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05/01/2022 | FRANCE | N°19-23458

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 05 janvier 2022, 19-23458


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

DB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 janvier 2022

Rejet non spécialement motivé

Mme DARBOIS, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 10003 F-D

Pourvoi n° R 19-23.458

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE,

DU 5 JANVIER 2022

La société La Thominière, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° R 19-23.4...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

DB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 janvier 2022

Rejet non spécialement motivé

Mme DARBOIS, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 10003 F-D

Pourvoi n° R 19-23.458

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 5 JANVIER 2022

La société La Thominière, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° R 19-23.458 contre un arrêt n° RG 17/10017 rendu le 4 juillet 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 3-3), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Enedis, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], anciennement dénommée ERDF,

2°/ à la société XL Insurance Company SE, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2] (Irlande), venant aux droits de la société Axa Corporate Solutions,

défenderesses à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller, les observations écrites de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société La Thominière, de la SCP Spinosi, avocat de la société XL Insurance Company SE, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société Enedis, et l'avis de Mme Beaudonnet, avocat général, après débats en l'audience publique du 9 novembre 2021 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

Reprise d'instance

1. Il est donné acte à la société XL Insurance Company SE de ce qu'elle vient aux droits de la société Axa Corporate Solutions.

2. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

3. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société La Thominière aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société La Thominière et la condamne à payer à chacune des sociétés Enedis et XL Insurance Company SE la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq janvier deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société La Thominière.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la société La Thominière de toutes ses demandes ;

Aux motifs que il n'est pas discuté en l'espèce que, d'une part, la demande de raccordement formulée par la Sarl La Thominière a été reçue par Enedis le 30 août 2010, laquelle disposait par conséquent d'un délai expirant le 30 novembre pour lui adresser la PTF et que, d'autre part, la SA Enedis a failli à cette obligation. L'appelante ne conteste plus d'ailleurs que ce manquement constitue une faute qui lui soit imputable (arrêt, p. 8, § 3.1).
?

Faute d'avoir respecté son obligation, la SA Enedis a fait perdre à la Sarl La Thominière une chance de pouvoir adresser dans le délai qui lui restait son acceptation de la PTF de sorte que le lien de causalité entre ledit manquement et le préjudice de perte de chance allégué est suffisamment établi (arrêt, p. 9, § 2) (?)

La Sarl La Thominière réclame la réparation d'un préjudice constitué par la perte de chance, évaluée à 80 %, d'obtenir un tarif de rachat de l'électricité produite par la centrale qu'elle projetait d'édifier aux conditions de l'arrêté du 12 janvier 2010, ou à défaut de celui du 10 juillet 2006, et qu'elle calcule sur la perte de marge sur exploitation pendant 20 ans. Les Sa Enedis et Axa CS font valoir qu'il n'est justifié d'aucun préjudice réparable à raison de l'illégalité de cet arrêté qui institue une aide d'État qui n'a pas été notifiée préalablement à la Commission européenne en violation des dispositions de l'article 108 § 3 du TFUE.

Aux termes de l'article 107§1 du TFUE, « Sauf dérogations prévues par les traités, sont incompatibles avec le marché intérieur, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les Etats ou au moyen de ressources d'État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions ». L'article 108§3 du TFUE dispose que « la Commission est informée en temps utile pour présenter ses observations des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. Si elle estime qu'un projet n'est pas compatible avec le marché intérieur, aux termes de l'article 107, elle ouvre sans délai la procédure prévue au paragraphe précédent. L'État membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées avant que cette procédure ait abouti à une décision finale. »

C'est à tort que la Sarl La Thominière invoque la prescription, l'illégalité du décret opposée par voie d'exception n'étant pas soumise à la prescription édictée par le règlement 659/1999 du 22 mars 1999 qui ne vise que les pouvoirs de la Commission en matière de récupération d'une aide d'État, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Sur la question préjudicielle posée par la cour d'appel de Versailles par arrêt rendu le 20 septembre 2016, dans une affaire similaire, la CJUE a, par ordonnance du 15 mars 2017, rappelé que la qualification d'aide d'État au sens de l'article 107§1 du TFUE supposait la réunion de 4 conditions, à savoir qu'il existe une intervention de l'État ou au moyen de ressources d'État, que cette intervention soit susceptible d'affecter les échanges entre les Etats membres, qu'elle accorde un avantage sélectif à son bénéficiaire, et qu'elle fausse ou menace de fausser la concurrence dans le marché intérieur. Elle a répondu que « l'article 107 paragraphe 1 du TFUE doit être interprété en ce sens qu'un mécanisme tel que celui instauré par la réglementation nationale en cause au principal, d'obligation d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative solaire à un prix supérieur à celui du marché et dont le financement est supporté par les consommateurs finals d'électricité doit être considéré comme une intervention de l'État ou au moyen de ressources d'État », précisant qu'il appartenait à la juridiction saisie de déterminer si la mesure en cause constituait une aide d'État en vérifiant si les trois autres conditions étaient remplies.

