LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 6 janvier 2022
Rejet
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 7 F-D
Pourvoi n° Q 20-19.988
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 6 JANVIER 2022
La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) des Ardennes, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Q 20-19.988 contre l'arrêt n° RG 19/03463 rendu le 30 juin 2020 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale, section 1), dans le litige l'opposant à Mme [I] [L], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Renault-Malignac, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes, de la SCP Didier et Pinet, avocat de Mme [L], et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 novembre 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Renault-Malignac, conseiller rapporteur, Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen, et Mme Aubagna, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 30 juin 2020), [H] [L] (la victime), ancien salarié de la société [3] comme employé de fonderie, est décédé le 17 janvier 1999 des suites d'un cancer broncho-pulmonaire diagnostiqué le 9 juin 1998. Ses ayants droit ont souscrit le 28 février 2011 une déclaration de maladie professionnelle au titre du tableau n° 30 bis. Par décisions des 6 décembre 2011 et 4 janvier 2012, la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes (la caisse) a pris en charge, au titre de la législation professionnelle, respectivement la maladie et le décès de la victime et a notifié à Mme [L], sa veuve (la conjointe survivante), une rente de conjoint survivant.
2. Un jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale des Ardennes, rendu le 28 juillet 2017, sur la demande formée le 18 juillet 2013 par le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (le FIVA), subrogé dans les droits des ayants droit de la victime, ayant dit que la maladie professionnelle de la victime était due à la faute inexcusable de son employeur et fixé au maximum le montant de la majoration de la rente devant être servie à la conjointe survivante de la victime, la caisse a notifié à cette dernière une décision de majoration de sa rente à compter du 18 juillet 2013, date de la demande en reconnaissance de la faute inexcusable.
3. La conjointe survivante a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. La caisse fait grief à l'arrêt de dire que la majoration de la rente sera versée à la conjointe survivante à compter du 28 février 2011, date de la déclaration de la maladie professionnelle de son époux décédé, alors :
« 1°/ que les droits résultant des dispositions de l'article 40, II, de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 prennent effet de la date du dépôt de la demande sans que les prestations, indemnités et rentes puissent avoir un effet antérieur au dépôt de celle-ci ; qu'en fixant la date d'effet de la majoration de rente octroyée à la conjointe survivante à une date antérieure au dépôt de la demande tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, quand les droits lui ayant été reconnus résultaient des dispositions de l'article 40, II, de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, les juges du fond ont violé l'article 40, III, de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ;
2°/ qu'en tout état, faute de s'être expliqués sur le point de savoir si les droits reconnus à la conjointe survivante ne résultaient pas des dispositions de l'article 40, II, de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, avant que de retenir que « l'article 40 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 était sans incidence au regard des dates des demandes en cause », les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 40, III, de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998. »
Réponse de la Cour
5. Aux termes de l'article 40, II, de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, les droits aux prestations, indemnités et majorations prévus par le livre IV du code de la sécurité sociale, y compris en cas de faute inexcusable , et ceux de leurs ayants droit, sont rouverts dès lors qu'ils ont fait l'objet d'une première constatation médicale entre le 1er janvier 1947 et la date de promulgation de la loi.
6. Selon l'article 40, III, de la même loi, les droits qui résultent des dispositions du II prennent effet de la date du dépôt de la demande sans que les prestations, indemnités et rentes puissent avoir un effet antérieur au dépôt de celle-ci.
7. L'arrêt relève, par motifs adoptés des premiers juges, que les décisions de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie et du décès de la victime ont été prises en application de l'article 40 de la loi du 23 décembre 1998 et que le FIVA , subrogé dans les droits des ayants droit de la victime, a agi en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur dans les deux ans suivant la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie et du décès de la victime.
8. Il énonce que l'article L. 452-2 du code de la sécurité sociale qui prévoit qu'en cas de faute inexcusable de l'employeur, la victime ou ses ayants droit reçoivent une majoration des indemnités qui leur sont dues, figure au livre IV de ce code, de sorte que la majoration de la rente de conjoint survivant est nécessairement visée par la réouverture des droits mentionnée au II de l'article 40 de la loi du 23 décembre 1998.
9. Il retient que, dès lors, la fixation du point de départ de la majoration de la rente fixée à la suite de la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur est soumise aux dispositions du III de l'article 40.
10. Il ajoute, par motifs propres, que la majoration de la rente d'accident du travail ou de maladie professionnelle étant un élément de la rente elle-même, la majoration prend effet à compter de la date à laquelle la rente est due, les mêmes principes s'appliquant à la majoration de la rente du conjoint survivant.
11. De ces constatations et énonciations, la cour d'appel a exactement déduit que le point de départ de la majoration de la rente de conjoint survivant devait être fixé à la date de la demande de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie.
12. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes et la condamne à payer à Mme [L] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille vingt-deux.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes.
L'arrêt attaqué par la Caisse encourt la censure ;
EN CE QU' il a, confirmant le jugement, infirmé la décision de la commission de recours amiable du 8 mars 2018 ayant retenu la date du 18 juillet 2013 comme point de départ de la majoration de la rente d'ayant droit servie à Mme [L], dit que la majoration de la rente serait versée à Mme [L] à compter du 28 février 2011 et invité la Caisse à procéder à la régularisation du dossier de Mme [L] ;
ALORS QUE, premièrement, les droits résultant des dispositions de l'article 40, II de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 prennent effet de la date du dépôt de la demande sans que les prestations, indemnités et rentes puissent avoir un effet antérieur au dépôt de celle-ci ; qu'en fixant la date d'effet de la majoration de rente octroyée à Mme [L] à une date antérieure au dépôt de la demande tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, quand les droits lui ayant été reconnus résultaient des dispositions de l'article 40, II de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, les juges du fond ont violé l'article 40, III de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ;
ALORS QUE, deuxièmement, et en tout état, faute de s'être expliqués sur le point de savoir si les droits reconnus à Mme [L] ne résultaient pas des dispositions de l'article 40, II de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, avant que de retenir que « l'article 40 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 .était. sans incidence au regard des dates des demandes en cause », les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 40, III de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998.