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15/04/2021 | FRANCE | N°19-25842

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 15 avril 2021, 19-25842


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 15 avril 2021

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 341 F-D

Pourvoi n° H 19-25.842

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 15 AVRIL 2021

La société Tokio Marine Europe, société anonyme, dont le siège est

[Adresse 1] (Luxembourg), et dont la succursale en France est située [Adresse 2], a formé le pourvoi n° H 19-25.842 contre l'arrêt rendu le 16 oct...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 15 avril 2021

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 341 F-D

Pourvoi n° H 19-25.842

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 15 AVRIL 2021

La société Tokio Marine Europe, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1] (Luxembourg), et dont la succursale en France est située [Adresse 2], a formé le pourvoi n° H 19-25.842 contre l'arrêt rendu le 16 octobre 2019 par la cour d'appel de Rouen (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [A] [Q], domiciliée [Adresse 3],

2°/ à la société Unicarriers France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4], venant aux droits de la société Atlet,

3°/ à la société Logistique Manutention Maintenance L2M, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 5],

4°/ à la société Brico dépôt, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 6],

5°/ à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) [Localité 1], dont le siège est [Adresse 7],

6°/ à la société Aprionis prévoyance radiance groupe Humanis, dont le siège est [Adresse 8],

défenderesses à la cassation.

Mme [Q] a formé un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi incident éventuel invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Kermina, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Tokio Marine Europe, de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de Mme [Q], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Unicarriers France, de la SCP Zribi et Texier, avocat de la société Logistique Manutention Maintenance L2M, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Brico dépôt et de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) [Localité 1], et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 10 mars 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Kermina, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 16 octobre 2019), Mme [Q], salariée de la société Brico dépôt, a été victime le 4 novembre 2011 d'un accident du travail, alors qu'elle utilisait un chariot élévateur équipé d'une nacelle, dans laquelle elle se trouvait et qui s'est décrochée, entraînant une chute d'une hauteur de 4 mètres.

2. Mme [Q] a assigné devant un tribunal de grande instance la société Unicarriers France (la société Unicarriers), fabricant du chariot élévateur, la caisse primaire d'assurance maladie [Localité 2], devenue Rouen-Elbeuf-Dieppe-Seine-Maritime (la caisse) et la société Aprionis prévoyance radiance groupe Humanis en réparation de son préjudice, selon les règles du droit commun.

3. La société Unicarriers a assigné en garantie devant le même tribunal son assureur, la société Tokio Marine Kiln Insurance Limited, devenue Tokio Marine Europe (la société Tokio Marine), la société Brico dépôt et la société Logistique manutention maintenance L.2.M, loueur du chariot élévateur.

4. Le 12 octobre 2017, la société Tokio Marine a interjeté un appel du jugement l'ayant condamné in solidum avec la société Unicarriers à indemniser Mme [Q], dont l'objet a été libellé "appel total", tandis que le 19 octobre 2017, la société Unicarriers, intimant Mme [Q], la caisse et la société Logistique manutention maintenance L.2.M, a interjeté appel du même jugement en énonçant les dispositions lui faisant grief qu'elle critiquait.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi principal de la société Tokio Marine, pris en ses deux premières branches, ci-après annexé

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen du pourvoi principal de la société Tokio Marine, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

6. La société Tokio Marine fait grief à l'arrêt de dire que l'appel interjeté par elle, dépourvu d'effet dévolutif, n'a saisi la cour d'aucune critique des dispositions du jugement entrepris et que ces dispositions sont devenues définitives à son égard et à celui de la société Brico dépôt et de la mutuelle Aprionis prévoyance, alors « qu'en tout état de cause la dévolution s'opère pour le tout lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible ; que le litige qui oppose la victime d'un dommage au responsable et à l'assureur de celui-ci est indivisible entre l'assureur et l'assuré ; qu'en jugeant néanmoins, que la déclaration d'appel ne lui avait pas dévolu l'entier litige, la cour d'appel a violé l'article 562 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Sur la recevabilité du grief, contestée par la défense

