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31/03/2021 | FRANCE | N°19-14839

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 31 mars 2021, 19-14839


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 31 mars 2021

Cassation partielle

Mme DARBOIS, conseiller le plus
ancien faisant fonction de président

Arrêt n° 296 F-P

Pourvoi n° X 19-14.839

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 31 MARS 2021r>
Mme F... C..., veuve B..., domiciliée [...] ), a formé le pourvoi n° X 19-14.839 contre l'arrêt rendu le 20 septembre 2018 par la cour d'ap...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 31 mars 2021

Cassation partielle

Mme DARBOIS, conseiller le plus
ancien faisant fonction de président

Arrêt n° 296 F-P

Pourvoi n° X 19-14.839

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 31 MARS 2021

Mme F... C..., veuve B..., domiciliée [...] ), a formé le pourvoi n° X 19-14.839 contre l'arrêt rendu le 20 septembre 2018 par la cour d'appel de Caen (2e chambre civile et commerciale), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. S... G..., domicilié [...] ,

2°/ à la société FHB, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , et ayant un établissement [...] , en la personne de Mme D... O..., prise en qualité d'administrateur judiciaire de la société Le Thenney,

3°/ à la société Le Thenney, société anonyme, dont le siège est [...] ,

4°/ à la société [...] , société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , en la personne de M. R... Y..., pris en qualité de mandataire judiciaire de la société Le Thenney,

5°/ au procureur général près la cour d'appel de Caen, domicilié [...] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme de Cabarrus, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de Mme C..., veuve B..., de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de M. G... et de la société Le Thenney, et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 9 février 2021 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme de Cabarrus, conseiller référendaire rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Caen, 20 septembre 2018) et les productions, la société anonyme Le Thenney a été mise en redressement judiciaire par jugement du 17 décembre 2014, les sociétés FHB et [...] étant désignées en qualité d'administrateur et mandataire judiciaires. Mme C..., veuve B... (Mme B...), alors associée de la société Le Thenney, a formé tierce-opposition à l'arrêt rendu par une cour d'appel le 30 novembre 2017, ayant adopté le plan de redressement de cette société « dans les termes de la proposition élaborée par M. G.... »

2. Le 5 mars 2018, l'assemblée générale de la société Le Thenney a, conformément à ce plan de redressement, décidé la réduction du capital à zéro et l'augmentation de capital réservée à M. G..., qui est ainsi devenu seul actionnaire de la société.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. Mme B... fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa tierce-opposition, alors « que la représentation des associés par le représentant légal de la société est limitée aux hypothèses où l'atteinte aux droits ou au patrimoine des associés n'est que la conséquence indirecte de l'atteinte aux droits ou au patrimoine de la société ; que l'atteinte à la qualité même d'actionnaire s'analyse en atteinte directe aux droits ou au patrimoine de l'associé ; qu'en décidant que Mme B... avait été représentée, s'agissant de la perte de sa qualité d'associé et de son droit préférentiel de souscription, par le représentant légal, quand ces deux points s'analysaient en atteinte directe à ses droits, les juges du fond ont violé l'article 583 du code de procédure civile ensemble l'article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 583 du code de procédure civile :

4. Il résulte de ce texte que si l'associé est, en principe, représenté, dans les litiges opposant la société à des tiers, par le représentant légal de la société, il est néanmoins recevable à former tierce-opposition contre un jugement auquel celle-ci a été partie s'il invoque une fraude à ses droits ou un moyen qui lui est propre.

5. Pour déclarer irrecevable la tierce-opposition formée par Mme B..., l'arrêt retient que les moyens qu'elle invoque ont tous été soulevés par la société Le Thenney dans le cadre de l'instance ayant abouti à l'arrêt du 30 novembre 2017 et que, s'ils concernent uniquement les actionnaires, ce sont des moyens qui leur sont communs à tous et qui ont été soutenus et défendus en tant que tels par la société Le Thenney, qui les représentait. Il en déduit que, Mme B... n'étant pas seule à pouvoir les invoquer, il ne s'agit pas de moyens propres au sens des dispositions de l'article 583 du code de procédure civile.

6. En statuant ainsi, alors que Mme B... prétendait que le plan de redressement adopté par l'arrêt du 30 novembre 2017 portait atteinte à sa qualité d'associée et à son droit préférentiel de souscription, de sorte qu'elle invoquait un moyen qui lui était propre, peu important que chacun des autres associés ait disposé d'un droit préférentiel de souscription, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute M. G... de sa demande en paiement par Mme C..., veuve B... de la somme de 300 000 euros à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 20 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;

Condamne M. G... et la société Le Thenney aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. G... et la société Le Thenney et condamne M. G... à payer à Mme C..., veuve B... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour Mme C..., veuve B....

