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16/02/2022 | FRANCE | N°19-25198

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 février 2022, 19-25198


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 février 2022

Rejet

Mme DARBOIS, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 127 F-D

Pourvoi n° H 19-25.198

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 16 FÉVRIER 2022

La so

ciété Investissement et conseil, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° H 19-25.198 ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 février 2022

Rejet

Mme DARBOIS, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 127 F-D

Pourvoi n° H 19-25.198

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 16 FÉVRIER 2022

La société Investissement et conseil, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° H 19-25.198 contre l'arrêt rendu le 17 octobre 2019 par la cour d'appel de Versailles (12e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Duralex international, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4],

2°/ à la société [M] et associés, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],

3°/ à la société JSA, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],

toutes deux prises en qualité de liquidateur de la société Duralex international,

défenderesses à la cassation.

La société Duralex international a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bessaud, conseiller référendaire, les observations de la SCP Marc Lévis, avocat de la société Investissement et conseil, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Duralex international et de la société [M] et associés, après débats en l'audience publique du 4 janvier 2022 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bessaud, conseiller référendaire rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Reprise d'instance

1. Il est donné acte à la société Investissement et conseil (la société IetC) de sa reprise d'instance contre la société Duralex international (la société Duralex), la société [M] et associés, en la personne de M. [W], et la société JSA, en la personne de M. [F], mandataires judiciaires, pris en leur qualité de liquidateurs de la société Duralex.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 17 octobre 2019), par une convention d'économies de charges conclue le 29 septembre 2010, la société IetC s'est engagée à réaliser, au profit de la société Duralex, une mission d'examen et d'analyse de ses coûts et charges d'exploitation dans le but de réaliser des économies sur divers postes. Les honoraires dûs à la société IetC étaient fixés à 50 % des économies obtenues.

3. Aux termes d'une seconde convention du 19 octobre 2010, la société IetC s'est engagée envers la société Duralex à identifier, gérer les demandes de subventions, aides ou primes (SAP) ou optimiser celles déjà obtenues, moyennant paiement d'un honoraire variable en fonction des SAP obtenues.

4. La société Duralex a signé avec la société Schneider un contrat ayant pour objet de déterminer les conditions de mise en oeuvre des installations d'économies d'énergie sur son site de production, son cocontractant s'engageant à lui garantir une performance énergétique annuelle minimale durant six années visant à des économies d'énergie de 245 000 euros par an.

5. En janvier 2014, la société Duralex a réglé à la société IetC le montant des deux premières factures. Le 7 mars 2014, elle a résilié le contrat à effet du 29 septembre 2014. La société IetC lui a facturé le second semestre.

6. Le 10 juin 2016, la société IetC a assigné la société Duralex en paiement des sommes restant dues au titre du contrat. Celle-ci a formé une demande reconventionnelle, notamment en restitution des sommes versées.

Examen des moyens

Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

7. La société IetC fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en paiement au titre de sa rémunération pour les économies de la mission d'efficacité énergétique, alors :

« 1°/ que les conventions doivent être exécutées de bonne foi ; qu'en se bornant à relever, pour débouter la société IetC de sa demande en paiement au titre de sa rémunération pour les économies de la mission d'efficacité énergétique et la condamner à restituer les rémunérations déjà perçues, que celle-ci ne pouvait, du fait de l'effet relatif des contrats, se prévaloir des dispositions contenues dans la convention conclue entre les sociétés Duralex et Schneider, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le devoir de loyauté n'obligeait pas la société Duralex à invoquer la garantie de résultats figurant dans le contrat de performance énergétique et l'indemnisation résultant de la sous-performance des prestations effectuées par la société Schneider, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134 et 1135 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

2°/ qu'en ne recherchant pas si le devoir de loyauté ne privait pas la société Duralex de la possibilité de se prévaloir, dans ses relations avec la société IetC, de la situation résultant de sa décision de ne pas exiger de la société Schneider le montant des économies contractuellement garanties, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1135 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

8. D'une part, dans la mesure où la société IetC ne prétendait pas que la société Duralex avait l'obligation contractuelle de poursuivre la société Schneider en exécution de la garantie prévue dans la convention conclue entre ces deux sociétés, mais se bornait à soutenir que la société Duralex devait prendre en compte, pour déterminer sa rémunération assise sur des économies, les économies contractuellement prévues et garanties par ce tiers, la cour d'appel n'avait pas à procéder à la recherche invoquée par la première branche, qui ne lui était pas demandée.

