LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 2 février 2022
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 109 F-D
Pourvois n°
A 18-23.463
K 19-25.109 JONCTION
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 FÉVRIER 2022
I. M. [S] [L], domicilié [Adresse 1],
a formé le pourvoi n° A 18-23.463 contre un arrêt rendu le 10 juillet 2018 par la cour d'appel de Reims (chambre civile, 1re section), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Le Château, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à M. [O] [F], domicilié [Adresse 3],
défendeurs à la cassation.
II. M. [S] [L], a formé le pourvoi n° K 19-25.109 contre l'arrêt rendu le 17 septembre 2019 par la cour d'appel de Reims (chambre civile, 1re section), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [O] [F],
2°/ à la société Le Château, société civile immobilière,
3°/ à la société Ph Contant, B Cardon, A Bortolus, société d'administrateurs judiciaires, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4],
défendeurs à la cassation.
Sur le pourvoi n° A 18-23.463 :
La société civile immobilière Le Château a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi provoqué contre le même arrêt ;
Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
La demanderesse au pourvoi provoqué invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt ;
Sur le pourvoi n° K 19-25.109 :
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Les dossiers ont été communiqués au procureur général.
Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Alain Bénabent et de la SCP Meier-Bourdeau Lécuyer et associés, avocats de M. [L], de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société Le Château et de la société Ph. Contant, B. Cardon, A Bortolus, de la SCP Ohl et Vexliard, avocat de M. [F], après débats en l'audience publique du 14 décembre 2021 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Jonction
1. En raison de leur connexité, les pourvois n° A 18-23.463 et K 19-25.109 sont joints. Faits et procédure
2. Selon les arrêts attaqués (Reims, 10 juillet 2018 et 17 septembre 2019), en 2007, la société civile immobilière Le Château (la SCI) a confié à M. [L], entrepreneur de travaux agricoles et ruraux, la création d'un étang à proximité du château dont elle est propriétaire. Elle a chargé M. [F], hydrogéologue, d'élaborer le dossier de déclaration de la création de l'étang.
3. La SCI a refusé de payer la facture de M. [L] au motif que celle-ci n'était pas conforme au devis et que les travaux ne pouvaient être réceptionnés car l'étang creusé n'était pas étanche.
4. Après expertise, la SCI a assigné M. [L] et M. [F] aux fins d'indemnisation de ses préjudices.
5. M. [L] a formé un recours en révision contre la décision l'ayant condamné à indemniser le maître d'ouvrage.
Examen des moyens
Sur les premier et troisième moyens du pourvoi principal n° A 18-23.463 et sur le moyen, pris en sa cinquième branche, du pourvoi n° K 19-25.109, ci-après annexés
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le deuxième moyen du pourvoi principal n° A 18-23.463 et sur le moyen du pourvoi provoqué n° A 18-23.463, réunis
Enoncé des moyens
7. Par son deuxième moyen, M. [L] fait grief à l'arrêt du 10 juillet 2018 de le déclarer seul responsable du dommage subi par la SCI et de rejeter sa demande de garantie formée contre M. [F], alors « que méconnaît son devoir de conseil l'hydrogéologue, chargé d'élaborer le dossier de déclaration de création d'un plan d'eau, qui se borne à reprendre dans son dossier les éléments géotechniques transmis par le terrassier du maître de l'ouvrage sans attirer l'attention de ce dernier sur l'insuffisance des éléments communiqués par un entrepreneur dépourvu de compétences techniques en la matière ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »
8. Par son moyen, la SCI fait grief à l'arrêt du 10 juillet 2018 de rejeter ses demandes dirigées contre M. [F], après avoir déclaré M. [L] seul responsable du dommage subi, alors « que méconnaît son devoir de conseil l'hydrogéologue, chargé d'élaborer le dossier de déclaration de création d'un plan d'eau, qui se borne à reprendre dans son dossier les éléments géotechniques transmis par le terrassier du maître de l'ouvrage sans attirer l'attention de ce dernier sur l'insuffisance des éléments communiqués par un entrepreneur dépourvu de compétences techniques en la matière ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
9. La cour d'appel a relevé que le maître d'ouvrage avait exclu toute étude géotechnique de la mission confiée à M. [F] et qu'il lui avait transmis les éléments techniques recueillis auprès de l'entrepreneur en charge des travaux.
10. Elle a souverainement retenu que M. [F] n'était pas chargé de vérifier ces éléments et a pu en déduire qu'il n'avait pas manqué à son devoir de conseil en se fondant sur ceux-ci pour accomplir sa mission.
11. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche, du pourvoi n° K 19-25.109
Enoncé du moyen
12. M. [L] fait grief à l'arrêt du 17 septembre 2019 de rejeter son recours en révision, alors « que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en retenant, pour écarter l'intention qu'avait eue la SCI Le Château de dissimuler l'étude réalisée en 2007 par un bureau d'études hydrogéotechnique, d'un côté, "que le fait que la source soit asséchée apparaissait plutôt préjudiciable à la SCI Le Château, cet élément rendant plus complexe la réalisation des travaux qu'elle avait commandés" et, de l'autre côté, "que le maître de l'ouvrage n'avait objectivement aucun intérêt à occulter volontairement les éléments contenus dans cette étude", lorsqu'il résultait au contraire du fait que cet élément complexifiait le chantier, ainsi que le faisait valoir M. [L], que la SCI Le Château avait intérêt à dissimuler cette étude, d'abord afin d'abaisser le prix des travaux, puis, lors des opérations d'expertise, en privant l'expert de cet élément d'appréciation des causes du dommage, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour
13. La cour d'appel a retenu que l'ignorance des difficultés révélées par l'étude hydrogéotechnique du 11 septembre 2007 était de nature à rendre plus complexe la création de l'étang.
