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31/03/2021 | FRANCE | N°19-26054

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 31 mars 2021, 19-26054


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 31 mars 2021

Rejet

M. CATHALA, président

Arrêt n° 404 FS-P

Pourvoi n° N 19-26.054

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 31 MARS 2021

La société Cendres+Métaux France, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le s

iège est [...] , a formé le pourvoi n° N 19-26.054 contre l'arrêt rendu le 23 octobre 2019 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale A), dans l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 31 mars 2021

Rejet

M. CATHALA, président

Arrêt n° 404 FS-P

Pourvoi n° N 19-26.054

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 31 MARS 2021

La société Cendres+Métaux France, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° N 19-26.054 contre l'arrêt rendu le 23 octobre 2019 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale A), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. N... H..., domicilié [...] ,

2°/ à Pôle emploi [...], dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Mariette, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Cendres+Métaux France, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. H..., et l'avis de Mme Laulom, avocat général, après débats en l'audience publique du 9 février 2021 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Mariette, conseiller rapporteur, Mme Leprieur, conseiller doyen, M. Pietton, Mme Le Lay, MM. Barincou, Seguy, conseillers, Mme Duvallet, M. Le Corre, Mmes Prache, Marguerite, conseillers référendaires, Mme Laulom, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 23 octobre 2019), M. H... a été engagé le 2 octobre 2003 par la société Cendres+Métaux France (la société) en qualité de voyageur représentant placier.

2. Après avoir refusé, le 5 novembre 2015, une proposition de modification de son contrat de travail pour motif économique, le salarié a été convoqué le 23 novembre 2015 à un entretien préalable à un licenciement pour motif économique fixé au 4 décembre 2015 et a adhéré le 24 décembre 2015 au contrat de sécurisation professionnelle qui lui avait été proposé lors de cet entretien, son contrat de travail ayant été rompu le 26 décembre 2015.

3. Il a saisi la juridiction prud'homale pour contester cette rupture et obtenir des dommages-intérêts à ce titre.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. La société fait grief à l'arrêt de la condamner à verser au salarié une somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de confirmer le jugement en ce qu'il la condamne à verser au salarié une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, d'ordonner le remboursement des allocations de chômage versées au salarié et de la condamner à payer au salarié une somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, alors :

« 1°/ que la preuve du secteur d'activité du groupe au sein duquel s'apprécie la cause économique du licenciement économique est partagée entre l'employeur et le salarié ; qu'en l'espèce, elle faisait valoir, preuves à l'appui, que les difficultés économiques ayant justifié le licenciement du salarié devaient être appréciées au niveau du secteur dentaire, lequel se caractérisait par la spécificité des produits fabriqués et distribués (consommables et matériels nécessaires à la fabrication de prothèses dentaires sur mesure), ses canaux de distribution (filiales propres, réseaux d'importateurs indépendants dans les autres pays), sa clientèle et utilisateurs finaux (principalement les laboratoires de prothèses indépendants) et ses marques (Cendres + Métaux), ajoutant que, même après son rapprochement avec le secteur médical, envisagé fin 2015 mais effectif à partir du 1er juin 2016, soit postérieurement au licenciement du salarié, le secteur dentaire était demeuré distinct, ainsi que le confirmait le maintien, au sein de la nouvelle division Medtech, d'une sous-branche de vente directe (correspondant à l'ancienne division dentaire) à côté de celle nommée CMO (Contract Manufacturing ou fabrication sous contrat) (équivalent à l'ancienne division médicale) ; qu'en jugeant, pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, que l'employeur ne démontrait pas que les secteurs d'activité dentaire et médical continuaient, dans la nouvelle orientation stratégique, de fonctionner de manière distincte à compter de juillet 2015, la cour d'appel qui a fait peser la preuve du secteur d'activité à retenir pour apprécier la cause économique du licenciement exclusivement sur l'employeur, a violé l'article 1315, devenu l'article 1353, du code civil ;

