La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/10/2021 | FRANCE | N°20-13359

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 octobre 2021, 20-13359


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 octobre 2021

Cassation

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1177 F-D

Pourvoi n° J 20-13.359

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 20 OCTOBRE 2021

M. [O] [S], domicilié [Adresse 1], a form

é le pourvoi n° J 20-13.359 contre l'arrêt rendu le 19 décembre 2019 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section A), dans le litige ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 octobre 2021

Cassation

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1177 F-D

Pourvoi n° J 20-13.359

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 20 OCTOBRE 2021

M. [O] [S], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 20-13.359 contre l'arrêt rendu le 19 décembre 2019 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section A), dans le litige l'opposant à la société SR Technics Switzerland Ltd, dont le siège est [Adresse 2] (Suisse), défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de M. [S], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société SR Technics Switzerland Ltd, après débats en l'audience publique du 8 septembre 2021 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire rapporteur, M. Rinuy, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 19 décembre 2019), M. [S] a été engagé, à compter du 1er mai 2005, par la société de droit suisse, Jet Aviation AG Basel, en qualité de mécanicien d'avion, sur le site de l'aéroport de [1].

2. À la suite de la reprise de l'activité « Line maintenance » de cette société par la société de droit suisse SR Technics Switzerland Ltd, cette dernière a engagé le salarié par contrat du 7 octobre 2013.

3. Par avenant du 4 février 2014, ce dernier contrat de travail a été soumis au droit suisse.

4. Par lettre du 4 février 2016, la société SR Technics Switzerland Ltd a mis fin au contrat de travail du salarié avec effet au 31 mai 2016.

5. Par requête du 3 août 2016, le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins de contester son licenciement et d'obtenir diverses sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif et vexatoire, d'indemnité de licenciement, de rappel de salaire, de points UAZ correspondant à la période de préavis et de droits à congés payés afférents à cette dernière période.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. Le salarié fait grief à l'arrêt de déclarer ses demandes irrecevables, alors
« que, en énonçant qu'à la suite de l'arrêt du 2 avril 2019 ayant ordonné la réouverture des débats et invité l'exposant à conclure sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par l'employeur, ‘‘Monsieur [S] n'a pas reconclu'‘ cependant qu'au contraire, l'exposant avait régulièrement déposé le 28 mai 2019, des conclusions écrites datées du 27 mai 2019 au soutien notamment du rejet de la fin de non-recevoir tirée de la prescription de son action, ainsi que cela ressort très précisément non seulement du bordereau de dépôt RPVA, mais aussi des propres conclusions de l'employeur du 12 septembre suivant qui indiquait ‘‘Monsieur [S] a déposé des conclusions responsives et récapitulatives n° 2 le 27 mai 2019. Ces conclusions appellent les observations suivantes :?'', la cour d'appel qui n'a pas statué au visa des dernières conclusions de l'exposant, a violé les articles 954 et 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 455, alinéa 1er, et 954 du code de procédure civile :

7. Il résulte de ces textes que, s'il n'expose pas succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens, le juge, qui ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées, doit viser celles-ci avec l'indication de leur date.

8. Pour déclarer les demandes du salarié irrecevables, l'arrêt relève que, par un précédent arrêt du 2 avril 2019, la cour d'appel a ordonné la réouverture des débats et invité le salarié à conclure le vendredi 31 mai 2019 au plus tard sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par l'employeur et que le salarié n'a pas à nouveau conclu.

