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12/05/2021 | FRANCE | N°20-12072

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 mai 2021, 20-12072


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 mai 2021

Cassation partielle

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 554 F-D

Pourvoi n° K 20-12.072

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 MAI 2021

Le CHSCT central du centre hospitalier un

iversitaire de Rouen, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 20-12.072 contre l'ordonnance rendue en la forme des référés le 21...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 mai 2021

Cassation partielle

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 554 F-D

Pourvoi n° K 20-12.072

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 MAI 2021

Le CHSCT central du centre hospitalier universitaire de Rouen, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 20-12.072 contre l'ordonnance rendue en la forme des référés le 21 janvier 2020 par le président du tribunal judiciaire de Rouen, dans le litige l'opposant au centre hospitalier universitaire [Établissement 1], dont le siège est [Adresse 1], défendeur à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rinuy, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat du CHSCT central du centre hospitalier universitaire de Rouen, de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat du centre hospitalier universitaire [Établissement 1], après débats en l'audience publique du 17 mars 2021 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rinuy, conseiller rapporteur, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée (président du tribunal judiciaire [Localité 1], 21 janvier 2020), rendue en la forme des référés, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail central du centre hospitalier universitaire [Établissement 1] (le CHSCT) a, par délibération du 15 octobre 2019, voté le recours à une expertise pour risque grave.

2. Le centre hospitalier universitaire [Établissement 1] (le centre hospitalier) a fait assigner, le 25 octobre 2019, le CHSCT aux fins d'annuler cette délibération.

Examen du moyen

Sur le moyen, en ce qu'il fait grief à l'ordonnance de condamner le centre hospitalier à payer au CHSCT la seule somme de 7 000 euros au titre de ses frais de justice, et pris en ses troisième et sixième branches, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, en ce qu'il tend à l'annulation de la délibération du CHSCT, pris en ses première, deuxième et cinquième branches

Enoncé du moyen

4. Le CHSCT fait grief à l'ordonnance d'annuler sa délibération du 15 octobre 2019, alors :

« 1°/ que l'existence du risque grave justifiant le recours à une expertise doit être appréciée au moment de la délibération du CHSCT ; que le tribunal qui, pour annuler la délibération du CHSCT en date du 15 octobre 2019, s'est fondé sur l'absence supposée de troubles persistants et actuels des agents du CHU [Établissement 1] alors qu'il lui fallait seulement rechercher si, le 15 octobre 2019, il existait pour les agents du CHU [Établissement 1] un risque grave de subir les conséquences sur leur santé de l'incendie de l'usine [B] a violé les dispositions de l'article L. 4614-12 du code du travail ;

2°/ que la gravité d'un risque justifiant l'appel à un expert est suffisamment caractérisée par l'importance des dommages prévisibles encourus ; que le tribunal qui a constaté la combustion de milliers de tonnes de produits toxiques et la retombée de particules potentiellement cancérigènes tout en déniant le risque grave existant à la date de la délibération du CHSCT n'a pas tiré de ses constatations les conséquences légales qu'elles induisaient et a violé l'article L. 4614-12 du code du travail ;

5°/ que l'existence du risque grave justifiant le recours à une expertise doit être appréciée au moment de la délibération du CHSCT ; que l'ordonnance attaquée a retenu que "dans un second temps la qualité de l'air a été de nouveau mesurée", et il a été indiqué que "l'air ne dépasse pas les seuils réglementaires" sans indiquer si ce second temps se référait à une période antérieure ou postérieure à la délibération du 15 octobre 2019 ; que le tribunal a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 4614-12 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 4614-12,1°, du code du travail :

5. Aux termes de ce texte, le CHSCT peut faire appel à un expert agréé lorsqu'un risque grave, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l'établissement.

6. Pour annuler l'expertise décidée par le CHSCT par délibération du 15 octobre 2019, l'ordonnance retient que, dans un second temps, la qualité de l'air a été de nouveau mesurée et il a été indiqué que « l'air ne dépasse pas les seuils réglementaires », que plusieurs campagnes de prélèvement ont notamment recherché des traces de dioxine, il n'a pas été retrouvé de traces significatives, qu'un toit en fibrociment ayant brûlé, il a été recherché des traces d'amiante dans l'air, que les résultats ont révélé des concentrations en fibre inférieures à trois fibres par litre d'air, le seuil de gestion actuel déterminé par le ministère de la santé étant, ainsi qu'il résulte du document de l'Andeva produit par les défendeurs, fixé à cinq fibres par litre d'air, qu'il ressort de ces éléments que les analyses menées par l'INERIS n'ont pas établi de danger et que ces résultats, communiqués par l'agence régionale de Santé, n'ont pas davantage mis en avant de risques qui nécessiteraient des mesures de protection de la population, la description de ces analyses ayant été présentée, sous serment, aux commissions d'enquête parlementaires en novembre 2019.