7. Il ne ressort ni de l'arrêt ni des pièces de la procédure que la société Tokio Marine ait invoqué devant les juges du fond, à fin de voir produire un effet dévolutif à l'appel formé par l'assureur en méconnaissance des dispositions de l'article 901, alinéa 1er, 4°, du code de procédure civile, l'indivisibilité, entre l'assuré et l'assureur, du litige opposant la victime d'un dommage au responsable et à son assureur. Le moyen nouveau et mélangé de fait et de droit, est irrecevable.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi incident qui n'est qu'éventuel, la Cour :

REJETTE le pourvoi principal ;

Condamne la société Tokio Marine Europe aux dépens du pourvoi principal ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile sur le pourvoi principal, rejette la demande formée par la société Tokio Marine Europe et la condamne à payer à la société Unicarriers France la somme de 3000 euros, à la caisse primaire d'assurance maladie [Localité 1] la somme de 3000 euros, à la société Brico dépôt la somme de 3 000 euros, à Mme [Q], la somme de 3000 euros et à la société Logistique manutention maintenance L.2.M la somme de 3 000 euros ;

Condamne Mme [Q] aux dépens du pourvoi incident ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile sur le pourvoi incident, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du quinze avril deux mille vingt et un et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code procédure civile.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Tokio Marine Europe

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que l'appel interjeté par la société Tokio Marine Europe, dépourvu d'effet dévolutif, n'a saisi la cour d'aucune critique des dispositions du jugement entrepris et que ces dispositions sont devenues définitives à l'égard de la société Tokio Marine Europe, de la société Brico Dépot et de la mutuelle Aprionis Prévoyance ;

AUX MOTIFS QUE pour s'opposer au rejet de ses demandes consécutives à l'absence d'effet dévolutif de son appel, la société Tokio Marine invoque l'avis rendu par la cour de cassation le 20 décembre 2017, dont il résulte que le non-respect des dispositions de l'article 562 du code de procédure civile ne peut donner lieu à l'exercice d'une fin de non-recevoir, le fait d'exercer un appel "total" constituant seulement un vice de forme qui ne peut être sanctionné que dans certaines conditions et sous réserve de la démonstration d'un grief ; QU'elle ajoute que le conseiller de la mise en état, en rejetant la nullité de l'appel qui était sollicitée, a admis de fait l'effet dévolutif de l'appel, lequel porte sur les chefs de jugement critiqués dans ses conclusions régulièrement notifiées dans le délai prévu par l'article 908 du code de procédure civile ; QUE toutefois, le conseiller de la mise en état, s'il a débouté les sociétés Unicarriers et Brico Dépot de leur demande de nullité de la déclaration d'appel de la société Tokio Marine et de leurs demandes d'irrecevabilité des conclusions et pièces de cette dernière, s'est déclaré incompétent pour évaluer l'étendue de la saisine de la cour par l'effet dévolutif de l'appel, en retenant que seule la cour statuant au fond avait compétence de ce chef ;

QU'il résulte de l'article 562 du code de procédure civile dans sa rédaction issue du décret du 6 mai 2017 que : "L'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. La dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible." ; QU'en l'espèce, l'acte d'appel, dit "total" ne tend pas à l'annulation du jugement entrepris et il n'est pas prétendu ni établi que l'objet du litige serait indivisible ; QU'il ne vise expressément l'une quelconque des dispositions du jugement entrepris ; QUE dès lors que seule la déclaration d'appel emporte dévolution du litige, il ne peut y avoir d'effet dévolutif en l'absence de chefs de jugement expressément critiqués ;

QUE pour le même motif, les conclusions ultérieures ne peuvent suppléer à cette absence d'effet dévolutif ;

QUE la cour constatera en conséquence que l'appel interjeté par la société Tokio Marine ne l'a pas valablement saisie du litige à l'encontre de Madame [Q], des sociétés L2M, Unicarriers et Brico Dépot, de la CPAM et de la mutuelle Aprionis Prévoyance ;

