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02/02/2022 | FRANCE | N°20-14296

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 02 février 2022, 20-14296


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 2 février 2022

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 110 F-D

Pourvoi n° C 20-14.296

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 2 FÉVRIER 2022

1°/ M. [B] [E],

2°/ Mme [U] [D], épouse [E],

dom

iciliés tous deux [Adresse 3],

ont formé le pourvoi n° C 20-14.296 contre l'arrêt rendu le 9 janvier 2020 par la cour d'appel de Bourges (chambre civile), dan...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 2 février 2022

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 110 F-D

Pourvoi n° C 20-14.296

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 2 FÉVRIER 2022

1°/ M. [B] [E],

2°/ Mme [U] [D], épouse [E],

domiciliés tous deux [Adresse 3],

ont formé le pourvoi n° C 20-14.296 contre l'arrêt rendu le 9 janvier 2020 par la cour d'appel de Bourges (chambre civile), dans le litige les opposant à la société Blanchet, Dauphin-Pigois, Vilaire, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Mornet, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. et Mme [E], de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Blanchet, Dauphin-Pigois, Vilaire, après débats en l'audience publique du 7 décembre 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Mornet, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bourges, 9 janvier 2020), suivant acte authentique reçu le 29 mars 2012 par M. [V] (le notaire), notaire associé de la société civile professionnelle Blanchet, Dauphin-Pigois, Vilaire (la SCP), M. et Mme [E] (les acquéreurs) ont acquis de la société F. Immo transaction (le vendeur) une maison en l'état futur d'achèvement dépendant d'un ensemble immobilier.

2. L'acte authentique précisait que les acquéreurs envisageaient de bénéficier d'un dispositif de défiscalisation et qu'ils avaient réalisé cette acquisition au titre d'une activité de loueur en meublé non professionnel.

3. À cet acte authentique était annexée une promesse de bail commercial consentie par les acquéreurs au vendeur le 28 décembre 2011, sur l'immeuble acquis, d'une durée de neuf ans, en vue de l'exploitation d'une résidence senior « au sens de l'agrément qualité visé à l'article L. 7232-3 du code du travail » sous condition suspensive notamment de l'entier achèvement de la résidence pour le premier semestre 2012, le vendeur s'obligeant à faire le nécessaire en vue de l'obtention de cet agrément et de son maintien pendant la durée du bail et à proposer certaines prestations à sa clientèle pendant toute la durée du bail.

4. Exposant que le vendeur, qui avait fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire le 17 décembre 2013, n'avait jamais payé les loyers prévus au bail commercial et n'avait pas mis en oeuvre les prestations de résidence senior qu'il s'était engagé à fournir, de sorte qu'ils n'avaient pu bénéficier de l'avantage fiscal, les acquéreurs ont notamment assigné la SCP en responsabilité et indemnisation.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Les acquéreurs font grief à l'arrêt de rejeter leur demande d'indemnisation dirigée contre la SCP, alors :

« 1°/ que le notaire est tenu d'éclairer les parties et d'appeler leur attention, de manière complète et circonstanciée, sur la portée et les effets des actes auxquels il est requis de donner la forme authentique, quand bien même leur engagement procéderai d'un accord antérieur, dès lors qu'au moment de cette authentification, cet accord n'a pas produit ses effets ou ne revêt pas un caractère immuable ; que le notaire n'est pas dispensé de son obligation de conseil par le seul fait d'annexer à l'acte notarié de vente un contrat conclu antérieurement qui contiendrait les informations légales litigieuses ; que la cour d'appel a constaté que l'acte notarié du 29 mars 2012 mentionnait en page 30 l'objectif de défiscalisation poursuivi par les acquéreurs qui entendaient bénéficier des dispositions dites de « l'amortissement [W] » ; que pour décider que la SCP notariale n'avait pas manqué à son obligation d'information et de conseil lors de la rédaction de l'acte notarié du 29 mars 2012, la cour d'appel a retenu que les acquéreurs avaient été pleinement informés, par les termes du bail commercial conclu antérieurement le 28 décembre 2011, annexé à l'acte de vente, des conditions légales permettant l'obtention des avantages fiscaux résultants du dispositif dit « Censi-[W] » et en particulier de la nécessité de l'obtention de l'agrément qualité visé à l'article L. 7232-1 du code du travail de sorte que le notaire n'était pas tenu de réitérer dans l'acte notarié une information qui leur avait été antérieurement délivrée ; qu'en statuant par de tels motifs, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 du même code ;

