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07/07/2021 | FRANCE | N°21-70009

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 07 juillet 2021, 21-70009


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Demande d'avis
n°F 21-70.009

Juridiction : le tribunal de commerce de Bastia

SF1

Avis du 7 juillet 2021

n° 15011 D

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

COUR DE CASSATION
_________________________

Chambre commerciale, financière et économique

Vu les articles L. 441-1 et suivants du code de l'organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile :

La chambre commerciale, financière et é

conomique de la Cour de cassation a rendu le présent avis sur le rapport de Mme Vaissette, conseiller, et les observations écrite...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Demande d'avis
n°F 21-70.009

Juridiction : le tribunal de commerce de Bastia

SF1

Avis du 7 juillet 2021

n° 15011 D

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

COUR DE CASSATION
_________________________

Chambre commerciale, financière et économique

Vu les articles L. 441-1 et suivants du code de l'organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile :

La chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation a rendu le présent avis sur le rapport de Mme Vaissette, conseiller, et les observations écrites et orales de Mme Henry, avocat général.

La SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin a déposé des observations écrites pour la société BRMJ. La SCP Baraduc, Duhamel et Rameix a déposé des observations pour la société MJ Synergie, prise en qualité de liquidateur judiciaire de M. [E]. La SCP Piwnica et Molinié a déposé des observations écrites pour le Conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires, partie intervenante.

Énoncé de la demande d'avis

1. La Cour de cassation a reçu, le 30 avril 2021, une demande d'avis formée par une ordonnance du 28 avril 2021 du président du tribunal de commerce de Bastia, saisi d'une requête demandant la fixation de ses émoluments, émanant de la société BRMJ, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société VE Constructions.

2. La demande est ainsi formulée :

« 1) L'article R. 663-20 du code de commerce résultant du décret n° 85-1390 du 27 décembre 1985 modifié par le décret 2006-1709 du 23/12/2006 s'applique-t-il en cas de remplacement de liquidateurs successifs dans une même procédure ?

2) La majoration de 30 % des émoluments des liquidateurs prévue à l'article R. 663-35 du code de commerce résultant du décret n° 85-1390 du 27 décembre 1985 modifié par le décret 2006-1709 du 23/12/2006 s'applique-t-elle en cas de remplacement de liquidateurs successifs dans une même procédure ?

3) Les émoluments fixés par l'article R. 663-29 du code de commerce issu du décret n° 85-1390 du 27 décembre 1985 modifié par le décret 2006-1709 du 23/12/2006 se calculent-ils par liquidateur successivement désignés ou pour la totalité des actifs réalisés au cours de la procédure, quel que soit le liquidateur désigné lors de la réalisation de l'actif ?

4) La demande de fixation définitive des émoluments formée par le liquidateur ayant été désigné en cours de procédure en remplacement du liquidateur initialement désigné doit-elle mentionner la totalité des émoluments déjà perçus par le premier liquidateur ou se limiter aux émoluments dont le dernier liquidateur demande la fixation ?

5) En cas de remplacement de l'un des mandataires de justice en cours de procédure, la demande de fixation définitive des émoluments doit-elle préciser le partage des émoluments entre les mandataires de justice successivement désignés pour la même mission ? Le cas échéant, l'accord du mandataire de justice initialement désigné doit-il être justifié dans la demande de fixation définitive des émoluments ? »

Examen de la demande d'avis

Sur les première et deuxième questions

3. Les questions de droit posées sont nouvelles, présentent une difficulté sérieuse et sont susceptibles de se poser dans de nombreux litiges.

4. Elles sont donc recevables.

5. L'article R. 663-20 du code de commerce, dans sa rédaction issue du décret du 23 décembre 2006, objet de la question, dispose qu'en cas de désignation de plusieurs mandataires judiciaires ou de plusieurs liquidateurs, chacun d'entre eux perçoit le droit fixe prévu à l'article R. 663-18 selon les modalités, le cas échéant, prévues par le deuxième alinéa de l'article R. 663-18.

