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04/11/2021 | FRANCE | N°20-17322

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 novembre 2021, 20-17322


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 novembre 2021

Rejet

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1206 F-D

Pourvoi n° S 20-17.322

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 NOVEMBRE 2021

La société Innovation Energie et

Développement, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° S 20-17.322 contre l'arrêt rendu le 13 mai 20...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 novembre 2021

Rejet

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1206 F-D

Pourvoi n° S 20-17.322

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 NOVEMBRE 2021

La société Innovation Energie et Développement, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° S 20-17.322 contre l'arrêt rendu le 13 mai 2020 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale A), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [E] [C], domicilié chez [V] [C] [Adresse 3],

2°/ à Pôle emploi Ile-de-France, dont le siège est [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Pion, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Innovation énergie et développement, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [C], après débats en l'audience publique du 14 septembre 2021 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Pion, conseiller rapporteur, Mme Van Ruymbeke, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 13 mai 2020), M. [C] a été engagé en qualité d'ingénieur socio-économiste le 1er juillet 2002 dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée par la société Innovation énergie et développement.

2. En dernier lieu il exerçait les fonctions de directeur Afrique centrale.

3. Licencié le 27 mai 2015 pour cause réelle et sérieuse, il a saisi la juridiction prud'homale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième branches, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner à payer diverses sommes au salarié au titre de la rupture du contrat de travail, alors « que lorsque la lettre de licenciement comporte un (ou des) grief(s) matériellement vérifiable(s), celui-ci(ceux-ci) peu(ven)t être développé(s) et précisé(s) par les parties dans leurs conclusions ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement reprochait au salarié d'avoir "exécut[é son] contrat de manière déloyale, adoptant des positions contraires aux intérêts de la société, la plaçant ainsi en difficulté à l'égard de ses clients, mais également en terme financier", ce qui constituait l'énonciation d'un grief matériellement vérifiable dont la teneur pouvait être précisée par l'employeur dans ses conclusions ; qu'aux termes de celles-ci, la société IED exposait, en guise d'illustration de l'irrespect profond du salarié pour son obligation de loyauté, le fait que celui-ci avait profité de son statut de directeur de la société EED, filiale de la société IED, pour facturer, à son profit personnel, des missions confiées à celle-ci par le biais de l'association Codea dont il était le président, qu'il avait répondu à des appels d'offre restreints en concurrence avec son employeur en usant des moyens techniques de la société EED, notamment en mars 2015, à un moment où il se trouvait en absence injustifiée, le salarié ayant également procédé, tout au long de son arrêt de travail ayant débuté le 27 mars 2015, avec l'appui d'une société tierce, la société Puroil, à la création d'un bureau d'études, la société Arrow Engineering, dont il est devenu le directeur général après son licenciement ; qu'en estimant n'y avoir lieu de se prononcer sur ces griefs au prétexte qu'ils n'étaient pas évoqués dans la lettre de licenciement, lorsque l'énonciation dans la lettre de licenciement d'un grief matériellement vérifiable autorisait l'employeur à en préciser la portée par voie de conclusions, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail, dans sa rédaction applicable en la cause. »

Réponse de la Cour

6. Ayant constaté que la lettre de licenciement reprochait au salarié la prise de congés du 9 au 23 mars 2015, malgré le refus de l'employeur, la participation le 9 mars 2015 à une réunion à [Localité 8], au cours de laquelle il avait pris des positions contraires et préjudiciables aux intérêts de la société et le 10 mars 2015 au salon international Invest'elec au Cameroun sur des thématiques intéressant l'employeur, sans lui en faire part, et une mauvaise exécution des contrats Sénégal et Côte d'Ivoire, et qualifiait ces griefs de manquements à l'obligation de loyauté, la cour d'appel en a exactement déduit qu'elle n'avait pas à examiner d'autres griefs, non invoqués dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Innovation énergie et développement aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Innovation énergie et développement et la condamne à payer à M. [C] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre novembre deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Innovation énergie et développement

