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04/11/2021 | FRANCE | N°19-20079

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 novembre 2021, 19-20079


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CA3

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 novembre 2021

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1214 F-D

Pourvoi n° T 19-20.079

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 NOVEMBRE 2021

Mme [Y] [N], domiciliée [Adr

esse 2], a formé le pourvoi n° T 19-20.079 contre l'arrêt rendu le 29 janvier 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 8), dans le lit...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CA3

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 novembre 2021

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1214 F-D

Pourvoi n° T 19-20.079

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 NOVEMBRE 2021

Mme [Y] [N], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 19-20.079 contre l'arrêt rendu le 29 janvier 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 8), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Bank Polska Kasa Opieki, dont le siège est [Adresse 3]),

2°/ à la société Unicredit, dont le siège est [Adresse 1],

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rouchayrole, conseiller, les observations de Me Occhipinti, avocat de Mme [N], de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Bank Polska Kasa Opieki, après débats en l'audience publique du 15 septembre 2021 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rouchayrole, conseiller rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, Mme Rémery, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à Mme [N] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Unicredit.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 janvier 2019), Mme [N] a été engagée le 15 janvier 1989 par la société Bank Polska Kasa Opieki Spolka Akcyjna (ci-après la société), pour exercer les fonctions d'agent bilingue au sein de la succursale parisienne de cette banque, puis de responsable Corporate.

3. A la suite des restructurations et de son refus du reclassement à l'étranger proposé, la salariée était licenciée le 26 décembre 2011.

4. Le 30 décembre 2011, les parties ont conclu un contrat à durée déterminée de six mois renouvelable dans la limite de douze mois, précisant qu'il « s'agissait d'une création de poste pour les besoins de la clôture et de la liquidation de la succursale de [Localité 5] ». Un protocole d'accord conclu le même jour, prévoyait que les parties renonçaient à toute contestation en rapport avec la conclusion du contrat de travail à durée déterminée corrélativement à l'application du congé de reclassement. Ce protocole précisait qu'il valait transaction.

5. La relation contractuelle a cessé le 10 janvier 2014.

6. La salariée a saisi, le 15 juillet 2014, la juridiction prud'homale de demandes tendant à la requalification du contrat à durée déterminée et de ses avenants en un contrat de travail à durée indéterminée et de paiement de diverses indemnités subséquentes.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

7. La salariée fait grief à l'arrêt de limiter à une certaine somme l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de la débouter du surplus de ses demandes, alors « que les prétentions des parties, incluant les fins de non-recevoir opposées en défense, doivent être formulées dans le dispositif de leurs conclusions ; que, dans le dispositif de ses conclusions, la banque se bornait à demander qu'il soit constaté qu'elle avait respecté la réglementation applicable en matière de contrat à durée indéterminée et n'opposait pas à la salariée la prétendue irrecevabilité de ses demandes découlant d'une transaction ; qu'en se fondant néanmoins sur cette transaction pour opposer l'autorité de la chose jugée à la salariée, la cour d'appel a violé l'article 954 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

8. L'employeur conteste la recevabilité du moyen. Il soutient que celui-ci est irrecevable comme étant nouveau et mélangé de fait et de droit.

9. Cependant le moyen, tiré de ce que la cour d'appel a statué sur des demandes dont elle n'était pas saisie, est de pur droit.

10. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article 954, alinéas 2 et 3, du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n°2009-1524 du 9 décembre 2009 :

11. Selon ce texte, dans les procédures avec représentation obligatoire, les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée ; les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif et la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif.

12. Pour confirmer le jugement ayant débouté la salariée de l'ensemble de ses demandes formulées au titre de la conclusion et de la rupture du contrat à durée déterminée et de ses avenants successifs et à percevoir l'indemnité de requalification afférente, l'arrêt énonce que l'employeur rappelle et justifie que, parallèlement à ce contrat de travail -destiné à permettre les opérations de clôture des opérations liées à la fermeture de la banque- a été conclu le même jour un protocole d'accord par lequel il était convenu que la salariée continuerait à bénéficier du congé de reclassement et des mesures prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi et déclarait renoncer à toute contestation en raison du CDD [corrélativement à l'application du congé de reclassement].

