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24/11/2021 | FRANCE | N°19-23693

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 24 novembre 2021, 19-23693


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 24 novembre 2021

Cassation partielle

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 736 F-D

Pourvoi n° W 19-23.693

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 24 NOVEMBRE 2021

1°/ la société CTM Promotion, société à resp

onsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3],

2°/ M. [X] [B], domicilié [Adresse 2], agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 24 novembre 2021

Cassation partielle

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 736 F-D

Pourvoi n° W 19-23.693

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 24 NOVEMBRE 2021

1°/ la société CTM Promotion, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3],

2°/ M. [X] [B], domicilié [Adresse 2], agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société CTM Promotion,

ont formé le pourvoi n° W 19-23.693 contre l'arrêt rendu le 19 septembre 2019 par la cour d'appel de Rennes (4e chambre), dans le litige les opposant à la société Axeva, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Le Gall, conseiller référendaire, les observations de la SCP Marc Lévis, avocat de la société CTM Promotion et de M. [B], ès qualités, de la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat de la société Axeva, après débats en l'audience publique du 5 octobre 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Le Gall, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 19 septembre 2019), par contrat du 8 mars 2011, la société CTM Promotion a confié à la société Axeva la commercialisation de quinze lots situés dans un lotissement comportant chacun une maison individuelle.

2. Une ordonnance de référé du 15 mars 2012 a condamné la société CTM Promotion à payer à la société Axeva une provision de 160 000 euros à valoir sur ses commissions au titre de la réalisation de cinq ventes. Au vu d'un rapport d'expertise judiciaire ayant conclu que le chantier faisait l'objet de nombreuses malfaçons justifiant la démolition de l'existant, la société CTM Promotion a assigné la société Axeva notamment en remboursement de la provision versée.

3. M. [B] est intervenu volontairement à l'instance en qualité de commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la société CTM Promotion arrêté le 24 avril 2019.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. La société CTM Promotion et M. [B], ès qualités, font grief à l'arrêt de rejeter la demande de remboursement de la provision versée à la société Axeva, alors « que l'agent immobilier ne peut réclamer une commission ou rémunération à l'occasion d'une opération visée à l'article 1er de la loi du 2 janvier 1970 que si, préalablement toute négociation ou engagement, il détient un mandat écrit, délivré à cet effet par l'une des parties et précisant la condition de détermination de la rémunération ou de la commission, ainsi que la partie qui en aura la charge ; que le mandat doit préciser si cette rémunération est à la charge exclusive de l'une des parties à l'opération ou si elle est partagée ; qu'à défaut, cette convention est nulle ; qu'en l'espèce, l'article 4 du contrat de commercialisation exclusif et convention d'honoraires conclu entre les sociétés CTM Promotion et Axeva le 8 mars 2011 stipulait qu' « en rémunération de sa mission, il est expressément convenu par les Parties que le Mandataire recevra des honoraires fixés à 12 % (douze pour cent) hors taxes du prix de vente total immobilier TTC du ou des lots vendus considérés. La facturation et le règlement de cette commission seront effectués au moment de la signature de l'acte authentique après la levée de toute option ou condition suspensive prévue dans le cadre du compromis ou contrat de vente du ou des lots considérés » ; que l'article 5 ajoutait que « les honoraires dus conformément à l'article 4 devant faire l'objet d'un règlement lors de la signature de l'acte authentique de réitération de la vente du ou des lors considérés devant le notaire chargé de cette opération seront payés par la remise d'un ordre irrévocable de virement par le Mandant à ce notaire pour un montant correspondant aux honoraires dus au Mandataire » ; que s'il résultait de ces dispositions qu'était définie la condition de détermination de la rémunération de la société Axeva, celles-ci ne précisaient nullement si cette rémunération était à la charge exclusive de l'une des parties à l'opération ou si elle était partagée ; qu'en décidant au contraire qu'il découlait de la seule « référence au mandant » dans l'article 5 précité que la société CTM Promotion était la débitrice de la rémunération, quand la convention ne précisait nullement à la charge de quelle partie à l'opération elle incombait ou si elle était partagée, la cour d'appel a violé les articles 6 de la loi du 2 janvier 1970 et 73 du décret du 20 juillet 1972. »

Réponse de la Cour

5. Ayant constaté que, si l'article 4 du contrat du 8 mars 2011 déterminait le montant de la rémunération mais pas son débiteur, l'article 5 précisait que les honoraires seraient payés par la remise d'un ordre irrévocable de virement par le mandant correspondant aux honoraires dus au mandataire, la cour d'appel en a justement déduit que la société CTM Promotion, mandant, était désignée comme la débitrice de la rémunération due à la société Axeva, désignée comme mandataire.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