14. Elle a pu en déduire, sans se contredire, que le maître d'ouvrage n'avait pas d'intérêt à occulter volontairement cette étude.
15. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le moyen, pris en ses trois premières branches, du pourvoi n° K 19-25.109
Enoncé du moyen
16. M. [L] fait grief à l'arrêt du 17 septembre 2019 de rejeter son recours en révision, alors :
« 1°/ que la fraude alléguée à l'appui d'un recours en révision doit avoir eu un rôle déterminant dans la décision attaquée ; que tel est le cas lorsque l'élément dissimulé était de nature à établir une pluralité de causes du dommage et à exonérer ainsi au moins partiellement le défendeur de sa responsabilité ; que, pour juger indifférente la dissimulation de l'étude réalisée en 2007 par un bureau d'études hydrogéotechnique, ayant révélé que "la source située près de la chapelle était sèche le 17 août 2007 ", contrairement à l'affirmation de M. [F], dans son rapport dressé le 4 septembre 2007, selon laquelle cette source était pérenne et s'écoulait, la cour d'appel a retenu que " les eaux de cette source ne devaient servir qu'à une oxygénation de l'étang " et que la cause du dommage résidait dans l'insuffisance de la couche d'argile et non pas dans le débit de la source ; qu'en statuant ainsi, lorsqu'il ressortait du rapport d'expertise, outre du devis de M. [L] et du dossier établi par M. [F], que la source devait non seulement oxygéner, mais encore alimenter l'étang, de sorte que son assèchement était de nature à concourir au dommage, résidant dans l'abaissement du niveau du plan d'eau, la cour d'appel a violé l'article 595, alinéa 1er, du code de procédure civile et l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°/ que toute décision doit être motivée ; qu'il ressort des conclusions d'appel de M. [L] qu'il se prévalait non seulement du débit de la source, mais encore d'importantes venues d'eau, qui avaient également été mises en évidence par l'étude de 2007 et qui avaient concouru aux difficultés rencontrées lors du chantier, ainsi qu'à la réalisation du dommage ; qu'en délaissant les conclusions de M. [L] sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que le juge ne doit pas dénaturer les éléments de la cause ; que M. [L] précisait, dans ses conclusions, que les informations que recelait l'étude réalisée en 2007 auraient pu modifier l'appréciation portée tant par l'expert que par les juges, sur une éventuelle faute du maître d'ouvrage qui, en retenant ces informations, n'avait pas permis à M. [L] d'évaluer la complexité du chantier et de prendre les précautions nécessaires ou de refuser d'intervenir ; qu'en énonçant que l'incidence que l'étude réalisée en 2007 par un bureau d'études hydrogéotechnique aurait pu avoir sur la décision des juges n'était pas explicitée par M. [L] la cour d'appel a dénaturé ses conclusions. »
Réponse de la Cour
17. La cour a souverainement retenu qu'il n'était pas établi que la SCI avait sciemment dissimulé l'étude hydrogéotechnique du 11 septembre 2007 de sorte que sa non-communication ne constituait pas une manoeuvre frauduleuse.
18. Le moyen, en ce qu'il s'attaque à des motifs surabondants tenant à l'absence de caractère décisif de la pièce non communiquée, est, dès lors, inopérant.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Condamne M. [L] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. [L] à payer à la société civile immobilière Le Château la somme de 5 000 euros et rejette les autres demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux février deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat aux Conseils, pour M. [L] (demandeur au pourvoi principal n° A 18-23.463)
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir déclaré M. [L] responsable du dommage subi par la Sci Le Château et de l'avoir condamné à verser à la SCI des dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE le débiteur d'une obligation contractuelle est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part ; que Sur la responsabilité de M. [S] [L] suivant le devis établi le 21 juin 2006 par M. [S] [L] et accepté par la Sci Le Château, le premier s'est engagé envers la seconde à réaliser « un plan d'eau d'environ 7000 m² après autorisation de la police de l'eau », avec « alimentation par la source et rejet par fossé existant dans le bois, d'une profondeur comprise entre 1,50 et 3 mètres », le tour du plan d'eau devant être ceinturé en argile compactée et les bordures devant être en pente douce ; que le devis de M. [S] [L] ayant été accepté par la Sci Le Château, la description des travaux faites par le premier a pris valeur d'engagements contractuels envers la seconde ; qu'or, il est constant que les travaux tels que prévus au devis du 21 juin 2006 n'ont jamais pu être totalement réalisés ; qu'en effet, la réalisation du projet impliquait que la couche d'argile soit présente à 2 ou 3 mètres de profondeur et que cette argile soit utilisée pour « ceinturer » le tour du plan d'eau, alors que M. [S] [L] a découvert en procédant aux travaux de creusement de l'étang que la hauteur de la couche de gravier atteignait six mètres, ce qui empêchait l'accès à la couche d'argile située en dessous ; qu'il en est résulté que M. [S] [L] n'a pas pu « ceinturer » les bordures de l'étang en argile