9. En statuant ainsi, alors qu'il ressort des productions que le salarié avait déposé et fait notifier, le 28 mai 2019, via le réseau privé virtuel avocats (RPVA), des conclusions d'appel datées du 27 mai 2019, et que ces conclusions développaient une argumentation complémentaire portant sur la fin de non-recevoir soulevée par la société, la cour d'appel, qui n'a pas visé ces dernières conclusions et qui s'est prononcée par des motifs dont il ne résulte pas qu'elle les aurait prises en considération, a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 décembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne la société SR Technics Switzerland Ltd aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société SR Technics Switzerland Ltd et la condamne à payer à M. [S] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt octobre deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour M. [S]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUE D'AVOIR déclaré les demandes de Monsieur [S] irrecevables ;

AUX MOTIFS QUE par arrêt du 2 avril 2019, auquel il convient de se référer pour connaître les faits, prétentions et moyens des parties la cour a dit que les dispositions impératives de la loi française relatives au licenciement s'appliquaient à la relation salariale entre la société SR Technics Switzerland Ltd et Monsieur [S] ordonné la réouverture des débats, invité Monsieur [S] à conclure sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par l'employeur et invité les parties à conclure selon un calendrier précis et fixé l'affaire à l'audience de la cour du 5 novembre 2019 ; Aux termes d' écritures récapitulatives remises le 12 septembre 2019 au greffe de la cour, la SAS SR Technics Switzerland demande à la cour de dire et juger que l'action introduite par Monsieur [S] devant le conseil de prud'hommes de Mulhouse est prescrite au regard des dispositions applicables de l'article 336 b du code des obligations suisse, de déclarer en conséquence son appel irrecevable et en tout cas mal fondé, de déclarer ses demandes irrecevables ; A titre subsidiaire, elle demande à la cour de les déclarer mal fondées et, à titre encore plus subsidiaire, de les réduire à de plus justes proportions ; A l'appui de ses prétentions, elle fait valoir en substance que : - la loi française en matière de délai de saisine ne figure pas parmi les règles impératives qui auraient été applicables en l'absence de choix d'une loi étrangère applicable au contrat de travail, - par application de l'article 336 b du code des obligations suisse, l'action du salarié est périmé ; que Monsieur [S] n'a pas reconclu ; son avocat a déposé le mandat.

1°) ALORS D'UNE PART QU' en énonçant qu'à la suite de l'arrêt du 2 avril 2019 ayant ordonné la réouverture des débats et invité l'exposant à conclure sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par l'employeur, « Monsieur [S] n'a pas reconclu » cependant qu'au contraire, l'exposant avait régulièrement déposé le 28 mai 2019, des conclusions écrites datées du 27 mai 2019 au soutien notamment du rejet de la fin de non-recevoir tirée de la prescription de son action, ainsi que cela ressort très précisément non seulement du bordereau de dépôt RPVA, mais aussi des propres conclusions de l'employeur du 12 septembre suivant qui indiquait « Monsieur [S] a déposé des conclusions responsives et récapitulatives n° 2 le 27 mai 2019. Ces conclusions appellent les observations suivantes :? », la cour d'appel qui n'a pas statué au visa des dernières conclusions de l'exposant, a violé les articles 954 et 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS D'AUTRE PART QUE dans ses dernières écritures datées du 27 mai 2019, régulièrement déposées et signifiées, l'exposant avait notamment conclu sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de son action au regard des articles 336 et suivants du code des obligations suisse, soulevée par l'employeur ; qu'en énonçant que Monsieur [S] n'a pas reconclu, la cour d'appel a méconnu les termes du litige dont elle était saisie en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUE D'AVOIR déclaré les demandes de Monsieur [S] irrecevables ;

