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20/10/2021 | FRANCE | N°19-20909

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 20 octobre 2021, 19-20909


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

SG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 octobre 2021

Cassation

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 646 F-D

Pourvoi n° V 19-20.909

Aide Juridictionnelle Totale en Défense
au profit de M.[U].
Admission du Bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 12 novembre 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS<

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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 20 OCTOBRE 2021

La caisse d'épargne Grand Est Europe, don...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

SG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 octobre 2021

Cassation

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 646 F-D

Pourvoi n° V 19-20.909

Aide Juridictionnelle Totale en Défense
au profit de M.[U].
Admission du Bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 12 novembre 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 20 OCTOBRE 2021

La caisse d'épargne Grand Est Europe, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de la caisse d'épargne et de prévoyance d'Alsace, a formé le pourvoi n° V 19-20.909 contre l'arrêt rendu le 9 mai 2019 par la cour d'appel de Colmar (1re chambre civile, section A), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [Z] [U],

2°/ à Mme [G] [U],

domiciliés tous deux [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Champ, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse d'épargne Grand Est Europe, de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de M. et Mme [U], après débats en l'audience publique du 7 septembre 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Champ, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué ( Colmar, 9 mai 2019 ), le 27 juillet 2011, la société Caisse d'épargne Grand Est Europe ( la banque ) a consenti à la société Casa Toscana ( l'emprunteur ) un prêt d'un montant de 417 000 euros, garanti par le cautionnement de M. [U] dans la limite de 201 100 euros et de sa soeur, Mme [U], dans la limite de 68 900 euros.

2. Le 10 décembre 2013, à la suite du placement en redressement de l'emprunteur, la banque a assigné en paiement M. et Mme [U]. Ceux-ci ont opposé la disproportion de leur engagement.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La banque fait grief à l'arrêt de juger qu'elle ne peut se prévaloir du cautionnement de M. [U], alors « que pour considérer que la fiche patrimoniale de M. [U] comportait des anomalies apparentes relatives aux biens déclarés et que par suite son cautionnement était disproportionné au regard de ses seuls revenus, les juges du fond ont retenu le fait que l'intéressé a déclaré des plus-values, sur un intervalle de plusieurs années, relativement aux parts de la SCI et aux immeubles, le fait qu'il n'a pas précisé la répartition des parts de la SCI entre sa soeur et lui-même, et le fait qu'il a indiqué les hypothèques prises sur les immeubles ; qu'en statuant par ces considérations inaptes à caractériser des anomalies apparentes imposant à la banque de mettre en doute la véracité des informations déclarées par la caution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 341-4 devenu L. 332-1 et L. 343-4 du code de la consommation. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 :

4. Il résulte de ce texte qu'il incombe à la caution de rapporter la preuve de la disproportion manifeste de son engagement par rapport à ses biens et revenus à la date de sa souscription et que le créancier n'a pas, en l'absence d'anomalies apparentes, à vérifier l'exactitude et l'exhaustivité des renseignements transmis.

5. Pour juger que la banque ne pouvait se prévaloir de l'engagement de caution de M. [U] d'un montant de 201 100 euros, l'arrêt constate que la fiche de solvabilité signée le 6 décembre 2011 mentionne, d'une part, des revenus à hauteur de 11 388 euros par an et la charge d'une échéance de prêt de 960 euros, d'autre part, la propriété de parts de la SCI [U] évaluées à 543 500 euros, valant 187 500 euros en 2008, grevées d'une hypothèque de 165 155 euros, d'un premier appartement évalué à 164 000 euros, valant 60 948 euros en 2003, grevé d'une hypothèque de 103 000 euros, d'un deuxième évalué à 90 000 euros, valant 43 959 euros en 2002, grevé d'une hypothèque de 36 451 euros et d'une résidence principale évaluée à 165 400 euros, grevée d'une hypothèque du montant de sa valeur. Il en déduit que ces écarts de valeurs et les hypothèques grevant ces biens sont autant d'anomalies qui auraient dû conduire la banque à s'interroger sur la portée des engagements.