2°/ que le secteur d'activité qui sert de cadre d'appréciation du motif économique du licenciement doit être déterminé en fonction du marché sur lequel l'entreprise intervient, lequel est fonction de la nature des produits ou services vendus, de leur mode de production et/ou de commercialisation et de la clientèle à laquelle ils s'adressent ; qu'en l'espèce, pour dire que les secteurs d'activité dentaire et médicale avaient été fusionnés dès le 1er juillet 2015, soit dès avant le licenciement du salarié, la cour d'appel s'est déterminée au regard de communiqués officiels du groupe évoquant la fusion décidée « à partir du 1er juillet 2015 » de ces activités « en une seule division Medtech », sous la responsabilité de M. P... G..., ainsi qu'une note interne de l'employeur datée du 5 novembre 2015 présentant ce dernier sous le titre de « Directeur Medtech » ; qu'en se fondant sur ces seuls éléments, la cour d'appel, qui s'est déterminée par des motifs impropres à caractériser que, dès cette date, antérieure au licenciement, les activités dentaire et médicale avaient été effectivement confondues au-delà du seul rapprochement organisationnel de leur direction, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail, dans sa rédaction applicable à l'espèce. »

Réponse de la Cour

5. La cause économique d'un licenciement s'apprécie au niveau de l'entreprise ou, si celle-ci fait partie d'un groupe, au niveau du secteur d'activité du groupe dans lequel elle intervient. Il incombe à l'employeur de démontrer, dans le périmètre pertinent, la réalité et le sérieux du motif invoqué.

6. La spécialisation d'une entreprise dans le groupe ne suffit pas à exclure son rattachement à un même secteur d'activité, au sein duquel doivent être appréciées les difficultés économiques.

7. La cour d'appel, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a constaté en prenant en considération l'activité des sociétés du groupe Cendres+Métaux et l'activité propre de la société Cendres+Métaux France, que les domaines d'activités dentaire et médical avaient été fusionnés en une seule division à partir du 1er juillet 2015, placée sous la responsabilité d'une seule personne, afin de mettre en place une nouvelle orientation stratégique et de développer de nouveaux produits nécessitant une prospection ciblée du marché, une haute productivité et une organisation efficace. Elle a retenu, sans méconnaître les règles relatives à la charge de la preuve, que cette division constituait le secteur d'activité au niveau duquel devait s'apprécier la cause économique du licenciement.

8. Ayant ensuite relevé que l'employeur limitait les informations qu'il produisait à la situation du secteur de l'activité dentaire et ne démontrait pas la réalité de difficultés économiques au niveau du secteur d'activité à prendre en considération, la cour d'appel en a exactement déduit que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Cendres+Métaux France aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Cendres+Métaux France et la condamne à payer à M. H... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Cendres+Métaux France

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Cendres + Métaux France à verser à M. H... la somme de 35 000 euros en précisant que cette somme était allouée, à titre de dommages et intérêts, pour rupture sans cause réelle et sérieuse, en l'absence de motif économique du contrat de sécurisation professionnelle accepté par le salarié, d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a condamné la société Cendres + Métaux France à verser à M. H... la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l'a déboutée de sa demande à ce titre, d'AVOIR ordonné, en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, le remboursement par la société Cendres + Métaux France des allocations de chômage versées à M. H... du jour de la rupture du contrat de travail jusqu'à la décision, dans la limite de 3 mois, d'AVOIR condamné la société Cendres + Métaux France à payer à M. H... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel et d'AVOIR condamné la société Cendres + Métaux France aux dépens d'appel,

AUX MOTIFS, SUBSTITUÉS À CEUX DES PREMIERS JUGES, QUE « sur le bien-fondé du licenciement:
Aux termes de l'article L.1233-2 du code du travail, tout licenciement pour motif économique doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.
Si la rupture du contrat de travail résulte de l'acceptation par le salarié d'un contrat de sécurisation professionnelle en application des articles L.1233-65 et suivants du code du travail dans leur rédaction applicable, l'employeur doit en énoncer le motif économique dans un document écrit, porté à la connaissance du salarié au plus tard au moment de cette acceptation.
L'article L.1233-3 du code du travail précise que constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel de son contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.
Lorsqu' une entreprise fait partie d'un groupe, si la réalité de la suppression ou transformation d'emploi ou de la modification substantielle du contrat est examinée au niveau de l'entreprise, les difficultés économiques doivent être appréciées au niveau du groupe, dans la limite du secteur d'activité auquel appartient l'entreprise.
Il incombe à l'employeur d'établir le motif économique invoqué, lequel s'apprécie à la date de la rupture du contrat de travail.