compactée, qu'il a dû lui substituer de la terre végétale, plus perméable, et que l'étang ainsi créé n'a pas retenu l'eau autant qu'espéré, ce qui a entraîné une autre conséquence négative : la source qui devait alimenter l'étang s'est avérée insuffisante, poussant ainsi M. [S] [L] à créer une alimentation d'eau supplémentaire en détournant des eaux du fossé latéral au canal de la Marne au Rhin, solution qui n'est pas pérenne puisque non autorisée par l'Administration ; que M. [S] [L] ne peut invoquer aucune cause étrangère pour s'exonérer de l'inexécution de ses obligations contractuelles, car il lui appartenait de sonder sur le périmètre du site retenu pour creuser l'étang, afin de s'assurer qu'il y trouverait bien l'argile à la profondeur espérée et en quantité suffisante ; qu'il reconnaît avoir procéder lui-même au sondage préparatoire, en 2005, avant l'établissement de son devis ; que selon ce sondage, le premier mètre de profondeur était constitué de terre végétale, puis de deux mètres de grève, l'argile étant située en-dessous ; que toutefois, M. [S] [L] a reconnu devant l'expert judiciaire qu'il n'avait pas effectué ce sondage sur le périmètre de l'étang à créer, mais à 50 mètres de là ; qu'il a également reconnu devant l'expert qu'il avait interrompu le sondage dès que la surface de la couche argileuse avait été atteinte (rapport de M. [E] p.10) ; que l'expert judiciaire souligne à juste titre la légèreté de M. [S] [L] qui, pour établir son devis, s'est contenté d'effectuer un seul sondage, qui plus est à 50 mètres environ du périmètre retenu pour creuse l'étang, alors que si M. [S] [L] avait effectué plusieurs sondages sur le site même de l'étang il se serait rendu compte de l'épaisseur de la couche de graviers et du caractère irréalisable du projet tel qu'il ressort de son devis du 21 juin 2006 ; que M. [S] [L] ne peut valablement regretter que l'expert judiciaire n'ait pu recourir à un sapiteur, car les éléments de la cause (qui ressortent d'ailleurs des déclarations de M. [S] [L] lui-même en ce qui concerne l'inadéquation du sondage préalable qu'il a réalisé) sont suffisants pour caractériser le non-respect de ses obligations ; qu'en outre, le débat qu'il instaure sur le fait qu'il ne se serait jamais engagé à créer un étang totalement étanche, avec un niveau d'eau stable et permanent, est sans utilité : il a été démontré que l'absence d'apport d'argile tel que prévu au devis crée une perte d'eau ne permettant plus un remplissage par la seule source, tel que le devis le prévoyait, et que la solution palliative adoptée (dérivation des eaux du fossé longeant le canal) n'est pas pérenne puisqu'illicite ; qu'enfin, M. [S] [L] ne peut se retrancher derrière l'accord donné par le maître d'ouvrage au cours des travaux pour substituer à l'argile de la terre végétale, puisque la Sci Le Château n'avait plus le choix qu'entre renoncer purement et simplement à son projet d'étang et tenter cette solution alternative qu'il lui suggérait, étant précisé qu'il appartenait à M. [S] [L], en sa qualité de professionnel, de prodiguer à sa cliente des conseils avisés pour faire face à la situation qu'il avait lui-même créée par sa faute ; que par conséquent, M. [S] [L] doit être déclaré responsable des conséquences dommageables de l'inexécution de ses engagements contractuels ; que le jugement déféré sera confirmé sur ce point ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE Sur la responsabilité l'article 1147 du code civil dispose : « le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part » ; qu'en outre, engage sa responsabilité quasi-délictuelle, le professionnel qui manque à son devoir de conseil ; que Sur la responsabilité de M. [L] en l'espèce, l'expert conclut que le devis de M. [L] et le dossier de M. [F] étaient établis dans l'hypothèse d'une pièce étanche ; qu'il résulte, en effet, du devis établi par M. [L] le 21 juin 2006 et de la facture du 15 mai 2009, que les parties avaient convenu de réaliser un étang ceinturé d'argile ; qu'or, l'utilisation du terme étang et la précision relative au recouvrement des berges avec de l'argile indiquent que la prestation contractuelle portait sur la réalisation d'un plan d'eau « en eau » ; que la déclaration de création du plan d'eau, telle qu'elle est rédigée, confirme que les parties avaient convenu de la réalisation d'un plan d'eau à niveau constant et non d'un plan d'eau dont le niveau fluctue au point d'être partiellement asséché ; que M. [F], rédacteur du document, y précise, en effet que « les berges doivent être conçues de manière à conserver une hauteur d'eau minimum en étiage » et que l'excavation des argiles de fond doit être réalisée afin de « tapisser les berges jusqu'à une certaine hauteur pour bloquer les eaux et maintenir en eau le plan d'eau, même en étiage sévère de la nappe des alluvions » ; que le fait que l'hydrogéologue précise que le tapissage des berges est destiné à maintenir le plan d'eau en eau, malgré un étiage sévère des nappes, démontre la volonté des contractants de réaliser un étang dont le niveau est stable ; qu'or, il est constant que le plan d'eau réalisé sur le terrain de la Sci Le Château n'est pas en eau de façon continue ; que par conséquent, il est établi que M. [L] n'a pas réalisé la prestation convenue entre les parties et doit réparer les dommages causés par son inexécution contractuelle ; qu'en outre, M. [L] ne saurait écarter sa responsabilité au motif que le maître d'ouvrage a accepté de mettre en oeuvre une proposition à la fois inefficace et illégale, qu'il avait lui-même formulée ;
