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17/11/2021 | FRANCE | N°20-16406

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 novembre 2021, 20-16406


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CA3

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 17 novembre 2021

Cassation partielle

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1271 F-D

Pourvoi n° W 20-16.406

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 17 NOVEMBRE 2021

M. [O] [H], domici

lié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 20-16.406 contre l'arrêt rendu le 19 décembre 2019 par la cour d'appel de Versailles (11e chambre), da...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CA3

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 17 novembre 2021

Cassation partielle

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1271 F-D

Pourvoi n° W 20-16.406

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 17 NOVEMBRE 2021

M. [O] [H], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 20-16.406 contre l'arrêt rendu le 19 décembre 2019 par la cour d'appel de Versailles (11e chambre), dans le litige l'opposant à la société Finastra France, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Pion, conseiller, les observations de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de M. [H], de Me Occhipinti, avocat de la société Finastra France, après débats en l'audience publique du 28 septembre 2021 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Pion, conseiller rapporteur, M. Ricour, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 19 décembre 2019), M. [H], engagé en qualité de chef de projet-lead financial engineer le 31 juillet 2011 par la société Finastra France, a été licencié le 14 janvier 2013 pour insuffisance professionnelle.

Examen des moyens

Sur le deuxième et le troisième moyens, ci-après annexés

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes au titre des heures supplémentaires outre les congés payés afférents et pour dissimulation d'emploi salarié, alors « qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés ; qu'en estimant que le salarié ne produit pas des éléments préalables qui peuvent être discutés par l'employeur et qui sont de nature à étayer sa demande d'heures supplémentaires, dès lors d'une part que certaines pages du relevé informatique de la durée quotidienne de travail dénommé Timesheet Report produit ‘'comportent des déductions d'heures dont le volume total important excède les 479 heures supplémentaires invoquées, sans que le salarié ne s'explique sur ce point'‘ et d'autre part, s'agissant du tableau détaillant un nombre d'heures travaillées et des heures supplémentaires du lundi au dimanche ou du samedi au vendredi, également produit par le salarié, que ‘'les heures supplémentaires revendiquées au titre des semaines au cours desquelles la durée hebdomadaire du travail n'a pas atteint 35 heures ne peuvent ouvrir droit à rappel de salaire'‘ la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail :

4. Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

5. Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

6. Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

7. Pour débouter le salarié de ses demandes de rappel d'heures supplémentaires et de droits à congés payés afférents, l'arrêt retient que pour étayer ses dires, le salarié produit un relevé informatique de la durée quotidienne de travail, dénommé Timesheet Report, et un tableau détaillant un nombre d'heures travaillées et des heures supplémentaires du lundi au dimanche, ou du samedi au vendredi, que néanmoins, il ressort du Timesheet Report, formulé en anglais sans communication à la cour d'une version traduite en français, que certaines pages comportent des déductions d'heures dont le volume total important excède les 479 heures supplémentaires invoquées, sans que le salarié ne s'explique sur ce point, et que le salarié ne produit pas ainsi des éléments préalables qui peuvent être discutés par l'employeur et qui sont de nature à étayer sa demande.

8. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le salarié présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation prononcée sur le premier moyen emporte la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt relatif à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [H] de ses demandes formées au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents, et pour dissimulation d'emploi salarié, et condamne M. [H] à payer à la société Finastra France la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 et aux dépens d'appel, l'arrêt rendu le 19 décembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur ces points l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;

Condamne la société Finastra France aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Finastra France et la condamne à payer à M. [H] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept novembre deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour M. [H]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUÉ D'AVOIR débouté l'exposant de ses demandes au titre des heures supplémentaires outre congés payés y afférents et pour dissimulation d'emploi salarié

AUX MOTIFS QUE pour étayer ses dires M. [H] produit notamment : - un relevé informatique de la durée quotidienne de travail, dénommé Timesheet Report, - un tableau détaillant un nombre d'heures travaillées et des heures supplémentaires du lundi au dimanche ou du samedi au vendredi ; Néanmoins, il ressort du Timesheet Report, formulé en anglais sans communication à la cour d'une version traduite en français que certaines pages comportent des déductions d'heures dont le volume total important excède les 479 heures supplémentaires invoquées, sans que le salarié ne s'explique sur ce point . De plus la cour rappelle que les heures supplémentaires se décomptent par semaine civile en application de l'article L. 3121-20 du code du travail de sorte que les heures supplémentaires revendiquées au titre des semaines au cours desquelles la durée hebdomadaire du travail n'a pas atteint 35 heures ne peuvent ouvrir droit à rappel de salaire ; que le salarié ne produit pas ainsi des éléments préalables qui peuvent être discutés par l'employeur et qui sont de nature à étayer sa demande ; que dans ces conditions M. [H] sera débouté de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires ;

