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14/04/2021 | FRANCE | N°19-26340

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 avril 2021, 19-26340


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC. / ELECT

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 14 avril 2021

Cassation

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 480 F-D

Pourvoi n° Y 19-26.340

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 14 AVRIL 2021

La Caisse d'épargne Bretagne Pays de Lo

ire, banque coopérative, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 19-26.340 contre le jugement rendu le 18 décembre 2019 par le tr...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC. / ELECT

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 14 avril 2021

Cassation

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 480 F-D

Pourvoi n° Y 19-26.340

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 14 AVRIL 2021

La Caisse d'épargne Bretagne Pays de Loire, banque coopérative, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 19-26.340 contre le jugement rendu le 18 décembre 2019 par le tribunal d'instance de Nantes (contentieux des élections professionnelles), dans le litige l'opposant :

1°/ au syndicat Unifié-UNSA, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à Mme [U] [C], domiciliée [Adresse 3],

3°/ à Mme [O] [X], domiciliée [Adresse 4],

4°/ à Mme [P] [J], domiciliée [Adresse 5],

5°/ à Mme [H] [T], domiciliée [Adresse 6],

6°/ à Mme [N] [E], domiciliée [Adresse 7],

7°/ à M. [S] [G], domicilié [Adresse 8],

défendeurs à la cassation.

Le syndicat Unifié-UNSA, Mmes [C], [X], [J], [T], [E] et M. [G] ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ott, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la Caisse d'épargne Bretagne Pays de Loire, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat du syndicat Unifié-UNSA, de Mmes [C], [X], [J], [T], [E] et de M. [G], après débats en l'audience publique du 3 mars 2021 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ott, conseiller rapporteur, M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire, ayant voix délibérative, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Nantes, 18 décembre 2019), au sein de la Caisse d'épargne Bretagne Pays de la Loire, un accord relatif à l'exercice syndical a été signé le 12 avril 2019 entre l'employeur et les organisations syndicales, prévoyant pour chaque organisation syndicale représentative la faculté de désigner jusqu'à quatre délégués syndicaux et pour les première et seconde organisations syndicales représentatives ayant « récolté le plus de voix », la possibilité de désigner respectivement deux et un délégués syndicaux supplémentaires.

2. En vue des élections professionnelles, un protocole d'accord préélectoral a été signé le 21 mai 2019 entre l'employeur et les organisations syndicales prévoyant notamment une répartition du personnel en deux collèges, premier collège des techniciens et agents de maîtrise et second collège des cadres, en fonction de la classification d'emploi figurant sur le bulletin de salaire.

3. Tous les sièges à pourvoir au comité social et économique ayant été attribués lors du premier tour de scrutin des élections qui n'ont pas fait l'objet de contestation, le syndicat Unifié UNSA (le syndicat) a informé l'employeur, par lettre du 28 octobre 2019, de la désignation de cinq délégués syndicaux en application de l'accord du 12 avril 2019 puis, par lettre du 30 octobre 2019, de la désignation de Mme [C] en qualité de délégué syndical supplémentaire en application de l'article L. 2143-4 du code du travail.

4. Par requête datée du 14 novembre 2019, reçue au greffe le 15 novembre 2019, l'employeur a saisi le tribunal d'instance aux fins d'annuler ces désignations, en faisant valoir notamment que le syndicat Unifié UNSA était la troisième organisation syndicale représentative ayant recueilli le plus de voix.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