La société Cendres + Métaux France fait valoir que le groupe Cendres + Métaux dont elle fait partie intervient dans trois secteurs d'activité différents: le secteur dentaire, le secteur médical et le secteur de la bijouterie, horlogerie et recyclage, qu'exerçant son activité uniquement dans le secteur dentaire, elle est confrontée à des difficultés économiques sérieuses depuis 2013, qu'elle n'a pas pu remédier à ces difficultés malgré de nombreuses mesures d'économie mises en place, que ces difficultés résultent de la chute des ventes de matériaux précieux, en particulier de l'or, au profit d'autres matériaux ainsi que du basculement des technologies traditionnelles vers le numérique, que le secteur dentaire au niveau du groupe connaît les mêmes difficultés économiques, lesquelles ont entraîné la fermeture de plusieurs filiales à l'étranger, que les pièces comptables versées aux débats prouvent la réalité de ses difficultés économiques à la fin de l'année 2015 et la nécessité pour elle de se réorganiser du CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE – Licenciement économique – Cause économique -
Secteur d'activité fait de ces difficultés, que le rapprochement des divisions médicale et dentaire du groupe en une seule division dénommée Medtech, envisagé à la fin de l'année 2015, n'a été effectif que le 1er juin 2016, soit après la rupture du contrat de travail, qu'au surplus, ce rapprochement, qui ne porte que sur le marketing, la recherche et le développement, n'a aucun impact sur la nature même des secteurs d'activité, lesquels restent bien distincts, que les résultats réalisés au titre de l'activité médicale de la société n'ont donc pas à être pris en compte pour l'appréciation des difficultés économiques, que l'avenant proposé à M. H... permettait à celui-ci d'augmenter sa rémunération de 6 %, que la perte de confiance invoquée par le salarié est difficilement explicable, du fait qu'il était tenu compte des observations faites par celui-ci pour la fixation des objectifs et que la rémunération variable de l'intéressé a augmenté de 2014 à 2015.
M. H... réplique que depuis plusieurs années, l'employeur lui imposait des hausses irréalisables de ses objectifs ayant des répercussions importantes sur sa rémunération, que compte tenu de la perte de confiance générée par le comportement de l'employeur, l'avenant proposé n'était pas suffisamment précis quant à sa rémunération à venir pour qu'il l'accepte, que l'employeur ne démontre pas qu'il a des difficultés économiques suite à une baisse de la vente des alliages précieux ou encore au passage à la technologie numérique, qu'il ressort de la lettre de licenciement que celui-ci est fondé sur des difficultés économiques appréciées à fin juin 2015 et non à la date du licenciement, que la lettre considérée fixant les limites du litige, l'employeur ne peut justifier de la cause économique de la rupture à une date postérieure à fin juin 2015, de telle sorte que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, que les éléments comptables de la société arrêtés à décembre 2015 sont peu probants et que la lettre de licenciement ne donne aucune précision quant aux résultats de la branche dentaire du groupe, que le groupe Cendres + Métaux a mis en place la division Medtech dès le 1er juillet 2015 et que les secteurs dentaire et médical n'étaient plus distingués à compter de cette date, que l'employeur, qui fait état des difficultés économiques du secteur dentaire du groupe, ne démontre pas celles du nouveau secteur Medtech, auquel la société appartenait à la date de la rupture, que compte tenu de ces éléments, son licenciement économique est sans cause réelle et sérieuse.
Les parties sont d'accord pour reconnaître que:
- l'employeur, petite entreprise de plus de 10 salariés, a pour activité principale l'importation et l'exportation de métaux précieux et fournitures pour cabinets dentaires et laboratoires de prothèses dentaires et appartient au groupe Centre+Métaux, dont la société mère est située en Suisse,
- le motif économique à l'origine de la rupture du contrat de travail, énoncé dans une lettre remise le 4 décembre 2015 à M. H..., est une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutive à des difficultés économiques.