ALORS QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés ; qu'en estimant que le salarié ne produit pas des éléments préalables qui peuvent être discutés par l'employeur et qui sont de nature à étayer sa demande d'heures supplémentaire, dès lors d'une part que certaines pages du relevé informatique de la durée quotidienne de travail dénommé Timesheet Report produit « comportent des déductions d'heures dont le volume total important excède les 479 heures supplémentaires invoquées, sans que le salarié ne s'explique sur ce point » et d'autre part, s'agissant du tableau détaillant un nombre d'heures travaillées et des heures supplémentaires du lundi au dimanche ou du samedi au vendredi, également produit par le salarié, que « les heures supplémentaires revendiquées au titre des semaines au cours desquelles la durée hebdomadaire du travail n'a pas atteint 35 heures ne peuvent ouvrir droit à rappel de salaire » la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUÉ D'AVOIR débouté le salarié de toutes ses demandes notamment celle tendant à voir condamner l'employeur au paiement de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

AUX MOTIFS QUE Sur la rupture du contrat de travail ; M. [H] considère que son licenciement revêt un caractère disciplinaire, puisqu'il lui est reproché de ne pas avoir respecté sciemment diverses instructions, d'avoir eu un comportement irresponsable et d'être â l'origine de dysfonctionnements inacceptables. 11 soulève la prescription des faits reprochés au regard du délai de 2 mois de l'article L. 1332-4 du code du travail ; Subsidiairement, le salarié conteste son insuffisance professionnelle, qu'il estime non démontrée. Il souligne l'absence d'observation entre le 5 septembre 2011 et le 9 juillet 2012 et considère que le plan de mise à l'épreuve élaboré par sa supérieure Mme [N] relève d'une stratégie de préparation de son licenciement, alors la décision de l'employeur était prise depuis l'entretien informel du 9 juillet 2012, il affirme avoir découvert le plan d'action modifié dont se prévaut l'employeur, quelques jours avant la notification du licenciement. Il rappelle avoir donné satisfaction durant sa période d'essai et les 4 premiers mois de l'année 2012 et s'être vu accorder une augmentation de salaire par courrier du 19 avril 2012. H indique n'avoir bénéficié d'aucune formation, malgré le caractère hautement technique des prestations 11 soutient avoir été surchargé de travail et conteste tout retard lui étant imputable dans l'exécution de son travail. Il affirme que le véritable motif de son licenciement est économique Il réclame 74 250 euros de dommages et intérêts correspondant à 18 mois de salaire. L'employeur répond que la lettre de licenciement établit qu'il n'a pas souhaité se placer sur le terrain disciplinaire, en visant les carences professionnelles du salarié, son incapacité à exercer de manière satisfaisante ses fonctions conteste en conséquence l'application de la prescription invoquée. Il estime que l'insuffisance professionnelle est caractérisée par - le retard pris dans l'exécution des prestations dont le salarié n'informait pas la hiérarchie, de nombreux oublis. - une absence de saisie des dysfonctionnements informatiques et des informations documentées dans l'outil de gestion interne, privant l'entreprise de la visibilité en temps réel des anomalies techniques, - des tests insuffisamment exploites conduisant des retards de livraison, - une absence d'écoute et de communication avec les différents intervenants ; que l'employeur précise avoir mis en place un plan d'action, dont le salarie a été informé, et un accompagnement malgré lesquels les manquements ont perduré. II affirme avoir assuré une formation sur le produit KTP lors de l'embauche de M. [H] qui n'a jamais formulé la moindre remarque concernant un manque de formation Il ajoute que l'augmentation de salaire est antérieure à la période au cours de laquelle l'insuffisance professionnelle du salarié s'est révélée. Sur la qualification du licenciement. L'article L. 1232-I du code du travail dispose que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. Le motif réel est à la fois un motif existant, exact et objectif ; Il ressort de la lettre de licenciement que l'employeur a rappelé en préambule « Par courrier avec accusé de réception en date du 3 janvier 2013 nous vous avons convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour insuffisance professionnelle le 10 janvier 2013 ». Il reproche ensuite au salarié « un certain nombre de dysfonctionnements jugés inacceptables eu égard à votre niveau d'expérience » et évoque à titre d'exemples les manquements suivants : « - Des taches essentielles qui ne sont tout simplement pas traitées et ce sans sérieuses justifications de votre part, Le 20 juin un mail de votre responsable signalait des points à corriger sur la spécification des accumulateurs dont tout un chapitre sur la description de l'annulation du traitement qui a purement été omise et pour lequel vous n'avez pas donné de justification quant à cette omission ou demande d'explications si ce point n'était pas clair pour vous.- Un comportement irresponsable qui se manifeste par l'absence d'alerte auprès de votre hiérarchie pour l'informer des prévisions de retard et des conséquences prévisibles. En mai 2012, le développeur en charge des ZBA vous a questionné pour commenter le développement. Les réponses ne lui sont parvenues qu'après vos vacances soit avec 3 semaines d'attente. C'est le développeur qui a donné l'alerte à votre responsable. La rédaction de spécifications techniques de qualité médiocre générant l'intervention systématique de votre manager pour pallier votre insuffisance. - La spécification des ZBA a nécessité de trop nombreux échanges pour que la spécification soit exploitable par le développement. Dans un premier temps ses échanges om été oraux, mais constatant qu'il y avait de trop nombreux oublis, votre responsable vous les rédigeait pour avoir une garantie que chaque point son bien pris en compte. Malgré ces écrits, les oublis ont persisté. - L'absence répétée de saisie des bugs et d'informations, documentées dans notre outil de gestion qui nous empêchent d'avoir la visibilité en temps réel des anomalies techniques Le bug KTP-34 ne contient qu'un descriptif flou qui ne permet de traiter avec fiabilité l'anomalie. - Des tests insuffisamment exploités conduisant à des retards de livraison Pour les tests sur les « accumulateurs » le Project Delivery Manager a dû prendre en charge une bonne partie des tests et a trouvé un nombre de bugs non négligeable sur des scenario simples car seuls les cas basiques avaient été traités.- L'absence d'écoute et de discussions ouvertes et constructives avec les différents intervenants qui participent à l'évolution du produit. Lors des validations de spécifications, vous n'interveniez pas suffisamment pour indiquer les points que vous ne compreniez pas et vous n'écoutiez pas les remarques faites. Vous passiez directement sur le point suivant à la surprise des intervenants qui étaient obligés de vous faire revenir sur les points à éclaircir ». Les manquements décrits relèvement manifestement de l'insuffisance professionnelle. Au surplus, l'employeur poursuit en rappelant que pour remédier à ces manquements « nous vous avons proposé (?) de mettre en place un plan d'actions visant à vous remettre en capacité de réaliser vos missions conformément aux exigences du poste pour lequel vous avez été embauché » Il déplore toutefois : « Malgré l'investissement de votre manager qui n'a pas ménagé son temps pour vous aider à reprendre pleinement et en toute autonomie votre rôle d'Ingénieur Financier, nous sommes au regret de constater que les progrès sont très largement insuffisants que ce soit en terme de qualité du travail fourni, d'autonomie et de relations professionnelles comme en atteste le plan d'actions ci-joint qui met en évidence l'écart entre les résultats attendus et le travail rendu ». Cette motivation relève explicitement de l'insuffisance professionnelle de sorte que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a débouté M. [H] de sa demande de requalification de son licenciement.