L'arrêt attaqué encourt la censure EN CE QU'il a déclaré irrecevable la tierce-opposition formée par Mme C... veuve B... ;

AUX MOTIFS QUE « il n'est pas discuté que par application des dispositions de l'article L. 661-3 alinéa 1 du code de commerce, les décisions arrêtant le plan de redressement sont susceptibles de tierce-opposition ; que l'article R. 661-2 du code de commerce fixe le délai pour former tierce-opposition contre l'arrêt du 30 novembre 2017 expirant le 10 décembre 2017 qui était un dimanche, s'est trouvé prorogé, par application des dispositions de l'article 642 du code de procédure civile, au 11 décembre 2017, date de la déclaration de tierce-opposition faite par Mme B... au greffe de la cour d'appel ; que la tierce-opposition a donc été formée dans le délai imparti par l'article R. 661-2 précité et n'est pas tardive ; qu'aux termes de l'article 583 du code de procédure civile, "Est recevable à former tierce-opposition toute personne qui y a intérêt, à condition qu'elle n'ait été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque. Les créanciers et autres ayant-cause d'une partie peuvent toutefois former opposition au jugement rendu en fraude de leurs droits ou s'ils invoquent des moyens qui leurs sont propres" ; qu'au 30 novembre 2017, date de l'arrêt attaqué, Mme B..., titulaire de 236 actions, était associée de la SA le Thenney ; qu'il est de principe que les associés sont représentés par le représentant légal de la société, de sorte qu'ils ne sont pas recevables à former tierce-opposition à la décision rendue contre la société ; qu'il n'est fait exception à ce principe que dans le cas des sociétés civiles dont les porteurs de parts répondent indéfiniment des dettes sociales à proportion de leur part dans le capital social ; qu'à l'inverse, si le risque des associés est limité au montant de leurs apports, ils doivent être considérés comme ayant été représentés par la société ; qu'en l'espèce, en ce qu'il prévoit une annulation des actions détenues par les anciens actionnaires, le plan de redressement proposé par M. G..., dont l'adoption a été confirmée par l'arrêt du 30 novembre 2017, limite le risque auquel sont exposés les associés à la perte de leurs actions et donc au montant de leurs apports ; que la réduction du capital à zéro ne constitue pas une atteinte au droit de propriété des actionnaires, mais sanctionne leur obligation de contribuer aux pertes sociales dans la limite de leurs apports ; que le risque auquel elle était exposée n'excédant pas le montant de ses apports, Mme B..., associée de la SA le Thenney, était donc représentée par le représentant légal de la société lors de l'instance d'appel ayant abouti à l'arrêt du 30 novembre 2017 et n'avait pas la qualité de tiers audit arrêt ; que dès lors que cette qualité s'apprécie au jour où le tiers était supposé être représenté, soit en l'espèce au 30 novembre 2017, Mme B... ne peut utilement faire valoir qu'à la date de la présente décision, elle a perdu sa qualité d'actionnaire du fait de la mise en oeuvre du plan ; qu'ayant été représentée, elle ne peut pas plus prétendre avoir été privée d'un droit effectif d'accès au juge ; que selon l'article 583 alinéa 2 du code de procédure civile, la représentation cesse en cas de fraude ou de moyens propres ; que la fraude de son représentant lors de l'instance d'appel n'est pas alléguée par Mme B..., qui fait état de moyens qui lui seraient propres ; que le moyen propre est celui personnel au tiers-opposant, que lui seul aurait eu le pouvoir d'invoquer ; qu'en l'espèce, le rapprochement des dernières conclusions signifiées le 11 octobre 2017 par la SA Le Thenney dans le cadre de l'instance ayant abouti à l'arrêt du 30 novembre 2017, des premières conclusions de tiers-opposant signifiées le 11 décembre 2017 par Mme B... qui sont la copie conforme, sur le fond, de celles de la SA le Thenney du 11 octobre 2017, et des dernières conclusions signifiées devant la présente juridiction par Mme B... révèle que celle-ci ne développe aucun moyen qu'i n'ait été déjà invoqué par la SA le Thenney et soumis à la cour d'appel dans le cadre de l'instance ayant débouché sur l'arrêt du 30 novembre 2017 ; qu'il en est ainsi : - du moyen relatif à l'impossibilité d'imposer un coup d'accordéon aux actionnaires par la mise en oeuvre des dispositions de l'article L. 631-9-1 du code de commerce ; - du moyen tiré de l'impossibilité pour le tribunal d'imposer à cette occasion aux actionnaires une suppression de leur droit préférentiel de souscription ; - du moyen tiré de l'atteinte ainsi portée aux droits des actionnaires qui se trouvent évincés ; - du moyen relatif à l'absence de réunion des conditions d'application de l'article L. 631-9 du code de commerce ; que contrairement à ce que soutient Mme B..., ce rapprochement ne