5. L'employeur fait grief au jugement de le débouter de sa demande tendant à dire et juger que le syndicat Unifié-UNSA ne peut pas désigner cinq délégués syndicaux et à annuler, par conséquent, la désignation des cinq délégués syndicaux faite par courrier du 28 octobre 2019 et, subsidiairement, celle de Mme [O] [X] en qualité de cinquième déléguée syndicale, alors « que le juge a l'obligation de ne pas méconnaître les accords collectifs conclus par les partenaires sociaux dans l'entreprise ; qu'en l'espèce, les élections du comité social et économique de la Caisse d'Epargne Bretagne Pays de Loire reposent sur un scrutin de liste ; qu'en disposant que l'organisation syndicale représentative (OSR) "ayant récolté le plus de voix au premier tour des élections professionnelles se verra attribuer 2 délégués.es syndicaux.ales supplémentaires" et que "la seconde OSR ayant récolté le plus de voix se verra elle attribuer 1 délégué.e syndical.e supplémentaire", l'article 2.1 de l'accord collectif relatif à l'exercice syndical applicable au sein de cette Caisse, conclu le 12 avril 2019, fait référence au nombre de voix recueillies lors des élections professionnelles par les listes présentées par ces organisations syndicales représentatives et renvoie ainsi directement à l'audience obtenue par ces dernières ; qu'en affirmant au contraire que les signataires de l'accord relatif à l'exercice syndical ont entendu attribuer un ou deux délégué(s) syndical(aux) supplémentaire(s) aux organisations syndicales représentatives ayant obtenu le plus grand nombre de voix, calculé comme "le nombre total de voix recueillies par chacun personnellement des candidats desdites organisations syndicales", le tribunal d'instance a violé l'article 2.1 de l'accord collectif relatif à l'exercice syndical applicable au sein de la Caisse d'épargne Bretagne Pays de Loire, en date du 12 avril 2019. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 2.1 de l'accord collectif relatif à l'exercice syndical du 12 avril 2019 et l'article L. 2122-1 du code du travail :

6. Une convention ou un accord collectifs, s'ils manquent de clarté, doivent être interprétés comme la loi, c'est à dire d'abord en respectant la lettre du texte, ensuite en tenant compte d'un éventuel texte législatif ayant le même objet et, en dernier recours, en utilisant la méthode téléologique consistant à rechercher l'objectif social du texte.

7. L'article 2.1 de l'accord collectif relatif à l'exercice syndical du 12 avril 2019 prévoit que « chaque OSR dans l'entreprise a la faculté de désigner, parmi les candidats-es aux élections professionnelles qui remplissent les conditions prévues par la loi, jusqu'à 4 délégués-es syndicaux-ales. Au surplus l'OSR ayant récolté le plus de voix au premier tour des élections professionnelles se verra attribuer 2 délégués-es syndicaux-ales supplémentaires. La seconde OSR ayant récolté le plus de voix se verra elle attribuer 1 délégué-e syndical-e supplémentaire. »

8. Il résulte de ce texte que la faculté de désigner un ou deux délégués syndicaux supplémentaires n'est ouverte qu'aux organisations syndicales représentatives qui seules peuvent désigner des délégués syndicaux.

9. Aux termes de l'article L. 2122-1 du code du travail, dans l'entreprise ou l'établissement, sont représentatives les organisations syndicales qui satisfont aux critères de l'article L. 2121-1 et qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité social et économique, quel que soit le nombre de votants. Dès lors, le nombre de voix recueillies par les organisations syndicales à prendre en considération pour le décompte des suffrages exprimés en leur faveur est le nombre de suffrages exprimés au profit de chaque liste, sans qu'il y ait lieu, s'agissant de la mesure de la représentativité de ces organisations, de tenir compte d'éventuelles ratures de noms de candidats.

10. Il s'ensuit que l'ordre de classement pour l'attribution des délégués syndicaux supplémentaires, prévus par l'article 2.1 précité, s'établit selon la mesure de la représentativité des organisations syndicales ainsi définie.

11. Pour rejeter la demande d'annulation des cinq délégués syndicaux désignés par le syndicat, le jugement retient que les signataires de l'accord relatif à l'exercice syndical ont entendu attribuer un ou deux délégués syndicaux supplémentaires aux organisations syndicales représentatives ayant obtenu le plus grand nombre de voix calculé comme le nombre total des voix recueillies par chacun personnellement des candidats desdites organisations syndicales, que le syndicat Unifié UNSA ayant recueilli un total de 4 504 voix est la seconde organisation syndicale représentative ayant récolté le plus de voix et est donc fondée à désigner cinq délégués syndicaux.