7. En se déterminant ainsi, alors d'une part que l'ordonnance constate par ailleurs qu'il est constant que l'incendie survenu dans l'usine [B] [Localité 1] le 26 septembre 2019 a produit dans un premier temps un large nuage de fumée, qui s'est étendu sur plus de 20 km, puis dans un second temps a entraîné des retombées de suies, qu'il est également avéré que de très nombreux produits toxiques ont brûlé lors de cet incendie et notamment des hydrocarbures aromatiques polycycliques, que de nombreuses personnes présentes sur le périmètre impacté par le nuage de fumée se sont plaintes de troubles et de gênes, et alors d'autre part que l'existence du risque grave justifiant le recours à une expertise doit être appréciée au moment de la délibération du CHSCT, le président du tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'elle annule la délibération du CHSCT central du CHU [Établissement 1] en date du 15 octobre 2019, l'ordonnance rendue le 21 janvier 2020, entre les parties, par le président du tribunal judiciaire [Localité 1] ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cette ordonnance et les renvoie devant le président du tribunal judiciaire de Dieppe, statuant en la forme des référés ;

Condamne le centre hospitalier universitaire [Établissement 1] aux dépens ;

En application de l'article L. 4614-13 du code du travail, condamne le centre hospitalier universitaire [Établissement 1] à payer à la SCP Lyon-Caen et Thiriez la somme de 3 600 euros TTC ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance partiellement cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour le CHSCT central du centre hospitalier universitaire de Rouen

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'AVOIR annulé la délibération du CHSCT central du CHU [Établissement 1] en date du 15 octobre 2019 et condamné le CHU [Établissement 1] à payer au CHSCT la seule somme de 7.000 ? au titre de ses frais de justice ;

