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10/03/2021 | FRANCE | N°19-20864

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 10 mars 2021, 19-20864


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 mars 2021

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 215 F-D

Pourvoi n° W 19-20.864

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 10 MARS 2021

M. O... A..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° W 19-20.864 contre l'

arrêt rendu le 8 juillet 2019 par la cour d'appel de Basse-Terre (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. I... C...,

2°/ à Mm...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 mars 2021

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 215 F-D

Pourvoi n° W 19-20.864

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 10 MARS 2021

M. O... A..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° W 19-20.864 contre l'arrêt rendu le 8 juillet 2019 par la cour d'appel de Basse-Terre (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. I... C...,

2°/ à Mme S... X..., épouse C...,

domiciliés tous deux [...],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Darret-Courgeon, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. A..., de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. et Mme C..., après débats en l'audience publique du 19 janvier 2021 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Darret-Courgeon, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 8 juillet 2019), après avoir été embauché par la société [...] , suivant contrat de travail du 2 janvier 2008, M. A... a, par acte du 27 juillet 2016, assigné M. et Mme C... en paiement de dommages-intérêts, en soutenant que M. C..., gérant de la société, s'était engagé, par un courriel du 3 janvier 2008 auquel était joint un projet de résolution devant être voté en assemblée générale, à ce que la société lui verse des mensualités trimestrielles au titre de l'apport de sa clientèle ainsi qu'un complément de rémunération, et que cet engagement, constituant une promesse de porte-fort, n'avait pas été respecté.

2. M. et Mme C... ont opposé la prescription.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. M. A... fait grief à l'arrêt de déclarer son action irrecevable comme prescrite, alors :

« 1°/ que la prescription d'une action en responsabilité courant à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance, le délai de prescription de l'action en responsabilité engagée par le bénéficiaire d'une promesse de porte fort à l'encontre du promettant ne peut commencer à courir qu'à compter du jour où le bénéficiaire a connu le refus du tiers de passer l'acte promis ; qu'en retenant, pour juger prescrite l'action en indemnisation à l'encontre du promettant, que le dommage était connu dès la fin du premier trimestre 2008, M. A... n'ayant pas perçu les sommes qu'il aurait dû percevoir si l'acte promis avait été passé, quand le simple constat d'une inexécution de la convention promise n'établissait pas le refus du tiers de passer l'acte promis, en présence d'une promesse de porte-fort non enfermée dans un délai déterminé, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, devenu 1231-1 et 1217 du même code, ensemble l'article 2224 du code civil ;

2°/ que M. A... faisait valoir que l'engagement pris par M. C... le 3 janvier 2008 était une promesse de porte fort de ratification, sans qu'un délai n'ait été stipulé, générant une situation provisoire suspendue à l'acceptation ou au refus de la société [...] et que son action en responsabilité contre M. et Mme C... n'était pas prescrite dès lors que l'assignation avait été introduite le 27 juillet 2016 tandis que le refus de la société [...] d'exécuter l'acte promis par M. C... n'avait été matérialisé que le 13 novembre 2013, par des conclusions déposées dans l'instance initiée par M. A... ; qu'en se bornant à affirmer, pour déclarer l'action prescrite, qu'il est certain qu'à la fin du premier trimestre 2008, n'ayant pas perçu les sommes dues si le tiers avait passé l'acte promis, M. A... avait connaissance de son dommage, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la connaissance du refus du tiers de passer l'acte promis et la certitude du dommage ne devaient pas être situées à la date du 13 novembre 2013, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, devenu 1231-1 du même code, ensemble l'article 2224 du code civil ;

3°/ qu'en se bornant à affirmer, pour déclarer l'action prescrite, qu'en toute hypothèse, M. A... avait connu son dommage lors de l'assemblée générale du 30 avril 2010, sans caractériser les circonstances pouvant établir la connaissance, à cette date, par M. A... du refus de la société [...] de passer l'acte promis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, devenu 1231-1 du même code, ensemble l'article 2224 du code civil ;

4°/ que subsidiairement, en se bornant à affirmer, pour déclarer l'action prescrite, qu'il est certain qu'à la fin du premier trimestre 2008 ou à tout le moins en avril 2010, M. A... avait connaissance du dommage, sans rechercher si l'exécution partielle de la convention promis n'excluait pas toute idée d'un refus ferme et définitif de la société [...] , la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, devenu 1231-1 du même code, ensemble l'article 2224 du code civil. »

Réponse de la Cour

4. Aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou réelles se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

5. L'arrêt retient qu'à la fin du premier trimestre 2008, le dommage était réalisé dès lors que M. A... n'avait perçu ni la somme prévue au titre du rachat de clientèle ni le complément de rémunération, que, s'il se prévalait d'une exécution partielle de l'engagement de la société, par la distribution de dividendes, lors de l'assemblée générale du 30 avril 2009, son dommage était connu dès l'assemblée générale de l'année suivante et que, le délai de prescription ayant recommencé à courir à compter d'avril 2010, il aurait dû introduire son action au plus tard au mois d'avril 2015. Il ajoute qu'il n'y avait pas eu de réitération de la prétendue promesse de porte-fort avant le mois d'avril 2015.

6. Ayant ainsi apprécié souverainement les dates auxquelles M. A... avait eu connaissance du non-respect des engagements invoqués, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, n'a pu qu'en déduire que l'action intentée le 27 juillet 2016 était prescrite.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. A... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix mars deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. A...