9. D'autre part, ayant relevé que la société IetC s'était engagée à ne prélever aucune rémunération dans le cas où il n'était justifié d'aucune économie et retenu, au titre des économies brutes, les seules économies réelles, soit 406 675 euros, ce dont il ressortait que la somme qu'aurait pu éventuellement obtenir la société Duralex au titre de l'engagement qu'avait pris la société Schneider envers elle sur la valeur des économies d'énergie qu'elle devait réaliser ne pouvait constituer une économie au sens du contrat conclu entre la société Duralex et la société IetC servant d'assiette à la rémunération de cette dernière, la cour d'appel n'avait pas à procéder à la recherche prétendument omise, invoquée par la seconde branche, que ses constatations rendaient inopérante.

10. Le moyen est donc inopérant.

Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en ses troisième, quatrième et cinquième branches

Enoncé du moyen

11. La société IetC fait le même grief à l'arrêt, alors :

« 3°/ qu'en se bornant à relever que la convention d'économies de charges n'évoquait jamais la question des subventions pour en déduire que les honoraires relatifs à l'obtention des subventions C2E devaient être calculés selon les termes de la convention de subventions, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si les subventions C2E, attachées aux investissements réalisés au titre de la convention d'économies de charge et ne figurant pas dans le rapport établi au titre de la convention de subventions, dont l'exécution avait au surplus été interrompue avant toute mise en oeuvre des demandes de subventions à la suite du refus exprimé par la société Duralex, ne relevaient pas de l'exécution de la convention d'économies de charges, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

4°/ qu'en se bornant à affirmer que les charges invoquées par la société Duralex devaient être retenues à hauteur de 563 956 euros, sans s'expliquer sur ce montant, en particulier au regard de la part d'investissement se rapportant à la mission efficacité énergétique, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

5°/ qu'une décision de justice doit se suffire à elle-même et être suffisamment motivée ; qu'en se bornant à affirmer que les charges invoquées par la société Duralex devaient être retenues à hauteur de 563 956 euros, sans viser ni analyser les pièces sur lesquelles elle se fondait pour retenir ce montant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

12. L'arrêt constate d'abord que les parties ont conclu deux conventions, d'économies de charges, d'un côté, et de subventions, d'un autre côté, qui avaient des objets distincts et, les interprétant, a considéré que le mode de calcul de la rémunération, au titre des économies, ne comportait pas dans son assiette l'obtention de subventions, lesquelles entraient dans le champ précisément de la seconde. Il relève ensuite que l'article 3.1 de la convention d'économies de charges ne fournit aucune précision sur le mode de calcul des charges constituées par le coût d'exploitation ou le prix de revient et/ou la charge financière ou d'exploitation à déduire du montant des économies brutes aux fins de déterminer le montant des économies nettes constituant l'assiette de calcul des honoraires, de sorte que le calcul établi par chacune des parties conduit à des résultats tout à fait opposés, la société Duralex retenant un montant de charges de 563 956 euros, qui aboutirait alors à des économies nettes négatives, dès lors que les charges sont supérieures au montant des économies brutes à hauteur de 456 128,60 euros, tandis que la société IetC retient un montant de 197 729 euros, qui aboutirait alors à des économies nettes de 208 946 euros. Il estime que les écarts entre les décomptes de charges s'expliquent notamment du fait que la société Duralex a pris en compte certaines charges de production que la société IetC n'a pas comptabilisées. Il retient enfin que, conformément aux règles d'interprétation des contrats, il convient d'interpréter la convention contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l'obligation, de sorte qu'il y a lieu d'admettre que les charges retenues par la société Duralex entrent bien dans la définition des « coûts d'exploitation ou prix de revient et/ou charge financière ou d'exploitation » qu'elle supporte.

13. En l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui s'est fondée sur les dispositions contractuelles, et dès lors que la contestation de la société IetC ne portait pas sur le caractère probant des pièces débattues mais sur le mode de calcul à retenir pour déterminer sa rémunération, a, en la motivant, légalement justifié sa décision.

14. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

15. La société IetC fait grief à l'arrêt de la condamner à restituer à la société Duralex la somme de 53 160 euros, outre intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, alors « que la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation entraînera, par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif ayant condamné la société IetC à restituer à la société Duralex la somme de 53 160 euros, outre intérêts au taux égal à compter de l'arrêt. »

Réponse de la Cour

16. Le rejet du premier moyen rend le moyen sans portée.

Et sur le moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

17. La société Duralex fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société IetC la somme de 148 467 euros, outre intérêts au taux contractuel de 1 % par mois de retard à compter du 1er mai 2016, alors :

« 1°/ que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que la société Duralex versait aux débats, sous les numéros 14-1, 14-2 et 14-3, trois tableaux analytiques des charges et produits pour les années 2014, 2015 et 2016 faisant apparaître les charges et produits tant prévisionnels que ceux effectivement réalisés au titre du comptage des énergies ; qu'en affirmant néanmoins, pour énoncer que la société Duralex ne démontre pas l'absence de résultat qu'elle allègue, ni le caractère manifestement excessif de la clause pénale en cause, que cette société ne produit aucun chiffrage des économies qu'elle a pu réaliser au titre des opérations de comptage, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du bordereau de pièces figurant dans les conclusions récapitulatives du 19 juin 2019 de la société Duralex, en méconnaissance du principe selon lequel le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

2°/ que toute décision de réduction d'une clause pénale doit être spécialement motivée, les juges du fond devant indiquer en quoi le montant de la pénalité contractuelle est manifestement excessif par rapport au préjudice effectivement subi par le créancier ; qu'en l'espèce, l'article 3-4 de la convention d'économies de charges prévoyait, en cas de carence du client, que serait due à la société IetC "une rémunération à titre forfaitaire égale à la moitié des économies prévisionnelles sur les 36 mois, définie sur la base de l'évaluation précisée dans le rapport" ; que la cour d'appel, après avoir estimé que l'action comptage en cause avait été abandonnée par carence de la société Duralex, a énoncé que la société IetC était en droit de solliciter paiement des honoraires correspondant au comptage, au prorata de sa réalisation, soit à hauteur de 79,5 % du montant prévu par application de l'article 3-4 précité ; qu'en réduisant ainsi le montant de cette clause pénale, sans prendre en considération le préjudice effectivement subi par la société IetC du fait de la défaillance de la société Duralex, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1152 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

18. L'arrêt relève que l'article 3.4 de la convention d‘économies de charges prévoit le paiement d'une rémunération à titre forfaitaire égale à la moitié des économies prévisionnelles sur 36 mois, définie sur la base de l'évaluation précisée dans le rapport de la société IetC, en cas de carence du client dans la mise en oeuvre de ses recommandations, dès lors qu'il les a acceptées, puis retient que la société Duralex, après avoir accepté la recommandation de l'action de comptage, l'a partiellement mise en oeuvre à hauteur de 80 %, avant de l'abandonner. Il en déduit que la société IetC est en droit de solliciter le paiement de ses honoraires en application du contrat, dans les limites de l'inexécution partielle de ses obligations par la société Duralex.

19. En l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a, sans dénaturer les pièces qui lui étaient soumises, légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois, principal et incident ;

Condamne la société Investissement et conseil aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Investissement et conseil et la condamne à payer à la société Duralex international la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize février deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Marc Lévis, avocat aux Conseils, pour la société Investissement et conseil.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société IetC de sa demande en paiement au titre de sa rémunération pour les économies de la mission d'efficacité énergétique ;

AUX MOTIFS QUE, sur les postes d'économies qui doivent être pris en compte, et le calcul des économies brutes, et d'abord sur le montant des économies brutes, les parties s'opposent sur le calcul des économies brutes sur les années 2014 à 2016, la société Duralex retenant le montant de ses économies réelles de consommation, soit 406.675 euros, tandis que la société IetC retient le montant de la garantie d'économie fixée au contrat conclu entre les sociétés Duralex et Schneider, soit la somme de 519.000 euros, estimant que si les économies réelles sont inférieures à la garantie donnée par la société Schneider, il appartenait à la société Duralex de mettre en cause la responsabilité de cette dernière et d'exiger l'application de la garantie, indiquant qu'à défaut de mise en cause de cette responsabilité, elle n'a pas à supporter le manquement de la société Schneider à ses obligations contractuelles ; que la société Duralex réplique qu'elle n'est pas tenue d'agir judiciairement contre la société Schneider, et qu'elle préfère tenter de résoudre ses difficultés par d'autres voies, ajoutant que la société IetC ne peut se prévaloir d'une garantie qui n'est pas prévue à son propre contrat ; qu'en vertu de l'effet relatif des contrats, la société IetC n'est pas fondée à se prévaloir des dispositions contenues dans la convention conclue entre les sociétés Duralex et Schneider, notamment en ce qui concerne la garantie d'économie, étant observé qu'une telle garantie n'est pas prévue à son propre contrat, et qu'elle s'est au contraire engagée à ne prélever aucune rémunération dans le cas où il n'est justifié d'aucune économie ; qu'il convient dès lors de retenir un montant d'économies brutes de 406.675 euros ;