1°) ALORS QUE le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part ; qu'en estimant dès lors sans utilité le débat instauré par l'entrepreneur sur le fait qu'il ne se serait jamais engagé à créer un étang totalement étanche, avec un niveau d'eau stable et permanent, alors qu'un tel débat était déterminant puisqu'il délimitait l'obligation contractuelle souscrite par ce dernier, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°) ALORS QUE sous couvert d'interprétation, les juges ne peuvent altérer le sens clair et précis d'un contrat, ni modifier les obligations que les parties avaient librement acceptées ; qu'en jugeant qu'il résultait du devis du 21 juin 2006, aux termes duquel l'entrepreneur s'était engagé à procéder à la « création d'un plan d'eau d'environ 7 000 m2 après autorisation de la police de l'eau. Alimentation par la source et rejet par fossé existant dans le bois, d'une profondeur comprise entre 1,50 m et 3 mètres. Le tour du plan d'eau ceinturé en argile compactée et les bordures en pente douce », que la prestation contractuelle portait sur la réalisation d'un plan d'eau « en eau », c'est-à-dire d'un étang totalement étanche, avec un niveau d'eau stable et permanent, la cour d'appel qui a étendu les obligations de l'entrepreneur, en recherchant, contre les termes clairs et précis du devis, la commune intention des parties, en se fondant notamment sur les éléments du dossier de création du plan d'eau établi par l'hydrogéologue, tiers à la relation contractuelle, a dénaturé le devis en violation du principe selon lequel le juge a interdiction de dénaturer les éléments de la cause ;
3°) ALORS QU'en retenant la responsabilité contractuelle de M. [L], sans constater que l'absence d'étanchéité de l'étang résultait du défaut de réalisation des bordures de l'étang en argile comme cela avait été initialement convenu entre les parties, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
4°) ALORS QU'en jugeant que l'entrepreneur ne pouvait se retrancher derrière l'accord donné par le maître d'ouvrage au cours des travaux à la modification du projet initialement convenu, pour substituer à l'argile de la terre végétale, sans examiner, comme elle y était pourtant invitée par l'entrepreneur, la circonstance selon laquelle la Sci Le Château avait également conservé la maîtrise d'oeuvre du projet et souhaitait poursuivre les travaux, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré M. [L] seul responsable du dommage subi par la SCI le Château, après avoir écarté toute faute ou inexécution contractuelle et débouté M. [L] de sa demande de garantie formée à l'encontre de M. [O] [F] ;
AUX MOTIFS QUE Sur la responsabilité de M. [O] [F] suivant le contrat passé le 5 février 2007 entre M. [O] [F] et la Sci Le Château, le premier a reçu mission de procéder à « l'élaboration d'un dossier de déclaration avec notice d'incidence d'un plan d'eau (sans étude géotechnique) » ; que les prestations que M. [O] [F] s'est engagé à réaliser pour un prix de 3 588 euros ttc dans le cadre de cette mission étaient, suivant le devis accepté : - un déplacement sur site, - l'élaboration du dossier selon la législation actuelle, - le tirage du dossier en cinq exemplaires et l'envoi ; que M. [F] a constitué le dossier qu'il s'était engagé à élaborer ; que sur la base de ce dossier, l'Administration a d'ailleurs délivré à la Sci Le Château, le 3 octobre 2007, le récépissé lui permettant d'engager les travaux de création de l'étang ; que l'expert judiciaire reconnaît (page 24 de son rapport) que « le dossier établi par M. [O] [F] est conforme à la réglementation et il n'a pas fait l'objet, à ma connaissance, de remarques de l'Administration. Cette prestation est également conforme à l'engagement contractuel (devis accepté) » ; que la Sci Le Château reproche à M. [O] [F] d'avoir manqué à son obligation de renseignement et de conseil en ne l'alertant pas sur l'insuffisance et l'inadéquation des investigations préalables de M. [S] [L] ; que toutefois, l'obligation de renseignement et de conseil reposant sur M. [O] [F] ne pouvait concerner que son champ d'intervention contractuel, à savoir la constitution du dossier à déposer à la préfecture ; que M. [O] [F] pouvait devoir, par exemple, conseiller tel aménagement à la Sci Le Château afin de lui éviter un refus de la part de l'Administration ; qu'en revanche, il n'appartenait pas à M. [O] [F], dont la mission excluait expressément qu'il fût chargé d'une quelconque étude géotechnique, de donner des renseignements ou des conseils sur les investigations géologiques à effectuer pour garantir, dans les règles de l'art, la bonne exécution des travaux de réalisation de l'étang ; que la Sci ne peut tout à la fois borner la mission de son prestataire pour limiter le coût de la prestation, et reprocher ensuite à ce prestataire de ne pas lui avoir donné des conseils ou des renseignements sur des questions techniques dont elle l'avait expressément dessaisi ; qu'il est constant que M. [O] [F] a élaboré