12. En statuant ainsi, le tribunal a violé les textes susvisés.

Et sur le moyen du pourvoi incident, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

13. Le syndicat et les salariés font grief au jugement d'annuler la désignation de Mme [C] en qualité de déléguée syndicale supplémentaire sur le fondement de l'article L. 2143-4 du code du travail, effectuée par le syndicat Unifié UNSA le 30 octobre 2019, alors « qu'il ressort des articles L. 2143-4 et L. 2314-12 du code du travail que dans une entreprise d'au moins cinq cents salariés, la seule condition posée à la désignation par un syndicat représentatif d'un délégué syndical supplémentaire tient au fait d'avoir un élu dans le collège légal comprenant des ouvriers/employés ou dans un collège conventionnel regroupant ces derniers et des techniciens/agents de maîtrise ainsi qu'un élu dans un autre collège, quel que soit le nombre de collèges institués le cas échéant par voie conventionnelle ; qu'en retenant, pour dénier au syndicat Unifié UNSA le droit de désigner au sein de la Caisse d'épargne Bretagne Pays de Loire un délégué syndical supplémentaire, que la condition légale relative à la mise en place de trois collèges n'était pas remplie lors des élections du comité social et économique dès lors que le protocole d'accord préélectoral prévoyait la répartition du personnel en seulement deux collèges, le premier réunissant les salariés occupant les emplois de niveaux A à G, c'est-à-dire à la fois des employés et des techniciens et agents de maîtrise, et le second comprenant les cadres occupant les emplois de niveaux H et HC, cependant qu'il était constant que le syndicat Unifié UNSA disposait d'élus dans les deux collèges existants, le Tribunal d'instance a violé l'article L. 2143-4, ensemble l'article L. 2314-12 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 2143-4, L. 2314-11 et L. 2314-12 du code du travail :

14. Aux termes du premier de ces textes, dans les entreprises d'au moins cinq cents salariés, tout syndicat représentatif dans l'entreprise peut désigner un délégué syndical supplémentaire s'il a obtenu un ou plusieurs élus dans le collège des ouvriers et employés lors de l'élection du comité social et économique et s'il compte au moins un élu dans l'un des deux autres collèges.

15. Selon le dernier de ces textes, un accord peut modifier le nombre et la composition des collèges électoraux à condition d'être signé par toutes les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise.

16. La possibilité offerte aux organisations syndicales par une convention ou un accord collectif de travail plus favorable qui prévoit la désignation d'un délégué supplémentaire en sus du nombre de délégués syndicaux résultant de la loi ne saurait les priver, lorsqu'elles réunissent les conditions posées par l'article L. 2143-4 du code du travail, du droit de désigner un délégué syndical supplémentaire appartenant au personnel de l'encadrement.

17. Pour annuler la désignation de la salariée en qualité de délégué syndical supplémentaire, le jugement énonce que le protocole d'accord préélectoral du 21 mai 2019, en ne prévoyant que deux collèges, supprime ipso facto la possibilité pour les organisations syndicales représentatives de désigner un délégué syndical supplémentaire puisque la double condition d'avoir obtenu à la fois au moins un élu dans le collège des ouvriers et employés et au moins un élu dans un des deux autres collèges est exclue.

18. En statuant ainsi, alors qu'il avait constaté que le protocole d'accord préélectoral, signé par l'ensemble des organisations syndicales présentes dans l'entreprise, prévoyait la répartition du personnel en deux collèges, soit un premier collège pour les techniciens et agents de maîtrise et un second collège pour les cadres, de sorte qu'une organisation syndicale ayant obtenu des élus dans les deux collèges conventionnels ne pouvait être privée du droit de désigner un délégué syndical supplémentaire appartenant au personnel de l'encadrement, le tribunal a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 18 décembre 2019, entre les parties, par le tribunal d'instance de Nantes ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Saint-Nazaire ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze avril deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit, au pourvoi principal, par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la Caisse d'épargne Bretagne Pays de Loire

Il est fait grief au jugement attaqué D'AVOIR débouté la Caisse d'Epargne Bretagne Pays de Loire de sa demande tendant à dire et juger que le syndicat Unifié-UNSA ne peut pas désigner cinq délégués syndicaux et à annuler, par conséquent, la désignation des cinq délégués syndicaux faite par courrier du 28 octobre 2019 et, subsidiairement, celle de Mme [O] [X] en qualité de cinquième déléguée syndicale.