1/ ALORS QUE les conventions doivent être exécutées de bonne foi ; qu'en se bornant à relever, pour débouter la société IetC de sa demande en paiement au titre de sa rémunération pour les économies de la mission d'efficacité énergétique et la condamner à restituer les rémunérations déjà perçues, que celle-ci ne pouvait, du fait de l'effet relatif des contrats, se prévaloir des dispositions contenues dans la convention conclue entre les sociétés Duralex et Schneider, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le devoir de loyauté n'obligeait pas la société Duralex à invoquer la garantie de résultats figurant dans le contrat de performance énergétique et l'indemnisation résultant de la sous-performance des prestations effectuées par la société Schneider, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134 et 1135 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

2/ ALORS, à tout le moins, QU'en ne recherchant pas si le devoir de loyauté ne privait pas la société Duralex de la possibilité de se prévaloir, dans ses relations avec la société IetC, de la situation résultant de sa décision de ne pas exiger de la société Schneider le montant des économies contractuellement garanties, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1135 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

ET AUX MOTIFS QUE, sur les subventions, les parties s'opposent également sur la manière d'imputer les subventions obtenues à hauteur de 141.296 euros - qui aboutissent également à des économies et donnent lieu à paiement d'honoraires proportionnels - la société IetC estimant qu'elles doivent être imputées sur les trois années 2014 à 2016, alors que la société Duralex prétend qu'il y a lieu de les amortir de manière linéaire en fonction de l'amortissement des investissements ; que cette dernière ajoute que la convention relative aux subventions prévoit une rémunération à hauteur de 15% des subventions obtenues, et non pas 50% comme le soutient la société IetC ; que cette dernière estime en outre qu'il n'y a pas lieu de faire application de cette convention relative aux subventions qui est une mission spécifique ne faisant pas partie de la mission d'Efficacité Énergétique ; que s'il est certain que les deux conventions - d'économies de charges d'une part, et de subventions d'autre part - ont des objets distincts, on ne comprend nullement les raisons pour lesquelles les honoraires relatifs à l'obtention des subventions devraient être calculés selon les termes de la convention économies de charges (qui n'évoque jamais la question des subventions), plutôt que selon les termes de la convention spécifique « subventions » ; que la cour retiendra dès lors que les honoraires relatifs à l'obtention des subventions doivent être calculés selon les modalités fixées à la seule convention d'aide à l'obtention de subventions ; qu'il résulte de l'article 3.2 de la convention d'aide à l'obtention de subventions du 19 octobre 2010 que : « la rémunération d'IetC est calculée en pourcentage de la totalité des sommes générées par la mission et ventilées pour chaque dossier d'après le barème cumulatif suivant : jusqu'à 50.000 euros = 20 %, de 50.000 à 200.000 euros = 15% (.....) », que deux subventions ayant été obtenues, l'une de 63.333 euros, l'autre de 77.963 euros, il convient d'appliquer un honoraire de 35%, de sorte que la société IetC peut prétendre à ce titre à un honoraire de 49.453,60 euros ; que conformément au mode de calcul retenu par les parties, il convient d'inclure ces honoraires dans les économies réalisées ; que le montant des économies brutes qu'il convient de retenir est ainsi de : 406.675 euros + 49.453,60 euros = 456.128,60 euros ;

3/ ALORS QU'en se bornant à relever que la convention d'économies de charges n'évoquait jamais la question des subventions pour en déduire que les honoraires relatifs à l'obtention des subventions C2E devaient être calculés selon les termes de la convention de subventions, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si les subventions C2E, attachées aux investissements réalisés au titre de la convention d'économies de charge et ne figurant pas dans le rapport établi au titre de la convention de subventions, dont l'exécution avait au surplus été interrompue avant toute mise en oeuvre des demandes de subventions à la suite du refus exprimé par la société Duralex, ne relevaient pas de l'exécution de la convention d'économies de charges, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