son dossier sur la base des éléments géologiques que la Sci Le Château lui avait elle-même fournis en ces termes par lettre du 14 avril 2007 : « Pour ce qui concerne la composition du sol, M. [S] [L], le terrassier de Bignicourt, m'a indiqué que l'argile se trouvait à deux mètres puisqu'il y avait 80 cm d'épaisseur de terre végétale et 1,20 mètre de grève » ; que n'ayant pas pour mission de vérifier les éléments techniques fournis par le maître de l'ouvrage, c'est à juste titre que M. [O] [F] a utilisé ces données pour constituer le dossier de déclaration ; que par conséquent, aucune faute ni inexécution contractuelle ne pouvant être reprochée à M. [O] [F], la Sci Le Château sera déboutée de toutes ses demandes formées à son encontre et le jugement sera réformé sur ce point ; que de même, en l'absence de faute imputable à M. [O] [F], M. [S] [L] ne pourra qu'être débouté de sa demande de garantie formée à son encontre ;
ALORS QUE méconnait son devoir de conseil l'hydrogéologue, chargé d'élaborer le dossier de déclaration de création d'un plan d'eau, qui se borne à reprendre dans son dossier les éléments géotechniques transmis par le terrassier du maître de l'ouvrage sans attirer l'attention de ce dernier sur l'insuffisance des éléments communiqués par un entrepreneur dépourvu de compétences techniques en la matière ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné M. [L] à payer à la SCI le Château la somme de 138 018 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice ;
AUX MOTIFS QUE la Sci Le Château demande que son préjudice soit réparé par le comblement de l'étang, celui-ci ne correspondant pas à la demande qu'elle avait faite à M [S] [L] ; que la remise en état des lieux dans leur état initial est en effet de nature à constituer une réparation intégrale du préjudice subi ; que M. [S] [L] en convient, mais il demande que le comblement soit réalisé avec les matériaux qu'il a extraits du sol pour creuser l'étang et qu'il a ré-employés dans la parc du château, conformément au contrat conclu entre les parties (résultant de l'acceptation du devis du 21 juin 2006) ; que la Sci Le Château demande pour sa part que les matériaux à utiliser pour le comblement de l'étang soient importés de l'extérieur, afin de ne pas souffrir la destruction des aménagements réalisés grâce aux matériaux extraits lors du creusement de l'étang ; que le devis accepté du 21 juin 2006 prévoyait en effet que 15 600 mètres cubes de terre végétale provenant du creusement de l'étang soient ré-employés « en différents endroits autour du château suivant les plans [W] [U] » et que 5 400 mètres cubes de gravier soient « mis en place à différents endroits autour du château » ; que ces réemplois de matériaux dans le parc du château ont été réalisés par M. [L] et ont été payé par la Sci Le Château à hauteur de 20 000 euros (dont cette dernière ne réclame pas le remboursement si les aménagements ainsi payés ne sont pas détruits) ; que dès lors, autoriser que l'étang soit comblé en utilisant ces matériaux reviendrait à réparer un dommage subi par la Sci Le Château en lui causant un autre dommage consistant cette fois en la destruction d'aménagements qu'elle a commandés, obtenus et payés ; que la réparation intégrale, sans perte ni profit, exige que le comblement soit réalisé par l'emploi de matériaux extérieurs ; que la Sci Le Château produit des devis correspondant à ces travaux ; que le moins onéreux est celui de la société La Marnaise, daté du 21 septembre 2017, pour un prix de 211 315 euros ht, soit 253 578 euros ttc ; que M. [S] [L] n'élève aucune critique sérieuse à l'encontre de l'évaluation des différentes postes figurant sur ce devis ; que toutefois, retenir purement et simplement ce montant de 253 578 consacrer l'enrichissement de cette dernière ; qu'en effet, elle a bénéficié des matériaux issus de l'excavation de l'étang, ceux-ci ayant été utilisés pour réaliser divers aménagement (parking, chemin...) ; qu'elle n'a pas eu à payer ces matériaux puisqu'ils proviennent du sol dont elle est propriétaire ; mais qu'imputer à M. [L] la totalité du coût des matériaux nécessaires au comblement de l'étang, sans tenir compte du fait que les matériaux provenant de son creusement ont été laissés sur place, laisserait à la Sci le bénéfice indu du coût de ces matériaux ; que M. [L] doit être condamné, au titre de la réparation qu'il doit à la Sci, à remettre le périmètre de l'étang dans son état initial, et non à financer des matériaux qui ont servi à l'aménagement de parking et chemin, matériaux que la Sci aurait dû payer si l'étang n'avait pas été creusé ; qu'aussi convient-il de déduire de l'indemnité qu'il doit, la valeur des matériaux enlevés et réaffectés à des aménagements sur place ; que la valeur de ces matériaux est, selon le devis de la société La Marnaise, de 96 300 euros ht, soit 115 560 euros ttc ; que par conséquent, M. [S] [L] sera condamné à payer à la Sci Le Château la somme de 253 578 euros, diminuée d'un montant de 115 560 euros, soit 138 018 euros à titre de dommages et intérêts ; que ces dommages et intérêts n'ont pas à être augmentés du remboursement des sommes versées par la Sci Le Château à M. [S] [L] et à M. [O] [F], puisque ces sommes constituent le paiement de prestations réalisées ; que le jugement déféré sera infirmé sur tous ces points ;