2°/ que le notaire est tenu professionnellement d'éclairer les parties sur les incidences fiscales des actes qu'il a reçus ainsi que de s'assurer de leur validité et de leur efficacité ; que dans leurs conclusions, les acquéreurs faisaient valoir que le notaire, dûment informé de leur objectif fiscal, lequel avait été déclaré en page 30 de l'acte notarié du 29 mars 2012, ne les avait à aucun moment informés des conditions requises pour pouvoir obtenir l'avantage fiscal escompté ni alertés sur le fait que les conditions n'étaient pas réunies au jour de la signature, l'acte notarié ne faisant pas même référence aux dispositions régissant l'investissement dit « [W] » et le bail commercial conclu le 28 décembre 2011, ne comportant pas davantage mention de ces dispositions ; qu'en retenant, pour débouter les acquéreurs de leur demande, que le bail commercial du 28 décembre 2011, annexé à l'acte notarié, comportait les informations légales requises et que le notaire n'avait donc pas à réitérer dans l'acte notarié une information qui leur avait été délivrée antérieurement dans le bail, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'acte notarié ou le bail annexé reproduisait les dispositions légales des articles 199 sexvicies du code général des impôts et des articles L 7232-1 et R. 7232-1 du code du travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, devenu 1240 du même code ;

3°/ que le notaire est tenu professionnellement d'éclairer les parties sur les incidences fiscales des actes qu'il a reçus ainsi que de s'assurer de leur validité et de leur efficacité ; que dans leurs conclusions, les acquéreurs faisaient valoir que le notaire instrumentaire, par ailleurs notaire du programme, dûment informé de leur objectif fiscal, lequel avait été déclaré en page 30 de l'acte notarié du 29 mars 2012, se devait de fournir aux acquéreurs l'ensemble des informations concernant les obligations à respecter afin d'obtenir l'avantage fiscal légalement prévu et que le notaire avait manqué à son obligation d'information et de conseil sur les conditions légales d'octroi de l'avantage fiscal dit « [W] en n'attirant notamment pas leur attention sur le fait qu'au jour de la signature de l'acte authentique de vente, les conditions n'étaient pas réunies ; qu'en retenant, pour débouter les acquéreurs de leur demande, que le bail commercial du 28 décembre 2011, annexé à l'acte notarié du 29 mars 2012, comportait les informations requises et que le notaire n'avait donc pas à réitérer une information qui leur avait été délivrée antérieurement dans le bail, sans rechercher si l'acte notarié attirait précisément l'attention des acquéreurs sur le fait qu'au jour de la signature de l'acte, les conditions légales pour bénéficier de l'avantage fiscal n'étaient pas réunies, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 du même code. »

Réponse de la Cour

6. Se fondant sur les mentions de l'acte authentique et de la promesse de bail commercial, le cour d'appel a estimé, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, sans dispenser la SCP de son obligation de conseil ni être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que les acquéreurs avaient été pleinement informés des conditions légales permettant l'obtention des avantages fiscaux résultant du dispositif en cause et en particulier de la nécessité de l'obtention de l'agrément qualité visé à l'article L. 7232-1 du code du travail et de l'établissement d'un bail pour une durée minimale de neuf ans, de sorte qu'elle a pu en déduire que la responsabilité de la SCP n'était pas engagée.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme [E] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société civile professionnelle Blanchet, Dauphin-Pigois, Vilaire la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux février deux mille vingt-deux.

Le conseiller rapporteur le president

Le greffier de chambre

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [E].

