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19/05/2021 | FRANCE | N°20-15002

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 19 mai 2021, 20-15002


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 mai 2021

Cassation

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 433 F-D

Pourvoi n° V 20-15.002

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 19 MAI 2021

La société GS Group, société à responsabilité

limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° V 20-15.002 contre l'arrêt rendu le 16 octobre 2019 par la cour d'appe...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 mai 2021

Cassation

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 433 F-D

Pourvoi n° V 20-15.002

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 19 MAI 2021

La société GS Group, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° V 20-15.002 contre l'arrêt rendu le 16 octobre 2019 par la cour d'appel de Colmar (1re chambre civile, section A), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Résidence les tilleuls, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à la société [Personne physico-morale 1], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Fontaine, conseiller, les observations de Me Le Prado, avocat de la société GS Group, de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la société [Personne physico-morale 1], de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Résidence les tilleuls, après débats en l'audience publique du 23 mars 2021 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Fontaine, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 16 octobre 2019), la société [Personne physico-morale 1] a acheté à la société GS Group (le vendeur) un matériel de biométrie permettant la lecture des empreintes digitales, destiné à faciliter la gestion des horaires du personnel, pour le donner en location à la société La Résidence les tilleuls (la locataire), qui a conclu avec le vendeur un contrat de maintenance et d'entretien.

2. Invoquant des dysfonctionnements du matériel, la locataire a cessé de payer les loyers et redevances et a restitué le matériel.

3. Le bailleur l'ayant assignée en paiement d'une indemnité contractuelle de résiliation anticipée, la locataire a appelé le vendeur en garantie.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première, deuxième et troisième branches, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

5. Le vendeur fait grief à l'arrêt de prononcer la résolution du contrat de vente, de la condamner à payer à la société [Personne physico-morale 1] la somme de 8 106,82 euros hors taxes correspondant à la restitution du prix de vente du matériel et la somme de 2 093,18 euros hors taxes correspondant à la perte de marge et de constater la résiliation du contrat de location financière liant la société [Personne physico-morale 1] et la locataire, alors « que la charge de la preuve de la non-conformité à la commande du matériel livré incombe à l'acquéreur ; que la cour d'appel a énoncé que le vendeur, vendeur et fournisseur du matériel dont la défaillance était alléguée par la locataire, ne peut pas affirmer que l'installation était conforme et fonctionnelle et se retrancher derrière des coupures informatiques perturbatrices ou un mauvais usage des utilisateurs dont elle ne rapporte pas la preuve ; qu'en faisant peser la charge de la non-conformité du matériel livré sur le vendeur, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1315, devenu 1353, du code civil :

6. Aux termes de ce texte, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et, réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le payement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

7. Pour prononcer la résolution du contrat de vente, l'arrêt énonce que le fournisseur, la société GS Group, doit rapporter, en cas de défaillance alléguée du matériel, la preuve que cette défaillance ne lui est pas imputable.

Il relève que, si la locataire a signé un bon d'installation conforme puis un bon de livraison du matériel en parfait état de fonctionnement, elle a ensuite informé le bailleur et le vendeur que ce matériel, qui n'avait jamais fonctionné, était impropre à l'usage escompté.

Il en déduit que cette non-conformité justifie la résolution du contrat de vente.

8. En statuant ainsi, alors qu'il incombait au locataire de prouver l'existence des défaillances alléguées, que contestait le vendeur, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

9. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif prononçant la résolution du contrat de vente entraîne, par voie de conséquence, celle des dispositions prononçant la résiliation du contrat de location financière, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire, s'agissant de contrats concomitants ou successifs s'inscrivant dans une opération incluant une location financière et donc interdépendants.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 octobre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne la société La Résidence les tilleuls et la société [Personne physico-morale 1] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mai deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société GS Group.