1°) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en retenant que M. [L] avait convenu que la remise en état des lieux dans leur état initial était de nature à constituer une réparation intégrale du préjudice subi, lorsque ce dernier faisait valoir au contraire que cette solution, très onéreuse, était imprécise et impossible sans autorisation administrative, privilégiant l'alternative préconisée par l'expert, à savoir la réalisation d'une gravière, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QU'en se bornant à relever que la remise en état des lieux dans leur état initial était de nature à constituer une réparation intégrale du préjudice subi, sans s'expliquer, ainsi qu'elle y était pourtant invitée par l'entrepreneur, sur le caractère imprécis des opérations de comblement de l'étang, subordonnées à l'obtention d'une autorisation administrative, conformément aux dispositions des articles L. 214-1 et suivants du code de l'environnement, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
3°) ALORS QU'EN TOUT ETAT en s'abstenant de répondre aux conclusions de M. [L], invoquant le caractère imprécis des opérations de comblement de l'étang, subordonnées à l'obtention d'une autorisation administrative, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE la réparation d'un dommage doit être intégrale sans excéder le montant du préjudice ; qu'en condamnant M. [L] à payer à la Sci Le Château la somme de 138 018 €, en se fondant sur le devis établi par la société La Marnaise pour procéder au comblement de l'étang, après avoir déduit la valeur des matériaux nécessaires au comblement de l'étang (soit la somme de 96 300 euros ht), alors qu'elle aurait également dû retrancher du devis les frais de transport des matériaux (soit la somme de 53 100 € ht) qui n'ont pas davantage lieu d'être facturés lorsque le matériau se trouve sur place, la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale, ensemble l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. Moyen produit par la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat aux Conseils, pour la SCI Le Château (demanderesse au pourvoi provoqué n° A 18-23.463)
Le moyen de cassation du pourvoi provoqué fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la SCI le Château de ses demandes dirigées contre M. [F], après avoir déclaré M. [L] seul responsable du dommage subi,
Aux motifs que « suivant le contrat passé le 5 février 2007 entre M. [O] [F] et la Sci Le Château, le premier a reçu mission de procéder à « l'élaboration d'un dossier de déclaration avec notice d'incidence d'un plan d'eau (sans étude géotechnique) » ; que les prestations que M. [O] [F] s'est engagé à réaliser pour un prix de 3.588 euros ttc dans le cadre de cette mission étaient, suivant le devis accepté :
- un déplacement sur site,
- l'élaboration du dossier selon la législation actuelle,
- le tirage du dossier en cinq exemplaires et l'envoi ;
que M. [F] a constitué le dossier qu'il s'était engagé à élaborer ; que sur la base de ce dossier, l'Administration a d'ailleurs délivré à la Sci Le Château, le 3 octobre 2007, le récépissé lui permettant d'engager les travaux de création de l'étang;
que l'expert judiciaire reconnaît (page 24 de son rapport) que « le dossier établi par M. [O] [F] est conforme à la réglementation et il n'a pas fait l'objet, à ma connaissance, de remarques de l'Administration. Cette prestation est également conforme à l'engagement contractuel (devis accepté) » ;
que la Sci Le Château reproche à M. [O] [F] d'avoir manqué à son obligation de renseignement et de conseil en ne l'alertant pas sur l'insuffisance et l'inadéquation des investigations préalables de M. [S] [L] ; que toutefois, l'obligation de renseignement et de conseil reposant sur M. [O] [F] ne pouvait concerner que son champ d'intervention contractuel, à savoir la constitution du dossier à déposer à la préfecture ; que M. [O] [F] pouvait devoir, par exemple, conseiller tel aménagement à la Sci Le Château afin de lui éviter un refus de la part de l'Administration ; qu'en revanche, il n'appartenait pas à M. [O] [F], dont la mission excluait expressément qu'il fût chargé d'une quelconque étude géotechnique, de donner des renseignements ou des conseils sur les investigations géologiques à effectuer pour garantir, dans les règles de l'art, la bonne exécution des travaux de réalisation de l'étang ; que la Sci ne peut tout à la fois borner la mission de son prestataire pour limiter le coût de la prestation et reprocher ensuite à ce prestataire de ne pas lui avoir donné des conseils ou des renseignements sur des questions techniques dont elle l'avait expressément dessaisi.
qu'il est constant que M. [O] [F] a élaboré son dossier sur la base des éléments géologiques que la Sci Le Château lui avait ellemême fournis en ces termes par lettre du 14 avril 2007 :
« Pour ce qui concerne la composition du sol, M. [S] [L], le terrassier de [Localité 5], m'a indiqué que l'argile se trouvait à deux mètres puisqu'il y avait 80 cm d'épaisseur de terre végétale et 1,20 mètre de grève ».
que n'ayant pas pour mission de vérifier les éléments techniques fournis par le maître de l'ouvrage, c'est à juste titre que M. [O] [F] a utilisé ces données pour constituer le dossier de déclaration.
