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27/01/2022 | FRANCE | N°20-14546

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 27 janvier 2022, 20-14546


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 janvier 2022

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 118 F-D

Pourvoi n° Z 20-14.546

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 27 JANVIER 2022

La société [3], société par actions simplifiée, dont le siège

est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Z 20-14.546 contre l'arrêt rendu le 17 janvier 2020 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre sociale - se...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 janvier 2022

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 118 F-D

Pourvoi n° Z 20-14.546

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 27 JANVIER 2022

La société [3], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Z 20-14.546 contre l'arrêt rendu le 17 janvier 2020 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre sociale - section 3), dans le litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 5], dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Coutou, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société [3], de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 5], et l'avis de M. Halem, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 décembre 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Coutou, conseiller rapporteur, Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen, et Mme Aubagna, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 17 janvier 2020) la société [3] (l'employeur) a déclaré à la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 5] (la caisse), un accident survenu le 23 novembre 2016 à l'un de ses salariés.

2. La caisse ayant pris en charge l'accident au titre de la législation professionnelle, la société a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une demande d'inopposabilité de cette décision.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief à l'arrêt de lui déclarer opposable la décision de prise en charge de l'accident du travail dont a été victime son salarié, alors :

« 1°/ que la mise en oeuvre des dispositions de l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale, après avis donné par la caisse à l'employeur de la fin de l'instruction et de la possibilité de consulter le dossier dans un délai imparti par elle et présenter d'éventuelles observations, oblige cette caisse, préalablement à sa décision sur le caractère professionnel de la maladie ou de l'accident, à remplir à nouveau les obligations prévues par l'article R. 441-11 du même code ; qu'en l'espèce, l'employeur a reçu, le 8 février 2017, deux lettres recommandées avec avis de réception de la caisse, datées du 6 février 2017, l'informant, d'une part, que la prise de décision sur le caractère professionnel de l'accident interviendra le 27 février 2017, avec possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier, d'autre part, que, la décision sur le caractère professionnel de l'accident du 23 novembre 2016 ne pouvant être arrêtée dans le délai de trente jours, il était recouru à un délai complémentaire d'instruction ; que par un courrier du 27 février 2017, la caisse a néanmoins notifié à l'employeur sa décision de prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle ; que, pour dire opposable à l'employeur cette décision, la cour d'appel a retenu que « la notification de ce recours au délai complémentaire est motivée uniquement par l'impossibilité pour la caisse de rendre sa décision dans le délai de trente jours », en sorte qu'« il s'évince donc de ces deux lettres concomitantes du 6 février 2017 que le recours au délai complémentaire n'est pas rendu nécessaire par l'instruction du dossier mais uniquement, comme le soutient la caisse, pour lui permettre de respecter le délai de dix jours francs auquel elle est tenue, pour permettre à l'employeur d'user de son droit de consultation du dossier » ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il incombait à la caisse, qui avait, le 6 février 2017, informé l'employeur de la mise en oeuvre d'un délai complémentaire d'instruction, de procéder à une nouvelle information avant de prendre sa décision, la cour d'appel a violé les textes susvisés en leur rédaction applicable au litige ;

2°/ subsidiairement, que la caisse de sécurité sociale est redevable à l'égard de l'employeur d'une information loyale ; que si la notification par la caisse à l'employeur d'un délai complémentaire d'instruction, en même temps que l'envoi de la lettre de fin d'instruction, dans le seul but d'attendre ses observations et d'éviter ainsi que n'intervienne, dans le délai de dix jours qui lui est imparti, une décision implicite de prise en charge résultant de l'expiration du délai réglementaire de trente jours, n'impose pas à cette caisse de notifier à l'employeur un nouveau délai pour faire valoir ses observations si aucune instruction complémentaire n'a eu lieu, faute d'observations de l'employeur ou du salarié, ce n'est toutefois qu'à la condition que la caisse ait dûment précisé à l'employeur, dans la notification du recours à un délai complémentaire d'instruction, que les délais de consultation et de prise de décision demeuraient inchangés pour la réception des observations et la demande de consultation du dossier ; qu'à défaut, l'employeur pouvant légitimement penser que la caisse attend de nouveaux éléments pour conclure à nouveau son dossier et attendre une nouvelle clôture d'information avant de demander à consulter le dossier ou à présenter ses observations, la caisse manque à son devoir d'information loyale et de respect du contradictoire ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans constater que la caisse avait précisé, dans la notification du recours à un délai complémentaire d'instruction, que les délais de consultation et de prise de décision demeuraient inchangés pour la réception des observations et la demande de consultation du dossier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles R. 441-11 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale en leur rédaction alors applicable ;