QUE dès lors que les sociétés Tokio Marine, Brico Dépot ainsi que la mutuelle Aprionis n'ont pas été intimées sur l'autre appel principal interjeté par la société Unicarriers, les dispositions du jugement entrepris concernant ces trois parties sont définitives ;

1- ALORS QU'en jugeant que « la déclaration d'appel déposée par la société Tokio Marine Europe était dépourvue d'effet dévolutif, tout en constatant qu'en l'espèce, l'acte d'appel vise un appel « total » et n'a pas été annulé par le conseiller de la mise en état, faute pour l'irrégularité alléguée de faire grief à l'intimée, la cour d'appel a violé l'article 562 du code de procédure civile, ensemble l'article 6-1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2- ALORS QUE les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910 du code de procédure civile, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond ; que la régularisation de l'acte d'appel peut ainsi intervenir dans les conclusions déposées dans ce délai, dès lors qu'elles précisent les chefs critiqués du jugement, et n'a pas nécessairement à prendre la forme d'une seconde déclaration d'appel ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 562, 910-4, alinéa 1, et 954, alinéa 1, du code de procédure civile ;

3- ALORS QU'en tout état de cause la dévolution s'opère pour le tout lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible ; que le litige qui oppose la victime d'un dommage au responsable et à l'assureur de celui-ci est indivisible entre l'assureur et l'assuré ; qu'en jugeant néanmoins, que la déclaration d'appel ne lui avait pas dévolu l'entier litige, la cour d'appel a violé l'article 562 du code de procédure civile.
Moyen produit au pourvoi incident éventuel par la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat aux Conseils, pour Mme [Q],

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué de débouter Mme [Q] de ses demandes envers la société Unicarriers France ;