que par conséquent, aucune faute ni inexécution contractuelle ne pouvant être reprochée à M. [O] [F], la Sci Le Château sera déboutée de toutes ses demandes formées à son encontre et le jugement sera réformé sur ce point ; que de même, en l'absence de faute imputable à M. [O] [F], M. [S] [L] ne pourra qu'être débouté de sa demande de garantie formée à son encontre » (arrêt p. 5 et6) ;
Alors que méconnait son devoir de conseil l'hydrogéologue, chargé d'élaborer le dossier de déclaration de création d'un plan d'eau, qui se borne à reprendre dans son dossier les éléments géotechniques transmis par le terrassier du maître de l'ouvrage sans attirer l'attention de ce dernier sur l'insuffisance des éléments communiqués par un entrepreneur dépourvu de compétences techniques en la matière ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. Moyen produit par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour M. [L] (demandeur au pourvoi n° K 19-25.109)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté le recours en révision de M. [L] ;
AUX MOTIFS QUE « l'essentiel de l'argumentation de M. [L] consiste à soutenir que c'est de façon mensongère que la SCI Le Château - qui s'est vu allouer par la cour des dommages et intérêts correspondant au montant des frais nécessaires au comblement de l'étang - a prétendu subir un préjudice économique du fait du caractère peu engageant de l'ouvrage, qualifié par elle de mare, et ce, alors que les éléments révélés après la décision de la cour établissent qu'en réalité, elle n'en subit aucun puisqu'elle jouit normalement de cet étang et qu'elle en vante le caractère remarquable auprès du public ; qu'il y a lieu de reprendre chacun des éléments invoqués par M. [L] pour déterminer s'ils sont susceptibles de constituer une fraude au regard du principe ci-dessus rappelé ; la dissimulation par la SCI Le Château de l'étude réalisée le 11 septembre 2007 par le bureau d'études hydrogéotechnique Est et Centre ; que cette pièce est considérée par M. [L] comme étant un élément capital à l'appui de son recours en révision ; qu'outre le fait qu'il n'est pas démontré que cette pièce ait été sciemment dissimulée, il est relevé à l'examen de cette étude : - que les investigations ont été réalisées dans le cadre général de la restauration du château de [Localité 5] et qu'elles ont porté principalement sur l'assise du château, des fissures importantes étant apparues aux quatre coins du bâtiment sur les terrasses extérieures et les escaliers ; - que si les ingénieurs qui ont dressé cette étude ont pu effectivement indiquer que la source située près de la chapelle était sèche le 17 août 2007 alors que M. [F], dans son rapport dressé le 4 septembre 2007, soit quelques jours avant, avait relevé que cette source était pérenne et qu'elle s'écoulait, cette constatation est indifférente puisque les eaux de cette source ne devaient servir qu'à une oxygénation de l'étang et que leur écoulement était, en tout état de cause, tributaire de la présence suffisante d'argile aux contours de cette pièce d'eau ; - qu'en effet, il y a lieu de rappeler, ainsi que le relève à juste titre la SCI Le Château dans ses écritures, que les désordres affectant l'étang ne sont pas dus au fait que la source ait un faible débit mais à l'absence d'utilisation par l'entrepreneur d'argile en quantité suffisante pour ceinturer le plan d'eau, de sorte que la source qui devait alimenter l'étang en même temps que les eaux souterraines et les eaux pluviales s'est révélée insuffisante ; que M. [L] fait ainsi une confusion entre la cause des désordres et ses conséquences, cause que l'expert judiciaire, M. [E], a clairement identifiée et que ce dernier attribue principalement aux manquements de l'entrepreneur qui n'a réalisé qu'un sondage à la pelle pour établir son devis et qui a arrêté de creuser dès les premières traces d'argile sans se préoccuper de l'épaisseur de la couche rencontrée, tout en précisant qu'en approfondissant le sondage, il est probable qu'il se serait aperçu de l'anomalie - l'absence d'argile suffisante pour rendre l'étang étanche - ; que l'expert relève ainsi que les travaux effectués par M. [L] ne sont ni conformes à son engagement contractuel puisqu'il a modifié le projet ni conformes au dossier de déclaration administrative ; - qu'il n'est par ailleurs pas expliqué en quoi le fait de taire de manière volontaire cette étude géotechnique - ce qui n'est aucunement démontré - aurait pu déterminer la cour à prendre une décision autre, et ce d'autant que le fait que la source soit asséchée apparaissait plutôt préjudiciable à la SCI Le Château, cet élément rendant plus complexe la réalisation des travaux qu'elle avait commandés, de sorte que le maître de l'ouvrage n'avait objectivement aucun intérêt à occulter volontairement les éléments contenus dans cette étude qui n'a pas été déterminante dans la solution du litige ; que cette pièce, non constitutive d'une manoeuvre frauduleuse, ne peut donc servir de support à la fraude invoquée par M. [L] ; l'absence de réalisation des travaux de comblement de l'étang ; que c'est avec une certaine audace que M. [L] vient reprocher à la SCI Le Château de ne pas avoir déposé de demande d'autorisation auprès de la Direction Départementale des Territoires pour réaliser les travaux de comblement de l'étang alors qu'il n'a pas exécuté, même partiellement, l'arrêt rendu par cette cour qui l'a condamné à payer au maître de l'ouvrage la somme de 138 018 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ; que la SCI Le Château justifie au surplus être en redressement judiciaire depuis le 16 mars 2010, avoir dû louer le domaine à la société Bien-Etre au Château dans le cadre d'une activité de chambres d'hôtes pour limiter ses pertes financières et ne pas disposer des fonds suffisants pour avancer le coût des travaux ; qu'en tout état de cause, elle est légitime à attendre le règlement de M. [L] pour réaliser les travaux dont le coût a été mis à la charge de ce dernier ; que cet élément, non constitutif d'une manoeuvre frauduleuse, ne peut donc servir de support à la fraude invoquée par M. [L] ; le devis établi par la société La Marnaise ; que M. [L] fait valoir que c'est sur la base de ce devis que l'indemnisation de la SCI Le Château a été fixée par la cour et que M. [H], qui en est le gérant, entretiendrait des liens étroits avec cette