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de M. [C] était sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la société IED à payer à M. [C] la somme de 40 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR dit que la somme allouée supportait, s'il y avait lieu, le prélèvement des cotisations et contributions sociales, d'AVOIR ordonné, en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, le remboursement par la société IED des allocations de chômage versées à compter du jour du licenciement jusqu'à la décision, dans la limite de 3 mois et d'AVOIR condamné la société IED à payer à M. [C] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « La société IED, qui emploie 50 salariés environ, a pour activité principale le conseil et l'ingénierie dans le domaine de la production d'énergie principalement électrique à destination essentiellement de l'Afrique et de l'Asie. Elle a créé plusieurs filiales à l'étranger, dont la société Etudes Engineering Developpement (EED) courant 2005, située à [Localité 8].
Il ressort des explications des parties et des pièces versées aux débats:
-que la société EED a été créée par trois associés, dont la société IED, actionnaire détenant plus de 50 % du capital social, et M. [C],
-que M. [C] a assuré seul la gérance de la société EED à compter de février 2011, alors qu'il partageait antérieurement cette gérance avec une autre personne,
-qu'en 2013 ainsi qu'à la fin de l'année 2014, M. [C], ès-qualités de gérant de la société EED, s'est opposé à plusieurs demandes formulées par M. [N], président de la société IED, pour le compte de cette dernière société,
-que M. [C] a été placé en arrêt de travail pour maladie à compter du 27 mars 2015 jusqu'à la rupture effective du contrat de travail.
La lettre de licenciement reproche à M. [C] un comportement déloyal à son égard, ayant consisté en :
-la prise de congés du 9 au 23 mars 2015, malgré le refus de l'employeur,
-la participation le 9 mars 2015 à une réunion à [Localité 8], au cours de laquelle le salarié a pris des positions contraires et préjudiciables aux intérêts de la société IED et le 10 mars 2015 au salon international Invest'elec au Cameroun sur des thématiques intéressant l'employeur mais sans lui en faire part,
-une mauvaise exécution des contrats Sénégal et Côte d'Ivoire dont le salarié avait la charge en raison des congés pris sans autorisation.
Aussi, il n'y a pas lieu d'examiner les autres manquements que l'employeur développe dans ses écritures à l'encontre du salarié, ceux-ci n'étant pas évoqués dans la lettre de licenciement.
M. [C], qui avait déposé le 27 février 2015 une demande de congés payés pour la période du 5 au 20 mars 2015, conteste avoir reçu un courriel de M. [N] du 4 mars 2015, n'acceptant ces congés que pour les 5 et 6 mars 2015.
L'employeur produit en cause d'appel un procès-verbal de constat d'huissier de justice du 14 février 2018. Toutefois, ce procès-verbal ayant été établi plus de deux ans après le licenciement, la fiabilité des éléments de messagerie relevés par l'huissier de justice sur l'ordinateur de M. [N] et celui de son épouse, directrice générale de la société IED, n'est pas certaine. Au surplus, ce procès-verbal ne prouve pas que M. [C] a bien reçu le courriel de l'employeur du 4 mars 2015, en l'absence de messages antérieurs au 10 juillet 2015 sur la messagerie présentée par l'employeur comme étant la messagerie professionnelle du salarié.
Les courriels échangés entre les parties du 23 février au 3 mars 2015 montrent que l'employeur a accepté que M. [C] se rende en mission à [Localité 4] (Côte d'Ivoire) à compter du 2 mars 2015 mais a refusé qu'il aille ensuite à [Localité 8] pour d'autres projets, considérant que le salarié devait traiter prioritairement les contrats Sénégal et Côte d'Ivoire. En revanche, ils ne révèlent aucune opposition de l'employeur au souhait exprimé par M. [C] de prendre des congés en mars 2015, le salarié ayant fait part de ce qu'il devait assister à un enterrement le 7 mars 2015 dans son village au Cameroun, participer à différentes réunions importantes concernant la société EED et se reposer.
Le compte rendu de la réunion du 9 mars 2015 tenue dans le cadre du projet Plan Ver à l'agence d'électrification rurale du Cameroun fait apparaître que Messieurs [N] et M. [C] étaient présents lors de cette réunion en leurs qualités respectives de président de la société IED et de gérant de la société EED. Ce compte rendu de même que les autres pièces citées à l'appui de ce grief ne mettent en évidence aucune prise de position de M. [C], ès-qualités de gérant de la société EED, contraire aux intérêts de la société IED, les deux sociétés étant partenaires du projet Plan Ver.
Par ailleurs, un échange de courriels du 24 février 2015 entre les parties fait apparaître que l'employeur avait connaissance de ce que la société EED participerait au salon Invest'elec le 10 mars 2015.
Par courrier du 18 mars 2015, l'employeur a mis en demeure M. [C] de justifier de son absence depuis le 9 mars 2015 et de reprendre son poste de travail dans les plus brefs délais, indiquant être sans nouvelles du salarié depuis le début de son absence. Or, M. [N], signataire de ce courrier, avait rencontré M. [C] le 9 mars 2015 à [Localité 8] et ne pouvait donc prétendre être sans nouvelles à cette date.
Aussi, un doute existe quant à l'absence d'accord de l'employeur sur les congés du salarié du 5 au 20 mars 2015, même si cet accord n'a pas été formalisé par écrit.
Enfin, les pièces produites par l'employeur ne sont pas suffisantes pour établir une mauvaise exécution des contrats Sénégal et Côte d'Ivoire imputable à M. [C].
Compte tenu de ces éléments, l'employeur n'établit pas les manquements qu'il invoque dans la lettre de licenciement. En outre, les pièces versées aux débats par le salarié et notamment les échanges de courriels intervenus les 19 et 20 mars 2015 entre MM. [N] et [R] [U], montrent que le licenciement a fait suite à l'impossibilité pour la société IED d'évincer M. [C] de la gérance de la société EED, alors que l'employeur, en sa qualité d'actionnaire majoritaire de cette société, considérait que cette gérance n'était pas compatible avec le contrat de travail de l'intéressé.
Le licenciement de M. [C] est dès lors sans cause réelle et sérieuse et le jugement sera infirmé sur ce point.
En application des articles L. 1235-3 et L. 1235-5 du code du travail, le salarié qui a une ancienneté supérieure à deux ans dans une entreprise occupant habituellement 11 salariés au moins, peut prétendre, en l'absence de réintégration dans l'entreprise, à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
M. [C] avait 42 ans et une ancienneté de presque 13 ans dans l'entreprise au moment du licenciement. Il percevait à cette date un salaire mensuel brut moyen de 3.674 euros. Il a été placé en arrêt de travail pour syndrome anxio-dépressif liées aux conditions de travail du 27 mars 2015 jusqu'au 17 septembre 2015. M. [C], qui a un identifiant SIREN au titre d'une activité libérale d'ingénierie et d'études techniques depuis septembre 2015, a bénéficié principalement des indemnités de Pôle Emploi jusqu'au 22 septembre 2017. Il ne justifie pas de sa situation professionnelle depuis cette date.
Compte tenu des éléments susvisés, la société IED sera condamnée à payer à M. [C] la somme de 40.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Par ailleurs, en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur aux organismes concernés des indemnités de chômage versées au salarié à compter du jour du licenciement jusqu'à la présente décision, dans la limite de 3 mois.
(?)
La société IED, partie perdante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
Elle sera également condamnée à payer à M. [C] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés par le salarié tant en première instance qu'en appel. » ;