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré M. A... irrecevable en son action, comme prescrite ;

AUX MOTIFS QU'il est certain que le refus par le tiers d'exécuter l'engagement promis par le porte-fort entraîne l'obligation pour le portefort de réparer le préjudice subi par le cocontractant, par application des règles du droit commun de la responsabilité contractuelle ; qu'il n'est pas contesté que l'action est soumise à la prescription de droit commun de l'article 2224 du code civil et qu'elle court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; que M. A... se prévaut d'un e-mail de M. C... du 3 janvier 2008 dans lequel celui-ci s'exprime comme suit, "Nous ferons une AG extraordinaire pour prévoir de distribuer un pourcentage du bénéfice de la société tous les trimestres aux actionnaires travaillant au sein de celle-ci, de façon à ce que vous ayez en moyenne sur trois mois un revenu moyen de 6 000,00 €. Le delta restant étant distribué en fin d'exercice comptable", auquel était joint un projet de résolution à voter à l'assemblée générale ; que M. A... prétendant que des mensualités trimestrielles de 2 625 euros sur 7 ans au titre d'un rachat de clientèle fixé à 73 500 euros, comme mentionné au projet de la troisième résolution à voter à l'assemblée générale, pièce n°3, devaient lui être versées, il est certain qu'à la fin du 1er trimestre 2008, n'ayant perçu ni cette somme ni le complément de rémunération devant lui procurer un revenu moyen de 6 000 euros par trimestre, son dommage était réalisé, d'autant qu'il précise n'avoir cessé de solliciter la ratification de cet accord pendant plusieurs années ; que par ailleurs, s'il se prévaut d'une exécution partielle, par la distribution de dividendes, non de 25% au regard du nombre de parts, mais de 75,37% lors de l'assemblée générale du 30 avril 2009, son dommage était connu dès l'assemblée générale de l'année suivante, sur laquelle il ne donne aucune indication ; que le délai de prescription ayant recommencé à courir à compter d'avril 2010, il devait introduire son action au plus tard au mois d'avril 2015 alors qu'il l'a introduite par assignation du 27 juillet 2016, le courrier de Mme C... du 21 septembre 2012, pièce n°9, ne contenant aucune réitération de la prétendue promesse de M. C..., puisqu'elle s'exprime en ces termes, « Pour faire suite à vos différentes demandes tant par mail que verbalement, et suite à votre fax du 12/09/2012, concernant votre demande d'augmentation qui se base sur un mail envoyé par Monsieur C... I..., le 3 janvier 2008... je vous fais la réponse suivante. Les engagements de Mr C... I... l'ont été dans le contexte de 2008... tant que le bilan annuel de la société n'est pas clôturé et n'ayant pu avoir l'expert-comptable compétent qui puisse me donner des bilans au moins trimestriels, je ne peux pas faire d'avances sur les dividendes... nous y verrons plus clair à ce moment-là" ; qu'en l'absence de réitération de la prétendue promesse de porte-fort avant le mois d'avril 2015, il convient de dire M. A... prescrit en son action ;

1/ ALORS QUE la prescription d'une action en responsabilité courant à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance, le délai de prescription de l'action en responsabilité engagée par le bénéficiaire d'une promesse de porte fort à l'encontre du promettant ne peut commencer à courir qu'à compter du jour où le bénéficiaire a connu le refus du tiers de passer l'acte promis ; qu'en retenant, pour juger prescrite l'action en indemnisation à l'encontre du promettant, que le dommage était connu dès la fin du premier trimestre 2008, M. A... n'ayant pas perçu les sommes qu'il aurait dû percevoir si l'acte promis avait été passé, quand le simple constat d'une inexécution de la convention promise n'établissait pas le refus du tiers de passer l'acte promis, en présence d'une promesse de porte-fort non enfermée dans un délai déterminé, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, devenu 1231-1 et 1217 du même code, ensemble l'article 2224 du code civil ;

2/ ALORS QUE M. A... faisait valoir que l'engagement pris par M. C... le 3 janvier 2008 était une promesse de porte fort de ratification, sans qu'un délai n'ait été stipulé, générant une situation provisoire suspendue à l'acceptation ou au refus de la société [...] et que son action en responsabilité contre M et Mme C... n'était pas prescrite dès lors que l'assignation avait été introduite le 27 juillet 2016 tandis que le refus de la société [...] d'exécuter l'acte promis par M. C... n'avait été matérialisé que le 13 novembre 2013, par des conclusions déposées dans l'instance initiée par M. A... ; qu'en se bornant à affirmer, pour déclarer l'action prescrite, qu'il est certain qu'à la fin du premier trimestre 2008, n'ayant pas perçu les sommes dues si le tiers avait passé l'acte promis, M. A... avait connaissance de son dommage, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la connaissance du refus du tiers de passer l'acte promis et la certitude du dommage ne devaient pas être situées à la date du 13 novembre 2013, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, devenu 1231-1 du même code, ensemble l'article 2224 du code civil ;

3/ ALORS QU' en se bornant à affirmer, pour déclarer l'action prescrite, qu'en toute hypothèse, M. A... avait connu son dommage lors de l'assemblée générale du 30 avril 2010, sans caractériser les circonstances pouvant établir la connaissance, à cette date, par M. A... du refus de la société [...] de passer l'acte promis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, devenu 1231-1 du même code, ensemble l'article 2224 du code civil ;

4/ ALORS subsidiairement QU'en se bornant à affirmer, pour déclarer l'action prescrite, qu'il est certain qu'à la fin du premier trimestre 2008 ou à tout le moins en avril 2010, M. A... avait connaissance du dommage, sans rechercher si l'exécution partielle de la convention promis n'excluait pas toute idée d'un refus ferme et définitif de la société [...] , la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, devenu 1231-1 du même code, ensemble l'article 2224 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 19-20864
Date de la décision : 10/03/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 08 juillet 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 10 mar. 2021, pourvoi n°19-20864


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.20864
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