'autre part, la cour d'appel a constaté que la décision de préemption visait les objectifs légaux qu'étaient l'installation d'un agriculteur et la consolidation d'une exploitation et que les données concrètes au soutien de la décision, qui évoquait les projets de deux candidats en réservant l'examen d'autres candidatures susceptibles de permettre la réalisation de ces objectifs, étaient suffisamment précises, puisqu'elles permettaient de vérifier que le droit de préemption exercé était conforme aux objectifs légaux mentionnés à l'article L. 143-2 du code rural et de la pêche maritime.

6. Ayant retenu, à bon droit, que le juge n'avait pas à apprécier l'opportunité de cette décision, la cour d'appel, devant laquelle il n'avait pas été soutenu que la SAFER avait poursuivi, dès l'exercice de son droit de préemption, le seul objectif de rétrocéder les parcelles à une autre structure, a pu en déduire que la demande d'annulation de la déclaration de préemption devait être rejetée.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Vignobles de terroirs aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Vignobles de terroirs et la condamne à payer à la société d'aménagement foncier et d'établissement rural Aquitaine Atlantique la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mars deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour la société Vignobles de terroirs

La SAS Vignobles de terroirs fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande de nullité de la déclaration de préemption exercée par la SAFER Aquitaine Atlantique le 5 juin 2015 sur les biens et droits immobiliers situés à Illats (Gironde) acquis par elle selon jugement du tribunal de grande instance de Bordeaux du 7 mai 2015 et de ses autres demandes indemnitaires ;

1°) ALORS QUE le juge saisi d'une contestation de la légalité d'une décision de préemption d'un immeuble à usage agricole doit apprécier non seulement sa légalité externe, c'est-à-dire sa régularité formelle et procédurale, au titre de laquelle figure notamment le contrôle de l'existence de la mention de données concrètes établissant la conformité à un ou plusieurs objectifs légaux, mais également sa légalité interne, au titre de laquelle peut être soutenu notamment un grief d'abus de droit ou de détournement de pouvoir, lequel ne relève pas d'un contrôle de l'opportunité de la décision de la SAFER, lorsque celle-ci prend en réalité une décision de préemption en vue d'avantager une personne au détriment d'une autre ; qu'en refusant de contrôler l'existence d'un tel abus ou détournement dans l'appréciation de la légalité de la décision attaquée par des considérations inopérantes selon lesquelles elle n'avait pas à contrôler l'opportunité de la décision de la SAFER, quand elle était saisie d'un moyen de légalité interne de cette décision, la cour d'appel a violé les articles L. 143-2 et 3 du code rural et de la pêche maritime ;

2°) ALORS QUE, en tout état de cause, les juges qui doivent motiver leurs décisions, ne doivent pas dénaturer les conclusions des parties ; qu'en statuant par adoption de motifs du jugement par des considérations selon lesquels la société Vignobles de terroirs ne faisait valoir aucun nouveau moyen ou argument auquel il n'aurait pas été répondu par le tribunal quand elle était saisie pour la première fois d'une argumentation précise et circonstanciée relative à l'existence d'un détournement de pouvoir ou abus selon laquelle la SAFER avait dès le départ entendu rétrocéder les terres à des investisseurs non agriculteurs dans l'intérêt de ces derniers et moyennant un prix intéressant pour la SAFER, de sorte qu'il n'avait, en réalité, jamais été dans l'intention de la SAFER de rétrocéder ces terres à de jeunes agriculteurs comme cela était annoncé dans la décision de préemption ni de répondre à l'un des objectifs de l'article L. 143-2 du code rural, la cour d'appel, pour s'abstenir de répondre concrètement à ce moyen, a dénaturé les conclusions de la société Vignobles de terroirs, violant ainsi l'article 4 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 21-11316
Date de la décision : 23/03/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 26 novembre 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 23 mar. 2022, pourvoi n°21-11316


Composition du Tribunal
Président : Mme Teiller (président)
Avocat(s) : SAS Buk Lament-Robillot, SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.11316
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