1°) ALORS QUE lorsque la lettre de licenciement comporte un (ou des) grief(s) matériellement vérifiable(s), celui-ci(ceux-ci) peu(ven)t être développé(s) et précisé(s) par les parties dans leurs conclusions ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement reprochait au salarié d'avoir « exécut[é son] contrat de manière déloyale, adoptant des positions contraires aux intérêts de la société, la plaçant ainsi en difficulté à l'égard de ses clients, mais également en terme financier » ce qui constituait l'énonciation d'un grief matériellement vérifiable dont la teneur pouvait être précisée par l'employeur dans ses conclusions ; qu'aux termes de celles-ci, la société IED exposait, en guise d'illustration de l'irrespect profond du salarié pour son obligation de loyauté, le fait que celui-ci avait profité de son statut de directeur de la société EED, filiale de la société IED, pour facturer, à son profit personnel, des missions confiées à celle-ci par le biais de l'association Codea dont il était le président, qu'il avait répondu à des appels d'offre restreints en concurrence avec son employeur en usant des moyens techniques de la société EED, notamment en mars 2015, à un moment où il se trouvait en absence injustifiée, le salarié ayant également procédé, tout au long de son arrêt de travail ayant débuté le 27 mars 2015, avec l'appui d'une société tierce, la société Puroil, à la création d'un bureau d'études, la société Arrow Engineering, dont il est devenu le directeur général après son licenciement ; qu'en estimant n'y avoir lieu de se prononcer sur ces griefs au prétexte qu'ils n'étaient pas évoqués dans la lettre de licenciement, lorsque l'énonciation dans la lettre de licenciement d'un grief matériellement vérifiable autorisait l'employeur à en préciser la portée par voie de conclusions, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail, dans sa rédaction applicable en la cause ;