AUX MOTIFS QUE pour déclarer la société Unicarriers responsable du préjudice causé à Madame [Q] suite à l'accident du 4/4/2011 sur le fondement des articles 1245 du code civil et L 454-1 du code de la sécurité sociale, le premier juge a retenu qu'il résulte de l'enquête de police et notamment du procès-verbal de constatation sur place le jour des faits que la nacelle du chariot à poste de conduite élevable est tombée verticalement alors qu'elle était à 4 mètres au-dessus du sol, que 2 éviers avaient déjà été chargés, que 2 courroies étaient sorties de la poulie, constatation confirmée par huissier de justice le 19/4/2011 ; que l'Apave, organisme indépendant agréé par l'inspection du travail a vérifié l'état de conformité du chariot, a établi un rapport en date du 12/7/2011 faisant état d'un certain nombre de non-conformités du chariot élévateur litigieux ; qu'il a considéré que ces éléments lui permettait de retenir pour cause de l'accident l'existence de défectuosités du chariot dans sa conception et sa mise en circulation puisque les courroies sont sorties de leur poulie sans être dotées d'un dispositif de sécurité et que l'engin ne répondait pas aux normes de sécurité requises attendues, notamment au ralentissement de la chute de l'appareil et quant à l'information sur la stabilité du chariot, sur le coefficient de rupture de chaîne de levage, sur la charge maximale et les conditions de répartition sur la plate-forme ; que toutefois la responsabilité du fait des produits défectueux suppose que le dommage invoqué soit causé par un défaut du produit ce qui implique la nécessité de rapporter la double preuve de l'existence du défaut et du lien de causalité entre ce défaut et la survenance du dommage ; qu'en l'espèce, ainsi que le souligne la société Unicarriers, les circonstances de l'accident, qui résultent essentiellement des seules déclarations de la victime, ne sont pas établies avec certitude ; que le chariot élévateur, qui a été détruit plus d'un an après les faits, en l'absence d'action judiciaire entreprise, en raison de la fin du contrat de location et de sa vétusté, n'a pas fait l'objet d'une expertise aux fins de déterminer les causes de l'accident, mais seulement d'un examen visuel par les policiers enquêteurs le jour des faits, de plusieurs constats d'huissier dans les jours qui ont suivi, du rapport Apave mis en exergue par le tribunal ; que s'il a été constaté que deux courroies étaient sorties de leur logement ainsi que l'ont constaté la police et l'huissier, aucune explication technique n'a été fournie par quiconque pour déterminer le processus qui avait amené la nacelle à chuter de façon brutale d'une hauteur de 4 mètres sans que les dispositifs de sécurité permettent de freiner une telle chute ne fonctionnent ; qu'il est pourtant constant que lors des essais effectués le 14/6/2011 en présence des représentants des sociétés Brico dépôt et L2M et de l'Apave, les dispositifs de sécurité ont parfaitement fonctionné et aucune anomalie n'a été constatée ; ainsi que le souligne appelante, le chariot litigieux a été fourni à la société Brico-dépôt 5 ans avant les faits, a été entretenue par la société L2M et soumis aux vérifications périodiques concernant la sécurité par son utilisateur la société Brico-dépôt sans qu'aucune anomalie, non-conformité où défaillance ne soit constatée ; que le dernier examen périodique effectué par le Bureau Veritas le 11/3/2011, soit moins d'un mois avant l'accident, avait constaté l'absence de défectuosité où anomalie ; que s'agissant des non-conformités relevées par le rapport de l'Apave en date du 8/4/2011, la cour constate qu'aucun lien de causalité n'est établi entre d'une part le caractère incomplet du schéma électrique et du schéma hydraulique, l'absence d'informations sur les caractéristiques électriques des moteurs, l'absence de définition des conditions de transport et de manutention du chariot ou des interventions nécessaires sur l'électro frein, l'absence d'indication de la puissance nominale du chariot, l'absence de définition dans la notice d'instructions des critères de stabilité du chariot et les conditions de réalisation des épreuves statiques et dynamiques, l'absence d'informations relatives aux coefficients de rupture des chaînes de levage, l'absence d'indication de la charge maximale et de ses conditions de répartition dans la notice d'instructions ou encore des limites d'utilisation du chariot et d'autre part la survenance de l'accident qui selon le policier rédacteur du rapport d'enquête, seul à s'exprimer sur les causes du sinistre seraient consécutives au fait que les courroies sont sorties de leur logement ; que les conditions de stabilité du chariot, auquel l'Apave reproche de ne pas être définies dans la notice d'utilisation, n'apparaissent pas en lien avec la survenance de l'accident, aucun déséquilibre du chariot n'étant allégué par quiconque ; que le fait que la notice d'instruction ne détermine pas les différentes inspections et entretiens nécessaires pour des raisons de sécurité sur les chaînes de levage et sur l' électro frein est également sans lien avec l'accident puisqu'il résulte des pièces versées aux débats que ces inspections ont bien été réalisés, la dernière peu de temps avant l'accident ; que l'article 1.6.4 du rapport qui retient une non-conformité « compte tenu du risque de défaillance du circuit de commande mentionné à la règle technique 1.2.1 et des risques de chute mentionnée à la règle technique 1.5.15 » en affirmant que « les interventions des opérateurs peuvent ne pas se faire en sécurité » est particulièrement peu explicite, outre que l'article 1.2.1 du rapport vise le schéma électrique déjà citée ci-dessus tandis que les risques de chute évoqué sont dû « au non fonctionnement des dispositifs de inter-verrouillage des garde-corps relevable de la plateforme », à la « dégradation du tapis anti dérapant sur le plancher de la plateforme » et à la « déformation du garde-corps fixe à l'arrière de la plateforme », lesquels sont sans lien avec l'accident puisque Madame [Q] n'a pas chuté dans la plateforme, la chute étant celle de la nacelle sur laquelle elle avait pris place, étant en outre observé que la vétusté le chariot ne saurait être imputée à la société Unicarriers ; que le défaut de présentation du document « instructions de conduite des chariots électriques Atlet », outre qu'il est sans relation avec l'accident puisque Madame [Q] n'invoque aucune erreur de conduite, ne peut être reproché à la société Unicarriers qui n'a eu connaissance de l'établissement du rapport Apave que plusieurs années après sa rédaction et ne pouvait présenter un document qui ne lui avait pas été demandée ; que l'absence d'indication dans la notice d'instructions de la charge maximale et de ses conditions de répartition est sans relation avec l'accident alors qu'il résulte des pièces produites que le poids des 2 éviers chargés le jour des faits était notamment inférieur à la charge maximale de 1000 kilos ; que s'agissant de la fonction d'arrêt d'urgence, il résulte également des pièces versées aux débats qu'il existait lorsque le chariot a été livré au vu de l'attestation de conformité et de la description de l'engin, étant observé en outre que s'agissant d'un élément essentiel de sécurité, le Bureau Veritas qui avait examiné le chariot peu de temps avant l'accident aurait nécessairement signalé une telle non-conformité ; que la démonstration du lien de causalité entre la défectuosité du chariot et l'accident survenu suppose que l'origine de cet accident soit définie avec certitude ; qu'en l'espèce, la cour considère que tel n'est pas le cas, en l'absence de réalisation des investigations qui auraient pu permettre de connaître l'origine de la chute de la nacelle, alors que cet accident peut tout aussi bien être la conséquence d'un défaut de maintenance, de modifications apportées à la configuration du chariot, une faute de conduite ou d'une défectuosité de l'engin, sans que les éléments versés au débat permettent de trancher entre ces différentes hypothèses (arrêt attaqué, p. 11-12) ;