procède pas d'une confusion entre moyen nouveau et moyen propre, qui ajouterait au texte de l'article 583 alinéa 2 du code de procédure civile une condition qu'il ne prévoit pas ; qu'en effet, le moyen propre étant un moyen ne pouvant être invoqué que par la partie formant tierce-opposition à la décision critiquée, est nécessairement mais pas seulement, un moyen nouveau, puisque par définition, aucune partie à la décision contestée ne pouvait l'invoquer ; que l'ensemble des moyens précédemment rappelés a été soulevé par la SA le Thenney dans le cadre de l'instance ayant abouti à l'arrêt du 30 novembre 2017 ; que contrairement à ce que soutient Mme B..., la cour d'appel a statué sur ces moyens en jugeant que les dispositions de l'article L. 631-9-1 permettaient la reconstitution des capitaux propres de la société, au travers du procédé dit du coup d'accordéon, autorisant par voie de conséquence l'éviction des actionnaires opposants et la suppression de leur droit préférentiel de souscription et que les conditions de sa mise en oeuvre n'étaient pas réunies ; que si, comme le souligne Mme B..., ces moyens concernent uniquement les actionnaires, ce sont des moyens communs à l'ensemble des associés et qui ont été soutenus et défendus en tant que tels par la SA Le Thenney qui les représentait ; que celle-ci n'étant pas seule à pouvoir les invoquer, il ne s'agit donc pas de moyens propres à Mme B... au sens des dispositions de l'article 583 alinéa 2 du code de procédure civile ; que s'agissant de la fraude aux droits de Mme B... qui prétend avoir été dépossédée de ses actions Le Thenney à raison d'une collusion entre Cambon executive, Laris fiduciaria et M. T..., ce moyen a aussi été soulevé par la SA Le Thenney au soutien de sa demande de sursis à statuer dans l'attente d'une décision irrévocable au fond statuant sur la validité des cessions d'actions de la société Le Thenney intervenues entre, d'une part, la société Hyppokrene AG et la société Laris fiduciara SA le 26 avril 2016, d'autre part entre la société Laris fiduciaria et la société Cambon executive gérée par M. G... le 12 janvier 2017 ; que la SA Le Thenney contestait la validité de ces cessions pour les mêmes motifs que ceux repris par Mme B... devant la cour ; que dans son arrêt du 30 novembre 2017, la cour a rejeté la demande de sursis à statuer fondée sur ce moyen, au terme de la motivation suivante : "Mais l'identité des actionnaires de la SA Le Thenney est indifférente à l'issue de la procédure collective, qui ne dépend pas du point de savoir si la société Cambon executive sera ou non reconnue propriétaire des 2 219 actions litigieuses" ; qu'en effet, si M. G..., personne physique, est l'auteur de la proposition de plan de redressement adopté par le tribunal de commerce de Lisieux dont le jugement du 21 décembre 2016 est déféré à la cour, il n'est pas l'acquéreur des 2 219 actions achetées par la société Cambon executive, personne morale dont il est le gérant ; qu'à la date du jugement déféré, M. G..., personne physique, ne détenait aucune action au sein de la SA le Thenney ; qu'il en est de même à la date à laquelle la cour statue ; qu'il demande à la cour de confirmer le jugement ayant retenu sa proposition telle qu'elle a été initialement formulée, c'est-à-dire en tant que tiers non-associé ; que la procédure collective ne concerne d'autre part que la SA Le Thenney, personne morale, disposant d'un patrimoine propre, le haras du Thenney, et d'intérêts distincts, à savoir exploiter ce haras et développer une activité bénéficiaire lui permettant d'apurer le passif dont elle est seule débitrice ; que statuer sur l'une ou l'autre des propositions soumises à la cour en vue d'y parvenir ne nécessite pas de savoir qui est propriétaire des 2 219 actions dont la vente à la société Cambon executive est contestée" ; que le moyen tiré de la fraude aux droits de Mme B... a donc été soulevé par la SA Le Thenney, examiné et jugé inopérant par la cour car sans incidence sur l'issue de la procédure collective pour les motifs précédemment rappelés ; que la présente instance n'est qu'un nouveau développement de la procédure collective, puisqu'il s'agit d'une tierce-opposition à la décision arrêtant le plan de redressement de la SA le Thenney et cette motivation reste d'actualité, Mme B... ne pouvant pas faire rejuger ce qui a déjà été jugé ; que par conséquent, Mme B... étant représentée par la SA Le Thenney lors de l'instance ayant abouti à l'arrêt du 30 novembre 2017 et ne faisant valoir aucun moyen qui lui soit propre au sens des dispositions de l'article 583 alinéa 2 du code de procédure civile, sa tierce-opposition doit être déclarée irrecevable sans qu'il y ait lieu d'examiner l'autre condition cumulative posée par ce texte tenant à l'existence d'un intérêt » (arrêt, pp. 5-8) ;