ALORS D'UNE PART QUE c'est le motif de rupture mentionné dans la lettre de licenciement qui détermine le caractère disciplinaire ou non du licenciement ; que l'insuffisance professionnelle est exclusive de toute qualification disciplinaire sauf si elle résulte d'une mauvaise volonté délibérée ou d'une abstention volontaire du salarié ; qu'en l'état des termes de la lettre de licenciement reprochant notamment au salarié de ne pas avoir traité des tâches essentielles « et ce sans sérieuses justifications de votre part », « un comportement irresponsable qui se manifeste par l'absence d'alerte auprès de votre hiérarchie », « l'absence répétée de saisie des bugs et d'information documentées dans notre outil de gestion » et en général des « dysfonctionnements inacceptables dont vous portez l'entière responsabilité » caractérisant, à les supposer établis, la mauvaise volonté délibérée et une abstention volontaire du salarié, la cour d'appel qui affirme que « les manquements décrits relèvent manifestement de l'insuffisance professionnelle » et déboute le salarié de sa demande tendant à voir juger que son licenciement revêtait un caractère disciplinaire et que tous les agissements invoqués étaient prescrits a violé les articles L. 1235-1 du Code du travail et L. 1232-6 dudit code.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUÉ D'AVOIR débouté le salarié de toutes ses demandes notamment celle tendant à voir condamner l'employeur au paiement de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