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté les époux [E] de l'ensemble de leurs demandes ;

AUX MOTIFS QUE par acte authentique établi le 29 mars 2012 par Me [V], notaire associé de la Scp Blanchet, Dauphin-Pigois, Vilaire, la société F. Immo Transaction a vendu à M. et Mme [E] une maison individuelle en l'état futur d'achèvement dépendant d'un ensemble immobilier dénommé [Adresse 4]" sur la commune de Mehun Sur Yèvre (18) moyennant un prix de 145 000 € ; que la page 30 de cet acte authentique comportait un paragraphe intitulé « Investissement par l'acquéreur» ainsi libellé « l'acquéreur envisage de bénéficier des dispositions dites de l'amortissement [W]. Il déclare réaliser l'acquisition du ou des biens présentement réservés dans le cadre de son activité de loueur en meublé non professionnel. Il déclare s'être engagé irrévocablement à conclure, le jour de la livraison, un bail commercial meublé, portant sur le ou les biens objet du présent acte de vente en l'état futur d'achèvement avec la société d'exploitation F. Immo Gestion [Adresse 2], en suite de la promesse à bail faite par ladite société demeurée ci-annexée après mention »; qu'il est constant qu'a cet acte notarié a été annexé par le notaire le bail commercial conclu préalablement le 28 décembre 2011 entre M. et Mme [E], d'une part, et la société F. Immo Gestion locataire, d'autre part, et rappelant expressément que : - la résidence sera exploitée par le preneur en résidence senior éligible à l'amendement numéro 11 dit « amendement [W] » numéro 1494 à la loi de finances rectificative pour 2009 (article 1), - le preneur précise expressément que pour que la résidence soit ouverte et fonctionne, elle doit être entièrement achevée en tous ses composants tant privatifs (appartement, annexe, parking, garage, etc.) que communs (parties communes, équipements collectifs, extérieurs, etc.) (article 2), - le bail portera sur une durée de 9 années et autant de mois supplémentaires que nécessaire pour se terminer le 30 décembre 2021 (article 3), - le preneur entend exercer dans les locaux présentement loués, de même que dans l'ensemble des autres locaux composant la résidence, l'activité d'exploitation d'une « résidence seniors » au sens des dispositions de l'agrément « qualité » visé à l'article L 7232-3 du code du travail (article 4), - pendant la durée du bail, la société preneur s'oblige (...) à faire le nécessaire en vue de l'obtention de l'agrément « qualité » de la résidence seniors et veillera à ce que cet agrément soit maintenu pendant toute la durée du bail (...) En toute hypothèse, le preneur s'engage à proposer à sa clientèle pendant toute la durée du bail les prestations minimales suivantes : accueil, réception, blanchisserie et fourniture de linge, entretien et nettoyage des logements à la demande (...) (article 6) ; que selon l'article 199 sexvicies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au jour de la conclusion de l'acte authentique de vente du 29 mars 2012 :

« I. - Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 13 peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu au titre de l'acquisition, à compter du ler janvier 2009 et jusqu'au 31 décembre 2012, d'un logement neuf ou en l'état futur d'achèvement ou d'un logement achevé depuis au moins quinze ans ayant fait l'objet d'une réhabilitation ou d'une rénovation ou qui fait l'objet de travaux de réhabilitation ou de rénovation si les travaux de réhabilitation ou de rénovation permettent, après leur réalisation, de satisfaire à l'ensemble des performances techniques mentionnées au Il de l'article 2 quindecies B de l'annexe III, qu'ils destinent à une location meublée n'étant pas exercée à titre professionnel et dont le produit est imposé dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux lorsque ce logement est compris dans :

1° Un établissement mentionné aux 6° ou 7° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, une résidence avec services pour personnes âgées ou handicapées ayant obtenu l'agrément "qualité" visé à l'article L. 7232-1 du code du travail ou l'ensemble des logements affectés à l'accueil familial salarié de personnes âgées ou handicapées, prévu par les articles L. 444-1 à L. 444-9 du code de l'action sociale et des familles géré par un groupement de coopération sociale ou médicosociale ;

2° Une résidence avec services pour étudiants ;

3° Une résidence de tourisme classée ;

4° Un établissement délivrant des soins de longue durée, mentionne audixième alinéa du 3° de l'article L. 6143- du code de la santé publique, et comportant un hébergement, à des personnes n'ayant pas leur autonomie de vie dont l'état nécessite une surveillance médicale constante et des traitements d'entretien.

