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23/06/2021 | FRANCE | N°19-11445

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 juin 2021, 19-11445


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 juin 2021

Rejet

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen faisant fonction de président

Arrêt n° 786 F-D

Pourvoi n° G 19-11.445

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 23 JUIN 2021

M. [X] [V], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvo

i n° G 19-11.445 contre l'arrêt rendu le 13 avril 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (18e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 juin 2021

Rejet

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen faisant fonction de président

Arrêt n° 786 F-D

Pourvoi n° G 19-11.445

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 23 JUIN 2021

M. [X] [V], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° G 19-11.445 contre l'arrêt rendu le 13 avril 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (18e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société MJA, société d'exercice libéral à forme anonyme, dont le siège est [Adresse 2], prise en la personne de Mme [I] [C], en qualité de mandataire liquidateur de la société Normed,

2°/ à l'association AGS CGEA IDF Ouest, unité déconcentrée de l'Unedic, dont le siège est [Adresse 3], actuellement [Adresse 4],

3°/ à l'Agent judiciaire de l'État, domicilié [Adresse 5],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Le Lay, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [V], de la SCP Foussard et Froger, avocat de l'Agent judiciaire de l'État, après débats en l'audience publique du 11 mai 2021 où étaient présents Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Le Lay, conseiller rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 avril 2018), M. [V], engagé le 1er octobre 1961 par la société Constructions navales et industrielles de la Seyne-sur-Mer, devenue société Normed, a été licencié pour motif économique le 19 mars 1987.

2. La société ayant été placée en liquidation judiciaire, la société Mandataires judiciaires associés, en la personne de Mme [C], a été désignée mandataire liquidateur.

3. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale à plusieurs reprises de diverses demandes relatives à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail.

Examen des moyens

Sur les premier et deuxième moyens

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

5. Le salarié fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement d'une amende civile de 2 000 euros, alors :

« 1°/ que l'exercice d'une action en justice constitue en principe un droit et ne dégénère en abus que dans les cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol ; qu'en l'espèce, pour retenir que M. [V] avait agi de manière manifestement abusive et le condamner à une amende civile, la cour d'appel a relevé que la demande de l'exposant était manifestement vouée à l'échec du fait des décisions intervenues dans les précédentes instances qui étaient parfaitement motivées en droit et dont la lecture aurait dû dissuader M. [V] de poursuivre et d'engager une nouvelle instance ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser une faute faisant dégénérer en abus l'exercice par M. [V] de son droit d'agir en justice, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 32-1 du code de procédure civile ;

2°/ que la cassation qui ne manquera pas d'intervenir sur les premier et deuxième moyens de cassation entraînera, en application de l'article 624 du code de procédure civile, celle du chef de dispositif par lequel la cour d'appel a condamné M. [V] au paiement d'une amende civile au motif que ce dernier aurait agi de manière manifestement abusive, dès lors qu'aucun abus du droit d'agir en justice n'est susceptible d'être caractérisé lorsque le plaideur triomphe, même partiellement, dans son action. »

Réponse de la Cour

6. Ayant relevé qu'en engageant pour la troisième fois une instance pour demander la réparation des mêmes préjudices, de telles demandes étant manifestement vouées à l'échec, la cour d'appel a pu retenir le caractère manifestement abusif de l'exercice par le salarié de son droit d'agir en justice.

7. Les premier et deuxième moyens étant rejetés, la seconde branche, qui invoque une cassation par voie de conséquence, est sans portée.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le quatrième moyen

Enoncé du moyen

9. Le salarié fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au CGEA Ile-de-France Ouest une somme à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et injustifiée, alors :

« 1°/ que la contradiction entre les motifs et le dispositif d'une décision équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, après avoir, dans ses motifs, retenu que les intimés seraient déboutés de leur demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive, faute d'invoquer un préjudice particulier, la cour d'appel a confirmé dans son intégralité le jugement déféré, qui avait condamné M. [V] à payer au CGEA Ile-de-France Ouest une somme à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et injustifiée ; que, ce faisant, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction entre ses motifs et son dispositif en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que la cassation qui ne manquera pas d'intervenir sur les premier et deuxième moyens de cassation entraînera, en application de l'article 624 du code de procédure civile, celle du chef de dispositif par lequel la cour d'appel a confirmé le jugement entreprise en ce qu'il avait condamné M. [V] à payer au CGEA Ile-de-France Ouest une somme à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée, dès lors que, qu'aucun abus du droit d'agir en justice n'est susceptible d'être caractérisé lorsque le plaideur triomphe, même partiellement, dans son action. »

Réponse de la Cour

10. La contradiction dénoncée par la première branche entre les motifs et le dispositif de l'arrêt résulte d'une erreur matérielle qui peut, selon l'article 462 du code de procédure civile, être réparée par la Cour de cassation à laquelle est déféré cet arrêt.

