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08/12/2021 | FRANCE | N°20-20284

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 08 décembre 2021, 20-20284


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 8 décembre 2021

Cassation

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 788 F-D

Pourvoi n° M 20-20.284

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 DÉCEMBRE 2021

M. [S] [T], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° M

20-20.284 contre l'arrêt rendu le 29 juin 2020 par la cour d'appel d'Orléans (chambre civile), dans le litige l'opposant à M. [K] [N], domicilié [...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 8 décembre 2021

Cassation

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 788 F-D

Pourvoi n° M 20-20.284

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 DÉCEMBRE 2021

M. [S] [T], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° M 20-20.284 contre l'arrêt rendu le 29 juin 2020 par la cour d'appel d'Orléans (chambre civile), dans le litige l'opposant à M. [K] [N], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Kloda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de M. [T], de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [N], après débats en l'audience publique du 19 octobre 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Kloda, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Orléans, 29 juin 2020), par testament olographe déposé au rang des minutes de l'étude de M. [N], notaire (le notaire), [R] [E], décédée le 20 juin 2011, a institué M. [T] légataire universel. Le notaire a déposé une déclaration de succession le 27 février 2013, puis une déclaration rectificative le 20 juin suivant.

2. M. [T] a reçu de l'administration fiscale des avis de mise en recouvrement de majorations et intérêts de retard puis, après exercice de voies de recours, a été condamné à lui payer une certaine somme.

3. Alléguant que le notaire avait manqué à son obligation d'information et de conseil, M. [T] l'a assigné en responsabilité et indemnisation.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

4. M. [T] fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors « qu'il appartient au notaire chargé du règlement d'une succession, qui prétend avoir satisfait à son devoir d'information et de conseil, d'en rapporter la preuve ; que la cour d'appel a constaté que la déclaration de succession avait été enregistrée par l'administration fiscale le 27 février 2013 alors que le délai imparti pour ce dépôt expirait le 20 décembre 2011, que le paiement des premiers acomptes n'était intervenu qu'au début de l'année 2012 et que le notaire avait déposé une déclaration de succession rectificative le 17 juin 2013 ; que la cour d'appel a également constaté que le règlement de la succession de [R] [E] était complexe ; qu'en énonçant cependant que M. [T] ne rapportait pas la preuve que le notaire ne l'avait pas informé des forces de la succession, qu'il ne rapportait pas davantage la preuve d'un manque de diligence du notaire dans la gestion des délais de règlement de la succession de [R] [E], qu'il n'était pas fondé à reprocher au notaire de ne pas l'avoir informé de la procédure de paiement fractionné des droits de succession alors qu'il ne justifiait pas de la possibilité de constituer à l'expiration du délai de six mois une garantie d'un montant total des droit à payer et la capacité financière d'assumer le remboursement d'un crédit, et qu'il ne rapportait pas la preuve d'une faute commise par le notaire lors de l'établissement de la déclaration principale de succession et la déclaration rectificative, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315, devenu 1353, du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1315, devenu 1353 du code civil :

5. En application de ce texte, la preuve de l'exécution de son obligation d'information et de conseil incombe au notaire.

6. Pour rejeter la demande de M. [T], l'arrêt retient notamment que celui-ci ne rapporte pas la preuve d'un manquement du notaire à son devoir d'information sur l'état des forces de la succession.

7. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 juin 2020, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans autrement composée ;

Condamne M. [N] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit décembre deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat aux Conseils, pour M. [T]

M. [S] [T] fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit mal fondée l'action en responsabilité qu'il a formée à l'encontre de M. [Z] [N], notaire, d'AVOIR rejeté l'ensemble de ses demandes et de l'AVOIR condamné au paiement d'une somme de 4 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile

1°) ALORS QUE la responsabilité d'un notaire pour manquement à ses obligations professionnelles dans les opérations de règlement d'une succession et notamment à son devoir d'information et de conseil a un fondement délictuel ; qu'en énonçant que M. [T] ayant confié à Maître [N] le règlement de la succession dont il était légataire universel, il s'ensuivait qu'ils étaient liés par un contrat de mandat et que l'action en responsabilité litigieuse était régie notamment par les articles 1147 et suivants anciens du code civil, la cour d'appel a violé lesdits textes et l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

2°) ALORS QU' en toutes circonstances le juge doit faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction et ne fonder sa décision sur un moyen relevé d'office qu'après avoir invité les parties à présenter leurs observations ; que M. [T] ayant fondé son action en responsabilité sur la responsabilité délictuelle de l'article 1240 du code civil et Maître [N] n'ayant pas discuté le fondement de sa responsabilité, la cour d'appel qui, pour dire l'action fondée sur l'article 1147 ancien du code civil, a statué par un moyen qu'elle a relevé d'office sans le soumettre au préalable à la discussion des parties, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QU'il appartient au notaire chargé du règlement d'une succession, qui prétend avoir satisfait à son devoir d'information et de conseil, d'en rapporter la preuve ; que la cour d'appel a constaté que la déclaration de succession avait été enregistrée par l'administration fiscale le 27 février 2013 alors que le délai imparti pour ce dépôt expirait le 20 décembre 2011, que le paiement des premiers acomptes n'était intervenu qu'au début de l'année 2012 et que le notaire avait déposé une déclaration de succession rectificative le 17 juin 2013 ; que la cour d'appel a également constaté que le règlement de la succession de Mme [O] était complexe ; qu'en énonçant cependant que M. [T] ne rapportait pas la preuve que le notaire ne l'avait pas informé des forces de la succession, qu'il ne rapportait pas davantage la preuve d'un manque de diligence de Maître [N] dans la gestion des délais de règlement de la succession de Mme [O], qu'il n'était pas fondé à reprocher à Maître [N] de ne pas l'avoir informé de la procédure de paiement fractionné des droits de succession alors qu'il ne justifiait pas de la possibilité de constituer à l'expiration du délai de six mois une garantie d'un montant total des droit à payer et la capacité financière d'assumer le remboursement d'un crédit, et qu'il ne rapportait pas la preuve d'une faute commise par Maître [N] lors de l'établissement de la déclaration principale de succession et la déclaration rectificative, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315, devenu 1353, du code civil ;