La lettre du 4 décembre 2015 mentionne les difficultés économiques de la société Cendres + Métaux France. Si elle fait état des résultats négatifs de la société de 2013 à fin juin 2015, elle procède également à l'estimation du résultat de la société pour l'année 2015, l'évaluant à – 400 000 euros, en tenant compte du dernier trimestre. Par ailleurs, elle invoque les résultats particulièrement dégradés de la branche dentaire du groupe, auquel l'employeur appartient, pour l'année 2015, même si elle ne donne aucun détail quant à ces résultats. La lettre du 4 décembre 2015 fait donc bien référence aux difficultés économiques de l'entreprise à la date du licenciement envisagé et non à une date antérieure. Par ailleurs, elle invoque une des causes économiques du licenciement prévues par la loi, de telle sorte qu'elle est suffisamment motivée quant à cette cause, même si elle ne cite pas tous les chiffres de nature à justifier les difficultés économiques considérées.
Les comptes de la société Cendres + Métaux France pour les exercices 2012 à 2015, clos au 30 septembre de chaque année, révèlent une situation économique difficile, caractérisée par une baisse continue du chiffre d'affaires ( 8.364.323 euros au 30 septembre 2013, 7.150.561 euros au 30 septembre 2014 et 6.385.007 euros au 30 septembre 2015), ainsi qu'un résultat négatif très important (-347.616 euros au 30 septembre 2015 au lieu de -25.693 euros au 30 septembre 2014 et -105.075 euros au 30 septembre 2013). Les comptes clos au 30 septembre 2016 qui mentionnent un chiffre d'affaires de 5.663.294 euros et un résultat négatif de -706.984 euros confirment ces difficultés.
Néanmoins, il convient d'apprécier les difficultés économiques de la société Cendres + Métaux France au regard du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient.
Le groupe Cendres + Métaux intervenait en 2014 dans 5 domaines d'activité: dentaire (fabrication et distribution de consommables et matériels nécessaires à la fabrication de prothèses dentaires sur mesure), médical (fabrication et distribution d'implants dentaires, de pièces pour prothèses auditives et d'autres dispositifs médicaux), bijouterie, horlogerie et refining. Les communiqués officiels du groupe ainsi qu'une note interne de l'employeur datée du 5 novembre 2015 font apparaître que les domaines d'activités dentaire et médical ont été fusionnés en une seule division dénommé Medtech à partir du 1er juillet 2015 et non à compter du 1er juin 2016, date d'un organigramme de la division Medtech produit par l'employeur. Le groupe a expliqué la création de cette division, placée sous la responsabilité d'une seule personne, par une nouvelle orientation stratégique et le développement de nouveaux produits nécessitant une prospection ciblée du marché, une haute productivité et une organisation efficace. Or, compte tenu de cette nouvelle orientation stratégique, l'employeur ne démontre pas que les secteurs d'activité dentaire et médical continuaient de fonctionner de manière distincte à compter de juillet 2015, les extraits de site internet versés aux débats n'étant d'aucun renseignement sur ce point.
En conséquence, si les éléments comptables versés aux débats font apparaître que le résultat du secteur d'activité dentaire du groupe Cendres + Métaux était négatif en 2015, l'employeur ne prouve pas que c'était le cas de la division Medtech, nouveau secteur d'activité de la société depuis le 1er juillet 2015.
La société Cendres + Métaux France n'établit donc pas les difficultés économiques du groupe dans le secteur d'activité dont elle faisait partie à la date de la rupture du contrat de travail.
La rupture du contrat de travail ne reposant pas sur un motif économique, elle est sans cause réelle et sérieuse, sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen développé par le salarié quant à l'obligation de reclassement. Le jugement sera confirmé par substitution de motifs quant à l'absence de bien fondé de la rupture du contrat de travail pour motif économique.
sur la demande de dommages et intérêts:
En application des articles L.1235-3 et L.1235-5 du code du travail, dans leur rédaction applicable, le salarié qui a une ancienneté supérieure à deux ans dans une entreprise occupant habituellement 11 salariés au moins, peut prétendre, en l'absence de réintégration dans l'entreprise, à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
M. H... avait 48 ans et une ancienneté de plus de 12 ans dans l'entreprise au moment du licenciement. Il percevait à cette date un salaire mensuel brut moyen de 3.800 euros.
Il a bénéficié des indemnités versées par Pôle Emploi jusqu'en décembre 2017 mais ne justifie pas de sa situation financière depuis cette date.
Au vu de ces éléments, les premiers juges ont exactement apprécié le préjudice subi par M. H....
Par ailleurs, en application de l'article L.1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur aux organismes concernés des indemnités de chômage versées au salarié à compter du jour du licenciement jusqu'à la présente décision, dans la limite de 3 mois.
La société Cendres + Métaux France, qui n'obtient pas gain de cause dans le cadre de son recours, sera condamnée aux dépens d'appel.

