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19/05/2021 | FRANCE | N°20-12255

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 19 mai 2021, 20-12255


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 mai 2021

Cassation

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 429 F-D

Pourvoi n° J 20-12.255

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 19 MAI 2021

La société Literie saonoise, société par action

s simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 20-12.255 contre l'arrêt rendu le 4 décembre 2019 par la cour d'appel de Besa...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 mai 2021

Cassation

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 429 F-D

Pourvoi n° J 20-12.255

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 19 MAI 2021

La société Literie saonoise, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 20-12.255 contre l'arrêt rendu le 4 décembre 2019 par la cour d'appel de Besançon (1re chambre civile et commerciale), dans le litige l'opposant :

1°/ à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) [Localité 1], dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à la société Guyon Daval, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 3], prise en qualité de mandataire liquidateur de la société Literie saonoise,

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Vaissette, conseiller, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la société Literie saonoise, de la SCP Waquet, Farge et HazanFarge et Hazan, avocat de la société Guyon Daval, ès qualités, après débats en l'audience publique du 23 mars 2021 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Vaissette, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Besançon, 4 décembre 2019), l'URSSAF a notifié à la société Literie saonoise (la société) un redressement de cotisations sociales, pour travail dissimulé, par une lettre d'observations du 3 août 2016. La société a été mise en liquidation judiciaire par un jugement du 20 septembre 2016 qui a désigné la société Guyon Daval en qualité de liquidateur. L'URSSAF a déclaré une créance au titre du redressement, à concurrence de 391 583 euros à titre privilégié, que la société a contestée.

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

2. La société fait grief à l'arrêt de prononcer l'admission de la créance de l'URSSAF à titre chirographaire pour la somme de 376 583 euros, alors « que seule une contrainte, régulièrement signifiée par l'URSSAF et non contestée, est de nature à établir le titre exécutoire permettant à l'organisme de demander l'admission définitive de sa créance ; que dès lors en déclarant, pour admettre la créance déclarée par l'URSSAF de Franche-Comté[Localité 1] au passif de la liquidation judiciaire de la société, que cette dernière ne saurait solliciter du juge-commissaire de remettre en cause une décision ayant autorité de la chose jugée, de sorte que sa dette était définitivement jugée, sans par ailleurs constater la moindre existence d'une contrainte, régulièrement signifiée par l'URSSAF de Franche-Comté[Localité 1] et non contestée, la cour d'appel a violé l'article L. 244-9 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

3. Le liquidateur conteste la recevabilité du moyen. Il soutient que la société n'a pas fait valoir, devant les juges du fond, que seule une contrainte régulièrement signifiée et non contestée permet de conférer un caractère définitif à la créance de l'URSSAF.

4. Cependant, le moyen qui ne se prévaut d'aucun fait qui n'ait été soumis à l'appréciation des juges du fond et constaté par la décision attaquée, est de pur droit.

5. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles L. 622-24, alinéa 4, du code de commerce et L. 244-9 du code de la sécurité sociale :

6. Il résulte de ces textes que les créances des organismes de sécurité sociale, qui n'ont pas fait l'objet d'un titre exécutoire, constitué par une contrainte, au moment de leur déclaration, ne peuvent être admises qu'à titre provisionnel pour leur montant déclaré, à charge pour l'organisme créancier d'établir définitivement sa créance, à peine de forclusion, dans le délai fixé par le tribunal, en application de l'article L. 624-1 du code de commerce, pour l'établissement de la liste des créances déclarées.

7. Pour admettre à titre définitif la créance de l'URSSAF pour une somme inférieure à celle déclarée, l'arrêt, après avoir exactement énoncé que le juge statuant sur l'admission des créances n'a pas le pouvoir d'interpréter ou de modifier un titre exécutoire, retient que la créance déclarée est définitive faute pour la société d'avoir contesté, dans les trente jours, la lettre d'observations qui lui avait été notifiée le 3 août 2016.

8. En statuant ainsi, sans constater la production d'une contrainte délivrée dans le délai imparti au mandataire judiciaire pour la vérification du passif, seule susceptible de constituer le titre exécutoire permettant l'admission définitive de la créance, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 décembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;

Condamne l'URSSAF de Franche-Comté[Localité 1] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mai deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour la société Literie saonoise.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé l'admission de la créance déclarée par l'Urssaf de Franche-Comté[Localité 1] au passif de la procédure collective ouverte à l'encontre de la société Literie Saonoise pour la somme de 376 583 euros à titre chirographaire,

AUX MOTIFS QUE

La procédure de vérification des créances investit le juge commissaire du pouvoir de contrôler la matérialité et la légalité des créances déclarées telles qu'elles apparaissent à la date de l'ouverture de la procédure collective mais ne l'autorise pas à interpréter ou à modifier un titre exécutoire.