6. En se déterminant ainsi, sans caractériser l'existence d'anomalies apparentes imposant à la banque de vérifier la véracité les informations déclarées par M. [U], la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

Sur le second moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

7. La banque reproche à l'arrêt de juger qu'elle ne peut se prévaloir du cautionnement de Mme [U], alors « que pour décider que la fiche patrimoniale de Mme [U] comportait des anomalies apparentes relatives aux biens déclarés et que par suite son cautionnement était disproportionné au regard de ses seuls revenus, les premiers juges ont retenu que les parts de la SCI étaient évaluées à 187 500 euros en 2008 et à 543 000 euros en 2011 et que leur ventilation entre Mme [U] et son frère n'était pas précisée ; qu'en statuant par ces motifs impropres à caractériser des anomalies apparentes imposant à la banque de mettre en doute la véracité des informations déclarées par la caution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 341-4 devenu L. 332-1 et L. 343-4 du code de la consommation. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 :

8. Il résulte de ce texte qu'il incombe à la caution de rapporter la preuve de la disproportion manifeste de son engagement par rapport à ses biens et revenus à la date de sa souscription et que le créancier n'a pas, en l'absence d'anomalies apparentes, à vérifier l'exactitude et l'exhaustivité des renseignements transmis.

9. Pour juger que la banque ne pouvait se prévaloir de l'engagement de caution de Mme [U] d'un montant de 68 900 euros, l'arrêt énonce, par motifs adoptés, que la fiche de solvabilité signée le 29 septembre 2010 fait état de salaires annuels de 15 600 euros en 2010 neutralisés par des échéances de prêt d'environ 16 860 euros, augmentés de revenus fonciers annuels 24 000 euros et de la propriété d'un nombre indéterminé de parts de la SCI [U], dont la valeur a brusquement augmenté entre 2008 et le 29 septembre 2010. Il retient que ces écarts de valeurs et les hypothèques grevant ces biens, sont autant d'anomalies qui auraient dû conduire la banque à s'interroger sur la portée des engagements.

10. En se déterminant ainsi, sans caractériser l'existence d'anomalies apparentes imposant à la banque de vérifier les informations déclarées par Mme [U], la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

Et sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

11. La banque fait grief à l'arrêt de juger qu'elle ne peut se prévaloir du cautionnement de M. [U], alors « que dès lors que la caution est mariée sous le régime de la communauté au jour du cautionnement, la proportionnalité de celui-ci doit s'apprécier au regard des biens et revenus communs, peu important que le régime matrimonial soit ou non indiqué dans la fiche de renseignements remplie par la caution ou porté ou non à la connaissance du créancier d'une autre façon ; qu'en refusant de prendre en compte les revenus de Mme [U] dans l'appréciation de la proportionnalité du cautionnement de son mari au motif que la fiche patrimoniale de ce dernier ne mentionnait pas le régime matrimonial des époux ( à savoir la communauté ), qui n'avait pas été porté à la connaissance de la Caisse d'épargne, quand ces circonstances n'autorisaient nullement à exclure de tenir compte du régime matrimonial existant au jour du cautionnement, la cour d'appel a violé l'article L. 341-4 devenu L. 332-1 et L. 343-4 du code de la consommation. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 :

12. Il résulte de ce texte que la disproportion manifeste de l'engagement de la caution commune en biens s'apprécie par rapport à ses biens propres et aux biens communs.

13. Pour juger que la banque ne pouvait se prévaloir de l'engagement de M. [U], marié sous le régime de la communauté, l'arrêt retient qu'il n'y a pas lieu de prendre en considération les revenus de l'épouse, dès lors que le régime matrimonial n'a pas été porté à la connaissance de la banque et qu'il n'est pas mentionné sur la fiche de solvabilité.

14. En statuant ainsi, alors que les biens communs, incluant les revenus de l'épouse, devaient être pris en compte dans l'appréciation de la disproportion invoquée, peu important que le régime matrimonial n'ait pas été indiqué dans la fiche de renseignements remplie par M. [U], la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne M. et Mme [U] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme [U] et les condamne à payer à la société Caisse d'épargne Grand Est Europe la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt octobre deux mille vingt et un.