II - La réduction d'Impôt est calculée sur le prix de revient des logements retenu pour sa fraction inférieure à 300 000 €. Lorsqu'elle est acquise au titre d'un logement achevé depuis au moins quinze ans et qui fait l'objet de travaux de réhabilitation, elle est calculée sur le prix d'acquisition majoré du montant de ces travaux.

Le taux de la réduction d'impôt est de 25 % pour les logements acquis en 2009 et en 2010, et de 18% pour les logements acquis à compter de l'année 2011.

Toutefois, pour les logements acquis en 2012, le taux de la réduction d'impôt est de 14 %. Ces dispositions ne s'appliquent pas aux acquisitions pour lesquelles le contribuable justifie qu'il a pris, au plus tard le 31 décembre 2011, l'engagement de réaliser un investissement immobilier. Dans ce cas, la réduction d'impôt s'applique au taux en vigueur au 31 décembre 2011 pour les logements acquis en 2011. A titre transitoire, l'engagement de réaliser un Investissement immobilier peut prendre la forme d'une réservation, à condition qu'elle soit enregistrée chez un notaire ou au service des impôts avant le 31 décembre 2011 et que l'acte authentique soit passé au plus tard le 31 mars 2012.

Lorsque le logement est détenu en indivision, chaque indivisaire bénéficie de la réduction d'impôt dans la limite de la quote-part du prix de revient, majoré le cas échéant des dépenses de travaux de réhabilitation, correspondant à ses droits dans l'indivision.

La réduction d'impôt est répartie sur neuf années.

Pour les logements acquis neufs, en l'état futur d'achèvement ou achevés depuis au moins quinze ans et ayant fait l'objet d'une réhabilitation, elle est accordée au titre de l'année d'achèvement du logement ou de celle de son acquisition si elle est postérieure, et imputée sur l'impôt dû au titre de cette même année puis sur l'impôt dû au titre de chacune des huit années suivantes à raison d'un neuvième de son montant total au titre de chacune de ces années.

Pour les logements achevés depuis au moins quinze ans et qui font l'objet de travaux de réhabilitation, elle est accordée au titre de l'année d'achèvement de ces travaux et imputée sur l'impôt dû au titre de cette môme année puis sur l'impôt dû au titre de chacune des huit années suivantes à raison d'un neuvième da son montant total au titre de chacune de ces années.

Lorsque la fraction de la réduction d'impôt Imputable au titre d'une année d'imposition excède l'impôt de par le contribuable au titre de cette même année, le solde peut être imputé sur l'impôt dû au titre des années suivantes jusqu'à la sixième année inclusivement.

III. - Le propriétaire doit s'engager à louer le logement pendant au moins neuf ans à l'exploitant de l'établissement ou de la résidence.

Cette location doit prendre effet dans le mois qui suit la date :

1°) d'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure, pour les logements acquis neuf ou en l'état futur d'achèvement ;

2°) d'acquisition pour les logements neufs achevés depuis au moins quinze ans ayant fait l'objet d'une réhabilitation ;

3°) d'achèvement des travaux pour les logements achevés depuis au moins quinze ans et qui font l'objet de travaux de réhabilitation. (..) » ;

qu'il apparaît, ainsi, que M. et Mme [E] avaient été pleinement informés, par les termes précis et circonstanciés contenus dans le bail commercial annexé à l'acte de vente, des conditions légales permettant l'obtention des avantages fiscaux résultants du dispositif dit «Censi-
[W]» et, en particulier, de la nécessité de l'obtention de l'agrément qualité visé à l'article L. 7232-1 du code du travail et de l'établissement d'un bail pour une durée minimale de 9 ans ; qu'il en résulte qu'il n'incombait pas au notaire, qui n'a pas à répondre de la défaillance ultérieure des contractants librement choisis par ses clients, en application du devoir de conseil auquel il était tenu, de réitérer auprès des intimés une information qui leur avait été antérieurement et pleinement délivrée, de sorte que, contrairement à ce qui a été retenu par le tribunal, le manquement du notaire à ce devoir n'apparaît nullement établi en l'espèce ;