Il s'ensuit que c'est par des motifs pertinents que la cour adopte et auxquels l'appelante n'a pas même répondu, qu'après avoir constaté que la créance déclarée par l'Urssaf était définitive faute pour la société, qui le reconnaît expressément, d'avoir contesté dans les trente jours le redressement opéré par celle-ci qui lui avait été notifié le 3 août 2016, soit antérieurement à l'ouverture de la procédure collective, le juge commissaire a écarté la contestation et admis la créance déclarée.

C'est en revanche à tort, alors que l'Urssaf a déclaré d'abord le 24 octobre 2016 une créance de 391 583 euros dont 15 000 euros à titre privilégié et 376 583 euros à titre chirographaire, laquelle a été contestée par lettre du liquidateur en date du 18 janvier 2017, puis qu'en réponse à cette contestation, elle a modifié sa déclaration le 6 février 2017 en réclamant son admission pour la somme de 391 583 euros à titre chirographaire définitif, avant de transmettre un nouveau bordereau établi le 10 août 2017 pour la somme de 376 583 euros à titre chirographaire, et que par courrier à lui adressé le 15 février 2019 (pièce n° 6 du dossier de première instance), le mandataire lui a demandé d'admettre la créance de l'Urssaf pour la somme de 376 583 euros à titre chirographaire "conformément à sa déclaration", que le juge commissaire a prononcé son admission pour la somme de 391 583 euros, de surcroît à titre privilégié, aucun privilège, dont la nature n'est d'ailleurs pas précisée, n'ayant jamais été revendiqué.

Son ordonnance sera par conséquent réformée en ce sens,

AUX MOTIFS ADOPTES QUE

En l'espèce, il apparaît que la lettre d'observations de l'Urssaf en date du 3 août 2016 offrant aux cotisants la possibilité de faire parvenir des observations dans le délai de 30 jours suite à contrôle, n'a été suivie d'aucune réaction,

En conséquence de quoi, la taxation de l'Urssaf est devenue définitive,

La société Literie Saonoise ne saurait solliciter du juge commissaire de remettre en cause une décision définitive ayant autorité de la chose jugée ; qu'au-delà de tous les échanges et débats nombreux de ce dossier, l'évidence est l'existence de cette dette définitivement jugée ;

1° ALORS QUE le silence du cotisant contrôlé durant le délai de trente jours qui lui est imparti pour répondre à la lettre d'observations notifiée par l'Urssaf à l'issue des opérations de contrôle, ne le prive pas de la possibilité de contester la position de l'Urssaf et ne rend donc pas la créance de cette dernière définitive ; qu'en énonçant, pour écarter la contestation de la société Literie Saonoise et admettre au passif de la liquidation judiciaire de celle-ci la créance déclarée par l'Urssaf de Franche-Comté[Localité 1], que cette dernière était définitive faute pour la société Literie Saonoise d'avoir contesté dans les trente jours le redressement qui lui avait été notifié le 3 août 2016, date de la lettre d'observations de l'Urssaf, soit avant l'ouverture de la procédure collective, la cour d'appel a violé l'article R 243-59, III, du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige,

2° ALORS QUE seule une contrainte, régulièrement signifiée par l'Urssaf et non contestée, est de nature à établir le titre exécutoire permettant à l'organisme de demander l'admission définitive de sa créance ; que dès lors en déclarant, pour admettre la créance déclarée par l'Urssaf de Franche-Comté[Localité 1] au passif de la liquidation judiciaire de la société Literie Saonoise, que cette dernière ne saurait solliciter du juge-commissaire de remettre en cause une décision ayant autorité de la chose jugée, de sorte que sa dette était définitivement jugée, sans par ailleurs constater la moindre existence d'une contrainte, régulièrement signifiée par l'Urssaf [Localité 1] et non contestée, la cour d'appel a violé l'article L 244-9 du code de la sécurité sociale,

3° ALORS QUE l'exercice par le juge-commissaire et la cour d'appel à sa suite de leur pouvoir de statuer sur une demande d'admission d'une créance contestée sans surseoir à statuer et renvoyer l'examen de la contestation devant le juge du fond, est subordonné à la condition que la contestation soit dépourvue de sérieux et ne soit pas susceptible d'exercer une influence sur l'existence ou le montant de la créance ; que dès lors en se bornant à prononcer l'admission de la créance déclarée par l'Urssaf de Franche-Comté[Localité 1] au passif de la procédure collective de la société Literie Saonoise pour la somme de 376 583 euros à titre chirographaire, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la contestation soulevée par la société Literie Saonoise et selon laquelle cette dernière ne pouvait être redevable de cotisations sociales pour travail dissimulé, pour une période antérieure à sa date d'immatriculation et donc à son début d'activité, était dépourvue de sérieux et n'était pas susceptible d'exercer une influence sur le montant de la créance, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 624-2 du code du commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 20-12255
Date de la décision : 19/05/2021
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon, 04 décembre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 19 mai. 2021, pourvoi n°20-12255


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.12255
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