4°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE le notaire chargé du règlement d'une succession a l'obligation d'éclairer le légataire universel sur la portée d'une acception de la succession notamment quant à ses obligations fiscales, de l'informer sur les conséquences d'une déclaration tardive de succession et de l'éclairer sur la possibilité de solliciter un fractionnement du paiement des droits de succession dans les six mois du décès ; que la cour d'appel a énoncé que bien que la déclaration de succession principale ait été enregistrée le 27 février 2013 par l'administration fiscale, elle était accompagnée d'un courrier de Maître [N] rappelant que deux acomptes de 115 000 et 120 000 euros avaient été versés au début de l'année 2012 et sollicitant la remise intégrale de la pénalité pour remise hors délai, expliquant que seule la vente des biens immobiliers pouvait permettre le paiement des droits, que M. [T] ne contestait pas que le premier acompte avait été versé avec les fonds provenant de la succession de M. [C] dont Mme [O] était légataire universelle et que le second acompte avait été versé à la suite de la vente des titres mobiliers de Mme [O], qu'il résultait des courriers successifs adressés entre le 25 juillet 2011 et le 30 décembre 2011 par M. [T] à Maître [N] que le 30 décembre 2011, M. [T] n'avait pas encore décidé s'il acceptait ou non la succession de Mme [O], que ce n'était que le 5 avril 2012, soit postérieurement au 20 décembre 2011, date d'expiration du délai légal de six mois pour effectuer la déclaration de succession, qu'il avait fait part à Maître [N] de son avis sur l'évaluation des immeubles à porter dans la déclaration de succession ; qu'en exonérant Maître [N] de toute responsabilité dans le dépôt de la déclaration de succession avec 14 mois de retard aux motifs inopérants que M. [T] ayant établi la déclaration d'impôt de solidarité sur la fortune de Mme [O] le 30 septembre 2011, il connaissait la consistance de son patrimoine, que le 30 décembre 2011 il n'avait pas encore décidé s'il acceptait ou non la succession et qu'il n'était pas fondé à reprocher à Maître [N] de ne pas l'avoir informé de la procédure de paiement fractionné des droits de succession alors qu'il ne justifiait pas de la possibilité de constituer à l'expiration du délai de six mois une garantie d'un montant total des droit à payer et la capacité financière d'assumer le remboursement d'un crédit, sans constater que Maître [N] aurait informé M. [T], en temps utile, des conséquences d'une acceptation de la succession, notamment quant à ses obligations fiscales, ainsi que des différentes options qui s'offraient à lui pour procéder à une déclaration de succession et au paiement des droits de succession ou pour solliciter le fractionnement de ce paiement dans les délais et ceci alors même qu'elle relevait que la succession de Mme [O] était complexe, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

5°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE le notaire chargé du règlement d'une succession a l'obligation d'éclairer le légataire universel sur la portée d'une acception de la succession notamment quant à ses obligations fiscales, de l'informer sur les conséquences d'une déclaration tardive de succession et de l'éclairer sur la possibilité de solliciter un fractionnement du paiement des droits de succession dans les six mois du décès ; qu'ayant constaté que M. [T] savait, pour avoir établi la déclaration d'impôt de solidarité sur la fortune de Mme [O] le 30 septembre 2011, que le montant des liquidités s'élevait à 14 489 euros, celui des droits sociaux à 145 962 euros, que les immeubles étaient évalués à 840 450 euros, le reste, évalué à 500 000 euros résultant de la part de succession de M. [C], la cour d'appel qui a énoncé que M. [T] ne pouvait reprocher à Maître [N] de ne pas l'avoir informé de la procédure du paiement fractionné des droits de succession, alors qu'il ne justifiait pas de la possibilité de constituer, à l'expiration du délai de six mois une garantie d'un montant total des droits à payer et la capacité financière d'assumer le montant du remboursement de ce crédit, n'a pas déduit de ses propres constatations relatives à la consistance du patrimoine de Mme [O], les conséquences légales qui s'en évinçaient au regard de la faculté pour M. [T] d'obtenir un fractionnement du paiement des droits de succession et, partant, de la responsabilité du notaire pour avoir omis de l'informer de cette possibilité et a, ce faisant, violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

6°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en affirmant qu'il était établi que M. [N] avait informé M. [T], dans le délai de six mois, des conditions d'exonération d'un monument historique et avait fait toutes diligences nécessaires qui auraient permis une déclaration en une seule fois de la totalité de la succession incluant le château sans qu'aucun autre motif ne vienne étayer cette seule affirmation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 20-20284
Date de la décision : 08/12/2021
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 29 juin 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 08 déc. 2021, pourvoi n°20-20284


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.20284
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