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16/03/2022 | FRANCE | N°21-10433

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 mars 2022, 21-10433


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 mars 2022

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 342 F-D

Pourvoi n° Z 21-10.433

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 16 MARS 2022

M. [K] [N], domicilié [Adresse 3],

a formé le pourvoi n° Z 21-10.433 contre l'arrêt rendu le 30 janvier 2019 par la cour d'appel de Montpellier (4e A chambre sociale), dans le lit...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 mars 2022

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 342 F-D

Pourvoi n° Z 21-10.433

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 16 MARS 2022

M. [K] [N], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° Z 21-10.433 contre l'arrêt rendu le 30 janvier 2019 par la cour d'appel de Montpellier (4e A chambre sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Benoît et associés, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], prise en la personne de Mme [P] [D], en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Ets Callejo transports

2°/ à l'UNEDIC AGS CGEA de Toulouse, dont le siège est [Adresse 1],

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas Raquin, Martin Le Guerer, avocat de M. [N], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Benoît et associés, ès qualités, après débats en l'audience publique du 26 janvier 2022 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire rapporteur, Mme Monge, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 30 janvier 2019), M. [N] a été engagé, le 20 mars 2009, par la société Etablissements Callejo transports, en qualité de chauffeur routier SPL.

2. Le salarié a été licencié le 8 mars 2013.

3. Il a saisi la juridiction prud'homale, le 21 février 2014, de diverses demandes en paiement au titre de l'exécution du contrat de travail.

4. La société Etablissements Callejo transports a été placée en liquidation judiciaire par un jugement du tribunal de commerce du 15 décembre 2015 et la société Benoît et associés désignée en qualité de liquidatrice.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

5. Le salarié fait grief à l'arrêt de limiter la fixation des créances à la procédure collective ouverte à l'encontre de l'employeur à certaines sommes à titre de rappel d'heures supplémentaires des seuls mois de juin 2010, de mars et avril 2011, et de rappel de majoration de nuit et de rejeter ses autres demandes, alors « que tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en déboutant M. [N] de sa demande d'indemnité de congés payés sur les rappels de salaire alloués sans donner aucun motif à sa décision, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. L'arrêt n'ayant pas statué, dans son dispositif, sur le chef de demande d'indemnité de congés payés, le moyen, qui critique en réalité une omission de statuer qui peut être réparée par la procédure prévue par l'article 463 du code de procédure civile, ne donne pas ouverture à cassation.

7. Le moyen est donc irrecevable.

Mais sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

8. Le salarié fait le même grief à l'arrêt, alors « que tout jugement doit être motivé à peine de nullité, une contradiction entre les motifs équivalant à un défaut de motifs ; qu'ayant constaté, d'une part, que les demandes formées par M. [N] au titre des heures supplémentaires portaient sur la période du 8 mars 2010 au 31 juillet 2011 et que les explications fournies et les relevés de la carte chronotachygraphe constituaient à cet égard des éléments suffisamment précis pour que l'employeur y réponde de sorte que M. [N] avait suffisamment étayé ses demandes et, d'autre part, que contrairement à ce que celui-ci affirmait, il se bornait à produire, non la totalité des relevés pour les mois qu'il visait dans ses conclusions mais uniquement les relevés des mois de juin et novembre 2010 et ceux des mois de mars, avril et mai 2011, de sorte que les autres mois devaient être considérés comme ne pouvant être étayés, la cour d'appel qui a ainsi statué par des motifs contradictoires, a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

9. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. La contradiction entre les motifs équivaut à un défaut de motifs.

10. Pour limiter à certaines sommes la fixation des créances du salarié à la procédure collective ouverte à l'encontre de l'employeur au titre des rappels d'heures supplémentaires pour les mois de juin 2010, de mars et avril 2011, l'arrêt retient, d'abord, que le salarié expose qu'il a fait procéder, par un spécialiste, à la lecture de la carte chronotachygraphe restée en sa possession et a demandé à la société King Truck de l'examiner. Il énonce que le salarié invoque avoir réalisé un certain nombre d'heures supplémentaires au cours de la période du 8 mars 2010 au mois de juillet 2011. Il en déduit que les explications fournies et les relevés de la carte chronotachygraphe constituent donc des éléments suffisamment précis pour que l'employeur y réponde, en sorte que le salarié a suffisamment étayé ses demandes.

11. L'arrêt énonce, ensuite, que contrairement à ce que le salarié affirme, la production par lui aux débats des pièces examinées par la société King Truck se borne à communiquer, non pas la totalité des relevés pour les mois qu'il vise dans ses conclusions, mais uniquement les relevés des mois de juin et novembre 2010 et ceux des mois de mars, avril, et mai 2011. Il retient que, se fondant donc sur les seules constatations de cette société pour contester les évaluations horaires de l'employeur, le salarié n'apporte aucune autre précision sur les autres mois qui doivent être considérés comme ne pouvant être étayés.

12. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui s'est contredite, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

13. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation prononcée entraîne la cassation, par voie de conséquence, du chef de dispositif relatif à la rectification des fiches de paie et à la remise de documents sociaux, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

14. En revanche, elle n'atteint pas du chef de dispositif ayant débouté le salarié de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé, ainsi que celui ayant fixé la créance du salarié à une certaine somme au titre du rappel de majoration pour heures de nuit.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe les créances de M. [N] à la procédure collective ouverte à l'encontre de la société Etablissements Callejo transports aux seules sommes de 1 994,86 euros, 2 238,87 euros et 282,40 euros au titre des rappels d'heures supplémentaires pour les mois de juin 2010, mars 2011 et avril 2011, et déboute M. [N] de ses autres demandes de rappel d'heures supplémentaires, ainsi que celle au titre d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et en ce qu'il ordonne la délivrance par le mandataire liquidateur d'une attestation rectifiée destinée à pôle emploi et d'un bulletin de paye rectifié pour les périodes considérées, l'arrêt rendu le 30 janvier 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne la société Benoît et associés, en qualité de liquidatrice judiciaire de la société Etablissements Callejo transports, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Benoît et associés, ès qualités, et la condamne à payer à M. [N] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize mars deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat aux Conseils, pour M. [N]

M. [K] [N] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR fixé ses créances à la procédure collective ouverte à l'encontre de la société Etablissements Callejo transports aux seules sommes de 1 994,86 euros, 2 238,87 euros et 282,40 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires pour les mois de juin 2010, de mars et avril 2011, et de 213,31 euros à titre de rappel de majoration de nuit et d'AVOIR rejeté ses autres demandes

1°) ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité, une contradiction entre les motifs équivalant à un défaut de motifs ; qu'ayant constaté, d'une part, que les demandes formées par M. [N] au titre des heures supplémentaires portaient sur la période du 8 mars 2010 au 31 juillet 2011 et que les explications fournies et les relevés de la carte chronotachygraphe constituaient à cet égard des éléments suffisamment précis pour que l'employeur y réponde de sorte que M. [N] avait suffisamment étayé ses demandes et, d'autre part, que contrairement à ce que celui-ci affirmait, il se bornait à produire, non la totalité des relevés pour les mois qu'il visait dans ses conclusions mais uniquement les relevés des mois de juin et novembre 2010 et ceux des mois de mars, avril et mai 2011, de sorte que les autres mois devaient être considérés comme ne pouvant être étayés, la cour d'appel qui a ainsi statué par des motifs contradictoires, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE le juge doit en toutes circonstances observer lui-même et faire observer le principe du contradictoire ; que la cour d'appel qui a énoncé que contrairement à ce que M. [N] affirmait, il se bornait à produire, non la totalité des relevés pour les mois qu'il visait dans ses conclusions mais uniquement les relevés des mois de juin et novembre 2010 et ceux des mois de mars, avril et mai 2011 de sorte que les autres mois devaient être considérés comme ne pouvant être étayés, sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations sur l'absence au dossier de l'intégralité des relevés visés par M. [N] dans ses conclusions qui figuraient au bordereau de pièces annexé à celles-ci et dont la communication n'avait été contestée ni par la SELARL Benoît et associés ni par l'AGS CGEA, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments, le juge formant sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments ; que, pour limiter l'examen de la demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires formée par M. [N] pour l'intégralité de la période du 8 mars 2010 au 31 juillet 2011, aux seuls mois de juin et novembre 2010, mars, avril et mai 2011, la cour d'appel a énoncé que les explications et relevés de la carte chronotachygraphe produits par M. [N] constituaient des éléments suffisamment précis pour que l'employeur y réponde de sorte que M. [N] étayait suffisamment ses demandes, que l'exposant ne produisait pas la totalité des relevés pour les mois visés dans ses conclusions mais uniquement les relevés des mois de juin et novembre 2010 et ceux des mois de mars, avril et mai 2011, les autres mois devant être considérés comme ne pouvant être étayés, que l'employeur qui précisait que les mentions qu'il avait retenues dans les bulletins de salaire correspondaient aux horaires fixés par les ordres de mission délivrés à ce salarié, n'avait jamais demandé à celui-ci de lui apporter d'explication à propos de divergences entre les synthèses conducteur qu'il avait bâties à partir des prévisions sur la durée du parcours et les heures qu'in fine il avait fait figurer sur les bulletins de paye ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié et a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;

4°) ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en déboutant M. [N] de sa demande d'indemnité de congés payés sur les rappels de salaire alloués sans donner aucun motif à sa décision, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-10433
Date de la décision : 16/03/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 30 janvier 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 mar. 2022, pourvoi n°21-10433


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.10433
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