Le conseiller referendaire rapporteur le president

Le greffier de chambre

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la caisse d'épargne Grand Est Europe

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a dit que la Caisse d'épargne ne pouvait se prévaloir du cautionnement de monsieur [U] ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'« il convient tout d'abord de rappeler que, si comme le soutient la banque, la proportionnalité de l'engagement s'apprécie au moment de la souscription de ce dernier, il n'en demeure pas moins que c'est en date du 27 juillet 2011 que M. [U] s'est porté caution à hauteur de 201 100 euros de l'acte de prêt souscrit le même jour. Dans ces conditions, la banque ne saurait valablement s'appuyer sur la situation de revenu moyenne de M. [U] telle qu'il l'a évoquée le 22 avril 2016 devant les premiers juges soit 1 400 euros mensuels. C'est donc à juste titre que le premier juge a retenu les revenus, alors seuls connus, et en tout cas seuls pertinents, figurant sur la fiche de solvabilité, signée le 6 décembre 2011 par M. [U] qui mentionne des revenus à hauteur de 11 388 euros par an, soit un montant mensuel 943 euros par mois. M. [U] justifiant par ailleurs avoir à sa charge une échéance de prêt de 960 euros. M. [U], a également indiqué dans la fiche patrimoniale remise à la banque à l'appui de son cautionnement être propriétaire des parts de la SCI [U] évaluées à 543 500 euros, d'un appartement duplex situé à [Localité 1] évalué à 164 000 Euros, d'un appartement F2 situé à [Localité 2] évalué à 90.000 euros et d'un appartement situé [Adresse 4] ( sa résidence principale ). Concernant les parts de la SCI [U] évaluées à 543 500 euros en 2011, dont la valeur en 2008 était de 187 500 euros, il apparaît que ces parts étaient grevées d'une hypothèque de 165.155 euros, ce qui exclut que les parts sociales puissent être valorisées à hauteur de leur montant facial. L'appartement duplex situé à [Localité 1] est lui évalué à 164.000 euros en 2011 alors qu'il valait 60 948 euros en 2003, sur lequel pèse une hypothèse de 103.000 euros. L'appartement F2 situé à [Localité 2] évalué à 90.000 euros en 2011 n'en valait en 2002 que 43.959 euros, sur lequel subsiste une hypothèque de 36.451 euros. Enfin s'agissant de l'appartement situé [Adresse 4] ( sa résidence principale) évalué en 2011 à 165.400 euros celui-ci est grevé d'une hypothèque du montant de sa valeur. Sauf anomalie apparente, la banque peut considérer sur la base de déclarations mensongères que le cautionnement ne présente aucun risque pour son co-contractant et n'engagera donc pas sa responsabilité contractuelle. Cependant ces écarts de valeurs et les hypothèques qui grevaient ces biens sont autant d'anomalies qui auraient dû conduire la banque à s'interroger sur la portée de l'engagement de M. [U]. C'est également à bon droit que les juges en première instance ont considéré qu'il n'y avait pas lieu de prendre en considération les revenus de l'épouse, Mme [U] au motif que le consentement à l'engagement de cautionnement de son mari permet uniquement à la banque d'exécuter un titre obtenu contre le seul conjoint caution sur les biens de la communauté, tant qu'ils ne sont pas devenus des acquêts, d'autant plus qu'en l'espèce le régime matrimonial n'avait pas été porté à la connaissance de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Alsace et qu'il n'était pas mentionné sur la fiche de solvabilité. La banque qui ne disposait que de la fiche de solvabilité a néanmoins accepté l'engagement de caution alors qu'il apparaissait manifestement disproportionné au regard des revenus déclarés sur cette fiche. A hauteur d'appel la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Alsace ne démontre pas plus qu'elle ne l'avait fait devant les premiers juges que les revenus et le patrimoine de la caution à la date où elle a été appelée auraient évolué de telle sorte qu'elle puisse faire face à son engagement. En conséquence, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Alsace ne peut se prévaloir de l'engagement de caution de M. [Z] [U] qui en sera déchargé dans son intégralité, conformément aux dispositions de l'article L 341-4 du code de la consommation » ;

ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QUE « les défendeurs, qui n'ont produit aucune pièce compte tenu du ‘ dépôt de mandat " de leur avocat excipent principalement des dispositions de l'article L. 341-4 du code de la consommation selon lesquelles un créancier -professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution au moment où celle-ci est appelée ne lui permette de faire face à ses obligations. Comme le souligne à juste titre la Caisse d'Epargne d'Alsace, c'est à la caution qui excipe de ce texte de faire la preuve de la disproportion manifeste qu'elle invoque, lors de la souscription de rengagement. Par contre, et contrairement à ce qui a été prétendu par la demanderesse, c'est bien à l'établissement financier prêteur qu'il appartient de justifier de ce que la caution dont l'engagement était disproportionné au moment où le cautionnement a été souscrit, serait revenue à meilleure fortune, de sorte son patrimoine lui permettrait de faire face audit engagement au moment où la caution est appelée. Au cas d'espèce, et selon la fiche de solvabilité signée le 6 décembre 2011 par M. [U] quelques mois après l'engagement de cautionnement litigieux, les revenus du défendeur se limitaient à 11 388 euros par an, c'est-à-dire moins de 1000 euros par mois. Il n'y a pas lieu de rajouter à ces revenus ceux perçus par son épouse, même si celle-ci a consenti à l'engagement de cautionnement accordé par son mari, ce consentement permet uniquement au banquier prêteur d'exécuter un titre obtenu contre le seul conjoint-caution sur les biens de la communauté mais non sur les revenus de l'époux consentant au cautionnement, qui n'entrent pas en communauté, tant qu'ils ne sont pas devenus des acquêts. De surcroît, et au cas d'espèce la nature du contrat de mariage régissant les relations entre les époux [U] n'est nullement précisée les cases en cause ayant laissé en blanc, de sorte qu'il pourrait tout aussi bien s'agir d'un régime séparatiste. Par ailleurs, si le défendeur a fait état de la propriété d'un duplex situé à [Localité 1] celui-ci est évalué par ses soins à une valeur d'origine de 60.950 euros environ en 2003 pour une valeur en 2011 non explicitée de 164.000 euros grevé en tout état de cause d'une hypothèque d'un montant de 103.000 euros. De même, il est fait état d'un appartement F2 à [Localité 2] d'une valeur d'origine de 43.959 euros en 2002 qui serait passée à 90 000 euros sans explication, et en tout état de cause grevé d'une hypothèque d'environ 43.950 euros. La résidence principale de [Localité 2] acquise en 2011 est évaluée à 165.400 euros grevée d'une hypothèque d'un montant correspondant aux frais immobiliers destiné à l'acquérir avec des échéances d'un montant annuel de 11.520 euros, à compter de juillet 2012, ce qui signifie que ce bien immobilier doit être considéré au moment de sa souscription, comme étant d'une valeur nette nulle. Enfin, il est fait d'une SCI [U] propriétaire de plusieurs appartements à [Adresse 2] d'une valeur initiale en 2008 de 87.500 euros grevés d'une hypothèque d'un montant 65 155 euros dont les parts auraient atteint une valeur en 2011 de 543 500 euros sans aucune explication quant à cette considérable augmentation de valeur en trois ans n'ait été fournie. Cette anomalie flagrante aurait dû conduire le banquier- prêteur à se renseigner plus amplement, ce qui n'a nullement été le cas, alors que l'engagement de cautionnement litigieux contracté le 27 juillet 2011 est manifestement disproportionné par rapport aux biens et revenus de cette année 2011. Par ailleurs, la demanderesse, qui avait la charge de preuve, comme indiqué précédemment, ne justifie nullement que le patrimoine de cette caution à la date du 27 mai 2013, date à laquelle elle a été mise en demeure, et donc " appelée ", lui permettait de faire face son engagement de cautionnement solidaire précité » ;

ALORS, premièrement, QUE pour considérer que la fiche patrimoniale de monsieur [U] comportait des anomalies apparentes relatives aux biens déclarés et que par suite son cautionnement était disproportionné au regard de ses seuls revenus, les juges du fond ont retenu le fait que l'intéressé a déclaré des plus-values, sur une intervalle de plusieurs années, relativement aux parts de la SCI et aux immeubles, le fait qu'il n'a pas précisé la répartition des parts de la SCI entre sa soeur et lui-même, et le fait qu'il a indiqué les hypothèques prises sur les immeubles ; qu'en statuant par ces considérations inaptes à caractériser des anomalies apparentes imposant à la Caisse d'épargne de mettre en doute la véracité des informations déclarées par la caution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 341-4 devenu L. 332-1 et L. 343-4 du code de la consommation ;