11. Les premier et deuxième moyens étant rejetés, la seconde branche, qui invoque une cassation par voie de conséquence, est sans portée.

12. Le moyen ne peut donc être accueilli.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Ordonne la rectification de l'arrêt attaqué et dit qu'il y a lieu de remplacer dans son dispositif les mots « Confirme dans son intégralité le jugement déféré » par : « Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il condamne M. [V] à payer au CGEA d'Ile-de-France Ouest la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et injustifiée ; Déboute l'AGS de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive ; » ;

Dit que le présent arrêt sera transcrit en marge ou à la suite de la décision rectifiée ;

Condamne M. [V] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. [V]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevables les demandes de Monsieur [V] au regard de l'autorité de la chose jugée et du principe d'unicité de l'instance et d'avoir condamné l'exposant à payer à l'AGS CGEA Ile-de-France Ouest diverses sommes sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « Par des motifs pertinents en droit et exacts en fait, que la cour adopte, les demandes de [X] [V] ont été déclarées irrecevables, tant du fait de l'autorité de la chose jugée que du principe d'unicité de l'instance ; il convient également d'adopter les motifs qui ont conduit le conseil des prud'hommes à se déclarer incompétent pour examiner la demande subsidiaire contre l'État représenté par l'agent judiciaire de l'État. [X] [V] se contente de reprendre en cause d'appel les moyens soulevés en première instance, sans invoquer aucun moyen nouveau de droit ou de fait qui pourrait conduire à la réformation de la décision. Aux motifs des premiers juges, il convient seulement d'ajouter que l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme ne s'oppose ni à la constatation de la prescription, qui a fondé la première décision du conseil des prud'hommes de Toulon du 12 avril 2002, confirmée en appel, puis en cassation, rejetant les demandes du salarié en contestation du licenciement, au motif de la forclusion frappant sa déclaration de créance et de la prescription applicable. L'article 6 du même texte ne s'oppose pas davantage à la constatation de l'autorité de la chose jugée, ce principe ayant été invoqué par le jugement du conseil des prud'hommes du 28 juillet 2009, confirmé en appel et en cassation sur le fond, dès lors que la cause a déjà été entendue dans les conditions prévues par ce texte. Enfin, l'article 6 ne peut davantage être invoqué pour s'opposer à l'application du principe d'unicité de l'instance, tel que posé par l'article R1452 - 6 du code du travail, dans sa version applicable à l'espèce, principe soulevé par les intimés dans l'instance introduite par [X] [V] en indemnisation de son préjudice d'anxiété du fait de l'exposition à l'amiante, instance ayant abouti au jugement du conseil des prud'hommes du 30 décembre 2011, confirmé par arrêt de cette cour du 20 mars 2015, la Cour européenne elle-même ayant jugé que le juge social peut être facilement saisi par un salarié, que le principe de l'unicité de l'instance prud'homale évite un éparpillement des procédures et, partant, le risque de contrariété de décisions, en conséquence de quoi, cette disposition interne poursuit un but légitime » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Monsieur [X] [V] formule deux séries de demandes, l'une tendant à contester la régularité de la rupture de son contrat de travail qui a pris fin le 1er avril 1987 et l'autre tendant à rechercher la responsabilité de son employeur quant à son exposition à l'amiante. Les premières demandes ont déjà fait l'objet de plusieurs décisions devenues définitives à la suite des pourvois en cassation exercés, à savoir l'Arrêt de la Cour d'Appel d'Aix en Provence en date du 29 mars 2005 et l'Arrêt de la Cour de Cassation en date du 5 décembre 2012. L'Arrêt de la Cour d'Appel d'Aix en Provence en date du 20 mars 2015 est venu confirmer l'irrecevabilité de la demande relative au préjudice d'anxiété qui a pris naissance par la publication de l'Arrêté du 7 juillet 2000 et dont l'action, aurait due être jointe aux précédents recours exercés contre son employeur représenté par son mandataire judiciaire sur le fondement du principe de l'unicité de l'instance. Monsieur [X] [V] a choisi d'initier à nouveau une procédure devant le Conseil de Prud'hommes sans même attendre le résultat d'un pourvoi qu'il dit avoir déposé le 20 mai 2015 contre cette décision. Les défendeurs ont soulevé plusieurs fins de non recevoir conformément aux dispositions des articles 122 et suivants du code de procédure civile. Monsieur [X] [V] imagine contourner les règles de procédure et de prescription telles que résultent des dispositions applicables depuis 2008 en évoquant que ces décisions n'ont pas tranché le fond du litige. Par application des dispositions de l'article 480 du code de procédure civile, le jugement qui tranche dans son dispositif une exception de procédure, une fin de non recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée-relativement à la contestation qu'il tranche. Les décisions qui ont relevé le principe d'unicité de l'instance, comme la prescription ont tranché une cause d'irrecevabilité qui n'a pas disparu et qui rend toujours irrecevable l'examen au fond des demandes relatives à l'exécution et de la rupture du contrat de travail. Dans la présente instance qui constitue un acharnement après une longue série de recours qui a été exercé tardivement par le salarié dans ce litige du travail survenu en 1987, il y a lieu de retenir principalement les fins de non recevoir, tirées de l'autorité de la chose jugée et du principe de l'unicité de l'instance devant la juridiction du contrat de travail, qui découlent des précédentes décisions visées dans l'exposé du litige » ;