1°) ALORS QUE un produit est défectueux lorsqu'il ne présente pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre ; qu'en écartant la défectuosité du chariot litigieux, dont elle avait pourtant constaté que la chute de 4 mètres de la nacelle sur laquelle Mme [Q] était positionnée résultait de la sortie des courroies de leur logement et de l'absence de fonctionnement du dispositif de sécurité contre la chute, au motif qu'elle ne disposait pas de la connaissance certaine des raisons de cette défectuosité, une telle exigence n'était pas requise en l'état de telles constatations permettant de caractériser la défectuosité du chariot litigieux, la cour d'appel a violé l'article 1386-4, devenu1245-3, du code civil ;

2°) ALORS QU'en tout état de cause, la défectuosité d'un produit peut être établie par le recours à des présomptions graves, précises et concordantes ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si ses constatations sur la chute soudaine de la nacelle résultant de la sortie de ses courroies de leur logement et de l'absence de fonctionnement du dispositif de sécurité contre la chute ne constituaient des présomptions graves, précises et concordantes permettant d'établir la défectuosité du chariot litigieux, en l'absence d'autres causes explicatives du phénomène dommageable établies, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1386-9, devenu 1245-8, du code civil ;

3°) ALORS QU'en se bornant à constater qu'un dispositif d'arrêt d'urgence existait bien sur l'appareil litigieux, mais sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, s'il fonctionnait et présentait la sécurité à laquelle on pouvait légitimement s'attendre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1386-4, devenu 1245-3, du code civil ;

4°) ALORS QUE le producteur est responsable de plein droit du dommage causé par le défaut de son produit ; qu'en excluant toute responsabilité de la société Unicarriers, au motif que l'« accident peut tout aussi bien être la conséquence d'un défaut de maintenance, de modifications apportées à la configuration du chariot, une faute de conduite ou d'une défectuosité de l'engin, sans que les éléments versés au débat permettent de trancher entre ces différentes hypothèses », la cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres à exclure la responsabilité de plein droit du fabriquant et a violé l'article 1386-1, devenu 1245, du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 19-25842
Date de la décision : 15/04/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 16 octobre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 15 avr. 2021, pourvoi n°19-25842


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Piwnica et Molinié, SCP Zribi et Texier

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.25842
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