Elle a ajouté que « l'article 108 paragraphe 3 TFUE doit être interprétée en ce sens que en cas de défaut de notification préalable à la commission européenne d'une mesure nationale constituant une aide d'État au sens de l'article 107 paragraphe 1 TFUE il incombe aux juridictions nationales de tirer toutes les conséquences de cette illégalité, notamment en ce qui concerne la validité des actes d'exécution de cette mesure ». La CJUE n'a donc pas, comme le prétend la Sarl La Thominière, rejeté la qualification d'aide d'État, mais répondu au contraire que la première condition pour qualifier un dispositif d'aide d'État était remplie, invitant les juridictions nationales à vérifier si les trois autres conditions l'étaient.

En l'espèce, ce dispositif s'applique à des bénéficiaires qui opèrent dans un système d'économie de marché, caractérisé par ses échanges transfrontaliers, en leur procurant un avantage qui garantit la rentabilité de leur investissement et favorise de manière sélective un type de production, l'énergie photovoltaïque. Ce dispositif est donc susceptible d'affecter les échanges entre Etats membres, accorde à ses bénéficiaires un avantage sélectif et fausse ou risque de fausser la concurrence sur le marché intérieur. C'est par conséquent à raison que les Sa Enedis et Axa Cs soutiennent qu'il s'agit d'une aide d'État. Elle devait faire l'objet d'une notification préalable à la Commission en application de l'article 108 § 3.

Il ne peut être sérieusement discuté que l'arrêté du 12 janvier 2010, comme celui du 10 janvier 2006, n'a jamais été notifié à la Commission, préalablement à sa mise en oeuvre, dans les conditions de ce texte, ce qu'a d'ailleurs reconnu le secrétaire d'État auprès du ministère des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes répondant à une question écrite du 27 septembre 2016 sur les régimes d'aides accordées aux producteurs d'électricité d'origine photovoltaïque. La Sarl la Thominière ne peut invoquer la connaissance qu'a pu avoir la Commission de l'arrêté lors des instances devant la CJUE, cette « connaissance » ne pouvant valoir notification, ni le règlement CE 651/2014 lequel est entré en vigueur postérieurement à l'abrogation du décret du 12 janvier 2010 par le décret du 4 mars 2011.

Le règlement d'exemption CE 800/2008, applicable au jour du décret du 12 janvier 2010, ne concernait que les aides transparentes, c'est-à-dire dont il est possible de calculer précisément et préalablement l'équivalent-subvention brut au moment de l'octroi de l'aide, ce qui n'est pas le cas du régime d'aides accordées aux producteurs d'électricité photovoltaïque et les régimes d'aide devait contenir une référence expresse au règlement par la citation de son titre, ce qui n'est aucunement le cas pour les décrets litigieux. C'est tout aussi vainement que la Sarl La Thominière invoque les dispositions de l'article 88 de la loi du 12 juillet 2010 qui valide l'arrêté du 12 janvier 2010, une disposition de droit interne étant inefficace à écarter l'application du droit de l'Union en vertu du principe de primauté du droit de l'Union sur le droit national, ou les décisions du Conseil d'État, lequel n'a pas statué sur la violation de l'obligation de notification préalable, ou les décisions ultérieures de la Commission, concernant des régimes d'aide différents, plus contraignants et qui instauraient des tarifs inférieurs à ceux des arrêtés de 2006 et 2010. Les arrêtés de 2006 et 2010 ayant été abrogés et remplacés par l'arrêté du 4 mars 2011, lequel a d'ailleurs fait l'objet d'une procédure de notification à la Commission, aucune régularisation n'est possible.

Si les juridictions nationales sont compétentes pour apprécier le respect par les Etats membres de la procédure de notification, seule la Commission européenne est compétente pour statuer sur la compatibilité d'une aide d'État avec le marché intérieur et il n'appartient donc pas à une juridiction nationale d'opérer un tel contrôle. Le fait que la Commission a déclaré compatible les mécanismes d'aide à la production d'électricité photovoltaïque postérieurs est sans incidence sur la validité des dispositifs antérieurs. Il est tout aussi inopérant d'invoquer l'absence de saisine d'office par la Commission européenne pour procéder à un examen de la compatibilité, l'absence de décision sur ce point ne signifiant pas que le décret litigieux bénéficie d'une reconnaissance tacite de compatibilité.

L'arrêté du 12 janvier 2010 tout comme celui du 10 juillet 2006, qui n'ont pas été notifiés à la Commission européenne préalablement à leur mise en oeuvre, sont par conséquent illégaux, et cette illégalité fait obstacle à elle seule, à la demande d'indemnisation formée sur ce seul fondement par la Sarl La Thominière.

