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16/12/2021 | FRANCE | N°20-16713

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 16 décembre 2021, 20-16713


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 décembre 2021

Cassation

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 1229 F-D

Pourvoi n° E 20-16.713

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 DÉCEMBRE 2021

M. [P] [O], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi nÂ

° E 20-16.713 contre l'arrêt rendu le 14 janvier 2020 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre), dans le litige l'opposant à M. [U] [I], domici...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 décembre 2021

Cassation

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 1229 F-D

Pourvoi n° E 20-16.713

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 DÉCEMBRE 2021

M. [P] [O], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° E 20-16.713 contre l'arrêt rendu le 14 janvier 2020 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre), dans le litige l'opposant à M. [U] [I], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dumas, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [O], de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de M. [I], et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 3 novembre 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dumas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 14 janvier 2020), M. [I] a cédé à la société [O] Invest des parcelles de terrain par deux actes notariés, aux termes desquels M. [O] s'est porté caution solidaire.

2. Invoquant l'absence de paiement de sa créance, M. [I] a engagé des poursuites à fin de saisie immobilière à l'encontre de M. [O] sur le fondement de ces actes notariés.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. M. [O] fait grief à l'arrêt de dire que la procédure de saisie immobilière a été engagée sur le fondement de titres exécutoires constatant une créance certaine, liquide et exigible, de rejeter sa demande tendant à faire constater la nullité du commandement valant saisie immobilière, de dire que le montant retenu pour la créance de M. [I] est de 393 016,99 euros en principal, frais et accessoires, de le débouter de sa demande de sursis à statuer dans l'attente d'une décision définitive dans le litige opposant la société [O] Invest à M. [I], et de renvoyer les parties devant le juge de l'exécution pour qu'il soit procédé à la vente forcée du bien, alors « que le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ; qu'en se bornant à constater qu'au jour où elle statuait la validité des titres exécutoires n'avait pas été remise en cause, quand il lui appartenait de se prononcer elle-même sur la validité des actes notariés, fondement des poursuites, contestée par M. [O], la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé l'article L 213-6 du code de l'organisation judiciaire. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

4. M. [I] conteste la recevabilité du moyen. Il soutient qu'il est contraire à la thèse que soutenait M. [O] devant la cour d'appel.

5. Cependant, M. [O] a demandé, dans ses conclusions devant la cour d'appel, que le jugement du juge de l'exécution ayant annulé le commandement valant saisie immobilière, en raison de l'absence de caractère exécutoire du titre sur le fondement duquel la saisie a été pratiquée, soit confirmé en toutes ses dispositions.

6. Le moyen, qui n'est pas contraire à la thèse soutenue devant la cour d'appel, est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article L. 213-6, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire :

7. Selon ce texte, le juge de l'exécution connaît des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit, à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire.

8. Pour infirmer le jugement, l'arrêt retient qu'au jour où le juge de l'exécution a statué, l'irrégularité des actes notariés n'avait pas été constatée, de sorte que le juge de l'exécution, qui ne pouvait remettre en cause le caractère exécutoire des titres fondant la saisie immobilière, a excédé ses pouvoirs en constatant qu'ils ne répondaient pas aux conditions de l'article L. 311-2 du code des procédures civiles d'exécution, en vertu duquel tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance certaine, liquide et exigible peut procéder à une saisie immobilière.

9. En statuant ainsi, la cour d'appel, statuant avec les pouvoirs du juge de l'exécution, qui ne pouvait refuser de se prononcer sur la validité d'un acte notarié, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 janvier 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne M. [I] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [I] et le condamne à payer à M. [O] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. [O]

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que la procédure de saisie immobilière a été engagée sur le fondement de titres exécutoires constatant une créance certaine, liquide et exigible, rejeté la demande de M. [O] tendant à faire constater la nullité du commandement valant saisie immobilière, dit que le montant retenu pour la créance de [U] [I] est de 393.016,99 euros en principal, frais et accessoires, débouté M. [O] de sa demande de sursis à statuer dans l'attente d'une décision définitive dans le litige opposant la société [O] Invest à M. [I], et d'avoir renvoyé les parties devant le juge de l'exécution pour qu'il soit procédé à la vente forcée du bien ;

AUX MOTIFS QUE pour prononcer l'annulation du commandement valant saisie immobilière, le juge de l'exécution a considéré qu'il ne répondait pas aux conditions de l'article L 311-2 du code des procédures civiles d'exécution en vertu duquel tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance certaine, liquide et exigible, peut procéder à un saisie immobilière.
Selon l'article L 111-3 du code des procédures civiles d'exécution, « Seuls constituent des titres exécutoires (...) 4° Les actes notariés revêtus de la formule exécutoire. »
Or [U] [I] dispose avec les deux actes notariés revêtus de la formule exécutoire du 8 avril 2015, de deux titres exécutoires constatant chacun une créance certaine, liquide et exigible à hauteur des sommes de 160.000 euros et 234.000 euros.
Au jour où le juge de l'exécution a statué, la validité de ces titres exécutoires n'avait pas été remise en cause. Elle ne l'est d'ailleurs pas au jour où la cour a à connaître du litige.

Il en résulte que le juge de l'exécution qui ne pouvait remettre en cause le caractère exécutoire des titres fondant la saisie immobilière, a excédé ses pouvoirs en annulant un commandement de payer délivré sur le fondement d'un titre exécutoire répondant aux exigences de l'article L 311-2 du code des procédures civiles d'exécution.

Et que alors que la vente des parcelles a été conclue en 2015, ce n'est que le 7 mai 2019 soit 4 ans après la vente et 4 jours après la délivrance à [P] [O] du commandement valant saisie immobilière que la société [O] Invest s'est avisée de poursuivre la nullité de la vente, alors qu'il n'est pas contesté qu'elle a pris possession des parcelles et exploite la carrière.

Les circonstances de la cause ne justifient pas qu'il soit suris à statuer dans l'attente d'une décision définitive dans le litige opposant la société [O] Invest à [U] [I] rappel étant fait qu'aux termes de l'article L 111-10 du code des procédures civiles d'exécution, l'exécution est poursuivie aux risques du créancier.

1°- ALORS QUE le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ; qu'en se bornant à constater qu'au jour où elle statuait la validité des titres exécutoires n'avait pas été remise en cause, quand il lui appartenait de se prononcer elle-même sur la validité des actes notariés, fondement des poursuites, contestée par M. [O], la Cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé l'article L 213-6 du code de l'organisation judiciaire ;

2°- ALORS QUE la saisie immobilière ne peut être mise en oeuvre que sur le fondement d'un titre exécutoire constatant une créance certaine, liquide et exigible ; que ne répond pas à cette exigence, l'acte notarié dont la validité fait l'objet d'une contestation dans le cadre d'une procédure en cours devant les juges du fond ; qu'en l'espèce, la société [O] Invest, débiteur principal, ayant saisi le Tribunal de grande instance d'une action en nullité des actes de vente et de cautionnement des 6 avril 2015, ces actes ne pouvaient constituer le titre exécutoire exigé par la loi ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article L 311-2 du code des procédures civiles d'exécution ;

3°- ALORS QU'en statuant comme elle l'a fait, sans même se livrer à une appréciation du sérieux des moyens de nullité des actes notariés invoqués devant les juges du fond et sans vérifier s'ils n'étaient pas de nature à remettre en cause l'existence du titre exécutoire fondant les poursuites, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 311-2 du code des procédures civiles d'exécution.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 20-16713
Date de la décision : 16/12/2021
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 14 janvier 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 16 déc. 2021, pourvoi n°20-16713


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Thouin-Palat et Boucard, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.16713
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