Aux motifs qu'aux termes de l'article L. 4614-13 alinéa 2 du code du travail « [?] l'employeur qui entend contester la nécessité de l'expertise, la désignation de l'expert, le coût prévisionnel de l'expertise tel qu'il ressort, le cas échéant, du devis, l'étendue ou le délai de l'expertise saisit le juge judiciaire dans un délai de quinze jours à compter de la délibération » du CHSCT ; la délibération a été prise par le CHSCT le 15 octobre 2019 et l'assignation date du 25 octobre 2019, elle est donc recevable ; l'article L. 4614-12 du même code prévoit que « le CHSCT peut faire appel à un expert agréé lorsqu'un risque grave, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l'établissement » ; de jurisprudence constante, dans le cadre de sa mission de prévention et protection de la santé et de la sécurité des travailleurs de l'établissement, le CHSCT peut faire appel à un expert, doit démontrer l'existence de ce risque, qui doit être grave, identifié, actuel et prouvé préalablement à la demande, la désignation de l'expert ne pouvant avoir pour but de rechercher l'existence d'un tel risque ; 1- le CHSCT dans sa délibération du 15 octobre 2019 caractérise le risque par « une exposition prolongée des agents du CHU [Établissement 1] aux émanations provoquées par le nuage de fumée d'une ampleur extraordinaire, suite à l'incendie de l'usine [B] et qui a eu pour conséquence de provoquer certains troubles physiques (maux de tête, nausées et/ou étourdissements) chez plusieurs agents » et produit en premier lieu dans le cadre des débats de très nombreuses données scientifiques sur la dangerosité des produits présents sur le site et des études sur la notion « d'effet cocktail » ; il est constant que l'incendie survenu dans l'usine [B] [Localité 1] le 26 septembre 2019 a produit dans un premier temps un large nuage de fumée, qui s'est étendu sur plus de 20 km, puis dans un second temps a entraîné des retombées de suies ; il est également avéré que de très nombreux produits toxiques ont brûlé lors de cet incendie, et notamment des hydrocarbures aromatiques polycycliques et de nombreuses personnes présentes sur le périmètre impacté par le nuage de fumée se sont plaintes de troubles et de gênes ; afin de déterminer les dangers et les risques éventuels et par conséquent les mesures de protection qui pourraient s'avérer nécessaires pour la population, de nombreux organismes, parmi lesquels l'Institut National de l'Environnement Industriel et des Risques (INERIS) ont procédé à des analyses qui ont porté sur l'eau et l'air ; l'analyse de l'eau réalisée par un laboratoire indépendant, en lien avec l'Agence Régionale de Santé, a conclu à l'absence de contamination et à la possibilité de consommer l'eau ; l'analyse de l'air, confié à l'INERIS à partir de prélèvements effectués par un laboratoire agréé Atmo a dans un premier temps, alors que l'incendie était en cours, conclu à « l'absence de toxicité aigüe » ; aucun confinement n'a été ordonné par les autorités ; dans un second temps, la qualité de l'air a été de nouveau mesurée, et il a été indiqué que « l'air ne dépasse pas les seuils réglementaires » ; plusieurs campagnes de prélèvement ont notamment recherché des traces de dioxine, il n'a pas été retrouvé de traces significatives ; à la suite de l'incendie des suies sont retombées, pour le traitement desquelles des mesures de protection ont été recommandées. Le CHSCT ne fait toutefois pas mention dans sa délibération de la présence de telles suies sur l'emprise des différents établissements du CHU [Établissement 1] ; enfin, un toit en fibrociment ayant brûlé, il a été recherché des traces d'amiante dans l'air. Les résultats ont révélé des concentrations en fibre inférieures à 3 fibres par litre d'air, le seuil de gestion actuel déterminé par le ministère de la santé étant, ainsi qu'il résulte du document de l'Andeva produit par les défendeurs, fixé à 5 fibres par litre d'air ; il ressort de ces éléments que les analyses menées par l'INERIS n'ont pas établi de danger. Ces résultats, communiqués par l'agence régionale de Santé, n'ont pas davantage mis en avant de risques qui nécessiteraient de mesures de protection de la population. La description de ces analyses a été présentée, sous serment, aux commissions d'enquête parlementaires en novembre 2019. Il est évoqué, en particulier, les nombreuses analyses subies par les pompiers qui sont intervenus sur le sinistre et font l'objet d'un suivi médical renforcé. Les résultats au 20 novembre 2019, date de l'audition du colonel [T], directeur du service départemental incendie et de secours de la Seine Maritime, ne présentent aucune anomalie ; enfin, le CHSCT lors des débats fait état de risques liés aux effets cocktail dus à la combustion des différents produits toxiques présents sur le site. Les analyses produites, si elles démontrent que de tels effets peuvent être mis en évidence dans le cas d'expériences menées in vitro avec des pesticides, sont sans rapport direct avec le cas d'espèce et ne peuvent en l'occurrence caractériser un risque identifié pour les personnels du CHU, le directeur général de l'INERIS précisant « qu'une évaluation exhaustive des risques demande des mois de travail pour recenser toutes les données et pour conduire une évaluation quantitative reposant sur l'ensemble du spectre des données et des aspects de l'incident » ; 2- le CHSCT au cours de la procédure s'appuie en second lieu sur des attestations pour établir un risque grave et actuel constaté dans l'établissement ; le CHU [Établissement 1] compte environ 10.000 employés. Dix-sept attestations sont versées aux débats. Toutes sont produites après la délibération et les attestants témoignent de maux de tête, de gorges et voies respiratoires irritées, d'yeux larmoyants et une personne fait état d'une crise d'asthme. Les gênes sont décrites comme subies pendant quelques jours, une employée évoque quatre semaines. Une seule employée évoque une gêne persistante, en évoquant le 5 novembre, soit environ 6 semaines après les faits, « sentir des effets tant au niveau pulmonaire que psychologique » ; sous réserve de cet unique témoignage, aucun employé ne fait état de trouble persistant et actuel ; par ailleurs, aucun certificat médical n'est produit. Enfin, le CHU produit le recensement des arrêts maladie sur chacun des sites, lequel ne met en évidence aucune augmentation ; ainsi, aucun indicateur ne laisse présumer que le personnel serait exposé à un niveau élevé de probabilité de survenance d'atteintes significatives à son intégrité physique ou mentale ; la délibération, prise en considération d'une « exposition prolongée des agents du CHU [Établissement 1] aux émanations provoquées par le nuage de fumée d'une ampleur extraordinaire, suite à l'incendie de l'usine [B] et qui a eu pour conséquence de provoquer certains trouble physiques (maux de tête, nausées et/ou étourdissements chez plusieurs agents » ne caractérise pas de risque grave au regard des symptômes temporaires décrits, étant relevé qu'aucune attestation ne fait état d'étourdissements, et les éléments produits au cours des débats ne caractérisent pas de risque avéré et certain ; ce défaut de caractérisation du risque se déduit également de la mission confiée à l'expert, qui vise à « déterminer l'existence et la nature des facteurs des risques éventuels de dégradation de la santé physique et mentale des personnels, liés à l'incendie de l'usine [B] et à ses suites » ; il résulte de l'ensemble de ces éléments que si l'exposition des agents aux fumées consécutives à l'incendie, en particulier pour ceux exerçant au sein des établissements [Localité 2] et [Localité 3], n'est pas contestée, le CHSCT sur lequel pèse la charge de la preuve ne caractérise pas de pollution particulière ni de pathologie ou trouble persistant, qui établiraient un risque grave, avéré et certain auquel seraient exposés dans leur établissement les employés du CHU [Établissement 1] ; la désignation de l'expert ne pouvant avoir pour objectif de rechercher l'existence d'un risque, il convient d'annuler la délibération du CHSCT du 15 octobre 2019 ; le CHSCT produit deux factures de 7200 ? TTC pour 29 heures de travail puis 3600 ? TTC pour 14,5 heures supplémentaires pour ses avocats plaidants. Compte tenu de la contestation élevée sur ce montant par le CHU et des diligences effectivement accomplies par le conseil du CHSCT, il sera alloué au CHSCT, la somme globale de 7000 ? ;