Le principe de réparation intégrale du préjudice subi à raison d'une faute commise ne peut trouver à s'appliquer dès lors qu'il s'agit de réparer la perte d'un avantage résultant d'une aide illégale. La Sarl La Thominière, même lorsqu'elle sollicite à titre subsidiaire, une somme forfaitaire, ce mode de réparation étant en tout état de cause contraire au principe de réparation intégrale ci-dessus rappelé, ne demande pas autre chose que la perte de chance d'obtenir une indemnisation basée sur une aide illégale ;

ALORS QUE lorsque la solution d'un litige dépend d'une question soulevant une difficulté sérieuse et relevant de la compétence de la juridiction administrative, la juridiction judiciaire initialement saisie doit la transmettre à la juridiction administrative compétente et surseoir à statuer jusqu'à la décision sur la question préjudicielle ; que par un arrêt du 22 janvier 2020 (requête n° 418737), le Conseil d'État a considéré que l'arrêté du 12 janvier 2010 s'appliquait obligatoirement aux contrats d'achat d'électricité conclus sous l'empire de ce texte ; qu'il existe ainsi une difficulté sérieuse sur la légalité de l'arrêté du 12 janvier 2010 qui ne pouvait être tranchée par le juge judiciaire de sorte qu'en retenant, pour débouter la société La Thominière de ses demandes, l'illégalité de cet arrêté sans en saisir préalablement la juridiction administrative, seule compétente pour l'apprécier, la cour d'appel a violé l'article 49 du code de procédure civile, ensemble l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la société La Thominière de toutes ses demandes ;

Aux motifs que il n'est pas discuté en l'espèce que, d'une part, la demande de raccordement formulée par la Sarl La Thominière a été reçue par Enedis le 30 août 2010, laquelle disposait par conséquent d'un délai expirant le 30 novembre pour lui adresser la PTF et que, d'autre part, la SA Enedis a failli à cette obligation. L'appelante ne conteste plus d'ailleurs que ce manquement constitue une faute qui lui soit imputable (arrêt, p. 8, § 3.1).
?

Faute d'avoir respecté son obligation, la SA Enedis a fait perdre à la Sarl La Thominière une chance de pouvoir adresser dans le délai qui lui restait son acceptation de la PTF de sorte que le lien de causalité entre ledit manquement et le préjudice de perte de chance allégué est suffisamment établi (arrêt, p. 9, § 2) (?)

La Sarl La Thominière réclame la réparation d'un préjudice constitué par la perte de chance, évaluée à 80 %, d'obtenir un tarif de rachat de l'électricité produite par la centrale qu'elle projetait d'édifier aux conditions de l'arrêté du 12 janvier 2010, ou à défaut de celui du 10 juillet 2006, et qu'elle calcule sur la perte de marge sur exploitation pendant 20 ans. Les Sa Enedis et Axa CS font valoir qu'il n'est justifié d'aucun préjudice réparable à raison de l'illégalité de cet arrêté qui institue une aide d'État qui n'a pas été notifiée préalablement à la Commission européenne en violation des dispositions de l'article 108 § 3 du TFUE.

Aux termes de l'article 107§1 du TFUE, « Sauf dérogations prévues par les traités, sont incompatibles avec le marché intérieur, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les Etats ou au moyen de ressources d'État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions ». L'article 108§3 du TFUE dispose que « la Commission est informée en temps utile pour présenter ses observations des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. Si elle estime qu'un projet n'est pas compatible avec le marché intérieur, aux termes de l'article 107, elle ouvre sans délai la procédure prévue au paragraphe précédent. L'État membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées avant que cette procédure ait abouti à une décision finale. »

C'est à tort que la Sarl La Thominière invoque la prescription, l'illégalité du décret opposée par voie d'exception n'étant pas soumise à la prescription édictée par le règlement 659/1999 du 22 mars 1999 qui ne vise que les pouvoirs de la Commission en matière de récupération d'une aide d'État, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Sur la question préjudicielle posée par la cour d'appel de Versailles par arrêt rendu le 20 septembre 2016, dans une affaire similaire, la CJUE a, par ordonnance du 15 mars 2017, rappelé que la qualification d'aide d'État au sens de l'article 107§1 du TFUE supposait la réunion de 4 conditions, à savoir qu'il existe une intervention de l'État ou au moyen de ressources d'État, que cette intervention soit susceptible d'affecter les échanges entre les Etats membres, qu'elle accorde un avantage sélectif à son bénéficiaire, et qu'elle fausse ou menace de fausser la concurrence dans le marché intérieur. Elle a répondu que « l'article 107 paragraphe 1 du TFUE doit être interprété en ce sens qu'un mécanisme tel que celui instauré par la réglementation nationale en cause au principal, d'obligation d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative solaire à un prix supérieur à celui du marché et dont le financement est supporté par les consommateurs finals d'électricité doit être considéré comme une intervention de l'État ou au moyen de ressources d'État », précisant qu'il appartenait à la juridiction saisie de déterminer si la mesure en cause constituait une aide d'État en vérifiant si les trois autres conditions étaient remplies.

