LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° Q 20-81.513 F-D
N° 00896
CK
30 JUIN 2021
CASSATION
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 30 JUIN 2021
M. [T] [Z] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Bourges, chambre correctionnelle, en date du 30 janvier 2020, qui, pour agressions sexuelles aggravées, l'a condamné à cinq ans d'emprisonnement, cinq ans de suivi socio-judiciaire, dix ans d'interdiction professionnelle et cinq ans de privation des droits civiques, civils et de famille.
Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.
Sur le rapport de Mme Carbonaro, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de M. [T] [Z], les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de Mme [R] [Z], et les conclusions de Mme Bellone, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 9 juin 2021 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Carbonaro, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. M. [Z] a été poursuivi devant le tribunal correctionnel, du chef d'agressions sexuelles aggravées, suite à la plainte de sa fille, Mme [R] [Z], à son encontre.
3. Les juges du premier degré l'ont déclaré coupable de ces faits et l'ont condamné à une peine de cinq ans d'emprisonnement dont un an avec sursis et mise à l'épreuve devenu sursis probatoire, dix ans d'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec les mineurs et cinq ans de privation de tous ses droits civiques, civils et de famille. Statuant sur les intérêts civils, le tribunal correctionnel a déclaré la constitution de partie civile recevable, M. [Z] responsable du préjudice subi par sa fille, l'a condamné à lui payer une indemnité provisionnelle et a ordonné une expertise.
4. M. [Z] a relevé appel de cette décision en ses seules dispositions pénales et le ministère public a interjeté un appel incident.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a reçu l'intervention de Mme [Z] en qualité de partie civile et a confirmé le jugement déféré concernant la culpabilité de M. [Z] alors :
« 1°/ que la victime partie civile non appelante n'est plus partie à l'instance d'appel et ne peut être entendue en cette qualité ; qu'en recevant l'intervention de Mme [Z] en qualité de partie civile, aux motifs erronés que l'action civile procédant des faits dont M. [Z] a été déclaré coupable en première instance est toujours en cours devant la première juridiction qui, par deux fois, avant de statuer sur la réparation du préjudice de Mme [Z], a ordonné une expertise de cette dernière, lorsque, l'action publique ayant été seule remise en cause par l'appel sur l'action publique du prévenu et l'appel incident du ministère public, la cour d'appel ne pouvait entendre en qualité de partie civile la victime qui n'a pas relevé appel de la décision, la cour d'appel a méconnu les articles 509, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
2°/ qu'en acceptant d'entendre la victime non appelante, la plaidoirie de son avocat et en l'autorisant à déposer des conclusions, lorsque Mme [Z],
victime non appelante, n'avait aucune qualité pour intervenir en cause d'appel, la cour d'appel, qui a ainsi permis l'intervention d'un tiers à la procédure qui, en soutenant l'action civile, a corroboré l'action publique, a porté atteinte à l'exercice des droits de la défense et à l'égalité des armes, en violation des articles 6, § 1, et 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 509 et 513, alinéa 3, du code de procédure pénale :
6. Aux termes du premier de ces textes, l'affaire est dévolue à la cour d'appel dans la limite fixée par l'acte d'appel et la qualité de l'appelant.
7. Il se déduit du second que seuls le ministère public et les parties en cause ont la parole devant ladite cour.
8. Pour entendre à l'audience la partie civile et son avocat, l'arrêt attaqué énonce qu'il convient en l'espèce de relever que l'action civile procédant des faits dont M. [Z] a été déclaré coupable en première instance est toujours en cours devant la première juridiction qui, par deux fois, avant de statuer sur la réparation du préjudice de Mme [Z], a ordonné une expertise de cette dernière de sorte que Mme [Z], qui continue d'avoir la qualité de partie civile devant le tribunal correctionnel, est donc recevable à intervenir en cette qualité devant la cour d'appel.
9. En se déterminant ainsi, alors qu'une partie civile qui n'a pas fait appel, n'est plus partie devant la cour d'appel et ne peut intervenir aux débats sur le seul appel du ministère public, qui ne remet pas en cause les intérêts civils, et sur l'appel du condamné limité expressément à l'action publique, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés.
10. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Bourges, en date du 30 janvier 2020, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Bourges, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Bourges et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le trente juin deux mille vingt et un.