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09/03/2022 | FRANCE | N°20-18551

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 mars 2022, 20-18551


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 mars 2022

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 264 F-D

Pourvoi n° C 20-18.551

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 MARS 2022

M. [Z] [E], domicilié [Adresse 4], a

formé le pourvoi n° C 20-18.551 contre l'arrêt rendu le 17 juin 2020 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-3), dans le litige l'oppo...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 mars 2022

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 264 F-D

Pourvoi n° C 20-18.551

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 MARS 2022

M. [Z] [E], domicilié [Adresse 4], a formé le pourvoi n° C 20-18.551 contre l'arrêt rendu le 17 juin 2020 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-3), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société MJA, société d'exercice libéral à forme anonyme, dont le siège est [Adresse 1], en la personne de Mme [T] [C], co-liquidateur judiciaire de la société GLI Saint-Rémy de Provence dont le siège est [Adresse 3],

2°/ à la société MJO, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 5], en la personne de M. [O] [V], co-liquidateur judiciaire de la société GLI Saint-Rémy de Provence dont le siège social est [Adresse 3], 3°/ à l'AGS CGEA Ile-de-France Est, dont le siège est [Adresse 2],

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Prieur, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [E], de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société MJA, ès qualités, et de la société MJO, ès qualités, après débats en l'audience publique du 18 janvier 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Prieur, conseiller référendaire rapporteur, M. Pietton, conseiller, M. Gambert, avocat général, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 17 juin 2020), M. [E] a été engagé le 11 juillet 1994 par la société Sotragaz, aux droits de laquelle vient la société Gaz liquifiés industrie (la société GLI), en qualité en dernier lieu de technicien service atelier.

2. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale, le 20 décembre 2013, pour obtenir l'annulation de sanctions disciplinaires et le paiement de diverses sommes.

3. Par jugement du 10 janvier 2020, la société GLI a été mise en liquidation judiciaire et les sociétés MJA et MJO désignées en qualité de co-liquidateurs.

Examen des moyens

Sur le second moyen, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. Le salarié fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables comme prescrites ses demandes en paiement d'heures supplémentaires et repos compensateurs pour les années 2009 à 2012 et, en conséquence, de le débouter de ses demandes de fixation de sa créance de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail, de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de ses demandes consécutives en fixation de sa créance d'indemnités de rupture et dommages-intérêts, alors « que si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, au cours d'une même instance, concernent l'exécution du même contrat de travail ; qu'en retenant, pour déclarer prescrite la demande en paiement d'heures supplémentaires pour la période 2009/2014 formée " uniquement à hauteur de cour ", que " de principe, l'effet interruptif de prescription attaché à une demande de rappel de salaire ne s'étend pas à une seconde demande tendant au paiement d'heures supplémentaires ", quand la prescription de cette demande avait été interrompue par la saisine du conseil de prud'hommes en date du 20 décembre 2013, la cour d'appel a violé les articles 2241 du code civil, L. 3245-1 et R. 1452-1 du code du travail dans leur rédaction, applicable au litige, issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 2241 du code civil et R. 1452-6 du code du travail, dans sa rédaction issue du décret n° 2008-244 du 7 mars 2008 alors applicable :

6. Selon le premier de ces textes, la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.

7. Aux termes du second, toutes les demandes liées au contrat de travail font, qu'elles émanent du demandeur ou du défendeur, l'objet d'une même instance. Cette règle n'est pas applicable lorsque le fondement des prétentions est né ou révélé postérieurement à la saisine du conseil de prud'hommes.

8. Il en résulte que si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à l'autre, il en est autrement lorsque les deux actions, au cours d'une même instance, concernent l'exécution du même contrat de travail.

9. Pour déclarer irrecevables comme prescrites les demandes en paiement d'heures supplémentaires et repos compensateurs pour les années 2009 à 2012, l'arrêt retient que de principe, l'effet interruptif de prescription attaché à une demande de rappel de salaire ne s'étend pas à une seconde demande tendant au paiement d'heures supplémentaires. Il ajoute que le salarié a formé sa demande de rappel d'heures supplémentaires uniquement à hauteur de cour alors qu'en application de l'article L. 3245-1 du code du travail, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, que la demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour, ou, lorsque le contrat a été rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat. Il énonce encore que l'intéressé qui produit toutes ses fiches horaires des années 2009 à 2012 savait qu'il avait effectué des heures supplémentaires à compter de leur accomplissement. Il en déduit que sa demande formée pour la première fois dans un délai allant de 10 à 7 ans est nécessairement prescrite.