ALORS en premier lieu QUE, sur les points qu'elle atteint, la cassation replace les parties dans l'état dans lequel elles se trouvaient avant le jugement cassé ; qu'en l'espèce, en se fondant, par motifs adoptés, sur l'arrêt rendu par la Cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 20 mars 2015 ayant jugé irrecevable la demande de Monsieur [V] relative au préjudice d'anxiété sur le fondement du principe de l'unicité de l'instance pour conclure à l'irrecevabilité des demandes dont elle était saisie alors qu'à la date où elle a statué la cassation de cet arrêt avait été prononcée par la Cour de cassation, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 625 du Code de procédure civile ;

ALORS en deuxième lieu QUE si, aux termes de l'article R. 1452-6 du Code du travail, toutes les demandes liées au contrat de travail entre les mêmes parties font, qu'elles émanent du demandeur ou du défendeur, l'objet d'une seule et même instance, cette règle n'est applicable que lorsque l'instance précédente s'est achevée par un jugement sur le fond ; qu'en l'espèce, en déclarant les demandes de Monsieur [V] irrecevables par application du principe d'unicité de l'instance alors qu'il ressortait par ailleurs de ses constatations qu'au terme des précédentes instances prud'homales engagées par le salarié, ses demandes avaient été écartées comme irrecevables sur le fondement soit de la prescription, soit de l'autorité de la chose jugée, soit du principe d'unicité de l'instance, ce dont il se déduisait qu'aucune de ces instances ne s'était achevée par un jugement sur le fond, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article R.1452-6 du Code du travail alors applicables ensemble celles de l'article 122 du Code de procédure civile ;