3°/ que, dans les cas où elle a procédé à une instruction conformément au dernier alinéa de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale, la caisse informe l'employeur des éléments recueillis et susceptibles de lui faire grief ; qu'en déclarant opposable à l'employeur sa décision de prise en charge de l'accident du 26 novembre 2016, cependant qu'elle constatait que, « par contre, il est exact que la caisse n'a pas informé l'employeur « des éléments recueillis et susceptibles de lui faire grief », ce dont il résultait que la décision de la caisse, faute d'avoir été prise au terme d'une procédure contradictoire régulière, était inopposable à l'employeur, la cour d'appel a violé les articles R. 441-11 et R. 441-13 du code de la sécurité sociale en leur rédaction applicable au litige ;

4°/ que la mise en oeuvre de la procédure contradictoire prévue par les articles R. 441-11 à R. 441-14 du code de la sécurité sociale constitue une garantie procédurale substantielle pour l'employeur à défaut de laquelle la décision prise par la caisse ne lui est pas opposable, sans qu'il y ait lieu pour l'employeur d'établir l'existence d'un grief ; qu'en retenant dès lors de manière inopérante, pour refuser de constater l'inopposabilité de la décision de prise en charge à l'employeur résultant de l'irrégularité de la procédure, que « la société [3] (?) n'a émis aucune réserve lors de la déclaration d'accident du travail, que l'accident est survenu aux temps et lieu du travail (le 23 novembre 2016, gare de [4] à 23 heures 45, « lors du montage de vérin, ce dernier est tombé sur la main du salarié, qui a été blessé au majeur de la main gauche : fracture »), corroboré par un certificat médical du 24 novembre 2016 d'un médecin urgentiste de l'hôpital de [6], portant diagnostic d'une fracture de la 3e phalange du 3e doigt de la main gauche par écrasement et prescrivant un arrêt de travail), dont l'employeur connaissait la teneur puisqu'il est acquis aux débats qu'il était joint à la déclaration d'accident du travail qu'il a établie », pour en déduire que « le non-respect du contradictoire, imputé à la caisse par l'employeur au soutien de son moyen d'inopposabilité de la décision de prise en charge, ne peut être considéré comme étayé », la cour d'appel a ajouté une condition à la loi et violé les articles R. 441-11 et suivants du code de la sécurité sociale en leur rédaction applicable au litige. »

Réponse de la Cour

4. Selon l'article R. 441-14, alinéa 3, du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable au litige, dans les cas prévus au dernier alinéa de l'article R. 441-11 du même code, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13.

5. La notification par la caisse à l'employeur d'un délai complémentaire d'instruction, en même temps que l'envoi de la lettre de fin d'instruction, dans le seul but d'attendre ses observations et d'éviter ainsi que n'intervienne, dans le délai de dix jours qui lui est imparti, une décision implicite de prise en charge résultant de l'expiration du délai réglementaire de trente jours, n'impose pas à cette caisse de notifier à l'employeur un nouveau délai pour faire valoir ses observations si aucune instruction complémentaire n'a eu lieu, faute d'observations de l'employeur ou du salarié.

6. Pour déclarer opposable à l'employeur la décision de la caisse de prendre en charge au titre de la législation professionnelle l'accident dont avait été victime son salarié, l'arrêt retient essentiellement que contrairement aux allégations de la société, par deux lettres du 6 février 2017 la caisse a indiqué dans la première que "l'instruction du dossier est maintenant terminée" et l'a informé "de la possibilité de consulter le dossier" et que "sa décision interviendra le 27 février 2017" et dans la seconde du recours a un délai complémentaire, et que la notification de ce recours au délai complémentaire est motivée uniquement par l'impossibilité par la caisse de rendre sa décision dans le délai de trente jours. Il ajoute qu'il s'évince de ces deux lettres que le recours au délai complémentaire n'est pas rendu nécessaire par l'instruction du dossier, mais uniquement pour permettre à la caisse de respecter le délai de dix jours francs auquel elle est tenue, pour permettre à l'employeur d'user de son droit de consultation du dossier.