10. En statuant ainsi, alors que la prescription avait été interrompue par la saisine du conseil de prud'hommes, le 20 décembre 2013, même si la demande pour les années 2009 à 2012 avait été présentée en cours d'instance, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

11. Le premier moyen ne formulant aucune critique contre les motifs de l'arrêt fondant la décision de débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, la cassation ne peut s'étendre à cette disposition de l'arrêt qui n'est pas dans un lien de dépendance avec les dispositions de l'arrêt critiquées par ce moyen.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevables comme étant prescrites les demandes de M. [E] au titre des heures supplémentaires et repos compensateurs pour les années 2009 à 2012, le déboute de sa demandes en résiliation judiciaire de son contrat de travail et de ses demandes consécutives en fixation de sa créance de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, d'indemnité compensatrice de préavis et d'indemnité de licenciement, outre les congés payés afférents à ces sommes, l'arrêt rendu le 17 juin 2020, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne la société MJA, prise en la personne de Mme [C] et la société MJO, prise en la personne de M. [V], en qualité de co-liquidateurs judiciaires de la société GIL, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par les sociétés MJA et MJO, ès qualités, et les condamne à payer à M. [E] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mars deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. [E]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

M. [E] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevables comme prescrites ses demande en paiement d'heures supplémentaires et repos compensateurs pour les années 2009 à 2012 et, en conséquence, de l'AVOIR débouté de ses demandes de fixation de sa créance de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail, de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de ses demandes consécutives en fixation de sa créance d'indemnités de rupture et dommages et intérêts ;

ALORS QUE si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, au cours d'une même instance, concernent l'exécution du même contrat de travail ; qu'en retenant, pour déclarer prescrite la demande en paiement d'heures supplémentaires pour la période 2009/2014 formée « uniquement à hauteur de cour », que « de principe, l'effet interruptif de prescription attaché à une demande de rappel de salaire ne s'étend pas à une seconde demande tendant au paiement d'heures supplémentaires », quand la prescription de cette demande avait été interrompue par la saisine du conseil de prud'hommes en date du 20 décembre 2013, la cour d'appel a violé les articles 2241 du code civil, L.3245-1 et R.1452-1 du code du travail dans leur rédaction, applicable au litige, issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

M. [E] fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR débouté de sa demande d'annulation de la mise à pied du 10 juillet 2013 et de ses demandes de fixation de sa créance de dommages et intérêts, de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de ses demandes consécutives en fixation de sa créance d'indemnités de rupture et dommages et intérêts ;

1°) ALORS QU'en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés sont de nature à justifier une sanction ; que l'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction ; qu'il peut annuler une sanction irrégulière en la forme, injustifiée ou disproportionnée à la faute commise ; qu'en retenant, pour valider la sanction de mise à pied disciplinaire de trois jours infligée à M. [E] « qu'il ressort de l'examen du dossier et des pièces produites aux débats, que si la mise à pied de trois jours opérée à l'encontre de M. [Z] [E] est justifiée, notamment sur des problèmes relevant de la sécurité, il convient d'observer que celle-ci n'a pas été exécutée du fait de l'absence pour maladie du salarié sur la période du 07 au 09 août 2013 » la cour d'appel, qui s'est déterminée aux termes de motifs dont ne ressort pas l'exercice de ce contrôle, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QU'en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés sont de nature à justifier une sanction ; que l'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction ; qu'il peut annuler une sanction irrégulière en la forme, injustifiée ou disproportionnée à la faute commise ; qu'en retenant, pour valider la sanction de mise à pied disciplinaire de trois jours infligée à M. [E] « qu'il ressort de l'examen du dossier et des pièces produites aux débats, que si la mise à pied de trois jours opérée à l'encontre de M. [Z] [E] est justifiée, notamment sur des problèmes relevant de la sécurité, il convient d'observer que celle-ci n'a pas été exécutée du fait de l'absence pour maladie du salarié sur la période du 07 au 09 août 2013 » quand l'inexécution de la sanction était sans incidence sur sa validité la cour d'appel, qui s'est déterminée par un motif inopérant, a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1333-1 et L.1333-2 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-18551
Date de la décision : 09/03/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17 juin 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 mar. 2022, pourvoi n°20-18551


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.18551
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