Elle a ajouté que « l'article 108 paragraphe 3 TFUE doit être interprétée en ce sens que en cas de défaut de notification préalable à la commission européenne d'une mesure nationale constituant une aide d'État au sens de l'article 107 paragraphe 1 TFUE il incombe aux juridictions nationales de tirer toutes les conséquences de cette illégalité, notamment en ce qui concerne la validité des actes d'exécution de cette mesure ». La CJUE n'a donc pas, comme le prétend la Sarl La Thominière, rejeté la qualification d'aide d'État, mais répondu au contraire que la première condition pour qualifier un dispositif d'aide d'État était remplie, invitant les juridictions nationales à vérifier si les trois autres conditions l'étaient.

En l'espèce, ce dispositif s'applique à des bénéficiaires qui opèrent dans un système d'économie de marché, caractérisé par ses échanges transfrontaliers, en leur procurant un avantage qui garantit la rentabilité de leur investissement et favorise de manière sélective un type de production, l'énergie photovoltaïque. Ce dispositif est donc susceptible d'affecter les échanges entre Etats membres, accorde à ses bénéficiaires un avantage sélectif et fausse ou risque de fausser la concurrence sur le marché intérieur. C'est par conséquent à raison que les Sa Enedis et Axa Cs soutiennent qu'il s'agit d'une aide d'État. Elle devait faire l'objet d'une notification préalable à la Commission en application de l'article 108 § 3.

Il ne peut être sérieusement discuté que l'arrêté du 12 janvier 2010, comme celui du 10 janvier 2006, n'a jamais été notifié à la Commission, préalablement à sa mise en oeuvre, dans les conditions de ce texte, ce qu'a d'ailleurs reconnu le secrétaire d'État auprès du ministère des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes répondant à une question écrite du 27 septembre 2016 sur les régimes d'aides accordées aux producteurs d'électricité d'origine photovoltaïque. La Sarl la Thominière ne peut invoquer la connaissance qu'a pu avoir la Commission de l'arrêté lors des instances devant la CJUE, cette « connaissance » ne pouvant valoir notification, ni le règlement CE 651/2014 lequel est entré en vigueur postérieurement à l'abrogation du décret du 12 janvier 2010 par le décret du 4 mars 2011.

Le règlement d'exemption CE 800/2008, applicable au jour du décret du 12 janvier 2010, ne concernait que les aides transparentes, c'est-à-dire dont il est possible de calculer précisément et préalablement l'équivalent-subvention brut au moment de l'octroi de l'aide, ce qui n'est pas le cas du régime d'aides accordées aux producteurs d'électricité photovoltaïque et les régimes d'aide devait contenir une référence expresse au règlement par la citation de son titre, ce qui n'est aucunement le cas pour les décrets litigieux. C'est tout aussi vainement que la Sarl La Thominière invoque les dispositions de l'article 88 de la loi du 12 juillet 2010 qui valide l'arrêté du 12 janvier 2010, une disposition de droit interne étant inefficace à écarter l'application du droit de l'Union en vertu du principe de primauté du droit de l'Union sur le droit national, ou les décisions du Conseil d'État, lequel n'a pas statué sur la violation de l'obligation de notification préalable, ou les décisions ultérieures de la Commission, concernant des régimes d'aide différents, plus contraignants et qui instauraient des tarifs inférieurs à ceux des arrêtés de 2006 et 2010. Les arrêtés de 2006 et 2010 ayant été abrogés et remplacés par l'arrêté du 4 mars 2011, lequel a d'ailleurs fait l'objet d'une procédure de notification à la Commission, aucune régularisation n'est possible.

Si les juridictions nationales sont compétentes pour apprécier le respect par les Etats membres de la procédure de notification, seule la Commission européenne est compétente pour statuer sur la compatibilité d'une aide d'État avec le marché intérieur et il n'appartient donc pas à une juridiction nationale d'opérer un tel contrôle. Le fait que la Commission a déclaré compatible les mécanismes d'aide à la production d'électricité photovoltaïque postérieurs est sans incidence sur la validité des dispositifs antérieurs. Il est tout aussi inopérant d'invoquer l'absence de saisine d'office par la Commission européenne pour procéder à un examen de la compatibilité, l'absence de décision sur ce point ne signifiant pas que le décret litigieux bénéficie d'une reconnaissance tacite de compatibilité.