1/ ALORS QUE le notaire est tenu d'éclairer les parties et d'appeler leur attention, de manière complète et circonstanciée, sur la portée et les effets des actes auxquels il est requis de donner la forme authentique, quand bien même leur engagement procèderait d'un accord antérieur, dès lors qu'au moment de cette authentification, cet accord n'a pas produit ses effets ou ne revêt pas un caractère immuable ; que le notaire n'est pas dispensé de son obligation de conseil par le seul fait d'annexer à l'acte notarié de vente un contrat conclu antérieurement qui contiendrait les informations légales litigieuses ; que la cour d'appel a constaté que l'acte notarié du 29 mars 2012 mentionnait en page 30 l'objectif de défiscalisation poursuivi par les acquéreurs qui entendaient bénéficier des dispositions dites de « l'amortissement [W] » ; que pour décider que la scp notariale n'avait pas manqué à son obligation d'information et de conseil lors de la rédaction de l'acte notarié du 29 mars 2012, la cour d'appel a retenu que les époux [E] avaient été pleinement informés, par les termes du bail commercial conclu antérieurement le 28 décembre 2011, annexé à l'acte de vente, des conditions légales permettant l'obtention des avantages fiscaux résultants du dispositif dit « Censi-[W] » et en particulier de la nécessité de l'obtention de l'agrément qualité visé à l'article L. 7232-1 du code du travail de sorte que le notaire n'était pas tenu de réitérer dans l'acte notarié une information qui leur avait été antérieurement délivrée ; qu'en statuant par de tels motifs, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 du même code ;

2/ ALORS QUE le notaire est tenu professionnellement d'éclairer les parties sur les incidences fiscales des actes qu'il a reçus ainsi que de s'assurer de leur validité et de leur efficacité ; que dans leurs conclusions, M. et Mme [E] faisaient valoir que le notaire, dûment informé de leur objectif fiscal, lequel avait été déclaré en page 30 de l'acte notarié du 29 mars 2012, ne les avait à aucun moment informés des conditions requises pour pouvoir obtenir l'avantage fiscal escompté ni alertés sur le fait que les conditions n'étaient pas réunies au jour de la signature, l'acte notarié ne faisant pas même référence aux dispositions régissant l'investissement dit « [W] » et le bail commercial conclu le 28 décembre 2011, ne comportant pas davantage mention de ces dispositions ; qu'en retenant, pour débouter les acquéreurs de leur demande, que le bail commercial du 28 décembre 2011, annexé à l'acte notarié, comportait les informations légales requises et que le notaire n'avait donc pas à réitérer dans l'acte notarié une information qui leur avait été délivrée antérieurement dans le bail, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'acte notarié ou le bail annexé reproduisait les dispositions légales des articles 199 sexvicies du code général des impôts et des articles L 7232-1 et R. 7232-1 du code du travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, devenu 1240 du même code ;

3/ ALORS QUE le notaire est tenu professionnellement d'éclairer les parties sur les incidences fiscales des actes qu'il a reçus ainsi que de s'assurer de leur validité et de leur efficacité ; que dans leurs conclusions, M. et Mme [E] faisaient valoir que le notaire instrumentaire, par ailleurs notaire du programme, dûment informé de leur objectif fiscal, lequel avait été déclaré en page 30 de l'acte notarié du 29 mars 2012, se devait de fournir aux acquéreurs l'ensemble des informations concernant les obligations à respecter afin d'obtenir l'avantage fiscal légalement prévu et que le notaire avait manqué à son obligation d'information et de conseil sur les conditions légales d'octroi de l'avantage fiscal dit « [W] » en n'attirant notamment pas leur attention sur le fait qu'au jour de la signature de l'acte authentique de vente, les conditions n'étaient pas réunies ; qu'en retenant, pour débouter les acquéreurs de leur demande, que le bail commercial du 28 décembre 2011, annexé à l'acte notarié du 29 mars 2012, comportait les informations requises et que le notaire n'avait donc pas à réitérer une information qui leur avait été délivrée antérieurement dans le bail, sans rechercher si l'acte notarié attirait précisément l'attention des acquéreurs sur le fait qu'au jour de la signature de l'acte, les conditions légales pour bénéficier de l'avantage fiscal n'étaient pas réunies, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 du même code.

Le greffier de chambre


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 20-14296
Date de la décision : 02/02/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bourges, 09 janvier 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 02 fév. 2022, pourvoi n°20-14296


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.14296
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