ALORS en troisième lieu et enfin QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil ; que, si ce droit peut donner lieu à des limitations, celles-ci ne sauraient restreindre l'accès ouvert à l'individu d'une manière ou à un point tels que le droit s'en trouve atteint dans sa substance même ; que tel est le cas lorsque l'application conjuguée de règles encadrant l'accès au juge a pour effet de priver le justiciable de la possibilité de voir ses contestations tranchées au fond ; qu'en l'espèce, pour conclure à l'irrecevabilité des demandes de Monsieur [V], la Cour d'appel a retenu que l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Hommes ne s'opposait pas à la constatation de la prescription, qu'il ne s'opposait pas davantage à la constatation de l'autorité de la chose jugée et qu'il ne pouvait non plus être invoqué pour s'opposer à l'application du principe d'unicité de l'instance tel que posé par l'article R. 1452-6 du Code du travail ; qu'en statuant par de tels motifs alors qu'il en ressortait que, du fait de l'application conjuguée de ces différentes règles, Monsieur [V] s'était trouvé, sans motif légitime, privé de la possibilité de voir les contestations dont il avait saisi le juge prud'homal tranchées au fond, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 6 §1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré incompétent le Conseil de prud'hommes pour examiner la demande subsidiaire contre l'Etat représenté par l'agent judiciaire de l'Etat et d'avoir condamné l'exposant à payer à l'agent judiciaire de l'Etat une somme sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « La cour adopte là aussi les motifs juridiquement fondés et exacts en fait des premiers juges, motifs auxquels il convient seulement d'ajouter que la Cour européenne des droits de l'homme, saisie par [X] [V], a indiqué, dans son arrêt du 17 octobre 2000, que le requérant a été licencié par une société privée et avait la possibilité d'agir contre son ancien employeur devant les juridictions civiles ; qu'il en résulte que l'État n'a pas été l'employeur de [X] [V] ; et que les juridictions judiciaires sont incompétentes pour connaître d'une action en responsabilité de l'État, qui serait entreprise indépendamment de l'action contre l'employeur » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « La demande de condamnation de l'Etat formée subsidiairement est sans fondement juridique identifiable afin qu'il garantisse le CGEA AGS d'Ile de France Ouest et Maître [I] [C] mandataire judiciaire de la société NORMED , ne peut pas relever de la compétence du Juge de l'ordre judiciaire s'agissant d'examiner la responsabilité de l'Etat dans les conditions d'exécution et de rupture d'un contrat de travail . Cette action apparaît tout aussi abusive puisque Monsieur [X] [V] a déjà saisi la juridiction administrative à cette fin. Il y a lieu de déclarer le Conseil de Prud'hommes incompétent pour examiner cette demande subsidiaire ».

ALORS en premier lieu QUE, lorsqu'est caractérisée entre deux personnes morales une confusion d'intérêts, d'activités et de direction, ces liens confèrent à l'une de ces personnes morale la qualité d'employeur conjoint à l'égard du personnel de l'autre, ; que, même dans l'hypothèse où la personne morale ayant la qualité d'employeur conjoint est une personne morale de droit public, le juge judiciaire demeure compétent pour connaître du litige né de l'exécution et de la rupture des contrats de travail en cause, dès lors que les salariés concernés sont employés dans les conditions du droit privé ; qu'en l'espèce, pour justifier sa demande subsidiaire tendant à faire supporter à l'Etat français la réparation de préjudices subis du fait de la rupture illicite de son contrat de travail comme de son exposition à l'amiante, Monsieur [V] mettait en avant l'immixtion de ce dernier dans la gestion de la société NORMED, dans le cadre du redressement judiciaire de cette société, faisant valoir que l'Etat avait missionné la NORMED pour la construction et la finition de navires militaires et que la société était, à ce titre, placée sous son contrôle permanent, lequel était assuré conjointement par l'administrateur judiciaire et la direction départementale du travail, que le fonctionnement de la société dans ce cadre était financé par des fonds publics et qu'au terme de la procédure de redressement judiciaire, l'ensemble du personnel de la NORMED, à l'exception de Monsieur [V], avait été recruté par l'Etat par le biais de l'arsenal de Toulon ; qu'en rejetant cette demande subsidiaire comme ne pouvant pas relever de la compétence du Juge de l'ordre judiciaire sans rechercher si cette immixtion de l'Etat français dans la gestion de la NORMED ne conférait pas à l'Etat français la qualité d'employeur conjoint de Monsieur [V] et ne justifiait pas, par voie de conséquence, la compétence du juge prud'homal pour connaître de la demande subsidiaire de Monsieur [V] tendant à ce que les condamnations prononcées soient garanties par l'Etat français, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles L. 1221-1, et L. 1411-2 du Code du travail ensemble celles de la loi des 16-24 août 1790 et du décret du 16 fructidor an III.