AUX MOTIFS QU' il convient de rappeler au préalable que par arrêt du 26 octobre 2017, la cour a infirmé le jugement entrepris en ce qu'il s'était déclaré incompétent pour connaître du litige et avait invité le demandeur à saisir la juridiction du travail suisse, et décidé d'évoquer l'affaire ; que dès lors que le salarié n'est pas privé du droit d'accès au juge, les règles de procédure aménageant les délais de saisine des juridictions du travail ne portent pas atteinte aux dispositions impératives de la loi française qui auraient été applicables en l'absence de choix d'une loi étrangère applicable au contrat de travail ; qu'il s'ensuit que les dispositions des articles 336, 336 a et 336 b alinéa 2 du code des obligation suisses qui enferment la saisine de la juridiction du travail dans des délais plus courts que la loi française doivent s'appliquer, les parties ayant fait le choix de soumettre le contrat de travail à la loi suisse et ces règles n'étant pas des dispositions impératives de la loi française qui auraient été applicables en l'absence de choix d'une loi étrangère applicable au contrat de travail ; qu'en vertu des articles susvisés, la partie qui entend obtenir de l'autre une indemnité pour résiliation abusive du contrat de travail, "doit faire opposition au congé par écrit auprès de l'autre partie au plus tard jusqu'à la fin du délai de congé" ; qu'il est précisé que : "Si l'opposition est valable et que les parties ne s'entendent pas pour maintenir le rapport de travail, la partie qui a reçu le congé peut faire valoir sa prétention à une indemnité. Elle doit agir par voie d'action en justice dans les 180 jours à compter de la fin du contrat, sous peine de péremption" ; qu'en l'espèce, l'employeur a rompu le contrat de travail le 9 février 2016 avec un préavis expirant le 31 mai 2016 ; que Monsieur [S] n'apporte pas la preuve d'avoir manifesté son opposition à cette rupture, qui s'entendait d'un congé au sens de la loi suisse, avant le 31 mai 2016 et encore mois d'avoir saisi le conseil de prud'hommes de Mulhouse dans les 180 jours à compter du 31 mai 2016 ; qu'il s'ensuit que ses demandes sont irrecevables par péremption.

ALORS QUE lorsque les parties à un contrat de travail ont choisi la loi auquel il est soumis par application de l'article 3 de la Convention de Rome du 19 juin 1980, les dispositions impératives de la loi qui lui seraient applicables à défaut de choix trouvent à s'appliquer si le choix opéré a pour effet de priver le salarié de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi du lieu d'exécution habituelle du contrat ; que les dispositions impératives d'une loi sont celles auxquelles cette loi ne permet pas de déroger par contrat ; qu'au nombre de ces dispositions impératives figure celle de l'article L. 1471-1 du code du travail relative au délai de prescription de l'action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail ; qu'après avoir expressément constaté dans son arrêt du 2 avril 2019 (p. 6 et 7) que l'exposant accomplissait habituellement son travail en France dans l'enceinte de l'aéroport de [1] et que le choix de la loi Suisse ne peut avoir pour résultat de le priver des dispositions impératives de la loi française, loi du lieu d'exécution habituelle du travail, qui aurait été applicable à défaut de choix et que les dispositions dont s'agit s'entendent des dispositions auxquelles il ne peut être dérogé par accord en vertu de la loi, la cour d'appel qui néanmoins, pour déclarer irrecevables les demandes de l'exposant « par péremption » retient que « les règles de procédure aménageant les délais de saisine des juridictions du travail ne portent pas atteinte aux dispositions impératives de la loi française qui auraient été applicables en l'absence de choix d'une loi étrangère applicable au contrat de travail » et fait par conséquence application des dispositions des articles 336, 336 a et 336 b alinéa 2 du code des obligations suisse qui enferment la saisine de la juridiction du travail dans des délais plus courts, soit 180 jours à compter de la fin du contrat après une opposition au congé par écrit auprès de l'employeur avant la fin du préavis, cependant que le délai de prescription de l'action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail de l'article L. 1471-1 du code du travail, constitue une disposition impérative de la loi française dont le salarié ne peut être privé, a violé l'article 8 du règlement communautaire de substitution n° 593/2008 du 17 juin 2008 dit règlement Rome I, ensemble l'article L. 1471-1 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUE D'AVOIR déclaré les demandes de Monsieur [S] irrecevables ;