7. La société CTM Promotion et M. [B], ès qualités, font le même grief à l'arrêt, alors « que le montant de la rémunération ou de la commission de l'agent immobilier, ainsi que l'indication de la ou les parties qui en ont la charge, doivent être portés impérativement dans l'engagement des parties ; qu'en l'espèce, la société CTM Promotion faisait expressément valoir que la mention de la partie supportant la charge du paiement de la rémunération de l'agent immobilier, en l'occurrence de la société Axeva, devait obligatoirement être portée « dans l'engagement des parties, qu'il s'agisse de l'acte de vente ou de tout autre document préparatoire à la vente, à savoir le contrat de réservation », mais que ces documents étaient muets sur ce point ; qu'en condamnant néanmoins la société CTM Promotion à payer à la société Axeva la somme de 160.000 euros au titre de ses honoraires, la cour d'appel a violé les articles 6 de la loi du 2 janvier 1970 et 73 du décret du 20 juillet 1972. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

8. La société Axeva conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient qu'il est nouveau et mélangé de fait et de droit.

9. Cependant, le moyen n'est pas nouveau en ce que la société CTM Promotion, dans ses conclusions devant la cour d'appel, a soutenu que les contrats de réservation pour lesquels la société Axeva avait obtenu une condamnation provisionnelle de 160 000 euros ne précisaient pas les conditions de la détermination de la rémunération de l'agent immobilier ainsi que de la partie qui en avait la charge, en violation de l'article 73, alinéa 3, du décret n° 72-658 du 20 juillet 1972.

10. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 et 73 du décret n° 72-658 du 20 juillet 1972 :

11. Il résulte de ces textes que le montant de la rémunération ou de la commission de l'intermédiaire immobilier, ainsi que l'indication de la ou les parties qui en ont la charge, doivent être portés impérativement dans l'engagement des parties.

12. Pour rejeter la demande en paiement de la société CTM Promotion, l'arrêt retient que, selon l'article 5 du contrat du 8 mars 2011, la société CTM Promotion est la débitrice de la rémunération.

13. En statuant ainsi, sans constater, comme il le lui incombait, que les commissions dues à la société Axeva et leur débiteur étaient mentionnées dans les actes contenant l'engagement des parties à la vente, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de remboursement formée par la société CTM Promotion, l'arrêt rendu le 19 septembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;

Condamne la société Axeva aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes.

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre novembre deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Marc Lévis, avocat aux Conseils, pour la société CTM Promotion et M. [B], ès qualités.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société CTM Promotion de sa demande tendant à voir condamner la société Axeva à lui payer la somme de 160.000 €, avec intérêts au taux légal à compter de l'ordonnance de référé du 15 mars 2012 ayant ordonné le paiement à titre provisionnel de ladite somme ;

AUX MOTIFS QUE la convention du 8 mars 2011 stipule en son article 8 que la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 lui est applicable ; que le litige porte sur les honoraires de la société Axeva au titre de cinq ventes du programme Kerazur en décembre 2011 et janvier 2012 ; que les actes authentiques ne sont pas produits mais il n'y a pas de contestation sur ce point ; que pour s'opposer à la demande en paiement de la société Axeva, l'appelante fait valoir, en premier lieu, que la convention est nulle en raison de l'indétermination du montant de sa rémunération et de l'absence d'indication de la personne devant la payer, en violation de l'article 73 du décret du 20 juillet 1972 ; que l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970 et l'article 73 du décret imposent la mention des conditions et de la charge de la rémunération dans le mandat ; qu'il doit être indiqué notamment si elle est à la charge exclusive du mandant, ou de l'acquéreur, ou si elle est partagée ; que contrairement à ce que soutien l'intimée, il est indifférent que l'acquéreur ne soit pas partie à la convention de mandat ; que le non-respect de ces dispositions n'est pas sanctionné par la nullité du mandat mais par la privation du droit à rémunération du mandataire ; qu'en l'espèce, l'article 4 de la convention du 8 mars 2011 prévoit : « En rémunération de sa mission, il est expressément prévu par les parties que le mandataire percevra des honoraires fixés à 12 % Ht du prix de vente total immobilier Ttc du ou des lots vendus considérés. La facturation et le règlement de cette commission seront effectués au moment de la signature de l'acte authentique après la levée de toute option ou condition suspensive prévue dans le cadre du compromis ou contrat de vente du ou des lots considérés. Dans l'éventualité où l'acquéreur potentiel ayant signé un compromis de vente se rétracte et qu'un acompte avait été convenu et versé à cette occasion, de sorte qu'il resterait définitivement acquis au bénéfice du mandant, cette somme serait alors partagée à part égale entre le mandant et le mandataire » ; que le montant de la rémunération est donc déterminé mais pas son débiteur ; que l'intimée invoque l'article 5 ainsi rédigé : « Les honoraires dus conformément à l'article 4 devant faire l'objet d'un règlement lors de la signature de l'acte authentique de réitération de la vente du ou des lots considérés devant le notaire chargé de cette opération seront payés par la remise d'un ordre irrévocable de virement par le mandant correspondant aux honoraires dus au mandataire » ; qu'il découle de la référence au mandant que la société CTM Promotion est la débitrice de la rémunération ; (?) qu'aucun moyen n'étant fondé, le jugement qui a condamné l'appelante à verser la somme de 160.000 € à l'intimée est confirmé par substitution de motifs ;