1.- ALORS QUE l'existence du risque grave justifiant le recours à une expertise doit être appréciée au moment de la délibération du CHSCT ; que le tribunal qui, pour annuler la délibération du CHSCT en date du 15 octobre 2019, s'est fondé sur l'absence supposée de troubles persistants et actuels des agents du CHU [Établissement 1] alors qu'il lui fallait seulement rechercher si, le 15 octobre 2019, il existait pour les agents du CHU [Établissement 1] un risque grave de subir les conséquences sur leur santé de l'incendie de l'usine [B] a violé les dispositions de l'article L. 4614-12 du code du travail ;

2.- ALORS QUE la gravité d'un risque justifiant l'appel à un expert est suffisamment caractérisée par l'importance des dommages prévisibles encourus ; que le tribunal qui a constaté la combustion de milliers de tonnes de produits toxiques et la retombée de particules potentiellement cancérigènes tout en déniant le risque grave existant à la date de la délibération du CHSCT n'a pas tiré de ses constatations les conséquences légales qu'elles induisaient et a violé l'article L. 4614-12 du code du travail ;

3.-ALORS QUE dans ses écritures le CHSCT de Rouen[Établissement 1] insistait sur le risque grave prévisible dû à l'« effet cocktail » engendré par les interactions de plusieurs molécules fussent-elles non dangereuses en soi ; que le tribunal qui n'a pas répondu à ce moyen déterminant a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4.- ALORS QUE dans ses conclusions le CHSCT Central du CHU de Rouen[Établissement 1] soulignait que l'incendie avait eu lieu dans une usine classée SEVESO seuil haut, ce qui suffisait à mettre en évidence la gravité du sinistre et de ses conséquences ; que le tribunal qui n'a même pas mentionné dans les développements de son ordonnance qu'il s'agissait d'un établissement classé Seveso et n'a ipso facto pas examiné le moyen déterminant développé par le CHSCT a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5.- ALORS QUE l'existence du risque grave justifiant le recours à une expertise doit être appréciée au moment de la délibération du CHSCT ; que l'ordonnance attaquée a retenu que « dans un second temps la qualité de l'air a été de nouveau mesurée, et il a été indiqué que « l'air ne dépasse pas les seuils réglementaires » sans indiquer si ce second temps se référait à une période antérieure ou postérieure à la délibération du 15 octobre 2019 ; que le tribunal a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 4614-12 du code du travail ;

6.- ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que dans ses conclusions le CHSCT Central du CHU de Rouen[Établissement 1] faisait valoir que la Préfecture de Seine Maritime[Localité 4] avait enjoint à la population de prendre des mesures draconiennes pour éviter la contamination, que des pompiers avaient été hospitalisés et que le lait maternel avait été contaminé ; que ces éléments de preuve régulièrement versés aux débats établissaient à eux seuls la gravité du risque encouru ; que le tribunal qui n'a pas examiné ces éléments de preuve déterminants a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-12072
Date de la décision : 12/05/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal judiciaire de Rouen, 21 janvier 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 mai. 2021, pourvoi n°20-12072


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.12072
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