ALORS en second lieu QUE lorsqu'est caractérisée entre deux personnes morales une confusion d'intérêts, d'activités et de direction, ces liens confèrent à l'une de ces personnes morale la qualité d'employeur conjoint à l'égard du personnel de l'autre ; l'employeur conjoint est tenu de supporter les conséquences de la rupture des contrats de travail des salariés, peu important que cette qualité ne lui ait été reconnue que postérieurement et que les licenciements aient été prononcés par l'autre employeur ; qu'en l'espèce, pour considérer que l'Etat n'avait pas été l'employeur de Monsieur [V] et que les juridictions judiciaires étaient incompétentes pour connaître d'une action en responsabilité de l'Etat qui serait entreprise indépendamment de l'action contre l'employeur, la Cour d'appel a relevé que la Cour européenne des droits de l'Homme, saisie par Monsieur [V] avait indiqué, dans son arrêt du 17 octobre 2000, que le requérant avait été licencié par une société privée et avait la possibilité d'agir contre son ancien employeur devant les juridictions civiles, la Cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles L. 1221-1, et L. 1411-2 du Code du travail ensemble celles de la loi des 16-24 août 1790 et du décret du 16 fructidor an III.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Monsieur [V] à une amende civile de 2000 euros ;

AUX MOTIFS QUE « En droit, l'article 32-1 du code de procédure civile dispose que celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 ? sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés. En l'espèce, en engageant pour la troisième fois une demande manifestement vouée à l'échec, du fait des décisions intervenues dans les précédentes instances, qui étaient parfaitement motivées en droit, et dont la lecture aurait dû dissuader [X] [V] de poursuivre et d'engager une nouvelle instance, celui-ci a agi de manière manifestement abusive, justifiant la fixation à la somme de 2000 ? de l'amende civile applicable » ;

ALORS d'une part QUE l'exercice d'une action en justice constitue en principe un droit et ne dégénère en abus que dans les cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol ; qu'en l'espèce, pour retenir que Monsieur [V] avait agi de manière manifestement abusive et le condamner à une amende civile, la Cour d'appel a relevé que la demande de l'exposant était manifestement vouée à l'échec du fait des décisions intervenues dans les précédentes instances qui étaient parfaitement motivées en droit et dont la lecture aurait dû dissuader Monsieur [V] de poursuivre et d'engager une nouvelle instance ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser une faute faisant dégénérer en abus l'exercice par Monsieur [V] de son droit d'agir en justice, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 32-1 du Code de procédure civile ;

ALORS d'autre part et en toute hypothèse QUE la cassation qui ne manquera pas d'intervenir sur les premier et deuxième moyens de cassation entraînera, en application de l'article 624 du Code de procédure civile, celle du chef de dispositif par lequel la Cour d'appel a condamné Monsieur [V] au paiement d'une amande civile au motif que ce dernier aurait agi de manière manifestement abusive, dès lors qu'aucun abus du droit d'agir en justice n'est susceptible d'être caractérisé lorsque le plaideur triomphe, même partiellement, dans son action.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement déféré en ce qu'il avait condamné Monsieur [V] à payer au CGEA Ile-de-France Ouest une somme à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée ;

AUX MOTIFS QUE « les intimés seront déboutés de leur demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive, faute d'invoquer un préjudice particulier » ;

ALORS en premier lieu QUE la contradiction entre les motifs et le dispositif d'une décision équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, après avoir, dans ses motifs, retenu que les intimés seraient déboutés de leur demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive, faute d'invoquer un préjudice particulier, la Cour d'appel a confirmé dans son intégralité le jugement déféré, qui avait condamné Monsieur [V] à payer au CGEA Ile-de-France Ouest une somme à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée ; que, ce faisant, la Cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction entre ses motifs et son dispositif en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS en second lieu et en toute hypothèse QUE la cassation qui ne manquera pas d'intervenir sur les premier et deuxième moyens de cassation entraînera, en application de l'article 624 du Code de procédure civile, celle du chef de dispositif par lequel la Cour d'appel a confirmé le jugement entreprise en ce qu'il avait condamné Monsieur [V] à payer au CGEA Ile-de-France Ouest une somme à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée, dès lors que, qu'aucun abus du droit d'agir en justice n'est susceptible d'être caractérisé lorsque le plaideur triomphe, même partiellement, dans son action.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-11445
Date de la décision : 23/06/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 13 avril 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 jui. 2021, pourvoi n°19-11445


Composition du Tribunal
Président : Mme Leprieur (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.11445
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