LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° B 20-83.916 F-D
N° 00269
CK
17 MARS 2021
CASSATION PARTIELLE
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 17 MARS 2021
M. Q... F... a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'assises du Tarn-et-Garonne, en date du 5 juin 2020, qui, pour viol aggravé, l'a condamné à douze ans de réclusion criminelle, à cinq ans de suivi socio-judiciaire, et a ordonné une mesure de confiscation, et contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils.
Des mémoires, en demande et en défense, ont été produits.
Sur le rapport de Mme Sudre, conseiller, les observations de la SCP Boullez, avocat de M. Q... F..., les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de Mme L... X..., et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 27 janvier 2021 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Sudre, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. M. Q... F... a été renvoyé devant la cour d'assises de la Haute-Garonne, par arrêt de la chambre de l'instruction du 9 octobre 2014, pour viol avec arme.
3. Par arrêt du 1er février 2019, la cour d'assises de la Haute-Garonne, statuant sur son opposition à l'arrêt rendu par défaut le 3 avril 2018, l'a déclaré coupable des faits reprochés et l'a condamné à douze ans de réclusion criminelle. Par arrêt du même jour, la cour a prononcé sur les intérêts civils.
4. M. F... a relevé appel de l'arrêt pénal et de l'arrêt civil et le ministère public a formé un appel incident.
Examen des moyens
Sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen fait grief à l'arrêt civil de l'avoir condamné à payer à la partie civile la somme de 30 000 euros en réparation de son préjudice moral alors « que la cassation de l'arrêt pénal entraînera par voie de conséquence, celle de l'arrêt civil qui se trouvera alors dépourvu de base légale. »
Réponse de la Cour
6. Aucun moyen n'est dirigé contre la déclaration de culpabilité, laquelle constitue le fondement de la décision prononcée sur les intérêts civils.
7. Par ailleurs, la Cour de cassation est en mesure de s'assurer que la procédure suivie est régulière, et que la déclaration de culpabilité est justifiée par des motifs dénués d'insuffisance.
8. Il en résulte que le moyen, pris de la cassation, par voie de conséquence, de l'arrêt civil, ne peut être admis.
Mais sur le premier moyen
Enoncé du moyen
9. Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné une mesure de suivi socio-judiciaire durant cinq ans, mesure comprenant l'injonction de soins, et fixé à cinq ans la durée maximum de l'emprisonnement encouru en cas d'inobservation des obligations imposées, alors « qu'en ordonnant une mesure de suivi socio-judiciaire comprenant l'injonction de soins sans qu'il résulte, ni de l'arrêt criminel, ni du procès-verbal des débats, que le président ait averti le condamné, d'une part, des obligations résultant du suivi socio-judiciaire et des conséquences qu'entraînerait leur inobservation, d'autre part, qu'aucun traitement ne pourra être entrepris sans son consentement mais que, s'il refuse les soins qui lui seront proposés, l'emprisonnement prononcé à son encontre en vertu de l'article 131-36-1 du code pénal pourra être mis à exécution, enfin qu'il aura la possibilité de commencer un traitement pendant l'exécution de la peine de réclusion criminelle prononcée à son encontre, la cour d'assises a violé les articles 131-36-1 et 131-36-4 du code pénal. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 131-36-1 et 131-36-4 du code pénal :
10. Il résulte de ces textes que le président de la juridiction qui prononce une mesure de suivi socio-judiciaire avec injonction de soins, avertit le condamné des obligations résultant du suivi socio-judiciaire et des conséquences qu'entraînerait leur inobservation, de ce qu'aucun traitement ne pourra être entrepris sans son consentement, mais que, s'il refuse les soins qui lui seront proposés, l'emprisonnement encouru en cas d'inobservation des obligations imposées pourra être mis à exécution. Lorsque la juridiction de jugement prononce une injonction de soins et que la personne a également été condamnée à une peine privative de liberté non assortie du sursis, le président informe le condamné qu'il aura la possibilité de commencer un traitement pendant l'exécution de cette peine.
11. Si par l'arrêt attaqué, la cour d'assises a condamné M. F... à une peine complémentaire de suivi socio-judiciaire durant cinq ans, comprenant une injonction de soins, l'obligation de se soumettre aux mesures de contrôle prévues par l'article 132-44 du code de procédure pénale, d'indemniser la victime et de s'abstenir d'entrer en relation avec elle, un emprisonnement de cinq ans étant encouru en cas de méconnaissance de ces obligations, il ne résulte ni de l'arrêt pénal, ni du procès-verbal des débats que le président a donné au condamné les avertissements prévus par les textes susvisés.
12. La cassation est par conséquent encourue.
Portée et conséquences de la cassation
13. La déclaration de culpabilité étant régulière, et le moyen dirigé contre l'arrêt civil étant écarté, la cassation sera limitée aux dispositions de l'arrêt pénal relatives aux peines.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur le deuxième moyen de cassation proposé, la Cour :
CASSE et ANNULE l'arrêt pénal susvisé de la cour d'assises du Tarn-et-Garonne, en date du 5 juin 2020, mais en ses seules dispositions relatives aux peines, celles relatives à la culpabilité et à l'arrêt civil étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'assises du Tarn, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'assises du Tarn-et-Garonne et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé.
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-sept mars deux mille vingt et un.