L'arrêté du 12 janvier 2010 tout comme celui du 10 juillet 2006, qui n'ont pas été notifiés à la Commission européenne préalablement à leur mise en oeuvre, sont par conséquent illégaux, et cette illégalité fait obstacle à elle seule, à la demande d'indemnisation formée sur ce seul fondement par la Sarl La Thominière.

Le principe de réparation intégrale du préjudice subi à raison d'une faute commise ne peut trouver à s'appliquer dès lors qu'il s'agit de réparer la perte d'un avantage résultant d'une aide illégale. La Sarl La Thominière, même lorsqu'elle sollicite à titre subsidiaire, une somme forfaitaire, ce mode de réparation étant en tout état de cause contraire au principe de réparation intégrale ci-dessus rappelé, ne demande pas autre chose que la perte de chance d'obtenir une indemnisation basée sur une aide illégale ;

1. ALORS QUE la Cour de Justice de l'Union Européenne a dit pour droit, dans son arrêt CELF du 12 février 2008 (C-199/06) que l'article 88, devenu 108, paragraphe 3, dernière phrase, du Traité doit être interprété en ce sens que le juge national n'est pas tenu d'ordonner la récupération d'une aide mise à exécution en méconnaissance de cette disposition, lorsque la Commission des Communautés européennes a adopté une décision finale constatant la compatibilité de ladite aide avec le marché commun au sens de l'article 87, devenu 107, du Traité mais seulement d'ordonner au bénéficiaire de l'aide le paiement d'intérêts au titre de la période d'illégalité ; que ce n'est qu'en cas de déclaration d'incompatibilité que l'aide doit être intégralement récupérée, avec les intérêts ; que l'illégalité d'une aide d'État, pour absence de notification à la Commission européenne ne suffit donc pas à elle seule à rendre irréparable le préjudice constitué par la privation d'un telle aide, ce qui ne pourrait résulter que d'une déclaration d'incompatibilité par la Commission européenne ; qu'en l'espèce, en déduisant l'absence de préjudice réparable de la société La Thominière de l'absence de notification à la Commission de l'arrêté du 12 janvier 2010, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé l'article 108, paragraphe 3, du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne tel qu'interprété par la Cour de Justice de l'Union Européenne, ensemble l'article 11 du règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil du 22 mars 1999 et l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

2. ALORS QUE le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l'équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime, aux dépens du responsable, dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable ne s'était pas produit ; qu'en l'espèce, la société La Thominière faisait valoir, sans être démentie, que sans la faute de la société Erdf, elle aurait eu une chance de conclure un contrat d'achat d'électricité au tarif fixé par l'arrêté du 12 janvier 2010, lequel contrat serait toujours en cours comme le sont actuellement tous les contrats qui ont été effectivement conclus sous l'empire de cet arrêté et de celui de 2006, et ne pourrait être remis en cause en l'absence de toute action en annulation de ces arrêtés fondée sur leur absence de notification à la commission européenne, désormais impossible du fait de leur abrogation ; que la cour d'appel qui a rejeté la demande indemnitaire de la société La Thominière sans s'expliquer sur la situation des autres producteurs ayant bénéficié de contrats conclus sur la base de l'arrêté du 12 janvier 2010, ni rechercher quelle aurait été la situation dans laquelle la société La Thominière se serait trouvée sans la faute de la société Enedis, a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

3. ALORS QUE la perte d'une chance est toujours indemnisable, quand bien même elle ne résulterait pas de la lésion d'un droit dont l'exécution aurait pu être réclamée, en l'absence de toute négligence fautive de la part de la victime ; que la société La Thominière, qui ne demande pas la conclusion d'un contrat d'achat d'électricité au tarif fixé par l'arrêté du 12 janvier 2010 mais la réparation d'un préjudice, n'étant en rien responsable de l'absence de notification de cet arrêté à la Commission européenne qui résulte de la seule négligence des autorités françaises, ne pouvait se voir opposer cette illégalité pour refuser d'indemniser le préjudice certain qu'elle subit du fait de la perte d'une chance de conclure un contrat d'achat d'électricité au tarif en vigueur à la date à laquelle son dommage s'est réalisé par la faute de la société Erdf ; qu'en affirmant toutefois que le préjudice subi par la société La Thominière n'est pas réparable parce que les arrêtés fixant ce tarif seraient illégaux faute de notification à la Commission, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