7. De ces constatations, dont elle a fait ressortir que la caisse, avant de prendre sa décision, avait satisfait de manière loyale et suffisante à son obligation d'information de l'employeur en l'invitant à venir consulter le dossier et présenter ses observations préalablement à sa décision dont elle lui avait indiqué la date, la cour d'appel a exactement déduit que la décision de prise en charge était opposable à ce dernier.

8. Le moyen, inopérant en sa quatrième branche comme s'attaquant à des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société [3] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société [3] et la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 5] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept janvier deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société [3]

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société [3] de toutes ses demandes et de lui AVOIR déclaré opposable la décision de prise en charge de l'accident de M. [K] au titre de la législation professionnelle ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE le litige est circonscrit en cause d'appel comme en première instance à l'opposabilité de la décision de prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle motif pris du non-respect du principe du contradictoire ; qu'il résulte de la combinaison des articles R. 441-10, R. 441-11 dernier alinéa et R. 441-14 du code de la sécurité sociale dans leurs versions applicables qu'en cas de réserves motivées de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou procède à une enquête auprès des intéressés, puis communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur, au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier ; que lorsqu'il y a nécessité d'examen ou d'enquête complémentaire, la caisse doit en informer la victime ou ses ayants droit et l'employeur avant l'expiration du délai de trente jours à compter de la date à laquelle elle a reçu la déclaration d'accident et le certificat médical initial, par lettre recommandée avec avis de réception ; qu'à l'expiration d'un nouveau délai qui ne peut excéder deux mois en matière d'accident du travail à compter de la date de cette notification, et en l'absence de décision de la caisse, le caractère professionnel de l'accident est reconnu ; que dans tous les cas la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13 ; que la société [3] soutient que le principe du contradictoire n'a pas été respecté par la caisse faute de l'avoir informée, après lui avoir notifié le recours à un délai complémentaire : - de la fin de la procédure d'instruction ; - des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief ; - de la possibilité de venir consulter le dossier ; - de la date à laquelle la décision est prévue ; que la caisse lui oppose avoir respecté le principe du contradictoire dès lors que le recours au délai complémentaire d'instruction avait uniquement pour but de permettre à l'employeur d'émettre des observations et de consulter le dossier, puisque le délai de 30 jours avait commencé à courir le 3 janvier 2017, date de réception de la déclaration d'accident du travail et venait à échéance le 2 février 2017, et souligne n'avoir procédé à aucune instruction complémentaire ; qu'en l'espèce, la déclaration d'accident du travail portant sur l'accident du travail survenu le 23 novembre 2016 à M. [M] [K] a été établie le 25 novembre 2016 par la société [3] et est accompagnée d'un certificat médical initial daté du 24 novembre 2016, rédigé par un médecin urgentiste du centre hospitalier de [6] (69) ; qu'elle ne fait pas mention de réserves et il n'est pas davantage allégué que l'employeur a formalisé une lettre de réserves motivées ; que par deux lettres recommandées avec avis de réception datées du 6 février 2017, toutes deux réceptionnées le 8 février 2017, la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 5] a informé la société [3] que : - la décision sur le caractère professionnel de l'accident ne pouvait être arrêtée dans le délai de trente jours et le recours à un délai complémentaire d'instruction ; - la prise de décision sur le caractère professionnel de l'accident interviendra le 27 février 2017, avec possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier ; que la caisse a ensuite notifié par lettre recommandée avec avis de réception en date du 27 février 2012 réceptionnée le 1er mars 2017 à la société [3] que « les éléments recueillis permettent d'établir que l'accident est survenu par le fait ou à l'occasion du travail » ; que contrairement aux allégations de la société [3] par les deux lettres du 6 février 2017 la caisse a bien indiqué précisément d'une part dans la première que « l'instruction du dossier est maintenant terminée » et l'a informée « de la possibilité de consulter le dossier », et que « sa décision interviendra le 27 février 2017 », et dans la seconde le recours à un délai complémentaire ; que la notification de ce recours au délai complémentaire est motivée uniquement par l'impossibilité pour la caisse de rendre sa décision dans le délai de trente jours ; qu'il s'évince donc de ces deux lettres concomitantes du 6 février 2017 que le recours au délai complémentaire n'est pas rendu nécessaire par l'instruction du dossier mais uniquement, comme le soutient la caisse, pour lui permettre de respecter le délai de 10 jours francs auquel elle est tenue, pour permettre à l'employeur d'user de son droit de consultation du dossier ; que par contre, il est exact que la caisse n'a pas informé l'employeur « des éléments recueillis et susceptibles de lui faire grief » ; que la société [3] ne précise cependant pas la nature de ces éléments, alors qu'elle n'a émis aucune réserve lors de la déclaration d'accident du travail, que l'accident est survenu aux temps et lieu du travail (le 23 novembre 2016, gare de [4] à 23 heures 45, « lors du montage de vérin, ce dernier est tombé sur la main du salarié, qui a été blessé au majeur de la main gauche : fracture »), corroboré par un certificat médical du 24 novembre 2016 d'un médecin urgentiste de l'hôpital de [6], portant diagnostic d'une fracture de la 3ème phalange du 3ème doigt de la main gauche par écrasement et prescrivant un arrêt de travail), dont l'employeur connaissait la teneur puisqu'il est acquis aux débats qu'il était joint à la déclaration d'accident du travail qu'il a établie ; que dès lors le non-respect du contradictoire, imputé à la caisse par la société [3] au soutien de son moyen d'inopposabilité de la décision de prise en charge, ne peut être considéré comme étayé ; qu'ainsi que retenu par les premiers juges, aucune instruction complémentaire n'a en réalité eu lieu faute d'observation de l'employeur comme du salarié ; que la procédure est donc régulière et le jugement entrepris doit être confirmé ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE la notification par la caisse à l'employeur d'un délai complémentaire d'instruction, en même temps que l'envoi de la lettre de fin d'instruction, dans le seul but d'attendre ses observations et d'éviter ainsi que n'intervienne dans le délai de 10 jours qui lui est imparti, une décision implicite de prise en charge résultant de l'expiration du délai réglementaire de trente jours, n'impose pas à cette caisse de notifier à l'employeur un nouveau délai pour faire valoir ses observations si aucune instruction complémentaire n'a eu lieu, faute d'observations de l'employeur ou du salarié ; que la société [3], qui n'a pas consulté les pièces du dossier et qui n'a fait aucune observation, n'est pas fondée à soutenir que la notification d'un délai complémentaire d'instruction, dans le seul but d'éviter une décision implicite de rejet qui lui aurait été préjudiciable, obligeait la caisse primaire, en l'absence de toute instruction complémentaire, à « renouveler » l'information qui lui avait déjà été donnée ; que la violation alléguée du principe du contradictoire n'est donc pas caractérisée ;