ET AUX MOTIFS QUE, sur les postes de charge qu'il convient de prendre en compte pour le calcul des économies nettes, ainsi qu'il a été démontré, l'article 3.1 de la convention ne fournit aucune précision à ce titre (coût d'exploitation ou prix de revient et/ou charge financière ou d'exploitation), de sorte que le calcul établi par chacune des parties (si l'on excepte le remplacement des compresseurs Air comprimé qui est contesté, dès lors que cette éventuelle charge supplémentaire n'a en fait pas d'incidence sur la solution apportée au litige) aboutit à des résultats tout à fait opposés, la société Duralex retenant un montant de charges de 563.956 euros ( qui aboutirait alors à des économies nettes négatives, dès lors que les charges sont supérieures au montant des économies brutes à hauteur de 456.128,60 euros) tandis que la société IetC retient un montant de 197.729 euros (qui aboutirait alors à des économies nettes de 208.946 euros) ; que les écarts entre les décomptes de charges s'expliquent notamment du fait que la société Duralex a pris en compte certaines charges de production que la société IetC n'a pas comptabilisées ; qu'ainsi qu'il a été démontré, les dispositions contractuelles sont trop imprécises pour déterminer exactement les charges qui doivent être prises en compte et ne permettent pas d'écarter les charges retenues par la société Duralex ; que conformément aux règles d'interprétation des contrats rappelées plus avant, il convient, dans le doute, d'interpréter la convention contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l'obligation, de sorte que la cour admettra que les charges retenues par la société Duralex entrent bien dans la définition des « coûts d'exploitation ou prix de revient et/ou charge financière ou d'exploitation » qu'elle supporte ; que les charges d'un montant de 563.956 euros étant supérieures aux économies brutes de 456.128,60 euros, il n'existe aucune économie nette, de sorte qu'en application des dispositions contractuelles la société IetC ne peut prétendre à aucune rémunération au titre des économies de la mission d'efficacité énergétique (travaux réalisés par la société Schneider) ; que le jugement dont appel sera donc confirmé en ce qu'il a dit que la société IetC ne pouvait prétendre à aucune rémunération à ce titre ;

4/ ALORS QU'en se bornant à affirmer que les charges invoquées par la société Duralex devaient être retenues à hauteur de 563.956 euros, sans s'expliquer sur ce montant, en particulier au regard de la part d'investissement se rapportant à la mission Efficacité énergétique, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

5/ ALORS, au demeurant, QU'une décision de justice doit se suffire à elle-même et être suffisamment motivée ; qu'en se bornant à affirmer que les charges invoquées par la société Duralex devaient être retenues à hauteur de 563.956 euros, sans viser ni analyser les pièces sur lesquelles elle se fondait pour retenir ce montant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société IetC à restituer à la société Duralex la somme de 53.160 euros, outre intérêts au taux égal à compter de l'arrêt ;

AUX MOTIFS QUE la cour ayant constaté l'absence d'économies au titre de la mission d'efficacité énergétique (travaux réalisés par la société Schneider), il convient d'ordonner à la société IetC - en application de l'article 3.1 de la convention qui prévoit l'absence de rémunération si aucune économie n'est réalisée - de restituer à la société Duralex la somme perçue à ce titre, soit 53.610 euros, outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation entraînera, par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif ayant condamné la société IetC à restituer à la société Duralex la somme de 53.160 euros, outre intérêts au taux égal à compter de l'arrêt. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Duralex international.

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société Duralex à payer à la société Investissement et Conseil la somme de 148 467 euros, outre intérêts au taux contractuel de 1 % par mois de retard à compter du 1er mai 2016 ;