13. L'arrêt ajoute que dans ces conditions, la banque excipe de l'irrecevabilité des demandes de la salariée et que dès lors que cette dernière ne répond pas dans ses conclusions à cette fin de non-recevoir, ni ne s'explique sur les effets du protocole dont elle ne soulève pas la nullité, la cour ne peut que faire droit au moyen tiré par la banque de l'article 2052 du code civil, selon lequel le protocole a l'autorité de la chose jugée et fait donc obstacle aux prétentions de la salariée.

14. En statuant ainsi, alors que la société se bornait, dans le dispositif de ses écritures devant la cour d'appel, à demander à cette dernière de dire et juger qu'elle avait respecté la législation applicable au contrat à durée déterminée, la cour d'appel, qui n'était pas saisie d'une fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée à la transaction du 30 décembre 2011, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit que le licenciement pour motif économique est sans cause réelle et sérieuse et condamne en conséquence la société Bank Polska Kasa Opieki à payer à la salariée la somme de 60 000 euros à titre d'indemnité subséquente, l'arrêt rendu le 29 janvier 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Bank Polska Kasa Opieki aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Bank Polska Kasa Opieki et la condamne à payer à Mme [N] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre novembre deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produits par Me Occhipinti, avocat aux Conseils pour Mme [N] .

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Bank Polska à verser à Mme [N] la seule somme de 60 000 € et d'AVOIR débouté Mme [N] du surplus de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE Mme [N] soutient que le contrat à durée déterminée conclu le 30 décembre 2011 avec la Bank Polska -et ses avenants ultérieurs- doivent être requalifiés en contrat à durée indéterminée en raison du motif et de la durée du contrat, contraires aux dispositions légales ; qu'elle en déduit que l'expiration du dernier avenant constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse justifiant ses demandes d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts pour rupture abusive ; Mais considérant que la Bank Polska rappelle et justifie que, parallèlement à ce contrat de travail -destiné à permettre les opérations de clôture des opérations liées à la fermeture de la banque- a été conclu, ce même 30 décembre 2011, un protocole d'accord par lequel il était convenu que Mme [N], bien que titulaire d'un contrat à durée déterminée, continuerait à bénéficier du congé de reclassement et des mesures prévues par le PSE et déclarait renoncer à toute « contestation en raison d'un CDD » ; que dans ces conditions la Bank Polska excipe de l'irrecevabilité des demandes de Mme [N] relatives au CDD ; Et Mme [N] ne répond pas dans ses conclusions à cette fin de non-recevoir, ni ne s'explique sur les effets du protocole dont elle ne soulève pas la nullité ; la cour ne peut, dès lors, que faire droit au moyen tiré par la Bank Polska des dispositions de l'article 2052 du code civil selon lesquelles le protocole a l'autorité de la chose jugée et fait donc obstacle aux prétentions de Mme [N]

1°) ALORS QUE les prétentions des parties, incluant les fins de non-recevoir opposées en défense, doivent être formulées dans le dispositif de leurs conclusions ; que, dans le dispositif de ses conclusions, la société Bank Polska se bornait à demander qu'il soit constaté qu'elle avait respecté la réglementation applicable en matière de contrat à durée indéterminée et n'opposait pas à Mme [N] la prétendue irrecevabilité de ses demandes découlant d'une transaction ; qu'en se fondant néanmoins sur cette transaction pour opposer l'autorité de la chose jugée à Mme [N], la cour d'appel a violé l'article 954 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QU'en relevant d'office la fin de non-recevoir tirée de ce qu'une transaction ayant l'autorité de la chose jugée s'opposait aux demandes de Mme [N], la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE la transaction portant sur les conséquences d'une succession de contrats à durée indéterminée ne peut être conclue qu'après l'expiration du dernier contrat, permettant au salarié d'apprécier, le cas échéant, l'étendue des irrégularités commises par l'employeur ; qu'il résulte des constatations de la cour d'appel qu'une transaction aurait été conclue entre Mme [N] et la société Bank Polska le 30 décembre 2011, date d'un premier contrat à durée déterminée renouvelé trois fois ; qu'en estimant que cette transaction interdisait à Mme [N] de solliciter la requalification en contrat à durée indéterminée des contrats de travail successifs, dont le renouvellement était postérieur à la transaction, la cour d'appel a violé l'article 2044 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-20079
Date de la décision : 04/11/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 29 janvier 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 nov. 2021, pourvoi n°19-20079


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Occhipinti, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.20079
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