1°/ ALORS QUE, l'agent immobilier ne peut réclamer une commission ou rémunération à l'occasion d'une opération visée à l'article 1er de la loi du 2 janvier 1970 que si, préalablement toute négociation ou engagement, il détient un mandat écrit, délivré à cet effet par l'une des partie et précisant la condition de détermination de la rémunération ou de la commission, ainsi que la partie qui en aura la charge ; que le mandat doit préciser si cette rémunération est à la charge exclusive de l'une des parties à l'opération ou si elle est partagée ; qu'à défaut, cette convention est nulle ; qu'en l'espèce, l'article 4 du contrat de commercialisation exclusif et convention d'honoraires conclu entre les sociétés CTM Promotion et Axeva le 8 mars 2011 stipulait qu' « en rémunération de sa mission, il est expressément convenu par les Parties que le Mandataire recevra des honoraires fixés à 12 % (douze pour cent) hors taxes du prix de vente total immobilier TTC du ou des lots vendus considérés. La facturation et le règlement de cette commission seront effectués au moment de la signature de l'acte authentique après la levée de toute option ou condition suspensive prévue dans le cadre du compromis ou contrat de vente du ou des lots considérés » ; que l'article 5 ajoutait que « les honoraires dus conformément à l'article 4 devant faire l'objet d'un règlement lors de la signature de l'acte authentique de réitération de la vente du ou des lors considérés devant le notaire chargé de cette opération seront payés par la remise d'un ordre irrévocable de virement par le Mandant à ce notaire pour un montant correspondant aux honoraires dus au Mandataire » ; que s'il résultait de ces dispositions qu'était définie la condition de détermination de la rémunération de la société Axeva, celles-ci ne précisaient nullement si cette rémunération était à la charge exclusive de l'une des parties à l'opération ou si elle était partagée ; qu'en décidant au contraire qu'il découlait de la seule « référence au mandant » dans l'article 5 précité que la société CTM Promotion était la débitrice de la rémunération, quand la convention ne précisait nullement à la charge de quelle partie à l'opération elle incombait ou si elle était partagée, la cour d'appel a violé les articles 6 de la loi du 2 janvier 1970 et 73 du décret du 20 juillet 1972 ;

2°/ ALORS QUE, en toute hypothèse, le montant de la rémunération ou de la commission de l'agent immobilier, ainsi que l'indication de la ou les parties qui en ont la charge, doivent être portés impérativement dans l'engagement des parties ; qu'en l'espèce, la société CTM Promotion faisait expressément valoir que la mention de la partie supportant la charge du paiement de la rémunération de l'agent immobilier, en l'occurrence de la société Axeva, devait obligatoirement être portée « dans l'engagement des parties, qu'il s'agisse de l'acte de vente ou de tout autre document préparatoire à la vente, à savoir le contrat de réservation » (cf. conclusions d'appel, p 13), mais que ces documents étaient muets sur ce point ; qu'en condamnant néanmoins la société CTM Promotion à payer à la société Axeva la somme de 160.000 € au titre de ses honoraires, la cour d'appel a violé les articles 6 de la loi du 2 janvier 1970 et 73 du décret du 20 juillet 1972.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 19-23693
Date de la décision : 24/11/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 19 septembre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 24 nov. 2021, pourvoi n°19-23693


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, SCP Marc Lévis

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.23693
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