AUX MOTIFS QU' il convient de rappeler au préalable que par arrêt du 26 octobre 2017, la cour a infirmé le jugement entrepris en ce qu'il s'était déclaré incompétent pour connaître du litige et avait invité le demandeur à saisir la juridiction du travail suisse, et décidé d'évoquer l'affaire ; que dès lors que le salarié n'est pas privé du droit d'accès au juge, les règles de procédure aménageant les délais de saisine des juridictions du travail ne portent pas atteinte aux dispositions impératives de la loi française qui auraient été applicables en l'absence de choix d'une loi étrangère applicable au contrat de travail ; qu'il s'ensuit que les dispositions des articles 336, 336 a et 336 b alinéa 2 du code des obligation suisses qui enferment la saisine de la juridiction du travail dans des délais plus courts que la loi française doivent s'appliquer, les parties ayant fait le choix de soumettre le contrat de travail à la loi suisse et ces règles n'étant pas des dispositions impératives de la loi française qui auraient été applicables en l'absence de choix d'une loi étrangère applicable au contrat de travail ; qu'en vertu des articles susvisés, la partie qui entend obtenir de l'autre une indemnité pour résiliation abusive du contrat de travail, "doit faire opposition au congé par écrit auprès de l'autre partie au plus tard jusqu'à la fin du délai de congé" ; qu'il est précisé que : "Si l'opposition est valable et que les parties ne s'entendent pas pour maintenir le rapport de travail, la partie qui a reçu le congé peut faire valoir sa prétention à une indemnité. Elle doit agir par voie d'action en justice dans les 180 jours à compter de la fin du contrat, sous peine de péremption" ; qu'en l'espèce, l'employeur a rompu le contrat de travail le 9 février 2016 avec un préavis expirant le 31 mai 2016 ; que Monsieur [S] n'apporte pas la preuve d'avoir manifesté son opposition à cette rupture, qui s'entendait d'un congé au sens de la loi suisse, avant le 31 mai 2016 et encore mois d'avoir saisi le conseil de prud'hommes de Mulhouse dans les 180 jours à compter du 31 mai 2016 ; qu'il s'ensuit que ses demandes sont irrecevables par péremption.

ALORS QU' au titre de la « fin des rapports de travail », le droit suisse distingue d'une part le congé abusif définit à l'article 336 du code des obligations suisse comme donné notamment pour un motif discriminatoire et, d'autre part, la résiliation immédiate du contrat « pour de justes motifs » définit à l'article 337 du code des obligations suisse ; que la procédure spécifique, instituée par l'article 336 b dudit code, imposant au salarié de faire opposition au congé par écrit auprès de l'autre partie au plus tard jusqu'à la fin du délai de congé et d'agir par voie d'action en justice dans les 180 jours à compter de la fin du contrat « sous peine de péremption », n'est applicable que lorsque le salarié entend demander une indemnité pour résiliation abusive au sens des articles 336 et 336 a du code susvisé et non lorsqu'il soutient que le congé ne repose pas sur de justes motifs au sens de l'article 337 dudit code ; qu'en faisant application des disposition de l'article 336 b du code des obligations suisse pour déclarer irrecevables « par péremption » les demandes de l'exposant qui sollicitait pourtant la condamnation de son employeur à lui payer des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit pour absence de justes motifs au sens du droit suisse, la cour d'appel a dénaturé la loi étrangère et violé l'article 3 du code civil, ensemble l'article 1134 du même code dans sa rédaction applicable en l'espèce ;

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUE D'AVOIR déclaré les demandes de Monsieur [S] irrecevables ;