2°) ALORS QU'il incombe au salarié qui se prévaut d'une autorisation d'absence d'en démontrer l'existence ; qu'en l'espèce, le salarié avait été licencié notamment pour ne pas avoir repris son poste, au siège de la société à [Localité 6], le lundi 9 mars, à l'issue de ses congés qui n'avaient été autorisés que jusqu'au 6 mars ; qu'en retenant qu'il existait un doute sur l'absence d'accord de l'employeur sur les congés du salarié du 5 au 20 mars 2015, lorsqu'il appartenait, non pas à l'employeur de justifier de l'absence d'accord donné au salarié pour des congés s'achevant à cette date, mais au salarié de démontrer positivement qu'il disposait d'une autorisation expresse en ce sens de l'employeur nonobstant l'absence de toute formalisation écrite, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé, ce faisant, l'article 1315 du code civil, devenu l'article 1353 du code civil ;

3°) ALORS QU'aux termes de l'article 5.5.3 du règlement intérieur de la société IED « les demandes de jours de congés ou de RTT doivent être déposées auprès du service administratif au minimum 48 heures à l'avance pour des congés d'une journée et au minimum 1 semaine à l'avance pour des congés plus longs » (cf. production n° 5) ; qu'en l'espèce, la société IED faisait valoir que c'est seulement la veille de son départ pour [Localité 4], le 27 février 2015, qu'au mépris des dispositions précitées, le salarié avait déposé une demande de congés pour la période courant du 5 mars au 20 mars 2015 (cf. les conclusions de l'exposante p. 15, §2) ; qu'en retenant qu'un doute subsistait quant à l'absence d'accord de l'employeur sur les congés du salarié du 5 au 20 mars 2015, sans rechercher si le fait pour le salarié d'avoir méconnu les conditions impératives gouvernant la demande de congés, en les sollicitant moins d'une semaine avant son départ, ne faisait pas obstacle à toute autorisation valable susceptible de lui avoir été donnée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, devenu les articles 1103 et 1104 du code civil ;