4. ALORS QUE l'article 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 prévoit l'obligation pour l'État français d'arrêter les conditions d'achat de l'électricité produite par les producteurs bénéficiant de l'obligation d'achat, lesquelles conditions doivent prendre en compte les coûts d'investissement et d'exploitation évités par les acheteurs, ainsi qu'une prime prenant en compte la contribution de la production livrée ou des filières à la réalisation des objectifs définis au deuxième alinéa de l'article 1er de la loi ; que l'annulation de l'arrêté du 12 janvier 2010, si elle était intervenue, aurait contraint l'État français, tenu de prendre une décision, à fixer un nouveau tarif d'achat correspondant à ces prescriptions, au besoin rétroactivement, lequel tarif aurait pu être identique à celui fixé par l'arrêté du 12 janvier 2010 afin de consolider les situations acquises sous son empire ; qu'ainsi, le préjudice du producteur consistant dans une perte de chance de conclure un contrat d'achat d'électricité au tarif fixé par l'arrêté du 12 janvier 2010, l'absence de notification de cet arrêté à la Commission européenne imposait seulement à la cour d'appel de rechercher s'il existait ou non un risque que la Commission européenne le déclare incompatible au marché intérieur, entraînant une obligation générale de remboursement des aides perçues par tous les producteurs ayant conclu un contrat d'achat à ce tarif, ce qui aurait seul pu rendre ce préjudice non réparable, la compatibilité de l'arrêté permettant au contraire à l'État français de prendre un nouvel arrêté au même tarif pour régulariser rétroactivement la situation ; qu'en jugeant non indemnisable le préjudice invoqué, sans procéder à cette recherche, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la société La Thominière de toutes ses demandes ;

Aux motifs que il n'est pas discuté en l'espèce que, d'une part, la demande de raccordement formulée par la Sarl La Thominière a été reçue par Enedis le 30 août 2010, laquelle disposait par conséquent d'un délai expirant le 30 novembre pour lui adresser la PTF et que, d'autre part, la SA Enedis a failli à cette obligation. L'appelante ne conteste plus d'ailleurs que ce manquement constitue une faute qui lui soit imputable (arrêt, p. 8, § 3.1).
?

Faute d'avoir respecté son obligation, la SA Enedis a fait perdre à la Sarl La Thominière une chance de pouvoir adresser dans le délai qui lui restait son acceptation de la PTF de sorte que le lien de causalité entre ledit manquement et le préjudice de perte de chance allégué est suffisamment établi (arrêt, p. 9, § 2) (?)

La Sarl La Thominière réclame la réparation d'un préjudice constitué par la perte de chance, évaluée à 80 %, d'obtenir un tarif de rachat de l'électricité produite par la centrale qu'elle projetait d'édifier aux conditions de l'arrêté du 12 janvier 2010, ou à défaut de celui du 10 juillet 2006, et qu'elle calcule sur la perte de marge sur exploitation pendant 20 ans. Les Sa Enedis et Axa CS font valoir qu'il n'est justifié d'aucun préjudice réparable à raison de l'illégalité de cet arrêté qui institue une aide d'État qui n'a pas été notifiée préalablement à la Commission européenne en violation des dispositions de l'article 108 § 3 du TFUE.

Aux termes de l'article 107§1 du TFUE, « Sauf dérogations prévues par les traités, sont incompatibles avec le marché intérieur, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les Etats ou au moyen de ressources d'État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions ». L'article 108§3 du TFUE dispose que « la Commission est informée en temps utile pour présenter ses observations des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. Si elle estime qu'un projet n'est pas compatible avec le marché intérieur, aux termes de l'article 107, elle ouvre sans délai la procédure prévue au paragraphe précédent. L'État membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées avant que cette procédure ait abouti à une décision finale. »

C'est à tort que la Sarl La Thominière invoque la prescription, l'illégalité du décret opposée par voie d'exception n'étant pas soumise à la prescription édictée par le règlement 659/1999 du 22 mars 1999 qui ne vise que les pouvoirs de la Commission en matière de récupération d'une aide d'État, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Sur la question préjudicielle posée par la cour d'appel de Versailles par arrêt rendu le 20 septembre 2016, dans une affaire similaire, la CJUE a, par ordonnance du 15 mars 2017, rappelé que la qualification d'aide d'État au sens de l'article 107§1 du TFUE supposait la réunion de 4 conditions, à savoir qu'il existe une intervention de l'État ou au moyen de ressources d'État, que cette intervention soit susceptible d'affecter les échanges entre les Etats membres, qu'elle accorde un avantage sélectif à son bénéficiaire, et qu'elle fausse ou menace de fausser la concurrence dans le marché intérieur. Elle a répondu que « l'article 107 paragraphe 1 du TFUE doit être interprété en ce sens qu'un mécanisme tel que celui instauré par la réglementation nationale en cause au principal, d'obligation d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative solaire à un prix supérieur à celui du marché et dont le financement est supporté par les consommateurs finals d'électricité doit être considéré comme une intervention de l'État ou au moyen de ressources d'État », précisant qu'il appartenait à la juridiction saisie de déterminer si la mesure en cause constituait une aide d'État en vérifiant si les trois autres conditions étaient remplies.