AUX MOTIFS QU' il convient de rappeler au préalable que par arrêt du 26 octobre 2017, la cour a infirmé le jugement entrepris en ce qu'il s'était déclaré incompétent pour connaître du litige et avait invité le demandeur à saisir la juridiction du travail suisse, et décidé d'évoquer l'affaire ; que dès lors que le salarié n'est pas privé du droit d'accès au juge, les règles de procédure aménageant les délais de saisine des juridictions du travail ne portent pas atteinte aux dispositions impératives de la loi française qui auraient été applicables en l'absence de choix d'une loi étrangère applicable au contrat de travail ; qu'il s'ensuit que les dispositions des articles 336, 336 a et 336 b alinéa 2 du code des obligation suisses qui enferment la saisine de la juridiction du travail dans des délais plus courts que la loi française doivent s'appliquer, les parties ayant fait le choix de soumettre le contrat de travail à la loi suisse et ces règles n'étant pas des dispositions impératives de la loi française qui auraient été applicables en l'absence de choix d'une loi étrangère applicable au contrat de travail ; qu'en vertu des articles susvisés, la partie qui entend obtenir de l'autre une indemnité pour résiliation abusive du contrat de travail, "doit faire opposition au congé par écrit auprès de l'autre partie au plus tard jusqu'à la fin du délai de congé" ; qu'il est précisé que : "Si l'opposition est valable et que les parties ne s'entendent pas pour maintenir le rapport de travail, la partie qui a reçu le congé peut faire valoir sa prétention à une indemnité. Elle doit agir par voie d'action en justice dans les 180 jours à compter de la fin du contrat, sous peine de péremption" ; qu'en l'espèce, l'employeur a rompu le contrat de travail le 9 février 2016 avec un préavis expirant le 31 mai 2016 ; que Monsieur [S] n'apporte pas la preuve d'avoir manifesté son opposition à cette rupture, qui s'entendait d'un congé au sens de la loi suisse, avant le 31 mai 2016 et encore mois d'avoir saisi le conseil de prud'hommes de Mulhouse dans les 180 jours à compter du 31 mai 2016 ; qu'il s'ensuit que ses demandes sont irrecevables par péremption.

1°) ALORS D'UNE PART QU' ayant retenu que l'employeur a rompu le contrat de travail le 9 février 2016 avec un préavis expirant le 31 mai 2016 (arrêt attaqué p. 3) et que par acte introductif d'instance du 3 août 2016, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Mulhouse aux fins de contester son licenciement et obtenir diverses sommes à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif et vexatoire, d'indemnité de licenciement, de rappel de salaire, des points UAZ générés par le préavis non effectué et d'indemnité pour harcèlement moral (arrêt du 2 avril 2019 p. 2 in fine) la cour d'appel qui pour déclarer irrecevables « par péremption » toutes les demandes de l'exposant, affirme que le salarié n'apporte pas la preuve « d'avoir saisi le conseil de prud'hommes de Mulhouse dans les 180 jours à compter du 31 mai 2016 » n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations dont il ressortait au contraire que l'exposant avait saisi le conseil de prud'hommes moins de 180 jours avant la fin du préavis le 31 mai 2016 et a violé l'article 3 du code civil ;

2°) ALORS D'AUTRE PART QUE la contradiction de motifs équivaut à son absence ; qu'en affirmant tour à tour, d'une part que l'employeur a rompu le contrat de travail le 9 février 2016 avec un préavis expirant le 31 mai 2016 et que, par acte introductif d'instance du 3 août 2016, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Mulhouse et, d'autre part, que le salarié n'apporte pas la preuve « d'avoir saisi le conseil de prud'hommes de Mulhouse dans les 180 jours à compter du 31 mai 2016 », la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°) ALORS DE TROISIEME PART QU' il résulte de manière non équivoque des dispositions des articles 336, 336 a et 336 b du code des obligations suisse que la procédure d'opposition à congé et le délai réduit à 180 jours pour saisir la juridiction du travail ne sont applicables qu'aux demandes liées à la résiliation abusive du contrat de travail ; que l'exposant outre des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et vexatoire et des indemnités de licenciement demandait la condamnation de son employeur à lui payer diverses sommes au titre de l'exécution dudit contrat et notamment des dommages et intérêts pour harcèlement moral ainsi que des rappels de salaire et la délivrance d'un certificat de travail ; qu'en faisant application des textes susvisés du code des obligations suisse pour déclarer irrecevables toutes les demandes de l'exposant y compris celles qui n'étaient pas relatives à la résiliation de son contrat de travail, la cour d'appel a dénaturé le droit étranger et violé l'article 3 du code civil, ensemble l'article 1134 du même code dans sa rédaction applicable en l'espèce.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-13359
Date de la décision : 20/10/2021
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 19 décembre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 oct. 2021, pourvoi n°20-13359


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.13359
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award