entreprise ; qu'en réalité, selon les propres affirmations de M. [L] figurant dans ses conclusions, la société La Marnaise est dirigée par M. [D] qui est parent du gérant de la société Sovitel dont la SCI Le Château est débitrice (sic) ; que cet argument n'est pas sérieux dans la mesure où la cour a choisi le devis qui était le moins cher parmi les trois devis de comblement de l'étang versés aux débats par la SCI Le Château, de surcroît non contesté à l'époque par M. [L] ; qu'il importe peu dès lors que des liens aient uni cette SCI à la société La Marnaise, liens qui apparaissent au surplus particulièrement relâchés pour ne pas dire inexistants ; que cet élément ne peut donc servir de support à la fraude invoquée par M. [L] ; la valorisation du château faite par le notaire tenant compte de l'étang ainsi que son intention de vendre le bien ; que l'avis de valeur du 3 décembre 2016 établi par l'office notarial [Adresse 6] dans la perspective d'une vente du domaine tient effectivement compte de la présence d'un étang mais la cour cherche vainement en quoi cet avis de valeur, dont la date est non seulement antérieure au prononcé de l'arrêt mais également à celle du jugement frappé d'appel, soit à un moment où aucune indemnisation n'avait encore été allouée -, pourrait constituer un élément venant accréditer la fraude de la SCI Le Château ; la valorisation touristique du domaine ; qu'il ne peut être reproché à la SCI Le Château d'avoir cherché, lors des journées du patrimoine en septembre 2018, à valoriser son domaine, qui ne comprend d'ailleurs pas que l'étang objet du litige, mais qui intègre également un parc-jardin et surtout un château néo-palladien de 1810 classé monument historique qui en constitue objectivement la principale attraction ; qu'il est rappelé là encore que la SCI Le Château est créancière à ce jour de M. [L] et non l'inverse et qu'elle n'a donc pas à justifier des travaux à réaliser tant que celui-ci ne s'est pas acquitté de ses condamnations pécuniaires ; qu'en définitive, il n'existe aucun élément démontrant une fraude, de quelque nature qu'elle soit, qui aurait été commise par la SCI Le Château » ;
1°/ ALORS QUE la fraude alléguée à l'appui d'un recours en révision doit avoir eu un rôle déterminant dans la décision attaquée ; que tel est le cas lorsque l'élément dissimulé était de nature à établir une pluralité de causes du dommage et à exonérer ainsi au moins partiellement le défendeur de sa responsabilité ; que, pour juger indifférente la dissimulation de l'étude réalisée en 2007 par un bureau d'études hydrogéotechnique, ayant révélé que « la source située près de la chapelle était sèche le 17 août 2007 », contrairement à l'affirmation de M. [F], dans son rapport dressé le 4 septembre 2007, selon laquelle cette source était pérenne et s'écoulait, la cour d'appel a retenu que « les eaux de cette source ne devaient servir qu'à une oxygénation de l'étang » et que la cause du dommage résidait dans l'insuffisance de la couche d'argile et non pas dans le débit de la source ; qu'en statuant ainsi, lorsqu'il ressortait du rapport d'expertise, outre du devis de M. [L] et du dossier établi par M. [F], que la source devait non seulement oxygéner, mais encore alimenter l'étang, de sorte que son assèchement était de nature à concourir au dommage, résidant dans l'abaissement du niveau du plan d'eau, la cour d'appel a violé l'article 595, alinéa 1er, du code de procédure civile et l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°/ ALORS QUE toute décision doit être motivée ; qu'il ressort des conclusions d'appel de M. [L] qu'il se prévalait non seulement du débit de la source, mais encore d'importantes venues d'eau, qui avaient également été mises en évidence par l'étude de 2007 et qui avaient concouru aux difficultés rencontrées lors du chantier, ainsi qu'à la réalisation du dommage ; qu'en délaissant les conclusions de M. [L] sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ ALORS QUE le juge ne doit pas dénaturer les éléments de la cause ; que M. [L] précisait, dans ses conclusions, que les informations que recelait l'étude réalisée en 2007 auraient pu modifier l'appréciation portée tant par l'expert que par les juges, sur une éventuelle faute du maître d'ouvrage qui, en retenant ces informations, n'avait pas permis à M. [L] d'évaluer la complexité du chantier et de prendre les précautions nécessaires ou de refuser d'intervenir ; qu'en énonçant que l'incidence que l'étude réalisée en 2007 par un bureau d'études hydrogéotechnique aurait pu avoir sur la décision des juges n'était pas explicitée par M. [L] la cour d'appel a dénaturé ses conclusions ;
4°/ ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en retenant, pour écarter l'intention qu'avait eue la SCI Le Château de dissimuler l'étude réalisée en 2007 par un bureau d'études hydrogéotechnique, d'un côté, « que le fait que la source soit asséchée apparaissait plutôt préjudiciable à la SCI Le Château, cet élément rendant plus complexe la réalisation des travaux qu'elle avait commandés » et, de l'autre côté, « que le maître de l'ouvrage n'avait objectivement aucun intérêt à occulter volontairement les éléments contenus dans cette étude », lorsqu'il résultait au contraire du fait que cet élément complexifiait le chantier, ainsi que le faisait valoir M. [L], que la SCI Le Château avait intérêt à dissimuler cette étude, d'abord afin d'abaisser le prix des travaux, puis, lors des opérations d'expertise, en privant l'expert de cet élément d'appréciation des causes du dommage, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions des parties ; que M. [L] remettait en cause, à l'appui de son recours en révision, l'intention qu'avait la SCI Le Château de procéder au comblement de l'étang et, par là, la réalité du préjudice qu'elle prétendait subir, en se prévalant notamment du fait qu'elle n'avait pas déposé de demande d'autorisation auprès de la Direction Départementale des Territoires ; qu'en retenant que « c'est avec une certaine audace » que M. [L] invoquait cet élément, dès lors « qu'il n'a(vait) pas exécuté, même partiellement, l'arrêt rendu par cette cour » et que la SCI Le Château ne disposait pas des fonds suffisants pour avancer le coût des travaux, la cour d'appel a méconnu l'objet de la fraude invoquée et dénaturé les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile.