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30/06/2021 | FRANCE | N°19-21664

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 30 juin 2021, 19-21664


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 juin 2021

Rejet

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 576 F-D

Pourvoi n° R 19-21.664

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 30 JUIN 2021

La société

Hybrid Motors Group, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], et domicilié dans la procédure [Adresse 2], a formé le pourvoi...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 juin 2021

Rejet

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 576 F-D

Pourvoi n° R 19-21.664

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 30 JUIN 2021

La société Hybrid Motors Group, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], et domicilié dans la procédure [Adresse 2], a formé le pourvoi n° R 19-21.664 contre l'arrêt rendu le 13 juin 2019 par la cour d'appel de Lyon (3e chambre A), dans le litige l'opposant à la société Caisse d'épargne et de prévoyance de Rhône-Alpes, société coopérative à forme anonyme, directoire et conseil de surveillance, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Fevre, conseiller, les observations de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de la société Hybrid Motors Group, de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Caisse d'épargne et de prévoyance de Rhône-Alpes, après débats en l'audience publique du 18 mai 2021 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Fevre, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 13 juin 2019), le 16 février 2016 à 16h25, la société Hybrid Motors Group (la société Hybrid Motors), a adressé à la Caisse d'épargne et de prévoyance Rhône-Alpes (la banque) une demande de virement international d'un montant de 8 650 USD au profit de la société All Cargo en paiement de marchandises destinées à partir dans deux conteneurs. La banque a traité cette demande à 16h54, mais a commis une erreur sur l'identité du bénéficiaire, en indiquant celle du donneur d'ordre, ce qui a entraîné le rejet du paiement.

2. Le 20 février 2016, la banque a établi, à ses frais, un second ordre de virement à l'ordre de la société All Cargo, qui a reçu les fonds le 24 février 2016 à 4 heures, heure locale américaine.

3. Se prévalant de l'erreur commise par la banque lors du traitement de l'ordre de virement du 16 février 2016, la société Hybrid Motors l'a assignée en responsabilité contractuelle.

Sur le moyen

Enoncé du moyen

4. La société Hybrid Motors fait grief à l'arrêt attaqué de rejeter ses demandes, alors :

« 1°/ qu'une modification du contrat peut résulter d'un accord tacite se déduisant d'une pratique régulièrement suivie et librement acceptée par les parties ; qu'en partant, au contraire, du principe que le contrat ne peut être modifié "que par le consentement exprès des parties" pour retenir que le traitement rapide de trois précédentes demandes de virements n'a pu créer, à la charge de la banque, une obligation contractuelle non prévue par le contrat, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

2°/ qu'en toute hypothèse en indiquant ensuite que la banque "a traité la demande qui lui a été adressée le 16 février 2016 par courriel à 16h25 à 16h54, soit dans un délai de trente minutes", tout en constatant que, lors de ce traitement, cette banque a commis une erreur sur le destinataire du virement et qu'après le refus du virement par la banque destinataire, la banque a dû procéder à un second virement le 20 février à 8h52, "soit un délai de traitement de quatre jours", la cour d'appel a statué par des motifs impropres à caractériser que la banque aurait traité rapidement la demande de virement de la société Hybrid Motors Group, en violation de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

3°/ que la banque réceptionnaire d'un ordre de virement commet une faute en mentionnant un bénéficiaire différent de celui désigné par son client ; qu'en refusant de retenir une faute de la part de la banque, tout en constatant qu'alors même que la société Hybrid Motors Group lui avait adressé un ordre de virement au profit de la société All Cargo, la Caisse d'épargne avait indiqué comme bénéficiaire la société Hybrid Motors, ce qui avait retardé l'exécution de l'ordre de virement effectué par cette dernière société, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

5. Après avoir rappelé que l'article L. 311-21 du code monétaire et financier n'impose aucun délai de traitement des virements internationaux hors zone économique européenne et relevé que le contrat liant les parties n'en prévoit aucun, puis constaté que l'ordre de virement litigieux avait été émis le 20 février 2016 à 8h52 dans un délai de quatre jours à compter de la demande de sa cliente et que son bénéficiaire avait perçu les fonds quelques jours après, la cour d'appel a retenu que la banque avait traité l'ordre dans un délai raisonnable en dépit du rejet d'un premier ordre, émis le 16 février 2016, comportant une erreur sur le nom du bénéficiaire du paiement, et qu'elle n'avait pas manqué à ses obligations contractuelles.

6. Par ces constatations et appréciations souveraines, et abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les première et deuxième branches, la cour d'appel a légalement justifié sa décision.

7. Le moyen, inopérant en ses premières et deuxième branches, est mal fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Hybrid Motors Group aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Hybrid Motors Group et la condamne à payer à la société Caisse d'épargne et de prévoyance Rhône-Alpes la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente juin deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat aux Conseils, pour la société Hybrid Motors Group.

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la société Hybrid Motors Group de ses prétentions et de l'avoir condamnée à payer la Caisse d'épargne et de prévoyance Rhône-Alpes une indemnité de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

AUX MOTIFS QUE « la convention de compte courant liant les parties datant du 26 février 2014 est soumise aux dispositions du code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ce qui ne permet pas aux parties d'invoquer les nouvelles dispositions du code civil ; qu'au soutien de son appel, la Caisse d'épargne fait grief aux premiers juges d'avoir, par une motivation erronée en droit et en fait, jugé qu'elle n'avait pas respecté le contrat la liant à la société Hybrid Motors group en exécutant avec retard le virement au motif qu'il s'était formé un usage qui fonctionnait sans remarques de part et d'autre, tant sur la demande que sur l'exécution des virements, que cet usage reflétait la volonté des parties qui l'ont librement accepté et que de ce fait, il valait contrat ; que la loi des parties, qui définit les obligations contractuelles de chaque partie est constituée par leur contrat soit en l'espèce la convention de compte courant et son avenant du 26 février 2014, en exécution de laquelle le virement litigieux a été exécuté ; que les conditions générales de cette convention offrent la possibilité au client d'effectuer des virements internationaux en complétant et signant un formulaire disponible en agence mentionnant les éléments qu'elles précisent ; qu'elles ne stipulent pas de délai de traitement de ces ordres de virement ; qu'aucun délai n'est non plus imposé par des dispositions légales ou réglementaires, les dispositions de l'article L. 311-21 du code monétaire et financier ne s'appliquant pas aux virements hors zone économique européenne ; qu'il est exact que la société Hybrid Motors group n'a pas utilisé le formulaire disponible en agence mais d'une part, cette dernière justifie que la demande de virement était conforme aux demandes précédentes exprimées par courriel les 6 janvier, 13 janvier et 3 février 2016 et d'autre part, la Caisse d'épargne, qui allègue le non-respect sur ce point des conditions générales, n'en tire aucune conséquence juridique ; qu'en application de l'article 1147 ancien du code civil, sur lequel la société Hybrid Motors group fonde son action (en invoquant à tort l'article 1231-1 nouveau), le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au payement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part ; qu'il appartient à la société Hybrid Motors group de prouver un retard fautif dans cette exécution étant rappelé l'absence de délai contractuel, légal ou réglementaire ; que contrairement à ce qu'a retenu le tribunal de commerce, le traitement rapide de trois précédentes demandes ne peut entraîner, à la charge de la banque, création d'un usage imposant à cette dernière une obligation contractuelle, non prévue par le contrat lequel ne peut être modifié que par le consentement exprès des parties ; que de plus, la Caisse d'épargne a traité la demande qui lui a été adressée le 16 février 2016 par courriel à 16h25 à 16h54 soit dans un délai de 30 minutes, le retard qui lui est reproché étant la conséquence de l'erreur qu'elle a commise lors de ce traitement ; qu'il résulte des productions qu'après refus du virement par la banque destinataire, la Caisse d'épargne a procédé au second virement le 20 février à 8h52 soit un délai de traitement de 4 jours et que le compte bénéficiaire a été crédité le 23 février 2016 à 22 heures, heure française et le 24 février 2017 à 4 heures, heure locale USA soit un délai d'exécution de 7 jours ; que la société Hybrid Motors group n'offre pas de démontrer que ce délai est fautif ; que de son côté, la Caisse d'épargne fait valoir, avec pertinence, que son obligation était de traiter le virement dans un délai raisonnable et elle produit la plaquette commerciale d'une banque concurrente annonçant le traitement des virements internationaux dans un délai de 5 jours ainsi que des extraits de discussions de clients de banques sur un forum faisant ressortir que les délais d'exécution varient entre 5 et 7 jours ; que la Caisse d'épargne a donc traité le virement international dans un délai raisonnable et n'a pas commis de manquement à ses obligations contractuelles ; qu'il y a lieu par infirmation du jugement entrepris, de débouter la société Hybrid Motors group de ses prétentions ; que partie perdante, la société Hybrid Motors group doit supporter les dépens de première instance et d'appel la cour ne devant statuer que sur les dépens, ainsi que les frais irrépétibles qu'elle a engagés ; qu'elle doit également verser à la Caisse d'épargne une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ».

1°) ALORS QU'une modification du contrat peut résulter d'un accord tacite se déduisant d'une pratique régulièrement suivie et librement acceptée par les parties ; qu'en partant, au contraire, du principe que le contrat ne peut être modifié « que par le consentement exprès des parties » pour retenir que le traitement rapide de trois précédentes demandes de virements n'a pu créer, à la charge de la banque, une obligation contractuelle non prévue par le contrat, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

2°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU'en indiquant ensuite que la Caisse d'épargne « a traité la demande qui lui a été adressée le 16 février 2016 par courriel à 16h25 à 16h54, soit dans un délai de 30 minutes », tout en constatant que, lors de ce traitement, cette banque a commis une erreur sur le destinataire du virement et qu'après le refus du virement par la banque destinataire, la Caisse d'épargne a dû procéder à un second virement le 20 février à 8h52, « soit un délai de traitement de 4 jours », la cour d'appel a statué par des motifs impropres à caractériser que la Caisse d'épargne aurait traité rapidement la demande de virement de la société Hybrid Motors Group, en violation de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

3°) ALORS QUE la banque réceptionnaire d'un ordre de virement commet une faute en mentionnant un bénéficiaire différent de celui désigné par son client ; qu'en refusant de retenir une faute de la part de la Caisse d'épargne, tout en constatant qu'alors même que la société Hybrid Motors Group lui avait adressé un ordre de virement au profit de la société All Cargo, la Caisse d'épargne avait indiqué comme bénéficiaire la société Hybrid Motors, ce qui avait retardé l'exécution de l'ordre de virement effectué par cette dernière société, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19-21664
Date de la décision : 30/06/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 13 juin 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 30 jui. 2021, pourvoi n°19-21664


Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.21664
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