AUX MOTIFS QUE sur la demande d'annulation de la désignation par le syndicat Unifié-UNSA de 5 délégués syndicaux faite par courrier du 28 octobre 2019 ; que l'article L 2143-3 du code du travail édicte que « chaque organisation syndicale représentative dans l'entreprise ou l'établissement d'au moins cinquante salariés, qui constitue une section syndicale, désigne parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli à titre personnel et dans leur collège au moins 10 °/d des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité social et économique, quel que soit le nombre de votants, dans les limites fixées à l'article L. 2143-12, un ou plusieurs délégués syndicaux pour la représenter auprès de l'employeur » ; que le délégué syndical ne peut donc être choisi que parmi les salariés qui, candidats aux élections professionnelles, ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour ; que le délégué syndical a ainsi l'investiture des salariés qui lui ont personnellement accordé leurs votes ; que le nombre de délégués syndicaux est fixé par le code du travail en fonction de l'effectif de l'entreprise ; que ce nombre peut être augmenté par convention ou accord collectif ; qu'en l'espèce, l'accord relatif à l'exercice syndical signé le 12 avril 2019 par la Caisse d'Epargne Bretagne Pays de Loire et les quatre organisations syndicales présentes dans l'entreprise stipule que « chaque OSR dans l'entreprise a la faculté de désigner, parmi les candidats.es aux élections professionnelles qui remplissent les conditions prévues par la loi jusqu'à 4 déléguées syndicaux.ales. Au surplus, l‘OSR ayant récolté le plus de voix au premier tour des élections professionnelles se verra attribuer 2 délégués.es syndicaux.ales supplémentaires. La seconde OSR ayant récolté le plus de voix se verra elle attribuer 1 délégué.e syndical.e supplémentaire » ; qu'au regard de ce qui précède, il y a lieu de retenir que les signataires de l'accord relatif à l'exercice syndical ont entendu attribuer un ou deux délégué(s) syndical(aux) supplémentaire(s) aux organisations syndicales représentatives ayant obtenu le plus grand nombre de voix calculé comme le nombre total de voix recueillies par chacun personnellement des candidats desdites organisations syndicales ; qu'en l'espèce, à l'issue du premier tour des élections professionnelles, la CFDT a recueilli un total de 6 382 voix, le syndicat Unifié-UNSA un total de 4 504 voix, SUD un total de 4.308 voix et la CGC un total 2.592 voix ; que le syndicat Unifié-UNSA est donc la seconde OSR ayant récolté le plus de voix ; qu'elle est donc fondée à désigner 5 délégués syndicaux et la société Caisse d'Epargne Bretagne Pays de Loire est déboutée de sa demande d'annulation sur ce point ; que sur les demandes accessoires, le tribunal statue sans frais et dépens ; que selon l'article 700 du code de procédure civile, « dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu‘il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ; qu'aucune circonstance tirée de l'équité ne justifie de faire droit aux demandes des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas méconnaître les accords collectifs conclus par les partenaires sociaux dans l'entreprise ; qu'en l'espèce, les élections du comité social et économique de la Caisse d'Epargne Bretagne Pays de Loire reposent sur un scrutin de liste ; qu'en disposant que l'organisation syndicale représentative (OSR) « ayant récolté le plus de voix au premier tour des élections professionnelles se verra attribuer 2 délégués.es syndicaux.ales supplémentaires » et que « la seconde OSR ayant récolté le plus de voix se verra elle attribuer 1 délégué.e syndical.e supplémentaire », l'article 2.1 de l'accord collectif relatif à l'exercice syndical applicable au sein de cette Caisse, conclu le 12 avril 2019, fait référence au nombre de voix recueillies lors des élections professionnelles par les listes présentées par ces organisations syndicales représentatives et renvoie ainsi directement à l'audience obtenue par ces dernières ; qu'en affirmant au contraire que les signataires de l'accord relatif à l'exercice syndical ont entendu attribuer un ou deux délégué(s) syndical(aux) supplémentaire(s) aux organisations syndicales représentatives ayant obtenu le plus grand nombre de voix, calculé comme « le nombre total de voix recueillies par chacun personnellement des candidats desdites organisations syndicales », le tribunal d'instance a violé l'article 2.1 de l'accord collectif relatif à l'exercice syndical applicable au sein de la Caisse d'Epargne Bretagne Pays de Loire, en date du 12 avril 2019.