1°) ALORS QUE la mise en oeuvre des dispositions de l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale, après avis donné par la caisse à l'employeur de la fin de l'instruction et de la possibilité de consulter le dossier dans un délai imparti par elle et présenter d'éventuelles observations, oblige cette caisse, préalablement à sa décision sur le caractère professionnel de la maladie ou de l'accident, à remplir à nouveau les obligations prévues par l'article R. 441-11 du même code ; qu'en l'espèce, la société [3] a reçu, le 8 février 2017, deux lettres recommandées avec avis de réception de la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 5], datées du 6 février 2017, l'informant, d'une part, que la prise de décision sur le caractère professionnel de l'accident interviendra le 27 février 2017, avec possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier, d'autre part, que, la décision sur le caractère professionnel de l'accident du 23 novembre 2016 ne pouvant être arrêtée dans le délai de trente jours, il était recouru à un délai complémentaire d'instruction ; que par un courrier du 27 février 2017, la caisse a néanmoins notifié à l'employeur sa décision de prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle ; que, pour dire opposable à l'employeur cette décision, la cour d'appel a retenu que « la notification de ce recours au délai complémentaire est motivée uniquement par l'impossibilité pour la caisse de rendre sa décision dans le délai de trente jours », en sorte qu'« il s'évince donc de ces deux lettres concomitantes du 6 février 2017 que le recours au délai complémentaire n'est pas rendu nécessaire par l'instruction du dossier mais uniquement, comme le soutient la caisse, pour lui permettre de respecter le délai de 10 jours francs auquel elle est tenue, pour permettre à l'employeur d'user de son droit de consultation du dossier » ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il incombait à la caisse, qui avait, le 6 février 2017, informé l'employeur de la mise en oeuvre d'un délai complémentaire d'instruction, de procéder à une nouvelle information avant de prendre sa décision, la cour d'appel a violé les textes susvisés en leur rédaction applicable au litige ;