AUX MOTIFS QUE Sur le bien-fondé du licenciement ; Pour justifier l'insuffisance professionnelle du salarié, l'employeur verse aux débats un courriel du 9 juillet 2012 par lequel Mme [B] alerte M. [H] sur les difficultés relatives à son travail. Elle y fait état du défaut de traitement de certaines tâches, même après des relances, de l'absence de réponse aux questions du « dev », de l'absence d'alerte lorsqu'un travail ne pourra pas être rendu à la date attendue, de la médiocrité de la qualité des spécifications, de l'absence de saisie immédiate des « bugs » dans l'outil dédié, de la documentation insuffisante des « bugs », de méthodes de travail discutables, notamment l'enregistrement des réunions pour les réécouter, l'absence d'intervention lors des réunions, le manque d'organisation? Elle décrit ensuite un certain nombre de tâches qu'elle demande au salarié d'exécuter : « Saisir les bugs dans Jira aussitôt que tu détectes une anomalie. Ces bugs doivent être parfaitement documentés. A chaque mise à jour de bug, tu notifieras les personnes directement concernées? En ce qui concerne les tests, établir un plan de test conforme au template utilisé par KTP. Ce plan de test doit décrire les scenarios points à tester avant de commencer la validation? Établir un plan de spéciation avant de la rédiger et le faire valider par [D]? Définir au préalable le besoin fonctionnel ? Définir tous les motions clairement? Mettre à jour la documentation post dev sans délai et en informer les différents intervenants. Fais-toi un planning, classe des mails, fais des répertoires par sujet, pose des questions quand tu ne comprends pas quelque chose. Il n'y a pas de question stupide. Nous ne pourrons pas t'aider si nous ignorons tes difficultés. Tiens tes engagements fais toutes les tâches qu'on te demande et si tu ne peux pas, informe [D] sans attendre qu'elle te demande si c'est fait? Sois pro-actif. Informe [D] régulièrement de ton avancement, de tes difficultés. Lève l'alerte en cas de retard. Nous mettons en place un plan d'action détaillé pour les 3 prochains mois pour t'aider à comprendre ce que nous attendons de toi. ». Est annexé à ce mail un planning très détaillé des tâches à exécuter et du temps à y consacrer pour les 3 semaines à venir. M. [H] ne justifie d'aucune contestation, ni de la moindre remarque concernant tant les termes du courriel qui décrit explicitement les manquements constatés par l'employeur, que le planning proposé. Il en va de même des plannings qui lui sont ensuite adressés toutes les 3 semaines. Pourtant, par de très nombreux courriels versés aux débats, notamment les mails des 12, 23, 27 juillet, 16, 20, 21, 29 août, 1er octobre, 15, 23 novembre, 6, 18 décembre 2012, l'employeur a constaté la persistance des manquements : - « Il y a encore de nombreux points que je t'avais signalés par mail du 23 juillet qui n'om pas été pris en compte »,- « La fiche K1P-4609 est encore au mana Corrected. Ce n'est pas normal?. La fiche KIP – 4571 sera faite après la livraison du 1-1F21. [C] [J] en accord avec [U] t'avait prévenu sur ce point. C'estt en appelant [C] que j'ai eu l'info, pourquoi ne me l'as-tu pas dit ? Il y a encore des oublis de procédure et d'information, sois vigilant », Tes principaux problèmes - rester bloqué 1,5 jours sur une saisie et ne pas avoir demandé de l'aide,- refaire les tests en 6 alors que ceux attendus sont en 7,- ne pas alerter pour le retard pris ... ».- « [O], je viens de relire la spec et pour moi elle n'est pas présentable. Il serait souhaitable de décaler la réunion à la semaine prochaine? » - « [O], je m'inquiète un peu de la charge dépensée sur cette spec (on est à 10 jours au lieu des 4 prévu. Je compte sur toi pour que la prochaine revue soit la bonne car compte tenu des priorités, on ne peut pas se permettre de dépasser autant sur ce sujet-là ». outre de nombreux messages signalant des points non pris en compte par le salarié et de multiples erreurs. Tous ces messages, qui n'ont jamais été contestés par M. [H], corroborent les manquements persistants décrits par l'employeur dans la lettre de licenciement. Ils sont également confortés par le témoignage de M. [X] [X], chef de produit, qui indique :« Lors des réunions de revue de ces spécifications, j'ai pu constater personnellement que M. [H] ne maîtrisait pas son sujet. En particulier sur le sujet des ZBA il était évident que M. [H] ne comprenait pas l'enchaînement des tâches à spécifier, ni les différents aspects fonctionnels et concepts à décrire. J'ai le souvenir d'une réunion qui a dû être écourtée du fait de la non maîtrise du sujet par M. [H]. J'ai d'ailleurs après cette réunion fait part de mes inquiétudes quant à la livraison de cette fonctionnalité à la hiérarchie de M. [H] (mail daté du 33/11/2012). Malgré le support de ses collègues de travail et la tenue de plusieurs réunions, M. [H] ne fournissait pas un travail à la hauteur des enjeux. La fonctionnalité ZBA a finalement été spécifiée en retard ».M. [H] affirme n'avoir reçu que des félicitations à l'issue de sa période d'essai, la pièce n°33 qu'il produit au soutien de ses dires ne les conforte pas puisqu'il s'agit d'un courriel par lequel Mme [E] indique à M. [H] et Mme [F] qu'elle souhaite les rencontrer pour faire le point sur les premiers mois d'activité du salarié. De même l'allégation suivant laquelle le salarié a découvert le tableau relatant le plan d'action annexé à la lettre de licenciement après l'entretien préalable n'est justifiée par aucun élément probant. Les différents échanges de courriels produits par l'appelant ne sont pas de nature à remettre en cause les manquements constatés, dès lors que la plupart d'entre eux concernent des événements postérieurs ou sans lien avec les faits reprochés par l'employeur, étant rappelé que M. [H] n'a jamais émis la moindre contestation après réception des nombreux courriels précités. Il en va de même du seul courriel de satisfaction adressé par M. [T] à Mme [J] et M. [H] le 19 juillet 2012. Les pièces n° 34 et 35 produites par l'appelant n'apportent aucun élément utile au litige dès lors d'une part. qu'il n'est pas démontré que M. [H] en est l'auteur et d'autre part, qu'au regard de leur technicité, elles ne permettent pas à la cour d'en tirer la moindre conclusion quant aux compétences professionnelles du salarié. S'agissant de l'absence de formation, l'employeur établit, par les attestations circonstanciées de Mmes [F] et [N], que le salarié a reçu dès son arrivée une formation complète sur le produit KTP, étant relevé qu'il le connaissait en tant qu'utilisateur avant son embauche Mme [U] [R] témoigne par ailleurs de l'accompagnement dont a bénéficié M. [H] de la part de Mme [N]. Enfin, la cour relève que le salarie ne justifie pas avoir fait part d'une quelconque difficulté quant à un manque de formation durant la période d'emploi. Le bonus reçu pour l'année 2011 n'apparaît pas contradictoire avec les insuffisances relevées partir de 2012. Enfin, la mise en oeuvre d'un PSE en 2013 sein de l'entreprise n'est pas de nature à remettre en cause les manquements avérés du salarié dans l'exécution de ses fonctions. En conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a considéré que le licenciement de M. [H] repose sur une cause réelle et sérieuse et débouté le salarié de l'intégralité de ses demandes.