Moyen produit, au pourvoi incident, par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour le syndicat Unifié-UNSA, Mmes [C], [X], [J], [T], [E] et M. [G]

Ce moyen reproche au jugement attaqué d'avoir annulé la désignation de Madame [U] [C] en qualité de déléguée syndicale supplémentaire sur le fondement de l'article L.2143-4 du code du travail, effectuée par le syndicat Unifié UNSA le 30 octobre 2019 ;

AUX MOTIFS QUE l'article L.2143-4 du code du travail énonce que « dans les entreprises d'au moins cinq cents salariés, tout syndicat représentatif dans l'entreprise peut désigner un délégué syndical supplémentaire s'il a obtenu un ou plusieurs élus dans le collège des ouvriers et employés lors de l'élection du comité social et économique et s'il compte au moins un élu dans l'un des deux autres collèges. Ce délégué supplémentaire est désigné parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli au moins 10% des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité social et économique, quel que soit le nombre de votants. » ; que l'accord relatif à l'exercice syndical signé le 12 avril 2019 par la Caisse d'Epargne Bretagne Pays de Loire et les quatre organisations syndicales présentes dans l'entreprise stipule en application de cet article que « tout syndicat représentatif peut désigner un.e délégué.e syndicale supplémentaire s'il a obtenu un ou plusieurs élus.es dans le collège des ouvriers.ères et employés.es lors de l'élection du CSE et s'il compte au moins un. e élu. e dans l'un des deux autres collèges. » ; qu'il s'évince des termes ci-dessus que la Caisse d'Epargne Bretagne Pays de Loire et les quatre organisations syndicales présentes dans l'entreprise ont entendu s'inscrire strictement dans les termes de la loi en ce qui concerne la possibilité pour les organisations syndicales représentatives de désigner un délégué syndical supplémentaire, à savoir, d'une part, les termes de l'article L.2324-11 du code du travail qui fixe à trois le nombre légal de collèges dans une entreprise comme celle de la Caisse d'Epargne Bretagne Pays de Loire, d'autre part, les termes de l'article L.2143-4 du code du travail fixant 3 conditions cumulatives imposées aux syndicats pour la désignation : être représentatif dans l'entreprise, avoir obtenu au moins un élu dans le collège des ouvriers et employés et avoir obtenu au moins un élu dans un des deux autres collèges, mais aussi une condition relative au nombre de collèges - qu'il y ait trois collèges -, l'objectif du législateur ayant été d'assurer spécialement une représentation pour les cadres ; que le protocole d'accord préélectoral signé par les mêmes acteurs le 21 mai 2019, c'est-à-dire postérieurement à l'accord relatif à l'exercice syndical, prévoit la répartition du personnel pour les élections du CSE en 2 collèges : - 1er collège : techniciens et agents de maîtrise, ce qui correspond aux emplois de niveaux A à G c'est-à-dire comprenant à la fois des employés et des techniciens et agents de maîtrise ; - 2ème collège : cadres, ce qui correspond aux emplois de niveaux H et HC ; qu'il est certain que le second accord, en ne prévoyant que deux collèges, remet en cause les dispositions du premier accord et supprime ipso facto la possibilité pour les organisations syndicales représentatives de désigner un délégué syndical supplémentaire puisque la double condition d'avoir obtenu à la fois au moins un élu dans le collège des ouvriers et employés et au moins un élu dans un des deux autres collèges est exclue ; que le second accord a été signé par l'ensemble des organisations syndicales présentes dans l'entreprise, en toute connaissance de cause - si l'une ou l'autre d'entre elles n'avait pas été d'accord, l'obligation légale de prévoir trois collèges s'appliquait ; qu'il y a donc lieu de retenir que la commune intention des parties signataires du protocole d'accord préélectoral a été de contrevenir aux dispositions de l'accord sur l'exercice syndical relatives au délégué syndical supplémentaire prévu par l'article L.2143-4 du code du travail et de ne plus prévoir cette possibilité au sein de la Caisse d'Epargne Bretagne Pays de Loire pour la mandature à venir ; qu'en conséquence de quoi, la désignation par le syndicat Unifié-UNSA de madame [U] [C] en qualité de déléguée syndicale supplémentaire sur le fondement de l'article L.2143-4 du code du travail doit être annulée ;