Elle a ajouté que « l'article 108 paragraphe 3 TFUE doit être interprétée en ce sens que en cas de défaut de notification préalable à la commission européenne d'une mesure nationale constituant une aide d'État au sens de l'article 107 paragraphe 1 TFUE il incombe aux juridictions nationales de tirer toutes les conséquences de cette illégalité, notamment en ce qui concerne la validité des actes d'exécution de cette mesure ». La CJUE n'a donc pas, comme le prétend la Sarl La Thominière, rejeté la qualification d'aide d'État, mais répondu au contraire que la première condition pour qualifier un dispositif d'aide d'État était remplie, invitant les juridictions nationales à vérifier si les trois autres conditions l'étaient.

En l'espèce, ce dispositif s'applique à des bénéficiaires qui opèrent dans un système d'économie de marché, caractérisé par ses échanges transfrontaliers, en leur procurant un avantage qui garantit la rentabilité de leur investissement et favorise de manière sélective un type de production, l'énergie photovoltaïque. Ce dispositif est donc susceptible d'affecter les échanges entre Etats membres, accorde à ses bénéficiaires un avantage sélectif et fausse ou risque de fausser la concurrence sur le marché intérieur. C'est par conséquent à raison que les Sa Enedis et Axa Cs soutiennent qu'il s'agit d'une aide d'État. Elle devait faire l'objet d'une notification préalable à la Commission en application de l'article 108 § 3.

Il ne peut être sérieusement discuté que l'arrêté du 12 janvier 2010, comme celui du 10 janvier 2006, n'a jamais été notifié à la Commission, préalablement à sa mise en oeuvre, dans les conditions de ce texte, ce qu'a d'ailleurs reconnu le secrétaire d'État auprès du ministère des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes répondant à une question écrite du 27 septembre 2016 sur les régimes d'aides accordées aux producteurs d'électricité d'origine photovoltaïque. La Sarl la Thominière ne peut invoquer la connaissance qu'a pu avoir la Commission de l'arrêté lors des instances devant la CJUE, cette « connaissance » ne pouvant valoir notification, ni le règlement CE 651/2014 lequel est entré en vigueur postérieurement à l'abrogation du décret du 12 janvier 2010 par le décret du 4 mars 2011.

Le règlement d'exemption CE 800/2008, applicable au jour du décret du 12 janvier 2010, ne concernait que les aides transparentes, c'est-à-dire dont il est possible de calculer précisément et préalablement l'équivalent-subvention brut au moment de l'octroi de l'aide, ce qui n'est pas le cas du régime d'aides accordées aux producteurs d'électricité photovoltaïque et les régimes d'aide devait contenir une référence expresse au règlement par la citation de son titre, ce qui n'est aucunement le cas pour les décrets litigieux. C'est tout aussi vainement que la Sarl La Thominière invoque les dispositions de l'article 88 de la loi du 12 juillet 2010 qui valide l'arrêté du 12 janvier 2010, une disposition de droit interne étant inefficace à écarter l'application du droit de l'Union en vertu du principe de primauté du droit de l'Union sur le droit national, ou les décisions du Conseil d'État, lequel n'a pas statué sur la violation de l'obligation de notification préalable, ou les décisions ultérieures de la Commission, concernant des régimes d'aide différents, plus contraignants et qui instauraient des tarifs inférieurs à ceux des arrêtés de 2006 et 2010. Les arrêtés de 2006 et 2010 ayant été abrogés et remplacés par l'arrêté du 4 mars 2011, lequel a d'ailleurs fait l'objet d'une procédure de notification à la Commission, aucune régularisation n'est possible.

Si les juridictions nationales sont compétentes pour apprécier le respect par les Etats membres de la procédure de notification, seule la Commission européenne est compétente pour statuer sur la compatibilité d'une aide d'État avec le marché intérieur et il n'appartient donc pas à une juridiction nationale d'opérer un tel contrôle. Le fait que la Commission a déclaré compatible les mécanismes d'aide à la production d'électricité photovoltaïque postérieurs est sans incidence sur la validité des dispositifs antérieurs. Il est tout aussi inopérant d'invoquer l'absence de saisine d'office par la Commission européenne pour procéder à un examen de la compatibilité, l'absence de décision sur ce point ne signifiant pas que le décret litigieux bénéficie d'une reconnaissance tacite de compatibilité.

L'arrêté du 12 janvier 2010 tout comme celui du 10 juillet 2006, qui n'ont pas été notifiés à la Commission européenne préalablement à leur mise en oeuvre, sont par conséquent illégaux, et cette illégalité fait obstacle à elle seule, à la demande d'indemnisation formée sur ce seul fondement par la Sarl La Thominière.