ALORS QUE, premièrement, la représentation des associés par le représentant légal de la société est limitée aux hypothèses où l'atteinte aux droits ou au patrimoine des associés n'est que la conséquence indirecte de l'atteinte aux droits ou au patrimoine de la société ; que l'atteinte à la qualité même d'actionnaire s'analyse en atteinte directe aux droits ou au patrimoine de l'associé ; qu'en décidant que Mme B... avait été représentée, s'agissant de la perte de sa qualité d'associé et de son droit préférentiel de souscription, par le représentant légal, quand ces deux points s'analysaient en atteinte directe à ses droits, les juges du fond ont violé l'article 583 du code de procédure civile ensemble l'article 6 para. 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS QUE, deuxièmement, le moyen fondé sur la volonté de porter atteinte aux droits et obligations d'un seul associé s'analyse en moyen propre ; qu'en qualifiant le moyen fondé sur l'exclusion de Mme veuve B... seule de moyen commun à l'ensemble des associés, la cour d'appel de Caen a violé l'article 583 du code de procédure civile ensemble l'article 6 para. 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS QUE, troisièmement, les créanciers ou autres ayants cause d'une partie peuvent former tierce-opposition s'ils invoquent des moyens qui leur sont propres ; qu'un moyen propre au tiers-opposant s'entend comme un moyen qui ne pouvait être valablement soulevé par une partie présente ; qu'en déniant le caractère propre des moyens invoqués par Mme veuve B... au motif qu'ils avaient été déjà présentés par la SA Le Thenney (arrêt, p. 6 avant-dernier alinéa) sans s'assurer que cette dernière pouvait valablement le soutenir et qu'il a bien été examiné (conclusions de Mme veuve B..., p. 24 para. 71), la cour d'appel de Caen a privé sa décision de base légale au regard de l'article 583 du code de procédure civile ensemble l'article 6 para. 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS QUE, quatrièmement, les créanciers ou autres ayants cause d'une partie peuvent former tierce-opposition s'ils invoquent des moyens qui leur sont propres ; que si un moyen déjà soumis aux juges peut perdre son caractère propre, c'est à la condition qu'il ait été présenté au soutien d'une même demande ; qu'en écartant le caractère propre des moyens présentés par Mme veuve B... au motif qu'ils avaient déjà été soumis à la cour (arrêt, p. 6 avant-dernier alinéa) quand ils n'avaient été invoqués que pour demander un sursis à statuer (arrêt du 30 novembre 2017, p. 6 avant-dernier alinéa), alors que la tierce-opposition les invoquait comme moyen de fond, la cour d'appel de Caen a violé l'article 583 du code de procédure civile ensemble l'article 6 para. 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS QUE, cinquièmement, l'objet du litige est défini par les prétentions respectives des parties ; que Mme veuve B... faisait valoir que sa tierce-opposition était recevable au motif qu'une fraude à ses droits avait été commise (conclusions de Mme veuve B..., p. 26 para. 76) ; qu'en énonçant que Mme veuve B... ne se prévalait pas de la fraude (arrêt, p. 6 alinéa 5), la cour d'appel de Caen a violé l'article 4 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19-14839
Date de la décision : 31/03/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Redressement judiciaire - Plan de redressement - Jugement arrêtant le plan - Voies de recours - Tierce opposition - Recevabilité - Conditions - Détermination

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Procédure (dispositions générales) - Voies de recours - Exercice - Tierce opposition - Qualité pour l'exercer - Associé - Conditions - Invocation de moyens propres - Applications diverses - Atteinte à la qualité d'associé et au droit préférentiel de souscription

Il résulte de l'article 583 du code de procédure civile que si l'associé est, en principe, représenté, dans les litiges opposant la société à des tiers, par le représentant légal de la société, il est néanmoins recevable à former tierce opposition contre un jugement auquel celle-ci a été partie s'il invoque une fraude à ses droits ou un moyen qui lui est propre. L'associé qui prétend que le plan de redressement judiciaire de la société porte atteinte à sa qualité d'associé et à son droit préférentiel de souscription, invoque un moyen qui lui est propre, peu important que chacun des autres associés ait disposé d'un droit préférentiel de souscription


Références :

article 583 du code de procédure civile.

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 20 septembre 2018

Sur la recevabilité d'un créancier à former tierce opposition au jugement arrêtant un plan de sauvegarde, à rapprocher : Com., 15 novembre 2017, pourvoi n° 16-14630, Bull. 2017, IV, n° 154 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 31 mar. 2021, pourvoi n°19-14839, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Darbois (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 03/08/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.14839
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