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué ;

D'AVOIR prononcé la résolution du contrat de vente du 27 novembre 2013 liant la société GS Group et la société [Personne physico-morale 1], condamné la société GS Group à payer à la société [Personne physico-morale 1] la somme de 8.106,82 euros hors taxes correspondant à la restitution du prix de vente du matériel et la somme de 2.093,18 euros hors taxes correspondant à la perte de marge et constaté la résiliation du contrat de location financière des 13 et 28 novembre 2013 liant la société [Personne physico-morale 1] et la société Résidence les tilleuls ;

AUX MOTIFS QUE « la Résidence les tilleuls poursuit le constat de la résiliation du contrat de location motifs pris du non-fonctionnement du matériel financé. Grenke et GS Group s'y opposent, arguant respectivement d'une livraison conforme, du parfait fonctionnement du matériel livré le 22 novembre 2013 et de deux interventions de maintenance satisfactoires en février et mars 2014. L'article 1184 ancien du code civil applicable à la cause dispose que la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques pour le cas où l'une des parties ne satisferait pas à son engagement. Il est constant que le contrat de location financière litigieux s'est inscrit dans un ensemble contractuel constitué par la fourniture d'un matériel de biométrie par GS Group et par son financement par Grenke. Ces contrats, conclus de manière concomitante, et dont l'exécution était nécessaire à la réalisation d'une opération unique doivent être considérés comme étant interdépendants. En exécution du contrat de fourniture, le fournisseur GS Group doit rapporter, en cas de défaillance alléguée du matériel, la preuve que cette défaillance ne lui est pas imputable. Or, si la Résidence les tilleuls a signé le 15 novembre 2013 un bon de commande d'installation conforme et le 22 novembre 2013 un bon de livraison du matériel en parfait état de fonctionnement, elle a ensuite par lettre recommandée avec avis de réception du 4 février 2014, informé Grenke de ce que le matériel ne fonctionnait pas; elle a écrit le 31 mars 2014 à GS Group pour lui indiquer qu'en dépit de 2 ou 3 interventions de ses techniciens, le matériel n'avait jamais fonctionné, était impropre à l'usage escompté puisque son personnel ne pouvait plus pointer depuis décembre 2013. GS Group ne saurait utilement affirmer que l'installation était conforme et fonctionnelle et se retrancher derrière des coupures informatiques perturbatrices ou un mauvais usage des utilisateurs -dont elle ne rapporte pas la preuve- alors qu'en sa qualité de vendeur et installateur, elle était tenue d'un devoir d'information et de conseil, qu'elle devait s'informer des besoins de sa cliente et l'avertir le cas échéant de l'inadaptation du matériel de biométrie proposé à l'installation informatique de l'EHPAD. GS Group ne rapporte pas la preuve de l'exécution de ses obligations d'information et de conseil. Il est également établi que la Résidence les tilleuls a invoqué par courriers du 4 février et du 31 mars 2014 l'exception d'inexécution, s'est déclarée disposée à restituer le matériel et a suspendu le paiement des loyers à Grenke. La cour constatera la résiliation du contrat de location à l'initiative de Grenke. La défectuosité du matériel de biométrie justifie l'inexécution par la société Résidence les tilleuls du contrat de location dont l'objet est connexe à celui du contrat de fourniture du matériel litigieux, avec lequel il forme un ensemble contractuel interdépendant. Cette non-conformité justifie en conséquence le prononcé de la résolution du contrat de vente [Personne physico-morale 2]GS Group-Grenke matérialisé par la facture du 27 novembre 2013. S'agissant de la demande faite par Grenke au titre de la clause pénale du contrat de location financière, il résulte de l'économie de cette clause que celle-ci ne peut être mise en oeuvre en cas de résiliation de la location résultant de la défaillance du matériel. La résolution des contrats de fourniture et de maintenance n'est pas imputable à la Résidence les tilleuls de sorte que celle-ci ne saurait être comptable de l'indemnité de résiliation réclamée par Grenke. Par suite, la cour infirmera le jugement déféré et rejettera la demande de Grenke dirigée contre la société Résidence les tilleuls. La résolution de la vente [Personne physico-morale 2]GS Group-Grenke commande la restitution par GS Group du prix de 8.106,82 euros hors taxes perçu ainsi que la somme de 2.093,18 euros hors taxes (510 x 20 = 10.200 et 10.200 - 8.106,82 = 2.093,18) correspondant à la perte de marge durant la période de location de 20 trimestres soit 60 mois s'achevant en décembre 2018, parvenue à son terme, par application du principe de réparation intégrale du préjudice. La cour, infirmant le jugement déféré, condamnera GS Group à payer à Grenke les sommes de 8.106,82 euros hors taxes et de 2.093,18 euros hors taxes » ;