Elle sera également condamnée à payer à M. H... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de la somme déjà allouée par le jugement »,

1°) ALORS QUE la preuve du secteur d'activité du groupe au sein duquel s'apprécie la cause économique du licenciement économique est partagée entre l'employeur et le salarié ; qu'en l'espèce, la société Cendres + Métaux France faisait valoir, preuves à l'appui (cf. productions n° 5 à 7), que les difficultés économiques ayant justifié le licenciement du salarié devaient être appréciées au niveau du secteur dentaire, lequel se caractérisait par la spécificité des produits fabriqués et distribués (consommables et matériels nécessaires à la fabrication de prothèses dentaires sur mesure), ses canaux de distribution (filiales propres, réseaux d'importateurs indépendants dans les autres pays), sa clientèle et utilisateurs finaux (principalement les laboratoires de prothèses indépendants) et ses marques (Cendres + Métaux), ajoutant que, même après son rapprochement avec le secteur médical, envisagé fin 2015 mais effectif à partir du 1er juin 2016, soit postérieurement au licenciement du salarié, le secteur dentaire était demeuré distinct, ainsi que le confirmait le maintien, au sein de la nouvelle division Medtech, d'une sous-branche de vente directe (correspondant à l'ancienne division dentaire) à côté de celle nommée CMO (Contract Manufacturing ou fabrication sous contrat) (équivalent à l'ancienne division médicale) ; qu'en jugeant, pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, que l'employeur ne démontrait pas que les secteurs d'activité dentaire et médical continuaient, dans la nouvelle orientation stratégique, de fonctionner de manière distincte à compter de juillet 2015, la cour d'appel qui a fait peser la preuve du secteur d'activité à retenir pour apprécier la cause économique du licenciement exclusivement sur l'employeur, a violé l'article 1315, devenu l'article 1353, du code civil ;

2°) ALORS QUE le secteur d'activité qui sert de cadre d'appréciation du motif économique du licenciement doit être déterminé en fonction du marché sur lequel l'entreprise intervient, lequel est fonction de la nature des produits ou services vendus, de leur mode de production et/ou de commercialisation et de la clientèle à laquelle ils s'adressent ; qu'en l'espèce, pour dire que les secteurs d'activité dentaire et médicale avaient été fusionnés dès le 1er juillet 2015, soit dès avant le licenciement du salarié, la cour d'appel s'est déterminée au regard de communiqués officiels du groupe évoquant la fusion décidée « à partir du 1er juillet 2015 » de ces activités « en une seule division Medtech », sous la responsabilité de M. P... G..., ainsi qu'une note interne de l'employeur datée du 5 novembre 2015 présentant ce dernier sous le titre de « Directeur Medtech » ; qu'en se fondant sur ces seuls éléments, la cour d'appel, qui s'est déterminée par des motifs impropres à caractériser que, dès cette date, antérieure au licenciement, les activités dentaire et médicale avaient été effectivement confondues au-delà du seul rapprochement organisationnel de leur direction, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail, dans sa rédaction applicable à l'espèce.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Cause - Cause réelle et sérieuse - Motif économique - Appréciation - Cadre - Existence d'un groupe de sociétés - Périmètre du groupe - Détermination

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Cause - Cause réelle et sérieuse - Motif économique - Appréciation - Cadre - Existence d'un groupe de sociétés - Secteur d'activité commun - Détermination - Portée CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Cause - Cause réelle et sérieuse - Motif économique - Appréciation - Cadre - Existence d'un groupe de sociétés - Secteur d'activité commun - Etendue - Preuve - Charge - Détermination - Portée

La cause économique d'un licenciement s'apprécie au niveau de l'entreprise ou, si celle-ci fait partie d'un groupe, au niveau du secteur d'activité du groupe dans lequel elle intervient. Il incombe à l'employeur de démontrer, dans le périmètre pertinent, la réalité et le sérieux du motif invoqué. En conséquence, ne méconnaît pas les règles de la charge de la preuve relatives à l'étendue du secteur d'activité du groupe dans lequel intervient l'entreprise, la cour d'appel qui, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a constaté, en prenant en considération l'activité des sociétés du groupe et l'activité propre de l'employeur, que celui-ci relevait d'un secteur d'activité plus étendu que celui qu'il avait retenu. Dès lors que l'employeur ne démontrait pas la réalité de difficultés économiques au sein du secteur d'activité à prendre en considération, la cour d'appel en a exactement déduit que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse


Références :

article L. 1233-3 du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 23 octobre 2019


Publications
Proposition de citation: Cass. Soc., 31 mar. 2021, pourvoi n°19-26054, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles
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Composition du Tribunal
Président : M. Cathala
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Formation : Chambre sociale
Date de la décision : 31/03/2021
Date de l'import : 03/08/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19-26054
Numéro NOR : JURITEXT000043352195 ?
Numéro d'affaire : 19-26054
Numéro de décision : 52100404
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2021-03-31;19.26054 ?
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