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19/01/2022 | FRANCE | N°19-25944

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 19 janvier 2022, 19-25944


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 janvier 2022

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 54 F-D

Pourvoi n° T 19-25.944

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 19 JANVIER 2022

Mme [J] [Y], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 19-

25.944 contre l'arrêt rendu le 18 septembre 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 2-4), dans le litige l'opposant à Mme [D] [Y], ve...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 janvier 2022

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 54 F-D

Pourvoi n° T 19-25.944

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 19 JANVIER 2022

Mme [J] [Y], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 19-25.944 contre l'arrêt rendu le 18 septembre 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 2-4), dans le litige l'opposant à Mme [D] [Y], veuve [V], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dazzan, conseiller référendaire, les observations de Me Le Prado, avocat de Mme [Y], de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de Mme [Y], veuve [V], après débats en l'audience publique du 23 novembre 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Dazzan, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 14 mai 2018), Mme [Y], soutenant avoir prêté la somme de 100 000 euros à Mme [Y], sa fille, l'a assignée en remboursement et en paiement de dommages-intérêts. Celle-ci lui a opposé que cette somme lui avait été remise à titre de don.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

2. Mme [Y] fait grief à l'arrêt de dire qu'elle ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un contrat de prêt et de rejeter ses demandes à ce titre, alors :

« 1°/ que la preuve d'un contrat peut se faire par tout moyen lorsque la partie à qui incombe la charge de prouver une obligation a été dans l'impossibilité morale de se procurer un écrit ; que l'impossibilité morale de se procurer un écrit est caractérisée en présence d'un empêchement psychologique à le solliciter de l'autre partie ; qu'en déduisant de la supposée mésentente de Mme [Y] veuve [V] avec sa mère, Mme [Y], que cette dernière ne s'était heurtée à aucune impossibilité morale de solliciter de sa fille un écrit, la cour d'appel a statué par un motif impropre à justifier son arrêt en violation de l'article 1348, devenu 1360, du code civil ;

2°/ que la preuve d'un contrat peut se faire par tout moyen lorsque la partie à qui incombe la charge de prouver une obligation a été dans l'impossibilité morale de se procurer un écrit ; que l'impossibilité morale de se procurer un écrit est caractérisée en présence d'un empêchement psychologique à le solliciter de l'autre partie ; qu'en l'espèce, en énonçant encore, pour retenir que Mme [Y] ne s'était heurtée à aucune impossibilité morale de solliciter de sa fille un écrit, que l'importance de la somme versée et l'existence d'autres enfants dont il était nécessaire de préserver les droits, la rendaient tout à fait légitime à solliciter cet écrit, sans constater que de telles considérations avaient écarté chez elle tout empêchement psychologique sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 1348, devenu 1360, du code civil. »

Réponse de la Cour

3. Sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine de la cour d'appel qui a estimé qu'en dépit du lien de parenté entre les parties, Mme [Y] ne justifiait pas s'être trouvée dans l'impossibilité morale de se procurer une preuve par écrit.

4. Il ne peut donc être accueilli.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme [Y] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf janvier deux mille vingt-deux.

Le conseiller referendaire rapporteur le president

Le greffier de chambre

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour Mme [Y].

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué, D'AVOIR dit que Mme [J] [Y] ne rapportait pas la preuve de l'existence d'un contrat de prêt et de l'AVOIR en conséquence déboutée de ses demandes principales fondées sur l'existence d'un tel contrat ;