Le principe de réparation intégrale du préjudice subi à raison d'une faute commise ne peut trouver à s'appliquer dès lors qu'il s'agit de réparer la perte d'un avantage résultant d'une aide illégale. La Sarl La Thominière, même lorsqu'elle sollicite à titre subsidiaire, une somme forfaitaire, ce mode de réparation étant en tout état de cause contraire au principe de réparation intégrale ci-dessus rappelé, ne demande pas autre chose que la perte de chance d'obtenir une indemnisation basée sur une aide illégale ;

1. ALORS QU'une mesure ne peut être qualifiée d'aide d'État que s'il s'agit d'une intervention de l'État ou au moyen de ressources d'État, susceptible d'affecter les échanges entre Etats membres, accordant un avantage sélectif à son bénéficiaire et faussant ou menaçant de fausser la concurrence ; qu'en ce qui concerne la condition relative à la sélectivité de l'avantage, la notion d'aide d'État ne vise pas les mesures étatiques introduisant une différenciation entre entreprises et donc, a priori sélectives, lorsque cette différenciation résulte de la nature ou de l'économie du système dans lequel elles s'inscrivent ; que l'appréciation de cette condition impose donc de déterminer si, dans le cadre d'un régime juridique donné, une mesure nationale est de nature à favoriser certaines entreprises ou certaines productions par rapport à d'autres qui se trouvent, au regard de l'objectif poursuivi par ledit régime, dans une situation factuelle et juridique comparable et qui subissent ainsi un traitement différencié pouvant en substance être qualifié de « discriminatoire » ; que la détermination de l'ensemble des entreprises se trouvant dans une situation factuelle et juridique comparable dépend de la définition préalable du régime juridique au regard de l'objectif duquel doit, le cas échéant, être examinée la comparabilité de la situation factuelle et juridique respective des entreprises favorisées par la mesure en cause et de celles qui ne le sont pas ; qu'en l'espèce, en se bornant à affirmer que la réglementation en cause au principal accorde un avantage qui favorise de manière sélective un type de production, l'énergie d'origine photovoltaïque, au motif inopérant qu'il garantit aux bénéficiaires la rentabilité de leur investissement, sans définir au préalable le régime juridique au regard de l'objectif duquel devait être examinée la comparabilité de la situation factuelle et juridique respective des producteurs d'électricité photovoltaïque et des autres producteurs d'électricité, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé le caractère sélectif de l'avantage dont elle a constaté l'existence, ni justifié par suite la qualification d'aide d'État qu'elle a cependant retenue, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 107 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

2. ALORS QU'en ne caractérisant pas en quoi les producteurs d'électricité d'origine photovoltaïque seraient dans une situation factuelle et juridique identique aux autres entreprises produisant de l'électricité compte tenu de l'objectif poursuivi par le régime juridique dans lequel s'inscrit l'arrêté du 12 janvier 2010, de sorte que l'allocation à leur profit d'un tarif leur garantissant la rentabilité de leur investissement constituerait une discrimination à l'égard de ces autres entreprises, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé la sélectivité de l'avantage dont elle a constaté l'existence, ni justifié par suite la qualification d'aide d'État qu'elle a cependant retenue, a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article 107 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

3. ALORS subsidiairement QUE les juridictions nationales n'ont pas compétence pour interdire l'exécution d'une aide existante, qui doit être considérée comme légale aussi longtemps que la Commission européenne n'a pas constaté son incompatibilité au marché intérieur (CJUE, 18 juillet 2013, c-6/12) ; qu'est une aide existante toute aide réputée existante conformément à l'article 15 du règlement n° 659/1999 du Conseil du 22 mars 1999, c'est-à-dire toute aide à l'égard de laquelle le délai de prescription de dix ans imparti à la Commission pour la récupérer a expiré ; qu'en affirmant que l'illégalité du décret opposée par voie d'exception n'est pas soumise à la prescription édictée par le Règlement 659/1999 du 22 mars 1999 qui ne vise que les pouvoirs de la Commission en matière de récupération des aides d'État, ce qui n'est pas le cas en l'espèce pour débouter la société La Thominière de sa demande d'indemnisation fondée subsidiairement sur l'arrêté du 10 juillet 2006, cependant que l'expiration du délai de prescription de 10 ans a pour conséquence que le tarif fixé par l'arrêté de 2006 était réputé être une aide existante et légale dont elle ne pouvait interdire l'exécution, la cour d'appel a violé les articles 1-b, iv et 15 du règlement n° 659/1999 du Conseil du 22 mars 1999, ensemble l'article 108 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19-23458
Date de la décision : 05/01/2022
Sens de l'arrêt : Rejet non spécialement motivé
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 04 juillet 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 05 jan. 2022, pourvoi n°19-23458


Composition du Tribunal
Président : Mme Darbois (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Spinosi, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:19.23458
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