LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 16 février 2022
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 178 F-D
Pourvoi n° Q 20-16.952
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 FÉVRIER 2022
1°/ M. [X] [K], domicilié [Adresse 3],
2°/ la société Mutuelle des architectes français (MAF), dont le siège est [Adresse 2],
ont formé le pourvoi n° Q 20-16.952 contre l'arrêt rendu le 13 janvier 2020 par la cour d'appel de Versailles (4e chambre), dans le litige les opposant :
1°/ à la SMABTP, dont le siège est [Adresse 9],
2°/ à la société Eiffage construction tertiaire, dont le siège est [Adresse 1],
3°/ au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis [Adresse 5], dont le siège est chez son syndic la société IFF gestion, dont le siège est [Adresse 11],
4°/ à la société Marignan Elysée, société en nom collectif, dont le siège est [Adresse 7], venant aux droits de la société Rueil Castellina,
5°/ à la société SMABTP, dont le siège est [Adresse 9], prise en qualité d'assureur de la société Eiffage construction résidentiel,
6°/ à la société Eiffage construction résidentiel, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4],
7°/ à la société Axa France IARD, dont le siège est [Adresse 6],
8°/ à la société MAAF assurances, dont le siège est [Adresse 10],
9°/ à la société Cimsol, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 8],
défendeurs à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Brun, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. [K] et de la MAF, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 5], après débats en l'audience publique du 11 janvier 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Brun, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à M. [K] et à la société Mutuelle des architectes français (la MAF) du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la SMABTP, les sociétés Eiffage construction tertiaire, Marignan Elysée et Eiffage construction résidentiel, la SMABTP, prise en sa qualité d'assureur de cette dernière, et les sociétés Axa France IARD, MAAF assurances et Cimsol.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 13 janvier 2020), la société Marignan Elysée a confié à M. [K], assuré auprès de la MAF, la maîtrise d'oeuvre de la construction d'un groupe d'immeubles dont les lots ont été vendus en l'état futur d'achèvement.
3. Le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis [Adresse 5] (le syndicat des copropriétaires), se plaignant de désordres, a, après expertise, assigné en indemnisation les intervenants à l'acte de construire, dont l'architecte et son assureur.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. M. [K] et la MAF font grief à l'arrêt de les condamner in solidum à payer diverses sommes au titre des désordres de salissures et de la présence d'algues rouges en façade, alors « que la responsabilité contractuelle de droit commun du maître d'oeuvre, tenu à une obligation de moyen, n'est engagée qu'en cas de faute de sa part, tenant à un non-respect de la réglementation applicable ou des règles de l'art, ou à une méconnaissance de son obligation de conseil dans ces hypothèses ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a condamné l'architecte et son assureur à réparer les conséquences d'un phénomène de salissures sur bandeaux, du fait de l'absence de couvertines accompagnées de larmiers qui auraient pu être posées au-dessus de ces bandeaux ; que pourtant, la cour a relevé que ni les règles de l'art ni la réglementation applicable n'imposaient la mise en oeuvre de couvertines sur les bandeaux ; qu'en prononçant dans ces conditions une condamnation de l'architecte et de l'assureur à réparer le désordre C, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
5. La cour d'appel a rappelé que, tenu d'une obligation générale de conseil, le maître d'oeuvre devait guider les choix de son client et attirer son attention sur les conséquences techniques de ceux-ci et sur la nécessité de réaliser certains ouvrages non prévus, mais indispensables pour atteindre le but recherché par le client.
6. Ayant relevé que les salissures dues au développement d'algues rouges sur les bandeaux de la façade étaient la conséquence de l'absence de couvertines accompagnées de larmiers, elle a retenu que, même si la mise en oeuvre de couvertines n'était imposée ni par la réglementation en vigueur ni par les règles de l'art, le phénomène d'algues rouges et le moyen de l'éviter étaient connus des constructeurs, de sorte qu'il appartenait à l'architecte soit d'aviser le maître d'ouvrage des conséquences du choix architectural retenu et de lui conseiller la pose de couvertines soit de lui proposer un projet architectural autre.
7. En l'état de ces énonciations et appréciations, la cour d'appel a pu retenir un manquement de l'architecte à son obligation de conseil engageant sa responsabilité contractuelle
8. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [K] et la société Mutuelle des architectes français aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [K] et la société Mutuelle des architectes français et les condamne in solidum à payer au syndicat des copropriétaires sis [Adresse 5] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize février deux mille vingt-deux.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat aux Conseils, pour M. [K] et la MAF
Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné in solidum M. [K] et la Maf à verser au syndicat des copropriétaires les sommes de 352.227,34 € HT et de 412.764 € HT (désordre C), outre TVA, actualisation selon la variation de l`indice BT 01 entre le 5 février 2014 et la date de l'arrêt, et honoraires de maîtrise d'oeuvre s'élevant à 10 % HT du montant HT des travaux,
Alors que la responsabilité contractuelle de droit commun du maître d'oeuvre, tenu à une obligation de moyens, n'est engagée qu'en cas de faute de sa part, tenant à un non-respect de la réglementation applicable ou des règles de l'art, ou à une méconnaissance de son obligation de conseil dans ces hypothèses ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a condamné l'architecte et son assureur à réparer les conséquences d'un phénomène de salissures sur bandeaux, du fait de l'absence de couvertines accompagnées de larmiers qui auraient pu être posées au-dessus de ces bandeaux ; que pourtant, la cour a relevé que ni les règles de l'art ni la réglementation applicable n'imposaient la mise en oeuvre de couvertines sur les bandeaux ; qu'en prononçant dans ces conditions une condamnation de l'architecte et de l'assureur à réparer le désordre C, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.