6. L'article R. 663-35, alinéa 1, du même code dans la même rédaction, prévoit que lorsque plusieurs administrateurs judiciaires, commissaires à l'exécution du plan, mandataires judiciaires ou liquidateurs sont désignés dans une même procédure, chacun des émoluments auxquels cette procédure donne droit, à l'exception du droit fixe prévu à l'article R. 663-18, est majoré de 30 %. Chacun des mandataires de justice désignés en perçoit une part convenue entre eux. A défaut d'accord, le président du tribunal ou son délégué détermine la part de la rémunération qui revient à chacun après avoir entendu le débiteur et recueilli l'avis du ministère public.

7. La désignation de plusieurs liquidateurs, visée par les textes précités, se réfère à la désignation conjointe et concomitante de deux liquidateurs pour exercer la même mission à l'égard d'un débiteur en liquidation judiciaire, ou à la désignation, en cours de procédure, d'un second liquidateur chargé d'exercer le mandat conjointement avec celui initialement nommé, telle que visée par l'article L. 641-1 II du code de commerce.

Il en résulte que, s'agissant d'une liquidation judiciaire ouverte ou prononcée par un jugement ayant désigné un seul liquidateur, le professionnel désigné pour remplacer celui-ci n'exerce pas son mandat conjointement avec le confrère initialement nommé et ne peut prétendre, ni au droit fixe visé par l'article R. 663-20 du code de commerce, dans sa rédaction issue du décret du 23 décembre 2006, ni à la majoration de 30 % prévue par l'article R. 663-35, alinéa 1, du même code dans la même rédaction.

Sur la troisième question

8. L'article R. 663-29 du code de commerce qui débute par les termes « Il est alloué au liquidateur » avant d'énumérer les droits proportionnels fondés et calculés sur les cessions et réalisations d'actifs, les encaissements et recouvrements de créances, dans les conditions qu'il détermine, ne prévoit pas de régime distinct en cas de succession de plusieurs liquidateurs pour l'exercice du même mandat. Les émoluments prévus par ce texte sont calculés, pour la durée de la procédure, sur la totalité du montant des cessions d'actifs mobiliers corporels et sur la totalité du montant des créances encaissées ou recouvrées, sous déduction des rémunérations versées à des intervenants autres que le liquidateur ayant participé aux opérations de cession ou de recouvrement, ainsi que sur le prix de réalisation des actifs immobiliers et mobiliers incorporels.

Il en résulte que les droits proportionnels ainsi prévus ne sont pas attachés à la personne d'un liquidateur et que la rémunération du professionnel n'étant en principe arrêtée qu'à la fin de la procédure, il incombe au dernier liquidateur en fonctions, lorsqu'il présente son rapport de clôture et demande l'arrêté des rémunérations dues au titre de la procédure de liquidation judiciaire, conformément à l'article R. 663-34 du code de commerce, de récapituler l'ensemble des cessions et réalisations d'actifs, encaissements et recouvrements de créances, effectués par chacun des liquidateurs ayant pu se succéder dans l'exercice du mandat, qui constituent l'assiette des émoluments objets de la demande d'avis.

Sur la quatrième question

9. Selon l'article R. 643-19, alinéa 1, du code de commerce, dans les deux mois qui suivent l'achèvement de sa mission, le liquidateur dépose un compte-rendu de fin de mission dans les conditions prévues par les articles R. 626-39 et R. 626-40. L'article R. 626-41 est applicable.
L'article R. 626-39, prévoit, en son dernier alinéa, que le juge-commissaire chargé d'approuver le compte-rendu de fin de mission peut demander au mandataire de justice de lui produire tout justificatif.
L'article R. 626-40 , dans sa version issue du décret du 23 décembre 2006, précise que le compte rendu de fin de mission comporte :
1° La reddition des comptes telle qu'elle ressort de l'édition analytique du mandat dans la comptabilité spéciale de l'administrateur ou du mandataire judiciaire. Le classement analytique distingue, par nature, les opérations de recettes et dépenses ;
2° Le détail des débours et des émoluments perçus tels qu'ils ont été arrêtés, avec la référence au tarif prévu par les textes ;
3° Les rétributions que le mandataire de justice a prélevées sur sa rémunération au profit d'un intervenant extérieur au titre du mandat, en application des articles L. 811-1 et L. 812-1 ;
4° La rémunération des experts et des officiers publics désignés par le tribunal en application du dernier alinéa de l'article L. 621-4 ainsi que des techniciens désignés par le juge-commissaire en application du deuxième alinéa de l'article L. 621-9.
Et l'article R. 663-34 du code de commerce prévoit, dans ses rédactions successives, que les rémunérations dues au titre des procédures collectives sont arrêtées avant la clôture de la procédure et que le président du tribunal ou son délégué statue au vu d'un compte détaillé.
Enfin, les règles professionnelles édictées par le Conseil national des administrateurs et mandataires judiciaires, telles qu'approuvées par l'arrêté du 18 juillet 2018, prescrivent au professionnel d'appliquer le tarif avec transparence et loyauté à l'égard de la juridiction et de joindre à sa requête en fixation de ses émoluments tout élément justifiant la position et les bases retenues.

10. La quatrième question ne présente pas de difficulté sérieuse dès lors que l'ensemble des dispositions précitées imposent au liquidateur, qui présente une requête, après l'achèvement de sa mission, afin de voir arrêter ses émoluments, de fournir au président du tribunal le compte détaillé de tous les débours et des émoluments perçus au cours de la procédure, tels qu'ils ont été arrêtés le cas échéant en faveur du liquidateur l'ayant précédé, ou au profit de ce dernier en cas d'acomptes autorisés.

11. Il n'y a donc pas lieu à avis sur cette question.

Sur la cinquième question

12. Formulée sans énoncer une question de droit précise de nature à commander l'issue du litige, ni viser le ou les textes à interpréter, la demande d'avis formulée par cette question est irrecevable.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

DECLARE irrecevable la cinquième question ;

EST D'AVIS QUE lorsqu'un mandataire de justice est nommé liquidateur en remplacement d'un confrère précédemment désigné en qualité de liquidateur unique lors de l'ouverture ou du prononcé d'une liquidation judiciaire, il ne peut prétendre percevoir le droit fixe visé par l'article R. 663-20 du code de commerce, dans sa rédaction issue du décret du 23 décembre 2006, ni la majoration de 30 % des émoluments prévue par l'article R. 663-35, alinéa 1, du même code dans la même rédaction, ces rémunérations étant exclusivement prévues dans l'hypothèse d'une désignation conjointe de deux liquidateurs pour la même mission ;

EST D'AVIS que les émoluments prévus par l'article R. 663-29 du code de commerce, dans sa rédaction issue du décret du 23 décembre 2006, sont calculés, aux conditions prévues par ce texte, en fonction du montant de la totalité des actifs cédés ou réalisés et de la totalité des créances encaissées ou recouvrées au cours de la liquidation judiciaire ;

DIT N'Y AVOIR LIEU A AVIS pour le surplus.

Fait à Paris et mis à disposition au greffe de la Cour le 7 juillet 2021, après examen de la demande d'avis lors de la séance du 29 juin 2021 où étaient présents, conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire : Mme Mouillard, président, Mme Vaissette, conseiller rapporteur, M. Remery, conseiller doyen, Mmes Vallansan, Graff-Daudret, Belaval, M. Riffaud, Mme Fèvre, conseillers, M. Guerlot, Mme Barbot, MM. Blanc et Boutié, conseillers référendaires, Mme Henry, avocat général, Mme Fornarelli, greffier de chambre ;

Le présent avis est signé par le conseiller rapporteur, le président et le greffier de chambre.

Le conseiller rapporteurLe président

Le greffier de chambre


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 21-70009
Date de la décision : 07/07/2021
Sens de l'arrêt : Avis sur saisine
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Bastia, 28 avril 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 07 jui. 2021, pourvoi n°21-70009


Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:21.70009
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