ALORS, deuxièmement, QUE dès lors que la caution est mariée sous le régime de la communauté au jour du cautionnement, la proportionnalité de celui-ci doit s'apprécier au regard des biens et revenus communs, peu important que le régime matrimonial soit ou non indiqué dans la fiche de renseignements remplie par la caution ou porté ou non à la connaissance du créancier d'une autre façon ; qu'en refusant de prendre en compte les revenus de madame [U] dans l'appréciation de la proportionnalité du cautionnement de son mari au motif que la fiche patrimoniale de ce dernier ne mentionnait pas le régime matrimonial des époux ( à savoir la communauté ), qui n'avait pas été porté à la connaissance de la Caisse d'épargne, quand ces circonstances n'autorisaient nullement à exclure de tenir compte du régime matrimonial existant au jour du cautionnement. la cour d'appel a violé l'article L. 341-4 devenu L. 332-1 et L. 343-4 du code de la consommation ;

ALORS, troisièmement, QU'en ne s'expliquant pas, comme elle y était invitée ( conclusions de la Caisse d'épargne, p. 6 ), sur le point de savoir s'il n'eût pas été dénué de sens d'obtenir le consentement de madame [U] au cautionnement de son époux pour un régime matrimonial séparatiste et si cela n'établissait dès lors pas le caractère communautaire du régime matrimonial, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 341-4 devenu L. 332-1 et L. 343-4 du code de la consommation ;

ALORS, quatrièmement, QUE la proportionnalité du cautionnement d'un époux marié sous le régime de la communauté s'apprécie au regard des biens et revenus communs, ce qui inclut les revenus des deux époux, que le conjoint ait ou non donné son accord au cautionnement ; qu'en excluant les salaires de madame [U] de l'appréciation de la proportionnalité du cautionnement de son mari au prétexte que son consentement à ce cautionnement ne permettait à la banque d'exécuter un titre obtenu contre le conjoint caution que sur les biens communs, dans lesquels n'entraient pas les salaires de l'épouse tant qu'ils n'étaient pas devenus des acquêts, la cour d'appel a violé l'article L. 341-4 devenu L. 343-1 et L. 343-4 du code de la consommation.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a dit que la Caisse d'épargne ne pouvait se prévaloir du cautionnement de madame [U] ;

AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QUE « pour ce qui concerne Mme [G] [U] celle-ci a fait état de salaires d'environ 15.600 euros par an au titre de l'année 2010 dans la fiche de solvabilité signée le 29 septembre 2010 " neutralisés " par des échéances de prêt d'environ 16.860 euros, augmentés de revenus fonciers d'environ 24.000 euros soit 2000 € par mois. Pour ce qui concerne.la propriété de parts d'un nombre indéterminé de la SCI [U] les mêmes observations s'imposent quant à la brusque augmentation de valeur des parts de cette SCI entre 2008 et le 29 septembre 2010 qui est passée de 187.500 euros à 543.100 euros, sans précision quant à la détermination de la ventilation des parts entre la soeur et le frère. Cette anomalie aurait dû conduire le prêteur à effectuer de plus amples investigations, alors que l'engagement de cautionnement de Mme [U] pour un montant de 68.900 euros est manifestement disproportionné à ses revenus nets qui auraient été d'environ 2000 euros par mois en 2011 pour un patrimoine dont la consistance réelle est inconnue, compte tenu de ce qui a été indiqué précédemment pour ce qui concerne la valeur des parts de la SCI ci-dessus mentionné. La demanderesse ne justifie pas, alors qu'elle avait la charge de la preuve, de ce que l'état du patrimoine de Mme [U] lui permettrait de faire face à son engagement de cautionnement solidaire à la date où elle a été appelée par mise en demeure du 27 mai 2013 » ;

ALORS QUE pour décider que la fiche patrimoniale de madame [U] comportait des anomalies apparentes relatives aux biens déclarés et que par suite son cautionnement était disproportionné au regard de ses seuls revenus, les premiers juges ont retenu que les parts de la SCI étaient évaluées à 187 500 € en 2008 et à 543 000 € en 2011 et que leur ventilation entre madame [U] et son frère n'était pas précisée ; qu'en statuant par ces motifs impropres à caractériser des anomalies apparentes imposant à la Caisse d'épargne de mettre en doute la véracité des informations déclarées par la caution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 341-4 devenu L. 332-1 et L. 343-4 du code de la consommation.

Le greffier de chambre


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 19-20909
Date de la décision : 20/10/2021
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 09 mai 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 20 oct. 2021, pourvoi n°19-20909


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Buk Lament-Robillot, SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.20909
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