ALORS D'UNE PART QU'il ressort des articles L.2143-4 et L.2314-12 du code du travail que dans une entreprise d'au moins cinq cents salariés, la seule condition posée à la désignation par un syndicat représentatif d'un délégué syndical supplémentaire tient au fait d'avoir un élu dans le collège légal comprenant des ouvriers/employés ou dans un collège conventionnel regroupant ces derniers et des techniciens/agents de maîtrise ainsi qu'un élu dans un autre collège, quel que soit le nombre de collèges institués le cas échéant par voie conventionnelle ; qu'en retenant, pour dénier au syndicat Unifié UNSA le droit de désigner au sein de la Caisse d'Epargne Bretagne Pays de Loire un délégué syndical supplémentaire, que la condition légale relative à la mise en place de trois collèges n'était pas remplie lors des élections du comité social et économique dès lors que le protocole d'accord préélectoral prévoyait la répartition du personnel en seulement deux collèges, le premier réunissant les salariés occupant les emplois de niveaux A à G, c'est-à-dire à la fois des employés et des techniciens et agents de maîtrise, et le second comprenant les cadres occupant les emplois de niveaux H et HC, cependant qu'il était constant que le syndicat Unifié UNSA disposait d'élus dans les deux collèges existants, le Tribunal d'instance a violé l'article L.2143-4, ensemble l'article L.2314-12 du code du travail ;

ALORS D'AUTRE PART QUE le protocole d'accord préélectoral du 21 mai 2019, qui se borne à fixer les modalités de déroulement du processus électoral en prévoyant notamment la constitution de deux collèges électoraux, ne fait aucune mention d'une quelconque volonté de ses signataires de déroger aux dispositions de l'article 2.1 de l'accord « sur l'exercice syndical » en date du 12 avril 2019, rappelant la faculté prévue par l'article L.2143-4 du code du travail pour les organisations syndicales représentatives de désigner un délégué syndical supplémentaire ; qu'en affirmant que la commune intention des parties au protocole préélectoral avait été de ne plus prévoir une telle possibilité au sein de la Caisse d'Epargne Bretagne Pays de Loire pour la mandature à venir, le Tribunal d'instance a dénaturé les termes clairs et précis dudit protocole et violé l'article 1103 du code civil ;

ALORS ENFIN, et en tout état de cause, QUE les dispositions d'un protocole d'accord préélectoral ne peuvent écarter le droit pour les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise de se prévaloir des dispositions d'ordre public de l'article L.2143-4 du code du travail pour désigner un délégué syndical supplémentaire dès lors qu'elles réunissent les conditions posées par ce texte ; qu'en jugeant du contraire, le Tribunal d'instance a violé les articles L.2141-10 et L.2143-4 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-26340
Date de la décision : 14/04/2021
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Nantes, 18 décembre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 avr. 2021, pourvoi n°19-26340


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.26340
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