AUX MOTIFS QU'il convient ici de préciser que l'opération de comptage des énergies correspond à une des recommandations faites par la société IetC, portant sur une mesure précise et automatique des consommations d'énergie impliquant l'installation d'appareils de comptage par différentes sociétés, et notamment la société Enerdis ; qu'il résulte de l'article 3-4 de la convention d'économies de charges que : « dès lors qu'une recommandation est acceptée et qu'IetC a précisé les modalités de mise en oeuvre, en cas de carence du client dans la mise en oeuvre de cette recommandation dans un délai de 3 mois après acceptation des recommandations et/ou dans le cas où le client ne communiquerait pas à IetC les documents et informations qu'il détient et nécessaires à la facturation de ses honoraires, rendant celle-ci impossible, il sera dû à IetC une rémunération à titre forfaitaire égale à la moitié des économies prévisionnelles sur les 36 mois, définie sur la base de l'évaluation précisée dans le rapport. » ; qu'il résulte en outre de l'article 1152 du code civil, dans sa version applicable au présent litige, que lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre. Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire ; qu'en application des dispositions précitées (article 3-4 de la convention), la société IetC sollicite paiement d'une somme forfaitaire de 224.101,90 euros, correspondant à la moitié des économies nettes qu'aurait généré l'opération de comptage si la société Duralex n'avait pas décidé de l'arrêter brutalement sans aucun préavis ; que la société Duralex conteste avoir stoppé brutalement l'opération de comptage, indiquant qu'elle a mis 80% de son installation sous comptage, et qu'il ne restait que 20% à installer correspondant au projet LED ; qu'elle indique que seul le projet LED a été arrêté car son coût était supérieur à l'économie attendue ; qu'il résulte effectivement des pièces de la société IetC (pièce n°10) que l'action comptage était réalisée, au 31 décembre 2014, à 74% pour le gaz et à 85% pour l'électricité, soit une action réalisée à 79,5 % ; que dès lors que l'action comptage a été acceptée par la société Duralex et réalisée à 80%, l'abandon d'un sous-projet (projet LED) est sans incidence sur l'action comptage qui se trouve bien abandonnée par carence de la société Duralex, et la société IetC est en droit de solliciter paiement des honoraires correspondant au comptage, au pro-rata de sa réalisation ; que la société Duralex soutient que l'article 3.4 précité constituerait une clause pénale manifestement excessive au regard de l'absence de résultat global des recommandations formulées par la société IetC, de sorte qu'il y aurait lieu de réduire à néant l'indemnité réclamée ; que ce faisant, la société Duralex ne produit aucun chiffrage des économies qu'elle a pu réaliser au titre de l'opération de comptage, ne démontrant pas dès lors l'absence de résultat qu'elle allègue, ni le caractère manifestement excessif de la clause ; que sur cette opération de comptage - même réalisée à 79,5% - la société IetC est dès lors en droit de solliciter paiement de ses honoraires, en fonction des économies et charges prévisionnelles - telles qu'évaluées et au demeurant non contestées - aboutissant à des économies nettes de 373.503 euros qu'il convient de retenir à hauteur de 79,5%, soit 296.934 euros ; que sur cette somme, la société IetC peut prétendre à une rémunération forfaitaire de 50% des économies prévisionnelles, soit la somme de 148.467 euros ; que le jugement dont appel sera donc infirmé sur le quantum de la somme due par la société Duralex ; que celle-ci sera donc condamnée au paiement de cette somme, outre intérêts au taux contractuel de 1% par mois de retard à compter de la date d'échéance de la facture, soit à compter du 1er mai 2016, et capitalisation des intérêts ;

1) ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis; que la société Duralex versait aux débats, sous les numéros 14-1, 14-2 et 14-3, trois tableaux analytiques des charges et produits pour les années 2014, 2015 et 2016 faisant apparaître les charges et produits tant prévisionnels que ceux effectivement réalisés au titre du comptage des énergies ; qu'en affirmant néanmoins, pour énoncer que la société Duralex ne démontre pas l'absence de résultat qu'elle allègue, ni le caractère manifestement excessif de la clause pénale en cause, que cette société ne produit aucun chiffrage des économies qu'elle a pu réaliser au titre des opérations de comptage, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du bordereau de pièces figurant dans les conclusions récapitulatives du 19 juin 2019 de la société Duralex, en méconnaissance du principe selon lequel le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

2) ALORS, en toute hypothèse, QUE toute décision de réduction d'une clause pénale doit être spécialement motivée, les juges du fond devant indiquer en quoi le montant de la pénalité contractuelle est manifestement excessif par rapport au préjudice effectivement subi par le créancier ; qu'en l'espèce, l'article 3-4 de la convention d'économies de charges prévoyait, en cas de carence du client, que serait due à la société IetC « une rémunération à titre forfaitaire égale à la moitié des économies prévisionnelles sur les 36 mois, définie sur la base de l'évaluation précisée dans le rapport » ; que la cour d'appel, après avoir estimé que l'action comptage en cause avait été abandonnée par carence de la société Duralex, a énoncé que la société IetC était en droit de solliciter paiement des honoraires correspondant au comptage, au prorata de sa réalisation, soit à hauteur de 79,5 % du montant prévu par application de l'article 3-4 précité ; qu'en réduisant ainsi le montant de cette clause pénale, sans prendre en considération le préjudice effectivement subi par la société IetC du fait de la défaillance de la société Duralex, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1152 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19-25198
Date de la décision : 16/02/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 16 fév. 2022, pourvoi n°19-25198


Composition du Tribunal
Président : Mme Darbois (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Marc Lévis, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:19.25198
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