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16/02/2022 | FRANCE | N°21-82830

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 16 février 2022, 21-82830


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° S 21-82.830 F-D

N° 00217

GM
16 FÉVRIER 2022

CASSATION PARTIELLE

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 16 FÉVRIER 2022

Mme [T] [X] [D] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-2, en date du 15 avril 2021, qui, pour violation de domicile

et extorsion aggravée, l'a condamnée à deux ans d'emprisonnement dont un an avec sursis, cinq ans d'interdiction de détenir ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° S 21-82.830 F-D

N° 00217

GM
16 FÉVRIER 2022

CASSATION PARTIELLE

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 16 FÉVRIER 2022

Mme [T] [X] [D] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-2, en date du 15 avril 2021, qui, pour violation de domicile et extorsion aggravée, l'a condamnée à deux ans d'emprisonnement dont un an avec sursis, cinq ans d'interdiction de détenir ou porter une arme et a prononcé sur les intérêts civils.

Des mémoires ont été produits.

Sur le rapport de Mme Issenjou, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan et de Maître Balat, avocats de Mme [T] [X] [D], et les conclusions de Mme Bellone, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 19 janvier 2022 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Issenjou, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Mme [T] [X] [D] a été condamnée, le 6 mars 2020, par le tribunal correctionnel de Bobigny, des chefs susvisés, à trois ans d'emprisonnement. Un mandat d'arrêt a été délivré à son encontre.

3. Elle a relevé appel de cette décision. Le ministère public a formé appel incident.

Examen des moyens

Sur le deux premiers moyens du mémoire déposé par Me Balat et sur les deux premiers moyens du mémoire déposé par la SCP Waquet, Farge et Hazan

4. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Mais sur le troisième moyen déposé par Me Balat et sur le troisième moyen déposé par la SCP Waquet, Farge et Hazan

5. Le troisième moyen déposé par Me Balat critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné Mme [X] [D] à la peine de deux ans d'emprisonnement assortie du sursis simple pendant un an, alors « que le juge qui prononce une peine d'emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité au regard des faits de l'espèce, de la gravité de l'infraction, de la personnalité de son auteur et du caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction ; que le juge, s'il décide de ne pas aménager une peine d'emprisonnement sans sursis, doit en outre, soit constater une impossibilité matérielle de le faire, soit motiver spécialement sa décision au regard des faits de l'espèce, de la personnalité du prévenu et de sa situation matérielle, familiale et sociale ; qu'en condamnant la prévenue à une peine d'emprisonnement de deux ans dont un an ferme, sans s'expliquer sur le caractère inadéquat de toute autre sanction, ni se prononcer sur l'aménagement de la peine d'emprisonnement au regard de la situation matérielle, familiale et sociale de la prévenue ou constater l'impossibilité matérielle d'un tel aménagement, et alors qu'il lui appartenait, en tant que de besoin, de solliciter de l'intéressée des informations complémentaires propres à lui permettre de procéder à cet examen prescrit par la loi, la cour d'appel a méconnu les articles 132-19 du code pénal et 593 du code de procédure pénale. »

6. Le troisième moyen déposé par la SCP Waquet, Farge et Hazan critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné [T] [X] [D] à une peine de deux ans d'emprisonnement, dont un an avec sursis, alors « qu'en matière correctionnelle, une peine d'emprisonnement en partie sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire, et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; dans ce cas la peine d'emprisonnement ferme doit, si la personnalité et la situation du condamné le permettent et sauf impossibilité matérielle, faire l'objet d'une mesure d'aménagement ; en l'espèce et bien que Mme [X] [D] n'ait jamais été condamnée auparavant, la cour d'appel a prononcé une peine d'emprisonnement de deux ans dont un an ferme, non aménagée ab initio, sans s'expliquer concrètement sur le caractère inadéquat de toute autre sanction, ni motiver spécialement le refus d'aménagement de cette peine par la situation personnelle, familiale, sociale de Mme [X] [D] ou en constatant une impossibilité matérielle, alors même que la prévenue était présente aux débats et en mesure de donner toute information nécessaire à la mise en place d'un tel aménagement si la cour ne disposait pas de suffisamment d'éléments pour ce faire ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 132-19 du code pénal, ensemble l'article 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

7. Les moyens sont réunis.

Vu les articles 132-19 et 132-25 du code pénal et 464-2 du code de procédure pénale :

8. Il résulte de ces textes que si la peine d'emprisonnement ferme est supérieure à six mois et inférieure ou égale à un an au sens de l'article D. 48-1-1 du code de procédure pénale, son aménagement est le principe et le juge ne peut l'écarter que s'il constate que la situation ou la personnalité du condamné ne permettent pas son prononcé ou s'il relève une impossibilité matérielle de le faire. Dans ce cas, le juge doit motiver spécialement sa décision, de façon précise et circonstanciée, au regard des faits de l'espèce, de la personnalité et de la situation matérielle, familiale et sociale du condamné.

9. Il s'ensuit que le juge ne peut refuser d'aménager la peine au motif qu'il ne serait pas en possession d'éléments lui permettant d'apprécier la mesure d'aménagement adaptée ; dans ce cas, il doit ordonner d'une part l'aménagement de la peine, d'autre part la convocation du prévenu devant le juge de l'application des peines, en application de l'article 464-2, I, 2°, du code de procédure pénale.

10. Il ne peut pas davantage l'écarter au motif de l'absence d'éléments propres à caractériser un projet de réinsertion, ou, au motif qu'il ne dispose pas d'éléments suffisamment précis et actualisés : si le prévenu est comparant, le juge doit l'interroger sur sa situation personnelle et, le cas échéant, peut ordonner un ajournement de la peine aux fins d'investigations sur sa personnalité ou sa situation, en application de l'article 132-70-1 du code pénal.

11. L'arrêt attaqué, après avoir condamné Mme [X] [D] à la peine de deux ans d'emprisonnement dont un an avec sursis, énonce qu'en l'absence d'éléments suffisamment concrets sur la situation de celle-ci, le prononcé d'un aménagement ab initio de la partie ferme de cette peine ne peut être envisagé.

12. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a prononcé à l'égard du prévenu une peine d'emprisonnement d'un an, au sens de l'article D. 48-1-1 du code de procédure pénale, n'a pas justifié sa décision.

13. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 15 avril 2021, mais en ses seules dispositions relatives aux peines prononcées, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le seize février deux mille vingt-deux.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 21-82830
Date de la décision : 16/02/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 15 avril 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 16 fév. 2022, pourvoi n°21-82830


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.82830
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