1. ALORS QUE l'action en garantie des vices cachés est la seule action qui puisse être intentée par l'acheteur contre le vendeur lorsque le défaut affectant la chose la rend impropre à l'usage auquel elle est destinée; qu'ainsi un vice caché ne donne pas ouverture à une action en responsabilité contractuelle mais à une action en garantie spécifique dont le régime est fixé par les articles 1641 et suivants du code civil ; que la cour d'appel a relevé que la société Résidence les tilleuls a conclu un contrat de location financière avec la société [Personne physico-morale 1] portant sur du matériel de biométrie les 13 et 28 novembre 2013, que ce matériel a été fourni par la société GS Group à la société Résidence les tilleuls et qu'il a été acheté par la société [Personne physico-morale 1] à la société GS Group par contrat du 27 novembre 2013; que la cour d'appel a prononcé la résolution de la vente ainsi conclue entre la société GS Groupe et la société [Personne physico-morale 1] sur le fondement de l'article 1184 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 aux motifs que la société GS Group a manqué à ses obligations contractuelles en tant que vendeur et fournisseur; que pourtant, la cour d'appel a relevé que si la société Résidence les tilleuls a signé, le 15 novembre 2013, un bon de commande d'installation conforme et le 22 novembre 2013, un bon de livraison du matériel en parfait état de fonctionnement, elle a ensuite par lettre recommandée du 4 février 2014 informé le bailleur que le matériel ne fonctionnait pas et a écrit, le 31 mars 2014, à la société GS Group pour lui indiquer qu'en dépit des interventions de ses techniciens le matériel n'avait jamais fonctionné et était impropre à l'usage escompté puisque son personnel ne pouvait plus pointer depuis décembre 2013 (page 5 de l'arrêt) ; qu'il résultait de ces énonciations que la société la Résidence les tilleuls se plaignait de vices cachés constatés par la cour d'appel et contestés, à titre principal par la société GS Group dans ses écritures, en sorte que la vente ne pouvait pas être résolue sur le fondement de la responsabilité contractuelle ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1184 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble l'article 1641 du code civil ;

2. ALORS, à titre subsidiaire, QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense ; qu'à supposer même que la responsabilité de la société GS Group puisse être recherchée sur le fondement de la responsabilité contractuelle, ni la société [Personne physico-morale 1], ni la société Résidence les tilleuls n'ont soulevé le moyen tiré de ce que société GS Group aurait méconnu son obligation d'information et de conseil; qu'en retenant que la société GS Group ne rapportait pas la preuve de l'exécution de ses obligations d'information et de conseil pour prononcer la résolution du contrat de vente du 27 novembre 2013 liant la société GS Group et la société [Personne physico-morale 1], la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

3. ALORS, également à titre subsidiaire et en toute hypothèse, QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en soulevant d'office le moyen tiré d'une violation par la société GS Group de ses obligations d'information et de conseil sans inviter les parties à s'en expliquer, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

4. ET ALORS, enfin, à titre subsidiaire, QUE la charge de la preuve de la non-conformité à la commande du matériel livré incombe à l'acquéreur ; que la cour d'appel a énoncé que la société GS Groupe, vendeur et fournisseur du matériel dont la défaillance était alléguée par la société Résidence les tilleuls, ne peut pas affirmer que l'installation était conforme et fonctionnelle et se retrancher derrière des coupures informatiques perturbatrices ou un mauvais usage des utilisateurs dont elle ne rapporte pas la preuve (pages 5 et 6 de l'arrêt) ; qu'en faisant peser la charge de la non-conformité du matériel livré sur la société GS Group, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 20-15002
Date de la décision : 19/05/2021
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 16 octobre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 19 mai. 2021, pourvoi n°20-15002


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP L. Poulet-Odent, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.15002
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