4°) ALORS QUE tenus de motiver leur décision, les juges du fond doivent examiner les éléments de preuve versés aux débats par les parties ; qu'au soutien du grief tiré de la prise de décisions contraires et préjudiciables aux intérêts de la société IED, l'employeur produisait des éléments dont il ressortait que le salarié avait oeuvré pendant plusieurs mois à la préparation de réunions importantes pour l'entreprise sans l'en tenir informée (cf. productions n° 9 à 15 et n° 21), que, lors de celles-ci, notamment dans le cadre du plan Ver, le salarié avait présenté un schéma organisationnel relayant la maison mère, la société IED, en qualité de simple assistante de la filiale dirigée par le salarié, la société EED, à laquelle était confié le pilotage opérationnel de la mission (cf. productions n° 16 à 18), que ces manoeuvres, contraires aux positions exprimées par l'employeur, avaient gravement préjudicié à la société IED en la contraignant à régulariser un avenant actant une baisse de 593 957 euros du chiffre d'affaires issu de ce marché et un décalage de trois ans des produits censés être retirés de ce contrat (cf. productions n° 19 et 20), en la privant de la possibilité de faire connaître ses techniques et savoir-faire et de rencontrer de nouveaux clients (cf. productions n° 7, 10, 11 et 21) et en rendant impossible la bonne exécution des conventions entre elle et la filiale en question (cf. production n° 22), dont la gestion avait été intentionnellement maintenue opaque par l'intéressé (cf. productions n° 23 à 25); qu'en jugeant que les pièces produites par l'employeur à l'appui de ce grief, dont le compte-rendu de la réunion du 9 mars 2015, ne mettaient en évidence aucune prise de position du salarié, ès-qualités de gérant de la société EED, contraire aux intérêts de la société IED, sans s'expliquer sur ces pièces en ce qu'elles faisaient apparaitre la réalité de manoeuvres déployées par le salarié ayant gravement préjudicié à l'entreprise, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5°) ALORS QUE tenus de motiver leur décision, les juges du fond doivent examiner les éléments de preuve versés aux débats par les parties ; qu'au soutien du grief pris d'une mauvaise exécution des contrats Côte d'Ivoire et Sénégal dont le salarié avait la charge, l'employeur produisait des éléments dont il ressortait qu'alors qu'il était, en sa qualité de directeur au sein de la société IED, responsable des affaires qui lui étaient confiées dans leur intégralité (cf. production n° 5), le salarié s'était limité à remettre, dans le cas des contrats relatifs à la Côte d'Ivoire, un rapport imprécis et incomplet, cette carence dénoncée par la société en charge du marché, la société CI-Energie, ayant eu de lourdes conséquences pour l'entreprise, notamment dans ses relations commerciales avec cette société, en imposant aux équipes de nombreuses heures de travail (723 heures) et en rendant nécessaire l'organisation d'une réunion avec ladite société du 23 au 26 janvier 2015 (cf. production n° 26) ; que pour ce qui concerne les contrats relatifs au Sénégal, le salarié, procédant à un simple « copier/coller », avait seulement remis un rapport comportant des erreurs grossières (prise en compte d'une population erronée, hypothèses et références inadaptées etc?), comme l'avait relevé Mme [P], Senior Economist pour le compte de la World bank, en charge du suivi de ce projet (cf. production n° 27) ; qu'en affirmant que les pièces produites par l'employeur n'étaient pas suffisantes pour établir une mauvaise exécution des contrats Sénégal et Côte d'Ivoire imputable au salarié, sans s'expliquer concrètement sur les éléments précités, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

6°) ALORS QUE le juge ne peut déclarer le licenciement sans cause réelle et sérieuse au seul prétexte d'un doute sur la véritable cause de celui-ci mais seulement s'il caractérise avec certitude l'existence d'une cause de licenciement autre que celle visée dans la lettre de licenciement ; qu'en se bornant à relever que le licenciement faisait suite à l'impossibilité pour la société IED d'évincer le salarié de la gérance de la société EED au prétexte qu'elle n'était pas compatible avec le contrat de travail du salarié, lorsque cette circonstance était insuffisante à faire ressortir l'éventuelle fausseté des motifs énoncés dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1235-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-17322
Date de la décision : 04/11/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 13 mai 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 nov. 2021, pourvoi n°20-17322


Composition du Tribunal
Président : Mme Farthouat-Danon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.17322
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