2°) ALORS, subsidiairement, QUE, la caisse de sécurité sociale est redevable à l'égard de l'employeur d'une information loyale ; que si la notification par la caisse à l'employeur d'un délai complémentaire d'instruction, en même temps que l'envoi de la lettre de fin d'instruction, dans le seul but d'attendre ses observations et d'éviter ainsi que n'intervienne, dans le délai de dix jours qui lui est imparti, une décision implicite de prise en charge résultant de l'expiration du délai réglementaire de trente jours, n'impose pas à cette caisse de notifier à l'employeur un nouveau délai pour faire valoir ses observations si aucune instruction complémentaire n'a eu lieu, faute d'observations de l'employeur ou du salarié, ce n'est toutefois qu'à la condition que la caisse ait dûment précisé à l'employeur, dans la notification du recours à un délai complémentaire d'instruction, que les délais de consultation et de prise de décision demeuraient inchangés pour la réception des observations et la demande de consultation du dossier ; qu'à défaut, l'employeur pouvant légitimement penser que la caisse attend de nouveaux éléments pour conclure à nouveau son dossier et attendre une nouvelle clôture d'information avant de demander à consulter le dossier ou à présenter ses observations, la caisse manque à son devoir d'information loyale et de respect du contradictoire ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans constater que la caisse avait précisé, dans la notification du recours à un délai complémentaire d'instruction, que les délais de consultation et de prise de décision demeuraient inchangés pour la réception des observations et la demande de consultation du dossier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles R. 441-11 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale en leur rédaction alors applicable ;

3°) ALORS QUE, dans les cas où elle a procédé à une instruction conformément au dernier alinéa de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale, la caisse informe l'employeur des éléments recueillis et susceptibles de lui faire grief ; qu'en déclarant opposable à l'employeur sa décision de prise en charge de l'accident du 26 novembre 2016, cependant qu'elle constatait que, « par contre, il est exact que la caisse n'a pas informé l'employeur « des éléments recueillis et susceptibles de lui faire grief » », ce dont il résultait que la décision de la caisse, faute d'avoir été prise au terme d'une procédure contradictoire régulière, était inopposable à la société [3], la cour d'appel a violé les articles R. 441-11 et R. 441-13 du code de la sécurité sociale en leur rédaction applicable au litige ;

4°) ET ALORS QUE la mise en oeuvre de la procédure contradictoire prévue par les articles R. 441-11 à R. 441-14 du code de la sécurité sociale constitue une garantie procédurale substantielle pour l'employeur à défaut de laquelle la décision prise par la caisse ne lui est pas opposable, sans qu'il y ait lieu pour l'employeur d'établir l'existence d'un grief ; qu'en retenant dès lors de manière inopérante, pour refuser de constater l'inopposabilité de la décision de prise en charge à l'employeur résultant de l'irrégularité de la procédure, que « la société [3] (?) n'a émis aucune réserve lors de la déclaration d'accident du travail, que l'accident est survenu aux temps et lieu du travail (le 23 novembre 2016, gare de [4] à 23 heures 45, « lors du montage de vérin, ce dernier est tombé sur la main du salarié, qui a été blessé au majeur de la main gauche : fracture »), corroboré par un certificat médical du 24 novembre 2016 d'un médecin urgentiste de l'hôpital de [6], portant diagnostic d'une fracture de la 3ème phalange du 3ème doigt de la main gauche par écrasement et prescrivant un arrêt de travail), dont l'employeur connaissait la teneur puisqu'il est acquis aux débats qu'il était joint à la déclaration d'accident du travail qu'il a établie », pour en déduire que « le non-respect du contradictoire, imputé à la caisse par la société [3] au soutien de son moyen d'inopposabilité de la décision de prise en charge, ne peut être considéré comme étayé », la cour d'appel a ajouté une condition à la loi et violé les articles R. 441-11 et suivants du code de la sécurité sociale en leur rédaction applicable au litige.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 20-14546
Date de la décision : 27/01/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 17 janvier 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 27 jan. 2022, pourvoi n°20-14546


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.14546
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