AUX MOTIFS QUE « il n'est pas contesté par Mme [D] [Y] veuve [V] qu'elle a reçu de sa mère la somme de 100.000 € par un virement en date du 12 juillet 2006 ; il appartient cependant à cette dernière de justifier de l'obligation de sa fille au remboursement de cette somme, le transfert d'argent ne pouvant à lui seul démontrer qu'un contrat de prêt s'est formé entre les deux parties ; qu'aux termes de l'article 1341 du code civil dans sa rédaction applicable à l'époque du transfert d'argent « Il doit être passé acte devant notaires ou sous signatures privées de toutes choses excédant une somme ou une valeur fixée par décret, (1.500 Euros) même pour dépôts volontaires, et il n'est reçu aucune preuve par témoins contre et outre le contenu aux actes, ni sur ce qui serait allégué avoir été dit avant, lors ou depuis les actes, encore qu'il s'agisse d'une somme ou valeur moindre. » ; qu'aux termes des articles 1347 et 1348 du même code : « Les règles ci-dessus reçoivent exception lorsqu'il existe un commencement de preuve par écrit. On appelle ainsi tout acte par écrit qui est émané de celui contre lequel la demande est formée, ou de celui qu'il représente, et qui rend vraisemblable le fait allégué. Peuvent être considérées par le juge comme équivalant à un commencement de preuve par écrit les déclarations faites par une partie lors de sa comparution personnelle, son refus de répondre ou son absence à la comparution. Les règles ci-dessus reçoivent encore exception lorsque l'obligation est née d'un quasi-contrat, d'un délit ou d'un quasi-délit, ou lorsque l'une des parties, soit n'a pas eu la possibilité matérielle ou morale de se procurer une preuve littérale de l'acte juridique, soit a perdu le titre qui lui servait de preuve littérale, par suite d'un cas fortuit ou d'une force majeure. » ; qu'aucun acte sous seing privé ou devant notaire n'ayant été établi entre les parties Mme [Y] doit, pour être admise à rapporter par témoins ou présomptions la preuve du contrat de prêt qu'elle invoque , produire un commencement de preuve par écrit ou justifier de l'impossibilité morale ou matérielle dans laquelle elle se serait trouvée de solliciter un écrit ; que s'agissant du commencement de preuve par écrit il doit ainsi que le précise clairement l'article 1347 émaner de la personne à qui on l'oppose ; que dès lors tant l'ordre de virement que le constat du virement ne peuvent constituer un commencement de preuve par écrit et les seuls documents émanant de Mme [D] [Y] veuve [V] qui sont des courriels adressés à sa mère loin d'évoquer l'existence d'un prêt affirment au contraire qu'il s'agit d'une donation ; que s'agissant de l'impossibilité de se procurer un écrit il n'est pas allégué par Mme [J] [Y] qu'elle était dans l'impossibilité matérielle de solliciter un écrit de sa fille ; que s'agissant de l'impossibilité morale elle doit être caractérisée par des éléments de fait qui ne peuvent être constitués par le seul lien de parenté existant entre les parties ; que dans ses écritures Mme [Y] indique « en l'état de la confiance légitime régissant habituellement les relations entre parents et enfants Mme B. n'a pas jugé utile de faire signer à sa fille une reconnaissance de dette. » ; qu'elle indique par ailleurs qu'elle était très proche de sa fille ce qui n'est pas réellement démontré et est en tout hypothèse contesté par Mme [D] [Y] veuve [V] comme en témoignent les écrits versés aux débats dans lesquels elle reproche à sa mère son comportement passé et présent ; qu'au surplus compte tenu de l'importance de la somme versée, de l'existence d'autres enfants dont il était nécessaire de préserver les droits il était tout à fait légitime pour Mme [J] [Y] de solliciter de sa fille un écrit ; que la preuve d'une impossibilité morale de se procurer un écrit n'est donc pas rapportée : que faute pour Mme [J] [Y] de démontrer que les conditions prescrites aux articles 1347 et 1348 du code civil sont réunies elle n'est pas recevable à prouver par témoignages l'existence d'une obligation de remboursement de sa fille ; qu'elle ne démontre donc pas la réalité du prêt qu'elle invoque et doit être déboutée de ce chef » ;

1°) ALORS QUE la preuve d'un contrat peut se faire par tout moyen lorsque la partie à qui incombe la charge de prouver une obligation a été dans l'impossibilité morale de se procurer un écrit ; que l'impossibilité morale de se procurer un écrit est caractérisée en présence d'un empêchement psychologique à le solliciter de l'autre partie ; qu'en déduisant de la supposée mésentente de Mme [D] [Y] veuve [V] avec sa mère, Mme [J] [Y], que cette dernière ne s'était heurtée à aucune impossibilité morale de solliciter de sa fille un écrit, la cour d'appel a statué par un motif impropre à justifier son arrêt en violation de l'article 1348, devenu 1360, du code civil ;

2) ALORS QUE la preuve d'un contrat peut se faire par tout moyen lorsque la partie à qui incombe la charge de prouver une obligation a été dans l'impossibilité morale de se procurer un écrit ; que l'impossibilité morale de se procurer un écrit est caractérisée en présence d'un empêchement psychologique à le solliciter de l'autre partie ; qu'en l'espèce, en énonçant encore, pour retenir que Mme [J] [Y] ne s'était heurtée à aucune impossibilité morale de solliciter de sa fille un écrit, que l'importance de la somme versée et l'existence d'autres enfants dont il était nécessaire de préserver les droits, la rendaient tout à fait légitime à solliciter cet écrit, sans constater que de telles considérations avaient écarté chez elle tout empêchement psychologique sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 1348, devenu 1360, du code civil.

Le greffier de chambre


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 19-25944
Date de la décision : 19/01/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18 septembre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 19 jan. 2022, pourvoi n°19-25944


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Buk Lament-Robillot

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:19.25944
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