ALORS D'UNE PART QU'au soutien de la preuve de l'insuffisance professionnelle l'employeur avait allégué de manière déterminante, avoir mis en place et transmis au salarié en juillet 2012 un plan d'actions « ormalisant des objectifs à court terme des résultats attendus et des délais d'exécution précis » et annexé ledit plan d'action à la lettre de licenciement ; que l'exposant avait au contraire fait valoir que les tableaux constituant ce plan d'action annexé à la lettre de licenciement n'avaient été portés à sa connaissance qu'à l'issue de l'entretien préalable à son licenciement soit au début de l'année 2013 ; qu'en se bornant à affirmer que l'allégation du salarié suivant laquelle il n'aurait découvert le tableau relatant le plan d'action annexé à la lettre de licenciement après l'entretien préalable « n'est justifiée par aucun élément probant » cependant qu'il appartenait au contraire à l'employeur de rapporter la preuve de son allégation selon laquelle il aurait effectivement transmis au salarié, en juillet 2012, le plan d'action annexé à la lettre de licenciement, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;

ALORS D'AUTRE PART QUE contestant toute insuffisance professionnelle l'exposant au soutien de la preuve de la bonne exécution de ses fonctions avait, à titre d'exemple, versé aux débats, sous les pièces n° 34 et 35, deux documents constituant la version de base et la version définitive du projet « accumulator » qu'il avait réalisés et qui témoignaient de l'importance des prestations accomplies à la satisfaction des clients ; Qu'il ressortait des mentions claires et précises de ces deux documents que « [O] [H] » l'exposant en était l'« auteur » ; Qu'en affirmant qu'il n'est pas démontré que M. [H] est l'auteur des documents ainsi produits sous les pièces n° 34 et 35, la cour d'appel a méconnu l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-16406
Date de la décision : 17/11/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 19 décembre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 nov. 2021, pourvoi n°20-16406


Composition du Tribunal
Président : Mme Farthouat-Danon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Occhipinti, SCP Bouzidi et Bouhanna

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.16406
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